Des médiattitudes - Prospective sur la stratégie de l Etat dans les mutations des médias
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Description

Dans le cadre de son activité Prospective de l'Etat Stratège, le Commissariat général du plan, se penche, par le biais du groupe de projet Cosmos, sur les transformations auxquelles vont être confrontés les médias à l'horizon 2015 (concentration, innovations technologiques, croissance et évolution des besoins des consommateurs citoyens pour ces services). Craignant une banalisation des contenus liée à des hypothèses de concentration mondiale et concurrence plurielle, le groupe de projet recommande d'accroître le degré de concurrence, de renforcer le service public et d'inciter à des contrepouvoirs efficaces afin de permettre un pluralisme citoyen. Il conclue son exercice de
prospective par la présentation de dix médiattitudes pour une action de l'Etat et de la société qui incite à la qualité et au pluralisme dans les médias.

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Publié le 01 juin 2005
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Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

   DES MEDIATTITUDES   Prospective sur la stratégie de l’Etat dans les mutations des médias      Chefs de proje:tSylvie BENARD– Bernard BENYAMIN   Elie COHEN, Jea-Ynves DUPEUX , Francis JUTAND, Ivan LEVAI, Jean-Loup MANOUSSI (†), PaulNAHON, Laurent PELLET, Françoise SAMPERM ANS    Paris,22 juin2005
 
              
AVANT-PROPOS DALAINETCHEGOYEN,COMMISSAIRE AUPLAN
La réflexion sur le monde des médias ne sin scrit pas dans la tradition du Plan. On chercherait en vain dans les rapport s publiés durant les trois décennies précédentes une référence qui permette d affirmer continuité ou discontinuité. Ainsi, contrairement aux sillons que cont inue à creuser le Plan - lemploi, les qualifications, les relations professionnelles etc. -, les travaux du groupeCosmosconstituent un nouveau champ dinvesti gation. Puisque lidentité du Plan se focalise désormais sur la Prospective delÉtat Stratège, il sopère un déplacement de son centre de gravité : les fonctions régaliennes de lÉtat ou la culture, par exemple sont lobjet de nouvelles approches. Le groupe de projetCosmos a travaillé durant quatorze mois sur la relation de lÉtat avec les médias dans les années à venir. Rassemblant des acteurs privés et publics, des chercheurs et des journalistes, il a exploré les différences postures de lÉtat en prenant le parti dun État qui ne soit pas indifférent aux médias privés et qui soit responsable dans sa relation aux médias publics. Les rôles de lÉtat sont évidemment très différents dans le secteur de la presse où tous les opérateurs sont privés et dans le secteur de laudiovisuel où coexistent opérateurs privés et publics. Néanmoins,lÉtat stratège, soucieux de lintérêt général, doit agir au nom de principes communs à tous les secteurs. En effet, dans une économie développée comme la nôtre et dans une République qui repose sur des valeurs affichées, le secteur des médias nest pas un secteur comme les autres. Sans revenir aux références théoriques qui fondent notre démocratie et notre République, nous savons que les moyens qui diffusent info rmations et communications constituent des éléments essentiels pour lexercice des libertés fondamentales. Cette affirmation nest guère innovante puisque les décideurs politiques ont toujours été soucieux de leur réserver un traitement à part. Par exemple la concentration dans le domaine des médias ne se réfè re pas seulement au problème dune concurrence à sauvegarder, mais dun pluralisme à entretenir. De plus, dans laudiovisuel, lattribution des fréquences ne peut quêtre lobjet dune décision
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- Cosmos : Avant-propos -
publique puisquelles sontde facto ffuseursaccessibles à tous les di potentiels tant quune distribution officielle na pas permis à tel ou tel de les utiliser sans être brouillé ni parasité. Autrement dit, le marché ne peut pas j ouer le même rôle dans les médias que dans dautres activités. Cest pourquoi lÉtat y joue un rôle spécifique. Mais il nest pas le seul, cest pourquoi Cosmos aime parler de «médiattitudes ». Dans ses processus de production, la presse écr ite est plus proche des activités de production banalisées : elle choisit la répartition de ses modes de financement (publicité et lectorat), ses fournisseurs, son implantation géographique, son espace de marché, ses modes de distribution, ses opérateurs etc. Il reste