Les biocénoses des collemboles de la forêt de Sénart
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Description

In: Paul Pesson, 1980. Actualités d'écologie forestière: sol, flore, faune. Gauthier-Villars, Paris, France, pp. 151-176. Les Collemboles (Insectes, Aptérygotes) peuplent dans le monde entier le sol et ses annexes : mousses, écorce des arbres, plantes basses, mares (surface des eaux), etc., tant dans les milieux ouverts qu'en milieu forestier. Mais ce ne sont pas toujours les mêmes espèces qui participent à ces peuplements, la composition spécifique variant énormément d'un endroit à l'autre. Dans son ensemble, ce groupe relativement primitif reste étroitement inféodé aux conditions, notamment hydriques, du milieu, ne « créant» pas lui-même son propre environnement, comme le font les sociétés d'insectes évolués (abeilles, fourmis, termites, etc.). Voilà donc un matériel de choix pour une étude synécologique : un groupe peuplant des biotopes très divers et malgré tout sensible aux variations des conditions ambiantes.

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Publié le 07 septembre 2016
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Langue Français

Extrait

1
J.-F. PONGE
Les biocénoses des collemboles de la forêt de Sénart
I. INTRODUCTION
Les Collemboles (Insectes, Aptérygotes) peuplent dans le monde entier le sol et ses annexes: mousses,
écorce des arbres, plantes basses, mares (surface des eaux), etc., tant dans les milieux ouverts qu'en milieu
forestier. Mais ce ne sont pas toujours les mêmes espèces qui participent à ces peuplements, la composition
spécifique variant énormément d'un endroit à l'autre. Dans son ensemble, ce groupe relativement primitif reste
étroitement inféodé aux conditions, notamment hydriques, du milieu, ne «créant» pas lui-même son propre
environnement, comme le font les sociétés d'insectes évolués (abeilles, fourmis, termites, etc.). Voilà donc un
matériel de choix pour une étude synécologique: un groupe peuplant des biotopes très divers et malgré tout
sensible aux variations des conditions ambiantes.
La Forêt de Sénart est installée sur un plateau limoneux limité au nord par la vallée de l'Yerres, au sud-
ouest par la vallée de la Seine, la partie est se continuant par le plateau de Brie. La partie nord-est de la forêt
possède de très nombreuses mares reliées par des fossés de drainage (qui n'ont jamais réussi d'ailleurs à assécher
la forêt), la partie sud-ouest (beaucoup plus réduite) est légèrement plus en hauteur et n'en possède pas. La forêt
est traitée dans sa majeure partie en taillis de chênes ou de châtaigniers sous futaie de chêne sessile (de
nombreux chênes sont plusieurs fois centenaires). Le sol y est très acide, podzolique, plus ou moins
hydromorphe selon les endroits (sol à pseudo-gley). Dans les parties les plus fraiches et à la périphérie
(affleurement de la nappe phréatique) elle a été traitée en taillis de charmes ou de tilleuls sous futaie de chêne
pédonculé: on y trouve des sols bruns, souvent avec gley. Sur les pentes conduisant à la vallée de l'Yerres ou de
la Seine, l'érosion a dégagé les couches successives situées sous le limon des plateaux: meulière de Brie, argiles
vertes, marnes blanches de Pantin, marnes bleues d'Argenteuil, et enfin le calcaire de Champigny. On peut
observer sur l'argile, les marnes ou le calcaire, des rendzines forestières. Cependant, ces derniers types de sols
sont de très faible étendue comparativement aux sols bruns lessivés et surtout aux sols podzoliques. Il existe
également dans la forêt une tourbière bombée très typique, bien qu'asséchée de plus en plus par les bouleaux,
ainsi que des micro-tourbières en formation dans les clairières les plus humides.
