Habiter la Ville L'exemple de Marseille et de Shanghai
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 Retour au site académique Aix-Marseille Histoire et Géographie   Habiter la Ville L’exemple de Marseille et de Shanghai 
 Véronique Blua Professeure agrégée, Lycée Pierre Mendès-France, Vitrolles Claude Martinaud Professeure agrégée en CPGE, Lycée Thiers, Marseille  Introduction  Pourquoi le thème de la ville ?  Le thème de la ville est central pour la compréhension du monde d’aujourd’hui. Le monde est, en effet, de plus en plus urbanisé. L’ONU estime lapopulation urbaine à 3,4 milliards d’individus en 2008, dépassant pour la première fois le nombre des ruraux. En 2030, le nombre des citadins devrait atteindre les 5 milliards. Certes, le terme générique « ville» recouvre des réalités très différentes d’un pays à l’autre (et ces différences pourront être abordées ultérieurement dans notre présentation). Cependant, il est indéniablefait urbain est une réalité majeure dans nos sociétés.qu’aujourd’hui le  Une définition générale de la ville peut être retenue, au-delà des divergences statistiques. «La ville est avant tout un lieu de concentration d’hommes et de bâtiments sur un espace restreint. » Face à l’étalement urbain qui caractérise de plus en plus le fait urbain contemporain, de nombreuses définitionsretiennent les critères du nombre d’habitants agglomérés (2000 habitants dont les habitations sont distantes de moins de 200 mètres, par exemple pour la France). Mais la ville se caractérise aussi par sa morphologie, le tissu urbain (l’agencement en quartiers), par des fonctions spécifiques.1  Pourquoi avoir choisi les villes de Marseille et de Shanghai ? Le nouveau programme, de la classe de sixième préconise, de choisir deux villes dans des aires culturelles différentes. D’une manière générale, l’ambition de faire découvrir aux élèves la diversité du monde. est Dès lors, s’intéresser à Marseille permet d’appréhender une ville occidentale, une métropole de taille moyenne, dont l’étude peut aussi être conduite dans le cadre de la séquence « Espace proche : paysages et territoire » ou « Habiter les littoraux ». Par ailleurs, étudier Marseille permet de renforcer la connaissance que les élèves ont de la géographie de la France. Quant à Shanghai, elle est la première ville de Chine avec 12,4 millions d’habitants, le premier port et le premier centre industriel du pays. Les deux, enfin, sont dans une dynamique d’internationalisation, telle qu’étudiée par Isabelle Berry-Chikhaoui2 et qui se traduit par les choix et les orientations prises par les acteurs locaux.  Mise au point épistémologique sur la notion d’habiter  Le détour parl’étymologie d’«habiter »n’est pas sans présenter quelque intérêt pour la compréhension de la notion. Le verbe « habiter » est emprunté au latinhabitare« avoir souvent » qui a donné habitude, mais qui veut dire aussi demeurer ou rester. Depuis le XIe siècle, habiter indique le fait de rester quelque part, d’occuper une demeure. Au XVe siècle,                                                  1Pascal Baud, Serge Bourgeat, Catherine Bras,Dictionnaire de géographie, Paris, Hatier Initial, 2008, p.565-568. 2Isabelle Berry-Chikhaoui,Les citadins face aux enjeux d’internationalisation de la ville. Casablanca et Marseille : où est le Nord, où est le Sud ?de sciences sociales au Sud, Paris, Armand Colin,, Autrepart. Revue IRD Editions, mars 2007, n°4553. Et Isabelle Berry-Chikhaoui, Agnès Deboulet et Laurence Roulleau-berger (sld),Villes internationales. Entre tensions et réactions des habitants, Paris, La Découverte, 2007. Voir lintroduction. 