que, dans une démocratie, la vie et la survie dun journal, même sils sont sanctionnés par le marché ne sauraient laisser lÉtat indifférent. Même si ce dernier ne saurait intervenir pour sauver lun ou lautre suppor t, il est de son devoir de garantir aux citoyens une presse écrite diversifiée, c est-à-dire une presse écrite qui soit capable de trouver les ressources nécessaire s à sa diffusion. Tandis que les autres médias produisent sons et images très va riés dans leurs contenus (information, divertissements, débats etc.), la presse écrite est concentrée sur linformation, cest-à-dire sur ce qui détermine les choi x de tout citoyen dans une démocratie élective. Dans le domaine de laudiovisuel, les frontières du public et du privé se sont profondément modifiées depuis deux décennies. Elles ne sont pas gravées dans le marbre. Entre les deux, ce sont non seul ement les actionnaires mais aussi les clients qui font la différence. Si lon en admet, selon la définition la plus courante, le client est celui qui paye, en étant libre de choisir un autre fournisseur. Dans toutes les organisations économiques le c lient est un acteur du changement, il les contraint à des transformations qui sont la condition de leur survie et ses perspectives ne sont pas nécessairement homogènes à celles des producteurs ou prestataires : en effet, le client constitue par nature une figure de laltérité, il na pas, par principe, le même avis sur le produit fabriqué ou la prestation fournie que celui fabrique le produit ou rend le service. Dans le cas dune chaîne privée non cryptée, les seuls clients sont les annonceurs ; dans le cas dune chaîne à péage, ce sont les abonnés et les annonceurs ; dans le cas dune chaîne publique, ce sont les annonceurs et lÉtat -puisque la redevance dont le paiement es t indifférencié est affectée au budget de lÉtat avant dêtre répartie entre les chaînes publiques. Dans le cas des chaînes publiques, lÉtat est donc à la fois actionna ire et client - confronté aux exigences des autres clients que sont les annonc eurs, dans la plupart des supports audiovisuels (à lexception dArte). Le public - cest-à-dire, les citoyens - nest jamais un client ; il nest quun levier (a udimat) pour satisfaire le client. Ces données élémentaires, croisées avec la fonc tion régulatrice de lÉtat pour tout le champ audiovisuel - chacun reconnaît quon ne peut diffuser nimporte quoi à
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Cosmos : Introduction --
nimporte quelle heure pour nimporte quel public -, mettent lÉtat dans des positions très variables et instables. Dans les principes du gouvernement représentatif, lÉtat représente les citoyens, mais on ne peut considérer quil existe une identité de représentation et dexpression entre la communauté des citoyens et le public de laudiovisuel. Cette instabilité signifie avant tout que la situation présente évoluera. Rien nest inscrit dans le marbre quant à lévoluti on des rapports public/privé dans le domaine des médias. La mondialisation co ncerne au premier chef les médias audiovisuels et beaucoup moins la presse éc rite - protégée par la territorialité et la langue vernaculaire. Mais la presse écrite subit la concurrence des nouveaux médias qui prolifèrent. Relisons le fameux article 11 de la Déclaration des droits de lhomme et du citoyen (26 août 1789) : «La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de lHomme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre à labus de cette liberté dans les cas déterminés par la Loi». Cette liberté ne peut être seulementformelle, elle doit êtreréellecest-à-dire être effectivement exercée, comme le rappelait, Raymond Aron, en regrettant que cette dis tinction marxiste ne soit pas assez prise en compte par les libéraux (Essai sur les libertés). Le groupeCosmos probables dans lavenir. Il et les scénarios possibles explore essaie de montrer que le concept de qualité doit être un moderne souci delÉtat stratège Il ajoute une nouvelle dimension au dans ses différentes postures. pluralisme déjà promu par tous les avocats des libertés publiques. Je ne saurais que trop remercier les de ux co-chefs de projet du groupe Cosmos, Bernard Benyamin et Sylvie Bénard qui ont réussi à faire travailler ensemble des personnalités dhorizons et dopinions tr ès différents. Jai une pensée toute particulière pour Jean-Loup Manou ssi, directeur de la rédaction deLa Montagne, décédé au beau milieu des travaux du groupe Cosmos. Chacun a en mémoire ses apports singuliers et son enthous iasme pour les travaux du Plan.
