Pourquoi les ménages pauvres paient-ils des loyers de plus en plus élevés ? - article ; n°1 ; vol.381, pg 17-40
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Economie et statistique - Année 2005 - Volume 381 - Numéro 1 - Pages 17-40
Depuis la fin des années 1970, les aides directes à la personne sont devenues l'instrument majeur de la politique du logement au détriment des aides à la pierre, dont l'efficacité avait été remise en cause lors de la réforme de 1977. Les aides à la personne permettent, en théorie, de mieux cibler les populations pour qui le logement, qui demeure le premier poste de consommation des ménages, représente une charge jugée trop importante. Or le développement de ces aides s'est accompagné d'une augmentation du coût du logement pour les ménages locataires les plus défavorisés et l'on cherche à en évaluer l'impact sur l'augmentation des loyers des ménages à bas revenus. La réforme de l'extension des aides du début des années 1990 constitue une expérience naturelle qui permet d'isoler les effets des allocations logement, car elle s'est appliquée seulement à certains types de ménages et non à d'autres. On peut ainsi comparer l'évolution des loyers des ménages à bas revenus bénéficiaires de la réforme à celle des ménages qui n'ont pas été touchés et identifier les effets de la réforme pour les ménages concernés. À partir de données des enquêtes Logement de l'Insee, on montre que les aides pourraient bien être, pour une bonne partie, responsables de la hausse du loyer au mètre carré des ménages à bas revenus. D'après les estimations obtenues, entre 50 % et 80 % des allocations logement perçues par ces ménages auraient été absorbées par les augmentations de leurs loyers.
Why are low-income households paying increasingly high rents ?
The effect of housing benefit in France (1973-2002)
Since the late 1970s, means-based rent assistance has become the main housing policy instrument to the detriment of building subsidies, whose efficiency was brought into question by the 1977 reform. Meansbased rent assistance theoretically improves the targeting of populations for whom housing, which remains the number one household consumption item, is deemed to represent too much of a financial burden. Yet the development of this assistance has gone hand in hand with an increase in the cost of housing for the most disadvantaged tenant households. We seek to evaluate the impact of this on the increase in rents for low-income households. The early-1990s reform of the extension of assistance constitutes a natural experiment whereby the effects of housing benefits can be isolated, since it was applied solely to certain types of households and not others. The growth in the rents paid by the low-income households targeted by the reform can hence be compared with that of the households not affected, and the effects of the reform for the households concerned can be identified. We use data from the INSEE Housing surveys to show that the assistance could well have a lot to do with the increase in rents per square metre for low-income households. The estimates obtained show that 50% to 80% of the housing benefit received by these households has been absorbed by increases in their rents. Although these benefits may have given rise to some improvement in dwelling standards, this effect appears to be far too minor to explain the rise in rents, at least on the basis of the measurements able to be made from the Housing surveys. The increase in tenant demand generated by the assistance seems to have come up against an exceedingly inelastic housing supply from landlords, hence triggering a sharp increase in rents. This effect may have been compounded by the massive influx of students onto the housing market following the reform of this assistance.
¿ Por qué razones pagan unos alquileres cada vez más altos los hogares de bajos recursos?
La incidencia de los subsidios a la vivienda en Francia (1973-2002)
Desde finales de los años 1970, los subsidios directos a la persona se han convertido en la mayor herramienta de la política de la vivienda en detrimento de los subsidios a los bienes cuya eficiencia había sido puesta en tela de juicio a raíz de la reforma de 1977. Las ayudas a las personas permiten en teoría dar con más seguridad con aquellas poblaciones para las que la vivienda, primer puesto de consumo de los hogares, representa una carga demasiado importante. Ahora bien, el desarrollo de esas ayudas ha ido a la par con un aumento del coste de la vivienda para los hogares arrendatarios más desfavorecidos, y tratamos de medir su impacto sobre el alza de los alquileres de los hogares de bajos recursos. La reforma de la extensión de los subsidios a principios de los noventa constituye una experimentación natural que permite evidenciar los efectos de los subsidios a la vivienda ya que sólo afectó a determinadas categorías de hogares. Podemos comparar la evolución de los alquileres de los hogares de bajos recursos beneficiarios de la reforma con la de los hogares que no se beneficiaron de ella, e identificar los efectos de la reforma sobre aquellos hogares. A partir de datos de las encuestas Logement del Insee, se muestra aquí que los subsidios podrían haber sido por parte responsables del alza del alquiler al metro cuadrado de los hogares de bajos recursos. Según las estimaciones obtenidas, entre el 50 % y el 80 % de los subsidios a la vivienda cobrados por los hogares lo habrían absorto las alzas de los alquileres. Si bien esos subsidios han podido acarrear cierta mejora del confort de las viviendas, ese efecto parece demasiado corto para poder explicar el alza de los alquileres, al menos a partir de las mediciones posibilitadas por la encuesta Logement del Insee. Parece que el alza de la demanda de los arrendatarios acarreada por los subsidios se ha enfrentado a una oferta muy poco elástica por parte de los arrendadores, lo cual se ha traducido por una fuerte alza de los alquileres. Ese efecto ha podido ser aumentado por la llegada masiva de los estudiantes sobre el mercado de la vivienda a raíz de la reforma de esos subsidios.