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Des prélèvements ont été effectués dans les endroits les plus divers, en forêt et hors-forêt. Cette dernière
catégorie se justifie, si l'on considère un certain nombre de facteurs que l'on suppose, au départ ou au cours de
l'échantillonnage, responsables des variations dans la composition spécifique. Il est donc nécessaire, pour savoir
ce qui revient à l'un et non pas à l'autre, d'une part d'observer des conditions extrêmes, où un seul facteur
prédomine nettement, d'autre part de rechercher toutes les combinaisons possibles de ces facteurs (si elles se
rencontrent dans la région étudiée, évidemment). Quatre facteurs étaient supposés agir sur le groupe étudié:
l'humidité, la lumière, le type de sol et la profondeur. En ce qui concerne l'humidité, les biotopes très humides ne
manquaient pas: il existe plusieurs centaines de mares (permanentes ou temporaires) en forêt de Sénart (c'est la
forêt la plus humide de la région parisienne), tout un réseau de fossés d'assainissement. Par contre en ce qui
concerne les terrains très secs, une partie de la forêt ne possède pas de mares et la nappe phréatique n'y affleure
pratiquement jamais. La lumière agit en forêt dans les clairières, les chemins larges, mais ces endroits sont
toujours de faible étendue et subissent toujours l'influence «protégeante» (à l'égard des vents surtout) de la forêt.
Il a donc fallu échantillonner dans des champs et des prairies situés en bordure de la forêt, afin d'étudier les
conditions extrêmes relativement à l'éclairement. Les types de sols sont très variés en forêt de Sénart, bien que
les sols podzoliques (hydromorphes ou non) soient de loin les plus fréquents. Les sols calcaires forestiers
(rendzines forestières) sont rares. Il a donc fallu les rechercher et leur accorder dans l'échantillonnage une place
démesurée par rapport à leur fréquence réelle.
Chaque prélèvement de faune a été extrait par la méthode de l'entonnoir sec et a abouti à l'établissement
d'un relevé, constitué par les densités de population des diverses espèces qui étaient présentes. Les espèces
présentes dans moins de cinq prélèvements ont été éliminées de l'analyse. De plus, six autres espèces(Podura
aquatica(PAQ),Xenylla xavieri (XXA),Entomobrya nivalis (ENI),olivacea Isotoma  (IOL),Entomobrya
multifasciataet (EMA) Entomobrya lanuginosa (ELA) ont été placées en variables supplémentaires car leur
position très éloignée le long de certains axes perturbait l'analyse.
Le volume des prélèvements n'est pas constant. Les plus petits prélèvements ont été réalisés sur les
troncs d'arbres (mousses, lichens) car ces biotopes abritent des populations d'effectifs très grands. Par contre les
prélèvements réalisés au niveau de l'horizon cendreux des sols podzoliques sont les plus gros, étant donnée la
rareté de la faune à ce niveau. Le type d'analyse utilisé autorise cette souplesse d'échantillonnage car seuls les
profils des relevés sont pris en compte.
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II. METHODE UTILISEE: L'ANALYSE DES CORRESPONDANCES
Cette méthode d'analyse multifactorielle (Benzécriet coll., 1973; Lebart et Fénelon, 1973) est
parfaitement adaptée au traitement d'un ensemble de relevés tels que ceux qui ont été réalisés ici. Elle a été déjà
largement utilisée en biocénotique (Lacoste et Roux, 1971 et 1972; Guille et Ponge, 1975) et même chez les
Collemboles (Bonnet, Cassagnau et Travé, 1975).
Si l'on recherche une représentation géométrique de l'ensemble des données, la plus évidente est de
représenter chaque relevé par un point dans un espace euclidien ayant autant de dimensions que l'on a rencontré
d'espèces au cours de l'échantillonnage, chaque coordonnée étant égale au nombre d'individus de telle ou telle
espèce dans le relevé. L'ensemble des relevés forme un nuage de points dans un espace multidimensionnel. La
structure d'un tel «objet» est extrêmement difficile à analyser étant donnés, d'une part le grand nombre de
dimensions, d'autre part le fait que les relevés comportant peu d'individus vont être systématiquement très
proches les uns des autres (car tous proches de l'origine), les relevés comportant beaucoup d'individus étant au
contraire très éloignés les uns des autres; les considérations relatives aux affinités biocénotiques sont alors
faussées. L'analyse des correspondances a pour but de réduire le nombre de dimensions et de déterminer une
mesure de distance entre relevés qui tienne compte uniquement des proportions relatives des différentes espèces.
La réduction du nombre de dimensions s'opère en recherchant dans le nuage construit avec la mesure de
distance appropriée (distance du chi-carré) un espace s'ajustant au mieux aux directions principales
d'allongement. Les premiers axes, ceux qui extraient la majeure partie de la variance totale et sont donc les plus
«explicatifs», correspondent en général à quelques facteurs interprétables. Les autres correspondent au «bruit de
fond» que l'on se propose d'éliminer. Dans le cas présent, les axes 1, 2, 3, 5, 7 et 9 ont pu être interprétés en
termes de facteurs du milieu (humidité, profondeur, lumière, type de sol, dépôts d'ordures, bois en
décomposition).
