Une forme discrète de pauvreté : les personnes logées utilisant les distributions de repas chauds - article ; n°1 ; vol.391, pg 65-85
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Economie et statistique - Année 2006 - Volume 391 - Numéro 1 - Pages 65-85
Si l'enquête sur les personnes fréquentant les centres d'hébergement et les lieux de distribution de repas chauds a pour apport principal une meilleure connaissance des personnes sans domicile utilisatrices de ces services d'aide, elle permet aussi de voir que des personnes disposant de logements ont recours à ces mêmes services de restauration. On met là en évidence une forme de pauvreté sans doute moins visible dans l'espace public, mais qui n'en est pas moins profonde. Pour une partie des personnes concernées, il s'agit d'ailleurs d'anciens sans-domicile qui ont pu retrouver un logement sans pour autant sortir de la pauvreté. Le handicap physique ou mental qui touche une partie de ces personnes logées a pu être la cause de leur pauvreté, en les écartant du marché de l'emploi ou en leur rendant son accès plus difficile. Cette situation se retrouve régulièrement dans les entretiens, par exemple dans le cas d'ouvriers du bâtiment qui ont eu un accident du travail, parfois sans être déclarés. Par ailleurs, une fois reconnu, ce handicap leur assure une relative protection et un revenu régulier, quoique faible, qui leur évite de se retrouver sans logement. Malgré des revenus plus élevés provenant généralement de la perception d'allocations, ces personnes, souvent âgées, souffrent de la solitude et leurs ressources les limitent souvent à des logements de mauvaise qualité. L'aide de différents organismes et des particuliers est nécessaire à beaucoup pour compenser en partie leurs mauvaises conditions de logement et leurs faibles revenus. La fréquentation des accueils de jour et des distributions de repas a aussi une fonction sociale, en leur permettant d'avoir quelques échanges.
Una forma discreta de pobreza: las personas alojadas que utilizan las distribuciones de comidas calientes. Si la investigación sobre las personas que frecuentan los centros de albergue y los lugares de distribución de comidas calientes tiene como principal aportación un mejor conocimiento de los vagabundos usuarios de estos servicios de ayuda, también permite observar que las personas que disponen de un alojamiento han recurrido a estos servicios de restauración. Pone en evidencia una forma de pobreza sin duda menos visible en el espacio público, pero que no es menos profunda. Para una parte de las personas atañidas, que por cierto se trata de ancianos vagabundos que han encontrado un alojamiento sin salir por tanto de la pobreza. La discapacidad física o mental que afecta a una parte de estas personas alojadas ha podido ser la causa de su pobreza, apartándolos del mercado de trabajo o difi cultando su acceso. Esta situación se encuentra con regularidad en las entrevistas, por ejemplo en el caso de obreros de la construcción que han tenido un accidente de trabajo, a veces sin ser declarados. Por otra parte, una vez reconocida, esta discapacidad les asegura una protección relativa y unos ingresos regulares, aunque escasos, que les evita encontrarse sin vivienda. A pesar de sus ingresos más elevados, que generalmente provienen de subsidios, estas personas, a menudo de avanzada edad, sufren de soledad y sus recursos se limitan con frecuencia a viviendas de mala calidad. La ayuda de diferentes organizaciones y de particulares se revela necesaria en muchos casos para compensar sus malas condiciones de alojamiento y sus escasos ingresos. La frecuentación de las acogidas de día y de las distribuciones de comida tiene también una función social, permitiéndoles algunos intercambios.