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MEDIA-FICTION
Les médias, lÉtat et les citoyens en quatre saisons jusquen 2011 Si lÉtat démocratique et les individus ne réagissent pas pour obtenir des médias, pluralisme et qualité, que ce soit dans les programmes, les articles, les émissions, les portails, les sites web et les blogs, en utilisant les différents supports de la presse écrite, de la télévision, de la radio, dInternet (et du portable), lhistoire des médias français pourrait devenir rapide ment la conquête de la communication par quelques géants du multimédia. Voici ce que pourrait être une histoire de s médias dans la première décennie du 21èmesiècle, une sorte de « média-fiction ». « Automne 2007 : Un nouveau Président de la République vient de terminer ses cents premiers jours à lElysée. Après le nième plan de recapitalisation, les partenaires dun grand quotidien national jettent léponge, un deuxième vient dêtre restructuré et absorbé par un groupe de la presse magazine, un troisième ne survit quau prix dun plan drastique déc onomie et dune politique de publicité agressive. Compte tenu de labsence de réforme du régime peu différencié et à 90% indirect des aides à la presse, lÉta t ne peut plus aider les quotidiens nationaux en question. La presse écrite papier se recentre sur les magazines et les quotidiens nationaux et régionaux en faillite passent brutalement la main aux gratuits financés par la publicité et diff usant une information de plus en plus banale. Après trois ans de tergiversations, une chaîne dinformation internationale française est opérationnelle sur la TNT, une guerre des mots et des images sengage avec LCI sur lADSL.. LAFP, fortement concurrencée par Reuters et Associated Press, se mobilise pour fournir une information diversifiée.
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- Cosmos : Média-Fiction -
Hiver 2007 : un opérateur de communica tion multimédia allié à une grande chaîne de télévision gagne pour la première fois lappel doffre pour les droits de retransmission du football. La moitié des abonnés de Canal + résilient leur contrat et la société ferme. Printemps 2008 : Un groupe de presse ré gionale crée un premier groupe local dinformation multimédia : presse quotidienne, magazi ne, radio, Internet, TV locale bilingue. Été 2008 : Une des chaînes nouvelles apparue avec la TNT abandonne. La fragmentation du marché publicitaire affaiblit les plus faibles, lheure est aux rachats et à la restructuration. En labsence dune modification de la loi du 1eraoût 2000, les pourcentages des parts de marché publicitaire ne sont toujours pas laxe essentiel du contrôle des concentrations et lÉtat na pas institué une taxe supplémentaire permettant de financer la TNT. Automne 2008 : La communauté européenne prend à la majorité requise une directive créant un espace européen des médias ouvert et concurrentiel. Hiver 2008 : Avec les derniers achats de Noël, les consoles de jeux portables deviennent le premier terminal daccès et déchanges de contenus multimédias. La FNAC teste ses meilleurs adhérents en leur offrant une super promotion de téléphones portables multimédias avec que stionnaire à lappui sur les contenus les plus attractifs. Les contenus multiméd ias diffusés en Europe commencent à être doublés systématiquement en trois langues : anglais, arabe et chinois. Printemps 2009 : un groupe de la pre sse magazine rachète le dernier grand quotidien national et la plupart des rubriques « politiques intérieures », « communication » et « défense » sont désormais suspectées de parti pris. Été 2009 : Un opérateur éditeur généra liste rassemble ses chaînes, radios généralistes, magazines, quotidiens r égionaux et nationaux, gratuits, portails Internet, moteurs de recherche, chaînes de télévision, éditions multimédia, et structure le tout pour organiserle groupe intégré dinformation premier multimédia. La rationalisation de la sous-traitance de ce groupe entraîne des départs à la retraite massifs et une diminution des effectifs de lordre de 25%. Automne 2009 : Un major en allia nce avec un grand opérateur de communication lance une offre de cinéma à domicile en simultané avec la sortie en salle à un prix nettement inférieur à celui dune place de cinéma. Le nombre dentrées en salle diminue de 30% et l industrie du cinéma français voit une partie de son financement se tarir.