L'analyse des correspondances présente la particularité de permettre la représentation simultanée des
espèces et des prélèvements qui leur sont associés. L'interprétation des graphiques se réalise de la manière
suivante: chaque graphique constitue la représentation de l'ensemble des points-relevés et des points-espèces
dans un plan formé par deux axes factoriels issus de l'analyse (les directions générales de ces deux axes sont
figurées au centre du graphique, leur tracé complet ne présentant pas d'intérêt), chaque espèce étant figurée ici
non par un point mais par un code symbolique de trois lettres. Les espèces se trouvent placées au milieu des
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relevés qu'elles caractérisent le plus (c'est-à-dire où elles dominent relativement aux autres espèces). Espèces et
relevés sont d'autant plus éloignés de l'origine qu'ils sont caractéristiques par rapport aux facteurs correspondant
à ce plan. Une espèce proche de l'origine sera donc une espèce ubiquiste (relativement aux facteurs considérés)
et les milieux extrêmes (relevés et espèces) seront très éloignés de l'origine. Il peut arriver qu'une espèce soit
caractéristique à la fois de deux milieux extrêmes qui se trouvent, par le reste de leur composition spécifique,
opposés dans le plan. Dans ce cas, la position de cette espèce sera intermédiaire; cela ne veut pas dire pour autant
qu'elle soit ubiquiste. L'interprétation doit donc être très souple et tenir compte des connaissances relatives au
milieu et à la biologie des espèces (lorsque celle-ci est connue).
III. RESULTATS
A. ETUDE DU PLAN DES AXES 1 ET 2 (HUMIDITE ET PROFONDEUR) (Fig.1):
Ce plan fait apparaitre trois pôles, l'un constitué à la fois par les milieux très humides de bords de
mares, fossés, tourbières, et par les milieux ouverts (champs, prairies, clairières), le second pôle étant constitué
par des biotopes xérophiles éloignés du sol (mousses sur troncs d'arbres, écorce, lichens, mousses et hépatiques
sur rochers), le troisième par les prélèvements les plus profonds effectués dans le sol.
L'axe 1 a été interprété (la nature des prélèvements situés en position intermédiaire le confirme) comme
le facteur humidité, l'axe 2 comme le facteur profondeur. La position des prélèvements effectués en milieu
ouvert (herbes, surface du sol) peut paraitre inattendue. Elle est en effet très surprenante, car on peut penser que
les milieux ouverts sont les plus exposés au dessèchement de l'air ambiant. Cependant il faut tenir compte du fait
qu'il s'agit ici d'une région très humide où la nappe phréatique, bien que fluctuante, n'est jamais très loin de la
surface et que toute déforestation (comme cela a pu être vérifié à la suite d'une coupe rase dans la forêt)
provoque une remontée de la nappe phréatique, due à plusieurs facteurs conjoints: sous l'effet d'une évaporation
intense en surface, remontée de l'eau par capillarité et arrêt de la consommation hydrique par les racines des
arbres. En hiver, dès le mois de décembre, et au printemps jusqu'au mois de mai, la plupart des champs et des
clairières sont très humides, notamment au cours des deux années où l'échantillonnage a été effectué dans ces
terrains (1977 et 1978). Et l'on constate effectivement la présence dans ces milieux d'espèces hygrophiles (on
verra par la suite de quelles espèces il s'agit). Bien que des prélèvements aient été effectués à la période la plus
sèche (été-automne), ils n'ont pas mis en évidence d'espèces xérophiles. Quelques prélèvements effectués au
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cours de l'été torride de 1976, dans un remblai récent au milieu d'une lande à callune, ont cependant mis en
évidence, outre les espèces habituelles de terrains ouverts,Cryptopygus thermophilus1900) (Axelson sensu
Gisin 1960, xérophile, qui a malheureusement du être éliminé de l'analyse car présent seulement dans deux
relevés.
La position des relevés et des espèces de terrains ouverts se trouve donc influencée par cette corrélation,
bien involontaire mais artificielle, entre lumière et humidité. On voit donc quelle importance revêt l'équilibre de
l'échantillonnage et comment une corrélation illogique peut apparaitre lorsque le spectre des biotopes
échantillonnés est trop restreint.