Die Befragung der Menschen, die in Obdachlosenheimen und Suppenküchen verkehren, liefert vor allem bessere Erkenntnisse über die Obdachlosen, die solche Hilfsdienste nutzen, zeigt aber auch, dass Menschen mit einer Wohnung derartige Verpfl egungsdienste ebenfalls in Anspruch nehmen. Bei letzteren handelt es sich um eine Form der Armut, die in der Öffentlichkeit gewiss weniger sichtbar, dafür aber genauso gravierend ist. Im Übrigen sind diese Menschen zum Teil frühere Obdachlose, die eine Wohnung fi nden konnten, ohne jedoch die Armut zu überwinden. Eine körperliche oder geistige Behinderung, von der ein Teil der Menschen, die eine Wohnung fanden, betroffen ist, kann die Ursache ihrer Armut sein, da sie sie vom Arbeitsmarkt verdrängte oder ihnen dessen Zugang erschwerte. Eine derartige Situation wird bei den Gesprächen regelmäßig angeführt, wie beispielsweise von Bauarbeitern, die einen Arbeitsunfall hatten und oftmals nicht gemeldet waren. Nach Anerkennung ihrer Behinderung genießen sie dagegen einen relativen Schutz und beziehen ein regelmäßiges Einkommen, das zwar gering ist, ihnen aber die Obdachlosigkeit erspart. Trotz höherer Einkünfte, die in der Regel aus der Sozialfürsorge stammen, leiden diese oftmals älteren Menschen unter Einsamkeit und leben aufgrund ihrer begrenzten Ressourcen häufi g in Wohnungen von schlechter Qualität. Viele sind auf die Hilfe von verschiedenen Einrichtungen und Privatpersonen angewiesen, damit sie ihre schlechten Wohnverhältnisse und geringen Einkünfte teilweise verbessern können. Der Besuch von Tagesheimen und Suppenküchen hat auch eine soziale Funktion, da er ihnen einige menschliche Kontakte ermöglicht. Eine diskrete Form der Armut: Menschen, die eine Wohnung haben und die Verteilung warmer Mahlzeiten in Anspruch nehmen
The survey of the people who frequently use homeless shelters or hot meal distribution services, in addition to providing more information about the homeless people who use these services, reveals that people with housing also use the hot meal distribution service. This is a hidden form of serious poverty. Some of these people used to be homeless and although they have found housing, they have not been able to escape poverty. A physical or mental handicap could be the reason for their poverty, making it more diffi cult for them to enter, or removing them completely from, the labour market. This was the situation of many of the people interviewed, for example, the construction workers who had had industrial accidents and had sometimes not declared them. Yet, once their handicap is declared, they are guaranteed relative protection and a regular, although low, income, preventing them from becoming homeless. Despite their higher incomes, generally from the receipt of benefi ts, these people, who are often elderly, live in isolation and are limited by their fi nancial resources to poor quality housing. The fi nancial aid from different organisations and private individuals is essential for many to compensate in part their poor housing conditions and their low incomes. Visiting day centres and using hot meal distribution services also has a social function, allowing them to have some social contact. A Hidden Form of Poverty: People with Housing who Use Hot Meal Distribution Services
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 2006
Nombre de lectures 15
Langue Français

Extrait

Une forme discrète de pauvreté : les personnes logées utilisant les distributions de repas chauds Maryse Marpsat*
PAUVRETÉ
Si l’enquête sur les personnes fréquentant les centres d’hébergement et les lieux de dis-tribution de repas chauds a pour apport principal une meilleure connaissance des per-sonnes sans domicile utilisatrices de ces services d’aide, elle permet aussi de voir que des personnes disposant de logements ont recours à ces mêmes services de restauration. On met là en évidence une forme de pauvreté sans doute moins visible dans l’espace public, mais qui n’en est pas moins profonde. Pour une partie des personnes concernées, il s’agit d’ailleurs d’anciens sans-domicile qui ont pu retrouver un logement sans pour autant sortir de la pauvreté. Le handicap physique ou mental qui touche une partie de ces personnes logées a pu être la cause de leur pauvreté, en les écartant du marché de l’emploi ou en leur rendant son accès plus diffi cile. Cette situation se retrouve réguliè-rement dans les entretiens, par exemple dans le cas d’ouvriers du bâtiment qui ont eu un accident du travail, parfois sans être déclarés. Par ailleurs, une fois reconnu, ce handicap leur assure une relative protection et un revenu régulier, quoique faible, qui leur évite de se retrouver sans logement. Malgré des revenus plus élevés provenant généralement de la perception d’allocations, ces personnes, souvent âgées, souffrent de la solitude et leurs ressources les limitent souvent à des logements de mauvaise qualité. L’aide de différents organismes et des particuliers est nécessaire à beaucoup pour compenser en partie leurs mauvaises condi-tions de logement et leurs faibles revenus. La fréquentation des accueils de jour et des distributions de repas a aussi une fonction sociale, en leur permettant d’avoir quelques échanges.
* L’auteur appartient à l’Ined, unité de recherche « Mobilités, territoires, habitat et sociabilité ».
