Une réglementation française sur le secteur de la sécurité privée, pourquoi ? - article ; n°4 ; vol.12, pg 383-389
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Déviance et société - Année 1988 - Volume 12 - Numéro 4 - Pages 383-389
7 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 16
Langue Français

Extrait

Frédéric Ocqueteau
Une réglementation française sur le secteur de la sécurité
privée, pourquoi ?
In: Déviance et société. 1988 - Vol. 12 - N°4. pp. 383-389.
Citer ce document / Cite this document :
Ocqueteau Frédéric. Une réglementation française sur le secteur de la sécurité privée, pourquoi ?. In: Déviance et société. 1988
- Vol. 12 - N°4. pp. 383-389.
doi : 10.3406/ds.1988.1553
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ds_0378-7931_1988_num_12_4_1553et Société , 1988, Vol. 12, No 4, pp. 383-389 Déviance
UNE RÉGLEMENTATION FRANÇAISE SUR LE SECTEUR
DE LA SÉCURITÉ PRIVÉE, POURQUOI?1
F. OCQUETEAU*
D'abord, un constat: on assiste en France depuis une quinzaine d'années à
la croissance apparemment sans fin d'une multiplicité de vigiles ou agents de
sécurité privée en uniforme, armés ou non, offrant des prestations de gardien
nage à poste fixe, de rondes postées dans les zones industrielles, de passages
périodiques aux abords de locaux commerciaux, de surveillance à l'intérieur de
grandes surfaces ou de galeries marchandes. Ils se déploient dans les banques,
les entreprises de spectacles ou de jeux, chez les particuliers, mais sont égale
ment utilisés par les services publics (collectivités publiques et locales, PTT,
SNCF), le secteur aéronautique, le C.E.A... On les voit utilisés par certaines
organisations syndicales, assurer les services d'ordre de réunions ou manifestat
ions de partis politiques, et contribuer parfois à la répression de conflits
sociaux.
Ces agents peuvent être considérés comme appartenant à des entreprises pri
vées qui assurent elles-mêmes leur protection, ou bien être loués par des entre
prises privées ou publiques à des agences spécialisées dans la prestation de servi
ces de sécurité. Pour en récapituler les fonctions, on peut se servir de la défini
tion de l'INSEE, laquelle a l'avantage de ne pas obéir à une définition étatique:
elle dénombre les effectifs d'une activité professionnelle que la raison statist
ique tend à homogénéiser en rubrique pour les besoins du recensement de la
population. En 1982, les effectifs comptabilisés s'élevaient à 95.940 personnes,
soit plus de deux agents privés pour trois policiers, ou à un rapport de trois
agents privés pour cinq agents publics (police et gendarmerie confondues), sous
la dénomination de «salariés chargés d'assurer pour le compte de leur
employeur (entreprises, particuliers ou administrations) la protection des biens
et des personnes déterminées, contre les accidents techniques et les actes de malv
eillance. On peut également les définir comme contribuant à la sécurité ou à
l'ordre public, sans appartenir à l'armée, la gendarmerie, la police, l'administra
tion pénitentiaire ou l'ONF».
* C.N.R.S., C.E.S.D.I.P.
1 Nous reprenons ici quelques-uns des éléments d'une étude juridique plus approfondie que l'on
trouvera dans le dossier consacré aux polices privées et secteur privé de la sécurité de la revue
Actes, Les Cahiers d'Action juridique, n° 60, été 1987, pp. 3-19.
383 Ne serait-ce ainsi qu'à cause du poids des effectifs et de l'effet des fonctions
symboliquement similaires à des fonctions d'ordre, on pouvait imaginer qu'à
plus ou moins long terme, le politique n'allait pas rester éternellement indiffé
rent en France, à cette irrésistible ascension des forces privées2. Il existait bien
de banales législations commerciales sur les entreprises auxquelles étaient sou
mises les agences prestataires de services de sécurité, il existait bien quelques cir
culaires rituelles du Ministère de l'Intérieur rappelant aux préfets que les agents
privés n'avaient aucune prérogative de puissance publique: ces rappels circons
tanciels guère de conséquences en pratique.
Nous ne croyons pas au déterminisme en politique. On peut essayer pour