L'axe 2 fait apparaitre une direction d'allongement, vers les valeurs positives de cet axe, correspondant
aux prélèvements de profondeur, avec les espèces caractéristiques suivantes:Mesaphorura italica (MIT),
Megalothorax incertus (MIN),Pseudosinella decipiens (PDE),Mesaphorura sylvatica (MSY),Protaphorura
burmeisteri (PBU),Stenaphorura denisi (SDE),Paratullbergia callipygos (PCA),Folsomides parvus (FPA),
Mesaphorura betschi(MBE),Folsomia candida(FCA) etMesaphorura krausbaueri(MKR).
La direction d'allongement correspondant aux prélèvements les plus éloignés du sol (mousses et lichens
sur troncs d'arbres et rochers, écorce) fait apparaitre les espèces caractéristiques suivantes:Xenylla xavieri
(XXA),Entomobrya albocincta (EAL),Pseudisotoma sensibilis (PSE),Xenylla tullbergi (XTU),Orchesella
cincta(OCI),Vertagopus arboreus(VAR) etXenylla schillei(XSC). Ce type de biotope est à la fois très éloigné
du sol (donc placé du coté des valeurs négatives de l'axe 2) et soumis à la dessiccation (en réalité à des
alternances d'humidification et de dessiccation), d'où sa position du côté des valeurs négatives de l'axe 1.
Un certain nombre d'espèces opèrent la jonction avec le sol proprement dit: il s'agit dePseudachorutes parvulus
(PPA),Allacma fusca(AFU),Friesea mirabilis mirabilis(FMI),Entomobrya muscorum(EMU),Xenylla grisea
(XGR),Lipothrix lubbocki (LLU),Gisinianus flammeolus (GFL),Lepidocyrtus curvicollis (LCU), Friesea
mirabilis claviseta (FCL),Neanura muscorum (NMU),Proisotoma minuta (PMU),Pogonognathellus
longicornis (PLO),Dicyrtomina minuta (DMI),Deuterosminthurus flavus (DFL),Lepidocyrtus lanuginosus
lanuginosus(LLA),Pseudachorutella asigillata(PAS),Heteromurus major(HMA) etAllacma gallica(AGA).
Ces espèces peuplent la litière récente, les branches tombées sur le sol, les mousses et les herbes poussant sur le
sol, dans les endroits secs (le cas des espèces de terrains humides sera étudié plus loin). S'il est possible, comme
on le verra plus loin, de caractériser plus particulièrement le bois tombé ou les souches en décomposition, il n'est
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pas possible de distinguer, d'après la composition spécifique, les mousses, les plantes de la strate herbacée et la
litière fraiche. C'est donc bien le caractère épigé de ces biotopes qui a seul son importance ici.
Les espèces des troncs d'arbres (où il n'est, de même, pas possible de distinguer entre l'écorce nue et les
mousses et lichens sur écorce) se retrouvent, mais en densité bien plus faible, dans les biotopes opérant la
jonction avec le sol. Il était donc nécessaire de faire des prélèvements sur les troncs d'arbres afin de comprendre
le déterminisme de la composition spécifique de la litière, de la strate herbacée et muscinale.
Entomobrya nivalis (ENI) etEntomobrya multifasciata (EMA) ont une position assez particulière.
Entomobrya nivalisse rencontre exclusivement en forêt, en principe sur les troncs d'arbres, mais aussi (ENI)
dans la strate herbacée, même dans les endroits les plus humides (tourbières, bords de mares, fossés), ce qui
explique le décalage de sa position par rapport aux espèces épigées des troncs d'arbres.Entomobrya
multifasciata(EMA), espèce très proche mais dont l'écologie est légèrement différente se rencontre rarement sur
les troncs d'arbres, mais plutôt dans la litière fraiche ou la strate herbacée et muscinale, et elle pullule surtout
dans les milieux ouverts, dans les herbes ou à la surface du sol. C'est une espèce épigée de terrains ouverts donc,
mais également une espèce épigée de forêt, d'où sa position légèrement décalée. C'est également un Collembole
domestique (poussières des maisons). Un point-relevé se trouve placé en dehors des principales directions
d'allongement. Il correspond à l'écorce prélevée sur un arbre fruitier isolé au milieu d'une prairie. Sa position
s'explique car il abriteVertagopus arboreus(VAR) en grand nombre (84 individus), ce qui est normal pour un
tronc d'arbre, mais aussiLepidocyrtus lanuginosus cyaneus(30 individus), espèce de lumière. Bien (LCY)
qu'étant nettement en position épigée sur le graphique (valeurs négatives de l'axe 2), sa position est intermédiaire
entre les troncs d'arbres de la forêt et les milieux ouverts.
