La perfectibilité chez Rousseau
150 pages
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Description

Niveau: Supérieur, Master
Saloua ADLI La perfectibilité chez Rousseau Mémoire de Master 2 présenté dans le cadre du Master « Sciences humaines et sociales » Mention : « Philosophie » Spécialité « Histoire de la philosophie » sous la direction de Madame Sophie ROUX 2006-2007

  • dictionnaire de la langue du xixe siècle

  • perfectionnement

  • naissance au cœur du siècle des lumières

  • perfectibilité

  • perfectibilité prise

  • nature humaine

  • prise de conscience


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Langue Français

Extrait




Saloua ADLI







La perfectibilité chez Rousseau






Mémoire de Master 2 présenté dans le cadre du Master « Sciences humaines et sociales »
Mention : « Philosophie »
Spécialité « Histoire de la philosophie »
sous la direction de Madame Sophie ROUX
2006-2007
Introduction

La perfectibilité semble être un mot commode pour parler des perfectionnements dont
l’homme est à la fois l’objet et le sujet. Elle est le signe de tous les changements survenus
dans l’histoire et de toutes les capacités que l’homme a déployées pour s’élever au-dessus de
sa condition originelle. De ce point de vue, elle ne peut que refléter le succès d’une évolution
historique en perpétuelle ascension, susciter la fierté des hommes qui contribuent à cette
avancée, et celle de ceux qui en bénéficient. Sa naissance au cœur du siècle des Lumières
symbolise d’autant plus la prise de conscience de cette faculté propre à l’homme, en cette ère
où le progrès de l’espèce s’impose comme une réalité intangible. Pourtant Rousseau paraît ne
pas suivre le sens du courant lorsqu’il établit la première définition de la perfectibilité dans le
Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes.
En refusant de voir dans la civilisation qu’il a sous les yeux, l’indice d’une supériorité
indéniable de l’homme actuel, il remet en question les valeurs de la culture et la culture en
elle-même. La perfectibilité, sous sa plume, prend des allures de dénonciation des acquis
historiques, qu’il désigne comme autant d’aliénations de la nature de l’homme. Fallait-il alors
comprendre qu’il est un détracteur des progrès de l’homme, et le défenseur d’un mode de vie
primitif ? De manière plus générale, il revisite le débat nature-culture pour plaider en faveur
d’une nature originelle à conserver. Pourtant la culture n’existe que parce qu’il est possible,
en droit comme en fait, d’ajouter des éléments à une première nature. De ce fait, il est
possible de croire que Rousseau veut protéger la nature humaine contre toutes les altérations
susceptibles de transformer la face de celle-ci au cours des siècles. L’image de la statue de
Glaucos sortie des eaux expose les méfaits du temps, et illustre le projet rousseauiste de
vouloir rétablir le vrai visage de l’homme. Cependant, Rousseau place au sein de la nature
humaine la qualité de perfectibilité et par-là même, il induit qu’il est de la nature humaine de
se perfectionner. Comment comprendre, au vu de ces éléments, le nœud essentiel qui relie la
nature à la culture ?
La perfectibilité n’est pas simplement la manifestation du progrès de l’homme, ni la
preuve qu’il est capable de suppléer la nature en ajoutant à celle-ci tout ce qui contribue au
bonheur de l’espèce humaine. Si elle n’était qu’un porte-parole du progrès, elle ne saurait être
une caractéristique de la nature humaine. Aussi faut-il comprendre que Rousseau se sert de la
perfectibilité pour rejeter les acquis culturels, afin de revaloriser une nature transformée.
Autrement dit, il pense les perfectionnements de l’homme, et l’histoire en général, à l’aune de
ce que devrait être un homme naturel. A travers la question de la culture, la conception que se
2forge Rousseau de la perfectibilité exige de statuer sur la possibilité d’un devenir historique
de l’homme, inscrite dans sa nature même. A cet effet, il semble fondamentalement paradoxal
de renier une culture, pour une nature qui permet la culture. Toutefois, c’est parce qu’il voit
dans la culture un effet de la perfectibilité, qu’il arrive à apprécier la valeur négative de la
civilisation.
En quelque sorte, la perspective rousseauiste de la perfectibilité tend à interroger la
valeur de la culture étant entendu que c’est la nature qui laisse place à la culture. De cette
