Balade dans les bois
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Description

Balade dans les bois J’étais parti dans les bois traquer le sublime. Je cherchais un ton pour mon vers et quelque lustre Pour ma rime. Je quêtais le beau magnanime Pour plaire à l’amante, pour éclairer le rustre. Je voulais dire l’oiseau, son chant, la verdure ; Entendre l’arbre me dire ce que le vent Rapporte de ses repaires lointains. Plus pure Que l’angélique, j’imaginais sous l’auvent, A l’heure où la brise du jour dit l’ineffable, La femme qui rend moins pesants les quotidiens De l’homme soupirant après le désirable. Il n’y eut que la femme qui fût. Les lointains Ne rendaient plus le doux souvenir de la rose ; L’enfant errait étique par des rues sans cœur. L’heur s’annonçait mauvais, le temps plus que morose ; L’arbre s’éteignait, l’oiseau emportait le chœur. Je cherchais un peu de relief à la pâleur. Je parcourais des sentiers quêtant le silence, Le mot juste pour consoler la femme en pleur, Un sens à chaque chose, un remède à l’errance. Je continuais mon chemin par la montagne. La ville me renvoyait le râle du prince Déchu : guerrier pitoyable perdant sa hargne. Je fuyais la putréfaction de Port-au-Prince. Sur mon chemin je voyais des arbres poussifs, Restant d’une verdure longtemps décadente, Qui demandaient la sève, genre dépressifs, A la terre ravagée de pluie débordante. La clémence du soleil datait de jadis, La floraison n’eut gardé la moindre corolle ; La femme ne trouvait plus de pain pour son fils ; Le survivant, proie d’une cavalcade folle.

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Publié le 13 décembre 2012
Nombre de lectures 47
Langue Français

Extrait

Balade dans les bois
J’étais parti dans les bois traquer le sublime. Je cherchais un ton pour mon vers et quelque lustre Pour ma rime. Je quêtais le beau magnanime Pour plaire à l’amante, pour éclairer le rustre.
Je voulais dire l’oiseau, son chant, la verdure ; Entendre l’arbre me dire ce que le vent Rapporte de ses repaires lointains. Plus pure Que l’angélique, j’imaginais sous l’auvent,
A l’heure où la brise du jour dit l’ineffable, La femme qui rend moins pesants les quotidiens De l’homme soupirant après le désirable. Il n’y eut que la femme qui fût. Les lointains
Ne rendaient plus le doux souvenir de la rose ; L’enfant errait étique par des rues sans cœur. L’heur s’annonçait mauvais, le temps plus que morose ; L’arbre s’éteignait, l’oiseau emportait le chœur.
Je cherchais un peu de relief à la pâleur. Je parcourais des sentiers quêtant le silence, Le mot juste pour consoler la femme en pleur, Un sens à chaque chose, un remède à l’errance.
Je continuais mon chemin par la montagne. La ville me renvoyait le râle du prince Déchu : guerrier pitoyable perdant sa hargne. Je fuyais la putréfaction de Port-au-Prince.
Sur mon chemin je voyais des arbres poussifs, Restant d’une verdure longtemps décadente, Qui demandaient la sève, genre dépressifs, A la terre ravagée de pluie débordante.
La clémence du soleil datait de jadis, La floraison n’eut gardé la moindre corolle ; La femme ne trouvait plus de pain pour son fils ; Le survivant, proie d’une cavalcade folle.
Je voulais faire le vers qui revivifie. J’ai demandé à la montagne de me dire La poésie qui rendrait son sens à la vie, Qui rendrait à l’homme la vigueur pour produire.
« Ote-toi de mon chemin homme puéril»,  Me disait-elle d’un air apocalyptique, « Depuis quand n’aimais-tu pas le plaisir du vil ? Vois, j’ai déjà perdu mon arbre poétique ». Je m’en allais honteux à travers les sentiers. J’y baladais ma peine en craignant cette muse Qui me ferait part du chant des mornes pillés, De la source asséchée et de la faim qui use.
Fallait-il un chantre pour dire le cyclone Dévastateur, les ouragans ravageurs dans Leur fureur inhumaine ou la fin qui résonne A l’horloge infatigable des mauvais temps ?
Fallait-il, pour célébrer la sublimité Macabre du sadisme implacable des hommes, Etre poète ou quelque personnalité Autre qui n’aime que le bonheur des bonshommes ?
Je ne voulais pas dire le dessalinien Sanguinaire qui n’épargne ni femme ni Enfant, je voulais plutôt êtremusicien Des chants du peuple fraternel, fier et uni.
Les hommes de mon temps ont ignoré le beau. L’ordre fut cloîtré et la lettre se fit luxe Aux collèges d’élites ; survint le fléau De la corruption ; clash : tout espoir se luxe.
Il me restait donc peu de beauté à chanter. Ma poésie, je la voulais sans aucune ombre. Il fallait trouver les mots justes à jouxter Pour qu’aucune rime ne restât en pénombre.
Mais la beauté semblait se perdre aux profondeurs Incommensurables des abimes-flous-noirs. La passion ne pouvait tenir aux froideurs Des azurs anxieux, aux parfums des mouroirs.
Me hantait la certitude du sort dernier, Chaque pas m’y conduisit d’une sureté Effroyable. Pourvu d’ostensible denier, Tel craignait encor l’évidente éternité.
Dès lors j’ai vu l’incontournable finitude De toute humanité, le creux du vain paraître, L’autorité du suprême et sa rectitude, L’égo du pécheur et son rêve de bien-être.
Alors j’ai libéré ma passion d’extrêmes Eblouissements: des femmes parées de rares Préciosités, des enfants trop heureux, mêmes Qu’au paradis; d’érudits réprimant barbares.
J’ai forcé le coffre de toutes connaissances Humaines, répandu voyelles et consonnes Aux confins fertiles des diverses enfances ; J’ai donné sciences au pensant de toutes zones.
Après avoir pillé le grenier des pourvus, J’annonçais bombance aux affamés séculaires ; J’ai mis fin à la vénalité des pansus, Crié l’avènement d’intérêts populaires.
La nature libérait de folles verdures. Les oiseaux revinrent leur chant retissant. Heureux, j’ai dit l’horizon recouvrant parures, Joie, nation naissante et peuple renaissant.
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