Warum zahlen die Haushalte mit niedrigem Einkommen die höchsten Mieten ?
Auswirkungen des Wohngelds in Frankreich (1973-2002)
Seit Ende der 1970er Jahre sind die direkten personenbezogenen Hilfen das wichtigste Instrument der Wohnungspolitik, was zu Lasten der projektbezogenen Hilfen geht, deren Effizienz bei der Reform von 1977 in Frage gestellt worden war. Theoretisch ermöglichen die personenbezogenen Hilfen eine bessere Ausrichtung der Unterstützung auf die Bevölkerungsgruppen, für die die Wohnung nach wie vor der wichtigste Ausgabenposten darstellt und eine als zu hohe Belastung betrachtet wird. Die Ausweitung dieser Hilfen ging aber mit einem Anstieg der Mietkosten für die ärmsten Mieterhaushalte einher. Analysiert werden sollen mithin deren Auswirkungen auf die Erhöhung der Mieten der Haushalte mit niedrigem Einkommen. Die Reform mit einer Ausweitung der Hilfen Anfang der 1990er Jahre stellt ein reales Ereignis dar, das eine Isolierung der Effekte des Wohngelds ermöglicht, da nur bestimmte Haushalte hiervon betroffen waren. So kann man die Entwicklung der Mieten der Haushalte mit niedrigen Einkünften, die von der Reform profitierten, mit denjenigen, die hiervon nicht betroffen waren, vergleichen und die Auswirkungen der Reform für erstere identifizieren. Anhand von Daten der Insee-Erhebung
Wohnen wird gezeigt, dass die Hilfen zum großen Teil für den Anstieg der Miete pro Quadratmeter der Haushalte mit niedrigem Einkommen verantwortlich sein könnten. Nach den erhaltenen Schätzungen hätte die Erhöhung deren Mieten 50 % bis 80 % des bezogenen Wohngelds verschlungen. Diese Hilfen ermöglichten zwar eine gewisse Verbesserung des Wohnkomforts; dieser Effekt scheint aber viel zu gering zu sein, um als Erklärung für die Mieterhöhung auszureichen, zumindest mittels der Messungen auf der Grundlage der Erhebungen Wohnen. Der durch die Hilfen bedingten Zunahme der Nachfrage der Mieter stand ein zu unelastisches Wohnungsangebot der Vermieter gegenüber, was einen starken Anstieg der Mieten nach sich zog. Verstärkt wurde dieser Effekt womöglich noch durch den massiven Zustrom der Studierenden auf den Wohnungsmarkt infolge der Reform dieser Hilfen.
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Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2005
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Langue Français

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LOGEMEN
Pourquoi les ménages à bas revenus paient-ils des loyers de plus en plus élevés ? L’incidence des aides au logement en France (1973-2002) Gabrielle Fack*
Depuis la fin des années 1970, les aides directes à la personne sont devenues l’instrument majeur de la politique du logement au détriment des aides à la pierre, dont l’efficacité avait été remise en cause lors de la réforme de 1977. Les aides à la personne permettent, en théorie, de mieux cibler les populations pour qui le logement, qui demeure le premier poste de consommation des ménages, représente une charge jugée trop importante. Or le développement de ces aides s’est accompagné d’une augmentation du coût du logement pour les ménages locataires les plus défavorisés. L’objet de cette étude est d’évaluer leur impact sur l’augmentation des loyers des ménages à bas revenus. La réforme de l’extension des aides du début des années 1990 constitue une expérience naturelle qui permet d’isoler les effets des allocations logement, car elle s’est appliquée seulement à certains types de ménages et non à d’autres. On peut ainsi comparer l’évolution des loyers des ménages à bas revenus bénéficiaires de la réforme à celle des ménages qui n’ont pas été touchés et identifier les effets de la réforme pour les ménages concernés. À partir de données des enquêtesLogementde l’Insee, on montre que les aides pourraient bien être, pour une bonne partie, responsables de la hausse du loyer au mètre carré des ménages à bas revenus. D’après les estimations obtenues, entre 50 % et 80 % des allocations logement perçues par ces ménages auraient été absorbées par les augmentations de leurs loyers. Si ces allocations ont pu entraîner une certaine amélioration du confort de l’habitat, cet effet semble bien trop faible pour suffire à expliquer la hausse des loyers, du moins à partir des mesures possibles d’après les enquêtesLogement. La hausse de la demande des locataires provoquée par les aides semble s’être heurtée à une offre de logement trop inélastique de la part des bailleurs, entraînant ainsi une forte hausse des loyers. Cet effet a pu être renforcé par l’arrivée massive des étudiants sur le marché du logement à la suite de la réforme de ces aides.