En ce qui concerne la dénomination «mousses et lichens sur rochers», il s'agit plutôt de grosses pierres
calcaires (calcaire de Champigny) ou de meulière (meulière de Brie) dégagées lors de travaux anciens
(exploitation ou construction de chemins, fossés, etc.) qui se trouvent placées artificiellement en surface.
B. PLAN DES AXES 1 ET 3 (HUMIDITE ET LUMIERE) (Fig. 2):
L'axe 3 a été interprété comme correspondant au facteur lumière, ou plutôt, si l'on préfère, l'opposition
milieu ouvert-milieu forestier. On voit maintenant les prélèvements aquatiques de forêt (mares, fossés,
tourbières) se séparer nettement des milieux ouverts (herbes, surface du sol). L'analyse met donc en évidence des
espèces de lumière:Entomobrya lanuginosa (ELA),Isotoma olivacea (IOL),Sminthurides assimilis (SAS),
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Sminthurinus aureus elegans(SEL),Entomobrya multifasciata(EMA),Brachystomella parvula(BPA),Isotoma
viridis (IVI), Bourletiella viridescens (BVI),Sminthurus nigromaculatuset (SNI) Lepidocyrtus lanuginosus
cyaneus(LCY). Il est probable que les exigences de ces espèces vis-à-vis de l'humidité sont très diverses, mais
celles-ci se trouvent regroupées car l'échantillonnage a été insuffisant pour traiter précisément ce problème, en
particulier toutes les combinaisons possibles entre humidité et lumière n'ont pu être explorées.
En ce qui concerne les milieux aquatiques ou très humides, deux groupes apparaissent. L'un rassemble
les espèces épigées de la surface des eaux, des bords de mares (litière en surface, plantes aquatiques) ou des
endroits humides:Podura aquatica (PAO),Heterosminthurus insignis (HIN),Sminthurides malmgreni (SMA),
Isotomurus palustris (IPA),Lepidocyrtus lignorum (LLI),Sminthurides schoetti (SSC),Xenylla brevisimilis
(XBR),Orchesella villosa (OVI),Sminthurides parvulus (SPA),Sminthurinus aureus aureuset (SAU)
Dicyrtoma fusca(DFU).
Podura aquatica(PAO) etSminthurides malmgreni(SMA) vivent strictement soit à la surface des eaux
(miroir et plantes flottantes) soit dans la litière saturée accumulée au bord (c'est d'ailleurs dans ce dernier biotope
qu'elles sont les plus abondantes).Heterosminthurus insignis(HIN) vit sur les plantes aquatiques mais au-dessus
de l'eau. Les autres espèces présentent une hygrophilie décroissant dans l'ordre où elles sont citées.Xenylla
brevisimilisse retrouve dans les milieux ouverts (écorce d'un arbre isolé), ce qui explique sa position (XBR)
décalée vers les valeurs négatives de l'axe 3, mais c'est une espèce qui n'a jamais été trouvée en abondance (un
ou deux individus au plus par prélèvement).Isotomurus palustris(IPA) est également présent dans les milieux
ouverts les plus humides, mais c'est en forêt qu'il est le plus abondant.
