L élevage du boeuf et la production de la viande en Nivernais - article ; n°1 ; vol.40, pg 47-75
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Description

Revue de géographie de Lyon - Année 1965 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 47-75
29 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1965
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Jean Boichard
L'élevage du boeuf et la production de la viande en Nivernais
In: Revue de géographie de Lyon. Vol. 40 n°1, 1965. pp. 47-75.
Citer ce document / Cite this document :
Boichard Jean. L'élevage du boeuf et la production de la viande en Nivernais. In: Revue de géographie de Lyon. Vol. 40 n°1,
1965. pp. 47-75.
doi : 10.3406/geoca.1965.1775
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/geoca_0035-113X_1965_num_40_1_1775L'ÉLEVAGE DU BŒUF
ET LA PRODUCTION DE LA VIANDE
EN NIVERNAIS
par Jean Boichard
Les professionnels de la boucherie rejettent la responsabilité de la
rareté, donc de la cherté de la viande, sur le législateur et ses taxes, sur
le producteur et son traditionalisme technique, voire même sur la ménag
ère qui ne serait plus à même de cuisiner et n'achèterait plus que des
morceaux « nobles », faciles à rôtir ou à griller. -Les producteurs, quant
à eux, se plaignent que les prix ne sont pas rémunérateurs et s'ils expri
ment volontiers leur méfiance à l'égard des intermédiaires, ils répugnent
visiblement à tenter une véritable démarche en direction des consommat
eurs, par exemple en mettant sur pied avec eux un circuit de distribu
tion suffisamment raccourci.
Il est probable qu'une réponse objective à ce problème complexe devrait
retenir une partie des arguments qui émanent de chacun des groupes
en présence. Nous allons essayer, quant à nous, d'apporter en géo
graphe notre pierre à l'édifice : en partant de l'exemple concret et régio
nal d'une petite région du Nivernais, spécialisée depuis fort longtemps
dans la production presque exclusive de la viande de bœuf et des an
imaux reproducteurs, nous essaierons de dégager, au moins au stade de
la paysannerie, quelques-unes des raisons de la crise présente de l'él
evage à viande J.
I. — PRODUIRE DE LA VIANDE :
UNE PREOCCUPATION CONSTANTE DU NIVERNAIS
II y a fort longtemps que les plaines du Bazois et les prairies des
bords de Loire et d'Allier pratiquent un élevage à viande typique, sous
la forme de l'embouche, comme l'atteste, dès le dix-septième siècle, le
1. Cf. J. Boichard, Quelques éléments de la vie rurale Entre-Loire-et- Allier, Revue
de géographie de Lyon, 1962, p. 251-71.
et J. La vie rurale Entre~Loire~et- Allier, 417 pages dactylographiées. 48 JEAN BOICHARD
juriste Guy Coquille : « Vray est que la chair et la gresse des bœufs et
vaches nourris en Morvan n'est pas savoureuse et n'est pas si tost
acquise aux bestes comme en celles qui sont nourries au plat pays, pour
ce qu'au plat pays y a plus de soleil et l'herbe est naturelle, et en ta
montagne, à cause des bois et de la hauteur de la montagne, y a beau
coup d'ombre et peu de soleil, et l'herbe y vient par force d'arrousement.
Aussi, les marchans sont soigneux d'enquérir de quelle part vient le
bestial qu'ils veulent engraisser ; et s'ils le mettent en herbe du plat pays
et qu'il vienne du Morvan, ils sont asseurés de l'avoir incontinent gras
et bon ; mais s'il vient du pays bas, ils se gardent de le mettre es herbe
du Morvan » 2.
Le dépouillement des procès-verbaux d'estimation eu de vente des
biens nationaux, dans la région d'Entre-Loire-et-Allier, nous a fourni,
pour la fin du xvine siècle, un compte très précis des animaux qui vivaient
sur les domaines appartenant aux nobles de cet endroit. Dès cette époque,
on constate que toutes ces exploitations nourrissent plus d'une tête de
gros bétail sur une superficie équivalant à deux hectares de nos unités
d'aujourd'hui ; un de ces domaines entretient presque une bête à l'hectare.
Si l'on tient compte des chevaux, des porcs et des moutons, on arrive
à une proportion d'UGB/ha 3 qui n'est pas très sensiblement inférieure
à celle qu'on rencontre de nos jours. Il est vrai que ces animaux sont
de petite taille, trouvant l'essentiel de leur subsistance sur les jachères
et les pâturaux buissonneux ; aux dires des contemporains, ils pouvaient
atteindre, vers sept ou huit ans, un poids de 200 à 250 kilos, c'est-à-dire
à peu près ce que pèse aujourd'hui un veau charolais de six mois.