* Gabrielle Fack appartient au PSE Paris Jourdan Sciences Économiques, unité mixte de recherche CNRS – EHESS – ENPC – ENS. Les idées et opinions exprimées dans cet article sont de la responsabilité de l’auteur qui tient à remercier particulièrement Thomas Piketty pour son soutien tout au long de ce travail, ainsi qu’Esther Duflo, Alain Jacquot, Françoise Maurel, Cyrille Hagneré et deux rapporteurs anonymes pour leurs remarques constructives. Les noms et dates entre parenthèses renvoient à la bibliographie en fin d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 381-382, 2005
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Si les recherches empiriques sur les différents effets des aides au logement se sont déve-loppées depuis les années 1970, les études de l’impact des aides personnelles sur les loyers sont très récentes. Un premier article de Susin (2002) évalue un programme d’aides person-nelles au logement distribuées sous formes de bons aux États-Unis, leSection 8 Voucher pro-gram. Susin utilise des données par aire urbaine pour estimer l’impact de la proportion de béné-ficiaires d’aides dans une aire sur les loyers. Il exploite le fait qu’aux États-Unis, seulement 10 % des ménages pauvres éligibles pour les aides en reçoivent et que leur proportion varie considérablement d’une aire urbaine à l’autre. Il conclut que leSection 8 programa entraîné une augmentation des loyers pour tous les ménages pauvres, affectant particulièrement les ménages éligibles qui ne reçoivent pas d’aides. Ainsi, d’après les calculs de l’auteur, les hausses de loyers payées par l’ensemble des locataires à bas revenus ont été supérieures au montant total des aides versées, conduisant à un transfert net des locataires à bas revenus vers les proprié-taires. Cependant, il apparaît que l’allocation des aides est en grande partie endogène à la hausse des loyers, et il n’est pas sûr que les méthodes employées par Susin permettent de corriger parfaitement ce problème. L’étude sur données françaises de Laferrère et Le Blanc (2002) conclut aussi à un effet des aides sur les loyers. Les auteurs exploitent la structure de panel de l’enquêteLoyer et Charges, où un logement est suivi pendant plusieurs trimestres : ils comparent l’évolution des loyers des logements dont les locataires ont commencé – ou arrêté – de recevoir des aides sur la période  à celle des loyers de logements dont les locatai-res n’ont pas changé de statut sur la période. Ils trouvent un effet significatif des aides sur les loyers, mais leur méthode ne leur permet pas d’en donner une mesure précise. Enfin, une étude anglaise de Gibbons et Manning (2003) estime l’impact d’une réforme à la baisse du système d’aides au logement sur les loyers. Les auteurs identifient un effet substantiel sur la baisse des loyers, mais son amplitude varie du simple au double suivant les données utilisées. Toutes ces études vont dans le même sens, sug-gérant une très faible élasticité de l’offre de logement ainsi qu’un confinement des ménages à bas revenus dans certaines catégories de loge-ment. Cependant, elles ne donnent pas une mesure précise de la part des aides qui est absor-bée par la hausse de loyer. Or une estimation chiffrée de ce coût « indirect » des aides au
logement est indispensable pour évaluer l’effi-cacité de ce type de programme. Loyers et aides au logement des ménages à bas revenus es sept enquêtesLogement réalisées de L1973 à 2002 permettent d’étudier l’évolu-tion des loyers au m2en fonction du revenu des ménages sur longue période. Elles ont l’avan-tage de comporter des données sur les caracté-ristiques des logements mais aussi sur celles des ménages, notamment le revenu. Pour chaque année d’enquête, on dispose d’un grand nombre d’observations (entre 20 000 et 45 000 ménages selon les années, dont un peu moins de la moitié de locataires). On peut ainsi calculer l’évolution des loyers au m2 décile de revenu sur la par période 1973-2002. On a pris en compte les revenus tels qu’ils sont mesurés dans ces enquêtes, c’est-à-dire les revenus avant impôts. On utilise les revenus par ménage et non par unité de consommation. Ce choix est guidé par le fait que l’on n’étudie pas les ménages à bas revenus en tant que tels, mais qu’on cherche à estimer les effets des aides au logement sur les loyers : l’objectif est donc d’identifier les prin-cipaux bénéficiaires de la réforme de 1991-1993, à savoir les petits ménages à faibles reve-nus. Or il est plus facile de repérer ces derniers avec une distribution des revenus bruts qu’avec une distribution des revenus par unité de con-sommation, où ils seraient mêlés davantage avec les autres types de ménages. Ce choix, qui nous permet d’étudier précisément l’évolution des loyers et des aides aux ménages les plus concernés par la réforme des aides, implique aussi que les analyses menées ici ne sont pas directement comparables avec les études qui mesurent la pauvreté et qui prennent en compte pour cela des échelles d’équivalence. La situa-tion des petits ménages à bas revenus par rap-port au logement présentée ici ne prétend pas décrire celle de tous les ménages modestes en France. L’évolution des loyers au m2par décile pour tous les locataires, en euros constants de 2002, est retracée dans le graphique I. Sur la période retenue (1973-2002), les loyers au m2ont tous augmenté plus vite que l’indice des prix, mais la hausse est beaucoup plus forte pour les ménages des deux premiers déciles que pour les autres ménages. La chronologie de cette augmentation est intéressante. Les loyers au m2des ménages des premiers déciles, nette-
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