Un autre groupe de relevés appartenant aux milieux humides apparait, du côté des valeurs positives de
l'axe 3, c'est-à-dire complètement à l'opposé des milieux ouverts. Il s'agit du biotope assez particulier que
constituent les grosses accumulations de matière organique brute en milieu saturé. Cette accumulation peut se
produire dans deux conditions différentes: soit dans les tourbières bombées ou en formation (sphaignes), soit au
fond des mares (litières). Dans ce dernier cas, lorsque le niveau de la mare baisse, cette litière très noire (qui a
subi une fermentation anaérobie) apparait à l'air libre et il s'y installe une faune hygrophile qui est identique à
celle des tourbières à sphaignes. Ceci se produit également dans les fossés. Les espèces correspondantes sont:
Protaphorura lata (PLA),Arrhopalites caecus (ACA),Folsomia quadrioculata quadrioculata (FQU),Friesea
truncata (FTR) etCeratophysella denticulata (CDE).Tomocerus minorest une espèce hygrophile de (TMI)
surface qui se trouve placée à proximité de ce groupe, mais elle est relativement répandue dans tous les biotopes
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humides strictement forestiers, d'où sa position du côté des valeurs positives de l'axe 3. Les espèces de ce groupe
ne sont pas épigées et, sur les bords de mares, lorsque le niveau est bas, on peut passer du groupe précédent
(Podura aquatica(PAO),Heterosminthurus insignis(HIN), etc.) à ce groupe à mesure que l'on s'enfonce dans la
couche de litière noire accumulée. Dans les tourbières, on passe également, si l'on va de la surface (partie verte
des sphaignes) à la profondeur (partie morte saturée en eau) d'une composition spécifique du type du premier
groupe (saufPodura aquaticaet (PAO) Sminthurides malmgreni (SMA), qui nécessitent la présence d'un film
d'eau) à une composition du type du second groupe.
Les relevés correspondant au sol et à ses annexes proches (litière, strate herbacée et muscinale) dans les
endroits les plus secs de la forêt, sont groupés non loin de l'origine mais du côté des valeurs négatives de l'axe 1
(facteur humidité). A ce propos il faut se rendre compte du fait que, au bord des mares en entonnoir très
fréquentes dans cette forêt (mares d'origine glaciaire) on passe très rapidement à une faune «sèche»: dès que l'on
a grimpé sur le talus bordant la mare et que l'on a atteint le niveau du plateau, l'influence de la proximité de la
nappe phréatique ne se fait plus sentir (sauf les années où celle-ci remonte très haut).
Les relevés correspondant aux endroits humides de la forêt (dépressions formées par les deux ruisseaux
qui prennent leur source dans la forêt: ru d'Oly et Madereau, qui ont dégagé la couverture de limon des plateaux
et atteint la meulière de Brie sous-jacente, partie nord-est de la forêt où la nappe phréatique affleure pendant une
grande partie de l'année) sont groupés également près de l'origine, mais du côté des valeurs positives de l'axe 1.
Les sols de champs sont décalés vers les valeurs négatives de l'axe 3 (facteur lumière). Ceci s'explique
par le fait que les espèces épigées de lumière pénètrent parfois profondément dans ces sols qui sont labourés
chaque année, donc très aérés et offrant des possibilités de passage aux animaux de surface; ceux-ci viennent
donc se mêler à la faune de profondeur, perturbant ainsi la place de ces relevés sur le graphique. Ce phénomène
ne se produit pas dans les prairies où le sol est plus tassé.Megalothorax incertus(MIN), espèce strictement de
profondeur, se trouve déplacé au milieu des relevés des sols de champs, c'est-à-dire du côté «lumière». Cela ne
veut pas dire pour autant que cette espèce soit attirée par la lumière! Elle est caractéristique des sols calcaires ou
peu acides en profondeur, mais il s'est avéré qu'elle était particulièrement abondante dans les champs (limons
argileux régulièrement amendés, à pH élevé, entre 7 et 8), peut-être à cause des conditions d'aération
particulièrement bonnes de ces terrains labourés.
On retrouve dans ce plan la direction d'allongement correspondant aux troncs d'arbres et «rochers»,
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mais les espècesEntomobrya nivalis (ENI),Xenylla schilleiet (XSC) Vertagopus arboreusse trouvent (VAR)
décalées du côté «lumière».Entomobrya nivalisest présente, outre sur les troncs d'arbres en forêt, dans (ENI)
certains endroits (bord d'un chemin, petite clairière humide à sphaignes, bord de mare) où une trouée dans le
couvert végétal a favorisé l'apparition d'espèces de lumière, ce qui provoque le déplacement du point-espèce
correspondant. L'explication est la même en ce qui concerne les deux autres espèces citées.
C. PLAN DES AXES 1 ET 5 (HUMIDITE ET TYPE DE SOL) (Fig. 3):
L'axe 4 n'a pas pu être interprété. Le «facteur» correspondant est probablement lié à des corrélations
arbitraires fournies par l'échantillonnage lui-même mais n'ayant pas de signification biologique.