tant de pointer quelques éléments factuels et d'ordre idéologique nous parais
sant rétrospectivement présenter suffisamment de poids pour expliquer la mise
en branle de la décision gouvernementale d'élaborer un dispositif de contrôle,
à savoir une loi réglementant les «activités privées de surveillance, de gardien
nage et de transports de fonds (promulguée au J.O. le 13 juillet 1983).
• D'abord, deux affaires retentissantes dans l'opinion publique au début de
la législature socialiste, dites de «l'assassinat du clochard du Forum des Hall
es de Paris» et de «l'opération commando des Camemberts d'Isigny»,
après maintes affaires de répression privée de conflits sociaux par des milices
patronales tout le long des années 1970, lesquelles avaient mobilisé les éner
gies protestataires de la gauche indignée par la tolérance politique dont elles
faisaient l'objet.
• Ensuite, à l'épreuve du pouvoir, une prise de conscience politique à l'occa
sion de deux rapports (sur la réforme de la police et les politiques de préven
tion de la délinquance3) commandités par la nouvelle équipe socialiste, à
travers lesquels la question «sécurité privée» fut clairement posée, d'où il
ressortait la nécessité d'assainir le secteur, vu comme une «activité
d'appoint», avec lequel la police devait composer «puisqu'on ne pouvait
plus remplacer 55.000 personnes par des effectifs de police nationale»4. Une
doctrine était donc explicitement posée dans ces deux rapports, reflétant la
rgement les options des syndicats majoritaires de la police officielle. Si
l'enjeu était d'obtenir de l'Etat la certitude qu'aucune confusion dans les
missions publiques et privées ne soit possible, cela revenait néanmoins à
faire triompher la thèse de «Fauxiliariat», les forces privées étant désormais
reconnues comme ne pouvant jouer leur rôle qu'à la condition qu'elles puis
sent en l'occurrence être maîtrisées (voire instrumentalisées?) par les forces
publiques.
Ibid., pp. 17-19.
J.M. BELORGEY, «Prérapport sur les réformes de la police», Ministère de l'Intérieur et de
la Décentralisation, Paris, 1982; «Commission des maires sur la sécurité», Face à la délin
quance, prévention, répression, solidarité, Rapport au Premier ministre, Paris, Documentation
française, 1982.
J.M. BELORGEY, op. cit.
384 Au prix de cette lecture finalement partagée par l'ensemble de la classe poli
tique, le processus législatif pouvait s'enclencher, au cours duquel des divergen
ces d'appréciation virent le jour à propos de la finalité du projet de contrôle éta
tique5. Mais où finalement un compromis acceptable permit un vote à l'unani
mité.
Cette loi sera purement et simplement mise au placard pendant trois ans:
il faudra attendre l'automne 1986, une nouvelle équipe gouvernementale, et une
série d'attentats terroristes pour que les décrets d'application soient promulg
ués. Ce n'est qu'à ce moment-là que deux décrets et une longue circulaire
d'application rendront la loi effective6. On ne pouvait plus se passer du
concours du secteur privé dans l'impressionnante surveillance dont on avait
besoin à cette occasion dans les lieux privés et semi-publics: la reconnaissance
officielle des polices privées devenait inéluctable, et s'envolaient les craintes tou
jours diffuses et paralysantes de devoir s'engager dans le processus irréversible
de la création d'une «sous-police (allant) se targuer d'être agréée par l'Etat»7.
Au pays des droits de l'homme, on comprend l'importance des enjeux du
dilemme idéologique dans les sphères de l'Etat. Mais il semble que le scrupule
ait été plus obsidional chez des hommes de gauche, plus idéologiques en l'occur
rence que pragmaticiens comme le furent leurs collègues de droite.
Quoi qu'il en soit, la période 1981-1986 figurera désormais comme la
période de transition où le sécuritarisme, entré dans sa phase extensive de ges
tion commerciale, sera reconnu comme une véritable nécessité fonctionnelle,
désormais parée des plumes de la légalité.
Mais que disent donc cette loi et ces décrets qui ont

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