La race qu'élevaient les gens du Nivernais était un mélange d'an
imaux bourbonnais, auvergnats, morvandiaux ou berrichons. Toutes ces
bêtes, mélangées sans soin, s'étaient reproduites dans les pires conditions
de promiscuité. La description des animaux qu'on peut avoir de la fin
du dix-huitième siècle fait penser un peu à un arc-en-ciel qui ne pré
sage rien de bon quant au rendement des sujets et à la fixité des apti
tudes. Voici quelques-unes des descriptions de pelage retrouvées dans
les procès-verbaux d'estimation des biens des émigrés : « rouge grivelé,
rouge et grive, blond, brun, grive et brun, rouge et barré, et blond, aux yeux bruns, étoille blanche au front, marque blanche sur le
derrière, noir, noir et blanc, cendre, rous ». La plupart du temps, les
animaux sont d'ailleurs décrits « sous différents poils » ou bien « sous
poils fleuris ». Notons que, pas une seule fois, n'est apparue dans ces
rapports soigneusement rédigés la caractéristique du bœuf blanc cha
rolais.
2. Guy Goquille, Histoire du Nivernais, p. 352.
3. L'UGB, (unité de gros bétail) est une unité conventionnelle, une sorte d'animal
théorique dont les besoins d'entretien et de production sont de 3.000 unités fourra
gères par an: le taureau charolais vaut ainsi 1,20 UGB, la vache charolaise 0,88 UGB,
les élèves de 0,39 à 0,80 UGB selon leur âge, les moutons de 0,07 à 0,117 UGB selon
leur âge et leur race, etc.. PRODUCTION DE LA VIANDE EN NIVERNAIS 49
Plus tard encore, en 1827, quand Tiennot et sa famille (cf. La vie
d'un simple d'Emile Guillaumin), viennent s'installer au Garibier, près
de Bourbon l'Archambault, leurs chariots sont encore traînés par des
bœufs « mauriats », c'est-à-dire de la race de Salers.
C'est cependant quelques années avant la Révolution que le premier
troupeau blanc était arrivé dans le Nivernais. Un gros fermier du Brion-
nais, Mathieu, originaire d'Oyé, vint s'installer à Anlezy, à une tren
taine de kilomètres de Nevers. Avec beaucoup de savoir faire il améliora
ses prés, réduisit ses landes et acquit suffisamment de notoriété dans
la province pour être élu député du Tiers aux Etats Généraux, et ceci
moins de dix ans après son arrivée dans la province.
Il fallut cependant une cinquantaine d'années pour que le bétail blanc
se vulgarisât dans toute la province et que la prairie fît reculer sérieuse
ment les emblavures. Guy Thuillier4 estime que la crise de 1820 à 1823
fut déterminante dans la transformation du système agricole : c'est alors,
semble-t-il, que la chute durable des cours du blé a donné une prime
au moins relative aux opérations d'élevage et d'embouche, tandis que
la prospérité industrielle du département, avec les grosses concentrations
humaines qu'elle occasionnait, entraînait une consommation accrue de
viande. Il existait, à cette époque, une séparation très nette de l'élevage,
qui nécessitait la disposition de vastes bâtiments, de capitaux réalisés
à long terme, et l'embouche qui se contentait d'installations plus som
maires et mobilisait des fonds plus vite récupérés. G. Thuillier en déduit
que l'élevage eut tendance à se confiner chez les grands propriétaires et
l'embouche chez les grands fermiers ; mais cela ne paraît pas s'être passé
d'une façon aussi schématique, et certains éleveurs célèbres, tels les
Mathieu, les Paignon, les Chamard furent longtemps, certains même
toute leur vie, de grands fermiers.
Pendant quelques dizaines d'années, en gros à partir de 1830 jusque
vers 1860, on assiste à des opérations de croisement, avec des animaux
anglais de la race durham, pratiques d'ailleurs presque généralisées aux
dires d'Olivier Delafond, un judicieux vétérinaire nivernais qui nous
a laissé une fidèle description de l'élevage nivernais au milieu du siècle
dernier "'. C'est lui qui dit entre autres choses : « Presque tous les bons
agriculteurs de l'arrondissement de Nevers, du Bazois, de la bonne
pa

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