L'axe 5 oppose les sols bruns et rendzines forestières aux sols podzoliques, il correspond donc à un
ensemble de facteurs (pH, type d'humus, activité de la microflore, rapport C/N,etc., voir à ce sujet Bauzon,
Ponge et Dommergues (1974)) parmi lesquels il est difficile de choisir celui ou ceux qui agissent réellement sur
les animaux. Le même problème se pose d'ailleurs en ce qui concerne l'humidité, la profondeur ou la lumière; on
choisit ce qui nous parait le plus significatif, surtout le plus perceptible à nos yeux ou à nos instruments de
mesure, mais il est probable que les espèces hygrophiles, par exemple, le sont pour des raisons différentes: les
unes requièrent un film d'eau (Podura aquatica (PAO) etSminthurides malmgrenid'autres une (SMA)),
hygrométrie suffisamment élevée(Isotomurus palustris(IPA)), d'autres ont des exigences encore différentes. En
ce qui concerne le type de sol, il est probable que les exigences trophiques jouent un rôle important car les
ressources alimentaires (spores, grains de pollen, hyphes mycéliens, matière organique décomposée ou en voie
de décomposition) sont fondamentalement différentes dans les deux types de sols mis en évidence par l'analyse.
Du côté des valeurs positives de l'axe 5 se trouvent les sols podzoliques (il conviendrait en fait de
regrouper dans cette catégorie tous les sols à faible activité biologique, où la litière s'accumule plusieurs années
de suite) avec les espècesWillemia anophthalma(WAN),Protaphorura subarmata(PSU),Pseudosinella mauli
(PMA),Arrhopalites sericus (ASE),Micranurida pygmaea (MPY),Mesaphorura yosii (MYO),Mesaphorura
betschi (MBE),Proisotoma minima (PMI), Mesaphorura macrochaeta (MMA),Friesea mirabilis mirabilis
(FMI),Proisotoma minuta(PMU),Sminthurinus aureus signatus(SSI) etFolsomia candida(FCA).
Du côté des valeurs négatives de l'axe 5 se trouvent les sols à intense activité biologique (sols bruns
eutrophes, rendzines forestières, sols bruns lessivés) avec les espècesTomocerus botanicus (TBO),
Pseudachorutella asigillata (PAS), Onychiurus pseudogranulosus (OPS),Protaphorura burmeisteri (PBU),
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Pseudosinella decipiens(PDE),Bilobella grassei(BGR),Heteromurus nitidus(HNI),Folsomides parvus(FPA),
Stenaphorura denisi (SDE),Mesaphorura sylvatica (MSY),Entomobrya muscorum (EMU),Xenylla grisea
(XGR),Megalothorax incertus (MIN),Dicyrtomina minuta (DMI) etPseudosinella albaLes types de (PAL).
sols qui possèdent le plus grand nombre de ces espèces caractéristiques sont les sols bruns eutrophes et les
rendzines forestières, les sols bruns lessivés possédant une faune moins caractéristique, mais on y trouve
cependant constammentOnychiurus pseudogranulosus (OPS),Pseudosinella alba (PAL),Mesaphorura
sylvaticaet (MSY) Heteromurus nitidus (HNI). D'une manière générale les sols à intense activité biologique
possèdent beaucoup plus d'espèces (mais un moins grand nombre d'individus par espèce) que les sols à faible
activité biologique. Ceci n'est pas surprenant, puisque les sols à intense activité biologique présentent des niches
écologiques (trophiques) plus variées, mais chacune d'entre elles offrant peu de disponibilité: par exemple, dans
un sol podzolique, il y a une accumulation énorme d'hyphes mycéliens (souvent monospécifiques) au niveau de
la couche d'humus brut et de litière, favorisant ainsi la pullulation des quelques rares espèces capables de se
nourrir exclusivement de champignons (Pseudosinella mauli(PMA), par ex.), alors que dans un sol brun tous les
types sont représentés (algues, champignons, levures, bactéries, protozoaires), mais chaque groupe pris isolément
en quantité beaucoup plus faible.