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Hiver 2009 : Une grande chaîne de diver tissement lance un grand jeu interactif de télé-réalité en réseaux diffusé enprime time. Printemps 2010 : La restructuration de laudiovisuel sachève. Trois grandes chaînes généralistes « divertissement et société » émergent et se partagent le marché français ; deux sont contrôl ées par des grands groupes de médias européens, Berlusconi et Bertelsmann, avec des partenariats minoritaires de grands des médias mondiaux : Murdoch et Disney. France 2 est enfin privatisée ne pouvant concourir aux appels doffres devenus prohibitifs sur le sport, le cinéma et le divertissement. Été 2010 : Une chaîne généraliste sous-traite son information à un groupe dinformation multimédia, pour se concentrer sur les émissions de divertissement et de société, et la promotion des contenus : cinéma, chansons, livres de ses partenaires. Les autres suivent. LAFP est dissoute sur demande de Bruxelles, lÉtat français représentant désormais plus de 95% de son chiffre daffaires. Automne 2010 : Des opérateurs de communication rachètent massivement des chaînes thématiques et créent desjoint venture des majors autour de leurs avec activité de portail et depay per view. Hiver 2010 : Après rachats et concentrati on, deux grands groupes dinformation multimédias se sont structurés en France, à côté des chaînes audiovisuelles et radio publiques. Ils profitent des évol utions réglementaires pour prendre le contrôle et fédérer les groupes multimédias régionaux. France 3 doit cesser son activité. Printemps 2011 : Les grands éditeurs de contenus mondiaux raflent la mise, ils investissent deux chaînes généralistes « divertissement et société » et prennent le pouvoir dans leur alliance avec les opérateurs : bouquets de thématiques,pay per view chaînes de promotion sont mis au et de la promotion des contenus service multimédias. Été 2011 : Les chaînes de télévision pub liques, faute daudience et de moyens, sont réorganisées en une chaîne dinformation internationale et une chaîne éducative et culturelle. Automne 2011: ATTAC organise les ét ats généraux des altermédias. Un regroupement de citoyens et de professio nnels éclairés décide de créer une ONG financée par des donateurs et dédiée au contrôle éthique et économique de laudiovisuel. Hiver 2011 : la campagne électorale bat s on plein, 5 millions de Français sont connectés en permanence aux 2 grandes chaînes dinformation multimédia,
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soutenant chacune leur candidat ; la camp agne Internet fait rage : 5 millions échangent enpeer to peer ur télévision et alternent; 25 millions sont devant le entre émissions de télé-réalité politique et émission de promotion à scandale, 10 millions participent au grand jeu interactif de lannée : une invasion dextraterrestres, 10 millions ont définitivement décidé quils ne sintéresseraient quà la vie associative et locale, et 10 millions sont restés accrochés aux charmes désuets dun bon livre, dun bon concert retransmis en octophonie ou dun voyage de rêve en immersion dans le ur salle hypermédia à domicile ou dune émission sur la chaîne culturelle Arte portant sur lhistoire des médias et du service public. » Ainsi donc, les contenus médias deviennent des contenus multimédias, transitant sur nimporte quels supports, lesquels sont regroupés au sein de deux ou trois grands groupes multimédias, plutôt européens et mondiaux mais aussi régionaux. Peu importe le support, cest le produ it qui compte - le contenu multimédia demandé qui sera vendu-. Dans le paquebot des médias, les journa ux quotidiens disparaissent ou passent sur écran ; le secteur public est mis en position minoritaire et devient secteur réservé, pour une information et une culture de niche ; les opérateurs de communication et les éditeurs de cont enus trustent linformation, le divertissement et tous les produits dé rivés imaginables afin de vendre tout contenu média devenu marchandise avec généralisation dupay per view, des produits marketing et du thématique payant ; les acteurs des médias et les hommes politiques sont en symbiose pour un prêt à penser et un prêt à divertir, signes cliniques dun coma des médias. Lindépendance, léthique, la créativité di sparaissent du paysage des médias, seuls quelques journalistes marginaux maintiennent à bout de bras une information pluraliste et de qualité au risque de leur sécurité, avec les journalistes de laudiovisuel et de la radi o ils tentent de créer unIndependant Boarddéconnecté du politique, sorte dorgane de régulation éthique et économique. Des citoyens de toutes générations et milieux, secoués par des jeunes en quête de sens et désireux de retrouver une expression de proximité, prennent la relève et constituent des associations pour siffler les médias et les institutions gouvernementales. Les élus sinquiètent, lexécutif réagit et enquête pour savoir pourquoi les conclusions du rapportDes Médiattitudesont été égarées.
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