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 391-392, 2006
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s usagers des services d’hébergement L eetdedistributionderepaschaudssontinterrogés dans l’enquête  Sans-domicile 2001 (Brousse et al. , 2002 a, b, c), avec pour objectif principal d’atteindre les personnes sans domi-cile. Toutefois, parmi les personnes interrogées dans les distributions de repas, près d’un tiers disposent d’un logement autonome, au sens où elles sont locataires ou propriétaires de leur logement, ou sont logées gratuitement par leur employeur (cf. encadré 1). Ces repas gratuits leur permettent de s’alimenter malgré des reve-nus généralement très faibles. Les autres enquêtés, sans « logement auto-nome » au sens précédemment défi ni, ont passé la nuit précédente dans un service d’héberge-ment ou dans un lieu non prévu pour l’habita-tion – il s’agit alors de personnes sans domicile au sens de l’enquête –, ont été hébergés par de la famille ou des amis, ou ont dormi dans un squat, une chambre d’hôtel qu’ils ont eux-mêmes payée, ou une institution (foyer de tra-vailleurs, hôpital, prison, etc.). Pour toutes ces personnes sans logement autonome, les passa-ges d’une situation à l’autre sont fréquents : on peut rester quelques nuits dans un squat, s’en faire déloger par des services de sécurité, fi nir la nuit dehors, ou être hébergé par quelqu’un de façon provisoire entre deux séjours dans un cen-tre d’hébergement. Mais au-delà des multiples situations dans lesquelles ils peuvent se trouver au moment de l’enquête, ces enquêtés se divi-sent en deux groupes : ceux qui ont déjà béné-ficié d’un logement autonome et l’ont perdu, et ceux qui n’en ont jamais eu. Le but est ici de repérer les caractéristiques, les trajectoires et les conditions de vie des enquêtés qui disposent actuellement d’un logement auto-nome. On les comparera aux deux autres caté-gories d’enquêtés, ceux qui n’ont jamais eu de logement autonome, d’une part, ceux qui en ont eu un et l’ont perdu, d’autre part. On réservera le terme de logements autonomes à ceux dont les personnes ont pu disposer en propriété ou location pour une durée d au moins trois mois (cf. encadré 1). On déplace ainsi le projecteur sur les utilisateurs logés, dont on cherche à com-prendre pourquoi ils n’ont pas perdu leur loge-ment ou, l’ayant perdu, ont pu en retrouver un. Étant donné les faibles effectifs en jeu, les résul-tats chiffrés doivent être interprétés avec pru-dence, plutôt comme donnant à voir des pistes à explorer ultérieurement, et participant d un faisceau de présomptions où ils s’ajoutent aux conclusions de travaux plus qualitatifs, entre-tiens approfondis ou observations de terrain.
Les utilisateurs logés n’en sont pas pour autant très favorisés : toutes les personnes qui font appel à des services d’aide se trouvent dans des situations difficiles ; celles qui disposent d’un logement ne sont pas toujours assurées de pouvoir y rester longtemps, vivent souvent dans l’inconfort (1), ou peuvent connaître diverses autres difficultés liées à leur habitat (Clanché (2), 2000). Par ailleurs, les personnes qui disposent d’un logement et fréquentent les distributions de repas ne sont pas représentatives de l’ensemble des ménages à bas revenus. Par exemple, si quel-ques familles avec de jeunes enfants recourent à ces distributions – y compris dans les points-soupes itinérants comme ceux des Camions du Cœur – les familles à bas revenus utilisent plu-tôt des colis alimentaires, qui peuvent être cui-sinés et consommés à domicile, lorsqu’elles dis-posent d’une installation pour faire la cuisine, et que le gaz et l’électricité n’ont pas été cou-pés. Ces familles, auxquelles les associations viennent fréquemment en aide (3), ne fi gurent pas dans l’enquête car seules les distributions de repas chauds ont été enquêtées et non cel-les d’aliments à cuisiner, afi n d’avoir une plus grande chance d’interroger des personnes sans logement. Enfin, au sein même des deux caté-gories de personnes sans logement autonome étudiées ici, il existe une grande diversité de trajectoires et de caractéristiques (cf. Brousse, 2006, ce numéro), qui est bien résumée par les différents types d’hébergement (espace public, centres collectifs d’urgence ou de plus longue durée, appartements, etc.) auxquels elles ont accès (Marpsat et Firdion, 2000, chapitre 9). Deux études de référence sur les États-Unis et l’Espagne Aux États-Unis, Sosin (1992) a comparé les uti-lisateurs des distributions de repas de Chicago selon qu’ils étaient ou non sans domicile. Il disposait d’un échantillon de 531 personnes recueilli au cours de l’été 1986, dont 178 sans domicile et 353 logées. Ces repas incluent ceux distribués dans les centres d’hébergement, ce qui en fait une méthode d’échantillonnage assez proche de celle de Sans-domicile 2001 . Sosin essaie de déterminer les facteurs qui 1. Parfois dans un inconfort plus grand que certaines personnes logées en appartement par les services d’aide et qui sont, elles, classées par l’Insee comme sans domicile. 2. Cet article, qui résume une partie des travaux du groupe « sans-abri » du Cnis, décrit une classifi cation générale de l’en-semble des situations de logement selon plusieurs dimensions, qui permettent de repérer divers types de diffi cultés. 3. Cf., par exemple, les statistiques annuelles du Secours Catholique.
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