le terme s’enrichit d’une nouvelle signification: « habiter un pays» c’est le peupler. En 1694, la première édition duDictionnaire de l’Académie françaisesemble fixer définitivement le sens d’habiter: «faire sa demeure, faire son séjour en un lieu. Habiter un lieu». Les prémices de la notion d’habiter  Dans la géographie classique, pourAlbert Demangeonou Brunhes Jean, habiter renvoie à l’habitat, « arrangement des habitations dans un espace donnéensemble et »3, et à l’habitation, c’est-à-dire à la description des formes des maisons, non sans rapport avec le milieu physique. Cette approche a donné lieu à la production de nombreuses monographies jusqu’aux années 1950, portant notamment sur l’habitat rural. Après la Seconde Guerre mondiale,Maurice Le Lannoupropose une nouvelle définition de la géographie qui serait «la science de l’homme Pour lui, habiter-habitant ». renvoie à la «la connaissance sans cesse plus affinée des multiples relations entre les hommes et les lieux où ils vivent». Car «habiter, c’est vivre sur un morceau de la planète, en tirer de quoi satisfaire les besoins élémentaires de l’existence […]». «Habiter signifie[donc] à la fois demeurer, posséder, construire et vivre en symbiose avec un espace concret. »4 L’homme habitant s’oppose alors à l’homme producteur, cher aux géographes marxisants tel Pierre George. Point en effet, derrière cette approche, la figure du paysan sédentaire et une certaine nostalgie ruraliste qui dénonce l’essor de la technologie, l’urbanisation et la mobilité qui caractérisent la modernité d’après-guerre.  D’autres auteurs pensent cette modernité. Ainsi,George-Hubert Radkowskifait évoluer la notion d’« habiter » car«il saisit qu’une relation nouvelle à l’espace, post ,eriatnedés-appuyée sur la mobilité, est en passe d’émerger»5.Henri Lefebvre, dès 1947, dans son travail sur la vie quotidienne, formule une problématique reprise dans les années 1960 par Henry Raymond. Il entend «examiner la conscience habitante et les pratiques spatiales des résidents des pavillons.»6 Les travaux de H. Lefebvre, en insistant sur la nécessaire compréhension des logiques habitantes et de leurs effets temporels, sociaux, idéologiques et spatiaux, ont annoncé un renouvellement des recherches sur l’habitant. « Que veulent les êtres humains, par essence êtres sociaux, dans l’habiter? Ils veulent un espace souple, appropriable, aussi bien à l’échelle de la vie privée qu’à celle de la vie publique, de l’agglomération et du paysage. Une telle appropriation fait partie de l’espace social comme du temps social. »7    Les philosophes et l’« habiter »    Certains philosophes ont également enrichi la notion d’habiter. SelonMartin Heidegger, habiter n’est pas simplement construire, car l’habitation réfléchit essentiellement « la façon dont tu es, la manière dont nous autres hommes sommes sur la terre». Pour Heidegger, habiter est une activité primordiale, constitutive de l’être humain. Dès lors, c’est tout le cadre des relations entre l’homme et l’espace qui se construit sur la prééminence de l’être-là, le Dasein, différent de l’existence qui en serait en quelque sortela manifestation. La notion d’habiter s’impose ainsi comme centre de la réflexion; Heidegger distingue radicalement « habiter» (trait fondamental de l’être) et « (simple acte fonctionnel) »se loger8.Pierre Bourdieu a montré comment l’habiter s’avère une compétence acquise culturellement et insérée dans des habitus.Michel De Certeau, quant à lui, montre l’importance de prendre en compte les habitants dans la diversité de leurs usages, que ceux-ci soient langagiers ou
                                                 3Roger Brunet, Robert Ferras, Hervé Théry,Les mots de la géographie. Dictionnaire critique, Reclus. La Documentation française, 1992. 4Michel Sivignon, « Du verbe "habiter" et de son amère actualité »,Revue de géographie de Lyon, vol.68 4/93. 5Michel Lussault, dansHabiter, le propre de l’humainsous la direction de Thierry Paquot, Michel Lussault et Chris Younès,, Paris, La Découverte, 2007, p.40. 6Idem 7Henri Lefebvre cité par Michel Lussault, ibid., p.41. 8M. Lussault, idid.