Un second groupe de sols bruns et rendzines forestières apparait, du côté des valeurs positives de l'axe 1
(facteur humidité): il s'agit des sols bruns des endroits frais, principalement au niveau des affleurements de
meulière de Brie, où le lessivage est faible, et dans la partie nord-est de la forêt où le limon, beaucoup plus
argileux et moins épais (d'où la proximité de la nappe phréatique) a rendu également le lessivage impossible. Ce
type de sol est caractérisé par la présence d'espèces hygrophiles telles que celles qui sont situées du côté des
valeurs négatives de l'axe 5 (facteur «type de sol»), mises à partPodura aquatica (PAO),Sminthurides
malmgreniet (SMA) Heterosminthurus insignis (HIN) qui sont spécifiques aux mares. Ces espèces sont
Sminthurides parvulus (SPA),Sminthurinus aureus aureus (SAU),Sminthurides schoetti (SSC),Isotomurus
palustris (IPA),Lepidocyrtus lignorum (LU),Orchesella villosa (OVI),Dicyrtoma fusca (DFU) etTomocerus
minor(TMI). A ces espèces viennent s'ajouter les espèces caractéristiques des sols à intense activité biologique
telles quePseudosinella alba(PAL),Heteromurus nitidus(HNI),Mesaphorura sylvatica(MSY) etOnychiurus
pseudogranulosus(OPS).
Les deux groupes de relevés correspondant aux biotopes très humides (mares, tourbières, etc.) se
trouvent également séparés le long de l'axe 5 comme ils l'étaient le long de l'axe 3. Le groupe des espèces
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épigées présente en effet des affinités avec les espèces des sols bruns humides. Par contre les espèces vivant dans
les tas de feuilles accumulées au bord des mares et dans les tourbières présentent des affinités avec les espèces
des sols podzoliques, notamment celles qui vivent dans l'humus brut (Micranurida pygmaea(MPY) etWillemia
anophtalma(WAN)), les accumulations d'humus brut dans les moliniaies et sur les bords des fossés constituant
un intermédiaire avec les sols podzoliques. D'ailleurs le pH de ces accumulations de matière organique en milieu
humide est relativement acide (autour de 5 en général), et l'activité biologique y est très faible (mauvaise
dégradation de la matière organique).
Les sols de prairie sont des sols bruns, plus ou moins humides. Ils se placent, selon leur degré
d'humidité, dans l'un ou l'autre des groupes de sols bruns de forêt. Mais le cas des sols de champs est un peu à
part. Ils possèdent en général une faune appauvrie. A faible profondeur la faune est du type podzolique
(dominance deMesaphorura macrochaeta (MMA) notamment) et en profondeur du type sol alcalin, avec
Mesaphorura sylvatica (MSY),Mesaphorura italica (MIT),Megalothorax incertus (MIN),Folsomides parvus
(FPA) etPseudosinella decipiens(POE). Ceci peut s'expliquer par le fait que ces sols n'ont rien de comparable
avec les sols argilo-calcaires de même pH (entre 7 et 8) situés en forêt: ils sont labourés chaque année et très
pauvres en humus (que ne remplacent pas les nitrates et les phosphates). L'activité biologique y est donc faible
comparée à celle des sols de même pH situés en forêt, d'où une similitude avec les terrains acides. Par contre, en-
dessous, c'est le facteur «profondeur» qui l'emporte, avec les espèces vivant en profondeur dans les sols alcalins
en général. Ceci n'est qu'une hypothèse. Il se peut également que dans les sols labourés, l'activité biologique soit
plus importante en profondeur qu'en surface (enfouissage de la fumure). La question reste posée.
Les relevés et espèces des terrains ouverts sont situés du côté des sols podzoliques, bien que les sols
correspondant soient en général neutres ou alcalins. Les espèces telles queBiobella grassei(BGR),Onychiurus
pseudogranulosus(OPS),Tomocerus botanicus(TBO) etPseudachorutella asigillata(PAS), caractéristiques de
la surface des sols argilo-calcaires en forêt ne se retrouvent jamais à la surface des sols de terrains ouverts. Seule
Pseudosinella alba(PAL) est tolérante à la lumière. Cette absence d'espèces caractéristiques explique peut-être
la position curieuse des épigées de terrains ouverts.
Du côté des valeurs négatives de l'axe 1 se trouvent les relevés et espèces correspondant aux troncs
d'arbres et rochers. Mais le nuage est dispersé et, le long de l'axe 5,Xenylla schillei(XSC),Entomobrya nivalis
(ENI) etXenylla xavieris'opposent à (XXA) Pseudisotoma sensibilisEn réalité la faune des troncs (PSE).
d'arbres est la même que l'on soit dans la chênaie sessiliflore ou la chênaie-charmaie, que l'on ait prélevé sur un
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