Urbanisation et développement à base régionale - article ; n°45 ; vol.12, pg 45-72

J.-C. Perrin

Description

Tiers-Monde - Année 1971 - Volume 12 - Numéro 45 - Pages 45-72
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

• Sociologie, société et politique

Informations

• Publié par: TIERS-MONDE
• Publié le: 01 janvier 1971
• Nombre de lectures: 8
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

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J.-C. Perrin
Urbanisation et développement à base régionale
In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°45. pp. 45-72.
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Perrin J.-C. Urbanisation et développement à base régionale. In: Tiers-Monde. 1971, tome 12 n°45. pp. 45-72.
doi : 10.3406/tiers.1971.1747
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/tiers_0040-7356_1971_num_12_45_1747URBANISATION
ET DÉVELOPPEMENT
A BASE RÉGIONALE
par J.-C. Perrin*
Notre contribution a pour objet de replacer le problème de l'urba
nisation dans le cadre du développement régional. Il va de soi qu'urbaet régionalisation sont deux éléments d'un problème plus
fondamental : l'organisation spatiale du développement dans l'ensemble
d'une économie nationale. L'option régionale représente non pas une
voie conservatrice mais une stratégie d'optimisation à long terme de la
politique de la croissance. C'est dans cette perspective que nous nous
placerons.
Si l'on essaie, d'emblée, de situer la spécificité de ce problème dans
les pays en voie de développement, il apparaît qu'un processus urbain-
industriel rapporté et accéléré y a entraîné des transformations de l'espace
économique fort différentes de celles qui se sont produites par exemple
dans les économies occidentales où le phénomène a été progressif et
endogène. Il en résulte des problèmes d'aménagement de l'espace d'un
autre ordre. Ils appellent des solutions appropriées, en particulier pour
la planification à base régionale et pour ses instruments privilégiés que
sont la politique urbaine et la politique industrielle.
Ce n'est pas une des moindres difficultés de ce débat que se départir
de l'image classique de la région : celle d'un territoire plus ou moins
homogène, organisé autour d'un système urbain bien hiérarchisé et
plus ou moins régulier. Un tel schéma très statique est le plus souvent
* Professeur à la Faculté de Droit et des Sciences économiques et à l'Institut d'Aména
gement régional, directeur du Centre d'Economie régionale, Université d'Aix-Marseille.
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un obstacle à la compréhension d'une réalité nouvelle fondamentalement
dynamique : en effet, le processus urbain-industriel entraîne une transfo
rmation continuelle de l'organisation spatiale des activités économiques
ainsi que des formes intégrées qu'elle prend au niveau des sous-ensembles
qui s'étendent au-delà d'une ville ou d'une zone urbaine et que l'on a
coutume d'appeler région. Pour traduire ce phénomène dynamique, les
théories contemporaines de la politique de développement régional
ont dû adapter leurs concepts (i). Elles se servent de modèles à la fois
variés et souples. Les formes d'organisation que la planification régionale
est amenée à préconiser sont multiples et différenciées. C'est ce que
nous voudrions montrer en prenant exemple, d'une part, dans des
économies qui ont franchi la phase du décollage (certaines économies
d'Amérique latine) et d'autre part, dans les économies qui se situent
en deçà de cette phase. Parmi celles-ci, on distinguera, d'une part, le
cas de la Côte-d'Ivoire où il existe un pôle urbain-industriel relativ
ement très puissant et où la structure géographique ne soutient pas un
compartimentage régional traditionnel, et d'autre part, le Cameroun
et Madagascar, qui se caractérisent à l'inverse.
Auparavant, afin de mieux situer les problèmes propres aux économies
neuves, rappelons brièvement, dans le cadre de cette introduction, le
processus selon lequel la dynamique urbaine-industrielle a transformé
et développé les structures régionales au cours des xixe et xxe siècles
dans les économies européennes.
On peut distinguer schématiquement deux phases au cours desquelles
le progrès industriel et le développement urbain se sont cumulativement
renforcés. Dans la première phase, un premier développement urbain
s'opère à partir d'implantations industrielles exportatrices. Dès lors,
un marché régional de consommations finales s'accroît progressivement.
En fonction de ce marché se créent des activités industrielles (et se tran
sforme une partie de l'activité agricole) à l'initiative d'entrepreneurs
locaux. Ainsi se crée un milieu régional d'entrepreneurs. Ces créations indust
rielles sont relativement délocalisées sur le territoire régional en fonc
tion de l'emplacement des ressources et de l'armature urbaine préexis-
(i) Les travaux désormais classiques de J. Friedmann, en particulier son livre Regional
Development Policy, M.I.T. Press, en donnent un exemple. On ne trouve, ni dans la partie
théorique, ni dans l'application au Venezuela, de référence au schéma classique de la région.
Les principaux concepts sont fortement imprégnés par l'orientation dynamique. Ceci est
manifeste dans la classification en core regions, upward transitional area, downward transitional
area, resource frontier region.
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tante. Celle-ci se trouve modifiée certes, mais dans l'ensemble renforcée
(mises à part les zones périphériques d'émigration rurale). Hiérarchie
et polarisation du réseau urbain s'affirment. Ainsi, au terme de cette
première phase se sont forgés un milieu d'entrepreneurs autochtones et
une solidarité régionale. C'est sur de telles bases qu'une deuxième phase
va prendre appui.
La technologie des transports, l'évolution industrielle font entrer
la concurrence interrégionale dans une ère nouvelle et aiguë. Elle
contraint à la concentration et à la spécialisation vis-à-vis de marchés
de plus en plus suprarégionaux. Ainsi, l'unité régionale, qui se caractér
isait auparavant, pour une bonne part, par la complémentarité d'un
nombre important d'activités vis-à-vis d'un même marché final, prend
une consistance nouvelle. Elle se situe désormais au niveau d'un pro
cessus localisé d'intégration interindustrielle et intersectorielle. Elle
réside dans la capacité d'un ensemble d'activités spatialement intégrées
à renforcer, par les économies externes qu'elles constituent, les effets
d'industrialisation amont et aval, soit en attirant des activités nouvelles
exportatrices, soit en développant par spécialisations le tissu des activités
intermédiaires à marché régional. Dans cette deuxième phase, les régions
qui l'emportent en tant qu'ensembles économiques capables d'autodéve-
loppement sont, le plus souvent, celles qui disposent : i. De. fabricating
industries (i) polarisant généralement tout un milieu dynamique d'acti
vités mécaniques, électromécaniques, électriques et électroniques; 2. Et
de structures urbaines attractives. De telles économies externes, indust
rielles et urbaines, ne sont pas le fait du hasard mais d'une politique
volontaire menée par les responsables privés et publics conscients de
leur solidarité, et de la nécessité d'aménager au mieux le contenu de ces
avantages comparatifs, non plus naturels mais créés par l'homme.
Ce résumé très schématique met en évidence le fait que dans les
économies occidentales le processus urbain-industriel s'est déroulé en
deux temps, ce qui a permis la constitution d'un milieu régional d'entre
preneurs et le renforcement de l'armature urbaine. C'est sur ces bases
que le dynamisme régional s'est fondé.
Or, pour les pays en voie de développement, tout se passe comme si
la première phase avait été court-circuitée. La technologie industrielle
(1) Dans le sens de la distinction classique de O. Duncan entre processing industries et
fabricating industries.
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actuelle et les conditions du marché international les placent d'emblée
dans les conditions de spécialisation de la production qui imposent
des marchés de taille suprarégionale. De plus, les industries rapportées
sont des établissements qui ont naturellement tendance à entretenir
avec les fournisseurs étrangers des liens