non.9 pratiques habitantes ont un caractère foisonnant et « Lescréent sur le même espace urbain une multitude de combinaisons possibles entre les lieux anciens et les situations 10 nouvelles. »  Les géographes influencés par la phénoménologie S’inspirant d’Heidegger, des géographes français ont, aujourd’hui, une approche phénoménologique de la notion d’ «habiter ». «La démarche phénoménologique part de la description des "phénomènes" (manifestations mentales de ce qui est présent à la conscience, conscience toujours intentionnelle de quelque chose […])»11 en extraire pour une essence, une idée pure. C’est un humanisme qui s’efforce d’expliquer la nature des liens que tout individu noue avec son environnement « naturel » et humain.  Éric Dardelest un précurseur, dès 1952, de ce courant géographique. Pour lui, «la -géographie phénoménologique prend en compte les relations existentielles de l’homme et de la Terre. Celles-ci définissent une "gtécihiapgréo" : "noitpircsni" primitive, présociale et affective "du terrestre dans l’humain et de l’homme sur la Terre".ainsi pour former un monde géographique quiSujets et objets s’interpénètrent n’est accessible que par l’expérience vécue12 question posée est celle de La «l’humanisation des milieux biophysiques par l’habiter et la manière dont les hommes confèrent du sens, par et pour ce processus, à la Terre et à la natureque cette humanisation construit en tant que dimension de la société puisque la nature est un artefact humain.»13  -La réflexion d’Augustin Berque porte sur l’écoumène qu’il définitcomme la «relation de l’humanité à l’étendue terrestre partie» et non pas simplement comme la « habitée de la Terre ». Selon lui, «l’écoumène, c’est la Terre en tant que nous l’habitons. Plus encore: en tant que lieu de notre être. »14 -Selon André-Frédéric Hoyaux,«habiter pour l’être-là, c’est donc se construire à  l’intérieur d’un monde par la construction même de celui-ci. » Pour lui, «il est nécessaire de penser l’individu comme l’acteur d’une partie au moins de sa réalité géographique,  celle deson monde dont il s’entoure  par la construction territoriale qu’il opèredans le Monde qui l’entoure, mais aussi comme l’acteur de sa réalisation en tant qu’être qui fait sens. »15 L’espace habitéest un espace multidimensionnel qui intègre donc les mobilités qui sont la marque de la modernité.  Habiter et géographie des représentations  PourFlorent Hérouardd’habiter doit être considérée comme la version, la notion modernisée de l’espace vécu d’Armand Frémont devant permettre au géographe de prendre en compte les perceptions et les représentations de l’espace, mais une notion débarrassée de ses scories psychologisantes16.L’espace vécu consiste en l’espace de vie des hommes                                                  9Ibid.  10De Certeau cité par M. Lussault, idid., p.43.Michel  11Jacq es Lévy et Michel Lussault (sld),Dictionnaire de la géographie et de l’espace des sociétés,Paris, Belin,  u 2003. 12Ibid . 13M. Lussault, ibid. 14 Augustin Berque dansHabiter, le propre de l’humainde Thierry Paquot, Michel Lussault et, sous la direction Chris Younès, Paris, La Découverte, 2007, p.54. 15André-Frédéric Hoyaux,Entre construction territorialeet constitution ontologique de l’habitant: Introduction épistémologique aux apports de la phénoménologie au concept d’habiter, inCybergeo, article 216, mis en ligne le 29 mai 2002, modifié le 02 mai 2007.URL :http://www.cybergeo.eu/index1824.html 16Florent Hérouard, « Habiter et espace vécu: une approche transversale pour une géographie de l’habité», dans Michel Lussault, dansHabiter, le propre de l’humain, sous la direction de Thierry Paquot, Michel Lussault et Chris Younès, Paris, La Découverte, 2007
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