façon, le rapport entre nature et culture se transpose dans le rapport entre être et devenir. Car
lorsque Rousseau accorde à l’homme la faculté de se perfectionner, il ne pense pas que les
productions de cette faculté doivent être détachées de l’être qui les crée. Bien au contraire, sa
réflexion demande, à certains égards, dans quelle mesure le devenir est constitutif de l’être.
En d’autres termes, Rousseau ne se contente pas d’observer les perfectionnements de l’espèce
humaine, il veut entrer au cœur de la nature de l’homme pour déterminer les sources de ces
perfectionnements. C’est cette enquête généalogique qui va le conduire à la fois vers la
perfectibilité, et à la fois vers la critique des évolutions de l’homme. Il veut ainsi mettre en
évidence une réalité humaine qui ne coïncide pas avec sa nature.
Cette affirmation porte toute l’ambiguïté du propos de Rousseau en ce qu’elle laisse
penser que le devenir de l’homme, quand bien même il est permis par la nature, peut ne pas
être en accord avec la nature. La question du pouvoir de l’homme convoque la nature de la
perfectibilité étant donné que c’est elle qui procure à l’homme, en tant que qualité naturelle,
les moyens de s’écarter de sa nature. Rousseau observe effectivement en la perfectibilité une
virtualité qui se présente comme la condition de possibilité de toutes les transformations de la
nature. Autrement dit, la nature permet la contre-nature. Cependant, l’enjeu de la perfectibilité
consiste à penser un devenir humain culturel qui ne soit pas en contradiction avec la nature.
Rousseau suggère donc, par sa critique virulente de la civilisation, que l’homme doit, non pas
revenir à l’état de nature, mais qu’il doit réaliser sa nature authentique. Cette exhortation
contribue à placer l’être sur le plan du devenir afin de rendre effective une nature humaine
encore virtuelle.
L’idée selon laquelle l’homme actuel n’est pas un homme authentique découle de la
virtualité de la perfectibilité. En effet, celle-ci conditionne un devenir de l’homme mais elle
ne détermine pas la nature de ce devenir. C’est la raison pour laquelle Rousseau peut déclarer
que la société ne donne à voir que des hommes artificiels et imposer à l’homme la nécessité
de devenir ce qu’il est. En définitive, la perfectibilité pose le problème de la destination
humaine, partant du fait que l’homme n’est que parce qu’il devient, et qu’il ne peut pas se
3contenter de devenir s’il veut réaliser sa nature. Il doit savoir ce qu’il doit devenir. Il ne s’agit
donc pas pour Rousseau de se lancer dans une quête du perfectionnement infini mais de
comprendre la destination que la nature a assignée à l’homme.
En définitive, la perfectibilité pose la question de savoir comment l’homme peut
réaliser une nature qui ne se manifeste que par sa propre production, production qui doit tout
de même être en accord avec ce que la nature de l’homme a été de tout temps. En d’autres
termes, il s’agit de comprendre comment une faculté de se perfectionner peut présider à la
réalisation de la nature humaine. Pour ce faire, il convient de préciser les termes du débat qui
oppose Rousseau à son siècle en évaluant précisément la critique qu’il élabore de cette
société, pour voir quelle direction il suggère à l’homme d’emprunter. De surcroît, il est
possible de voir dans l’éducation d’Emile une tentative d’actualiser la perfectibilité de
l’individu. Aussi, en examinant les conditions de cette éducation, se donnent à voir les
moyens d’une actualisation de la perfectibilité. Toutefois, la perfectibilité prise comme faculté
de développer les autres facultés, pose la question de savoir comment une qualité de la nature
humaine peut être à l’origine du développement de facultés. D’autant plus que Rousseau la
fait dépendre des circonstances, ce qui engendre des questionnements sur la possibilité pour
l’homme de s’approprier le projet de son devenir en toute liberté. Ainsi, en vue de
comprendre dans quelle mesure la perfectibilité accorde à l’homme la possibilité de se réaliser
en écrivant son histoire personnelle et naturelle, est-il nécessaire d’en passer par un examen
précis de la création du néologisme, que Rousseau a réalisée sans le savoir.








1. L’apparition de la perfectibilité

4A. Le néologisme

1) La « perfectibilité », le mot

La « perfectibilité » apparaît

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