Linda Moreno, "Le patient zéro"
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Description

Un hareng sort de prison après trois ans de détention et s’effondre brusquement devant la porte d’une agence de l’emploi.
Transporté en urgence à l’hôpital, on découvre qu’il est atteint d’une fièvre inconnue transmise par une chauve-souris. C’est ainsi que Carlos Gonzalez Mata fut répertorié comme le « patient zéro » d’une terrible maladie non identifiée…

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Publié le 06 mai 2015
Nombre de lectures 4 528
Licence : Tous droits réservés
Langue Français

Extrait

1
J.-L. BOULBRIA présente : Linda Moreno Le patient zéro « Le sang est plus doux que le miel. » (Salvador Dali) MMXV 2
ZÉRO  Assis au fond du bus, Carlos Gonzalez Mata regardait le paysage désolant qui défilait autour de lui. Les quartiers populaires de San Pedro, en bordure du Los Angeles Harbor. Soudain, il se leva et se dirigea d’un pas mal assuré jusqu’à l’avant et adressa la parole au chauffeur, ce qui était strictement interdit par le règlement, comme le rappelait opportunément un panneau fixé au-dessus du pare-brise. C’est encore loin Margarita Station? ─ Ah! Vous allez à l’Agence de l’Emploi? réagit aussitôt le chauffeur du bus. ─ Comment vous avez deviné? ─ Tous les gens qui descendent à cet arrêt vont à l’Agence de l’Emploi!  Carlosretourna s’asseoir à sa place, au fond du bus.C’était un petit proxénète sans envergure, qui sortait tout juste de taule. Petit, malingre, le visage terreux, l’œil éteint, la voix grinçante, il n’avait en rien l’apparence d’un caïd. Il faisait travailler quelques filles sur Wilshire Boulevard, du côté de Fairfax. Les affaires marchaient plutôt bien… jusqu’au jour où une de ces salopes l’avait balancé aux flics… et il avait plongé pour trois ans. ─ Tenez, vous êtes arrivé ! fit le traminot en stoppant son bus àl’arrêtdemandé. ─ Merci mon pote, lança Carlos.Et bonne journée ! ─ Bonne journée à vous! renvoya le chauffeur en ouvrant la porte.  Carlos descendit du bus et se retrouva sans transition sur le trottoir… Un comble pour un maquereau! Il chercha des yeux l’Agence pour l’Emploi. Elle était droit devant, juste à côté d’un estaminet d’où s’échappait une odeur de frichti.
3
Il se dirigea vers l’entrée du job-center de cette démarche caractéristique des proxos, qui consiste en un déhanchement léger, signe de décontraction, accompagné d’un roulement d’épaule caractéristique d’une incontestable force virile. Tout en marchant, il ruminait sa rage. Parce que la pute qui l’avait balancélui avait dérobé son magot pendant qu’il était en taule… Avec ce pognon, il avait largement de quoi finir ses jours pépère à Acapulco, les doigts de pied en éventail au bord de la piscine d’un palace… Maintenant, il en était réduit à pointer au chômage… La honte.Si le Diable existait, il aurait le visage de Linda Moreno. Cette salopede Linda…Pendant trois ans, au fond de sa cellule, il avait ruminé sa vengeance… Il gravit péniblement les trois marches du perron qui conduisait à la porte d’entrée du job-center.  Parvenu devant la porte, Carlos saisit son image dans la vitre en miroir. Il avait pris un sacré coup de vieux en prison. Il avait le cheveu terne, le regard éteint, le visage livide.  Il avança la main pour saisir la poignée de la porte.  Alors, il ressentit un malaise.  Il avait chaud. Très chaud.Trop chaud… Il était en nage. Il avait la tête qui tournait.  Sa vue se troublait.  Il éprouva une violente douleur dans la nuque. Le soleil… les rayons du soleil martelaient son crâne. Un bruit lancinant lui vrillait la tête… Il porta les mains à ses oreilles. C’était comme si on lui perçait les tympans…C’était atroce! Insoutenable…Alors, il eut la sensation d’être aspiré par un tourbillon.Ses jambes flageolaient… Il vacilla etperdit l’équilibre.L’instant d’après, il s’écroulaitdevant la porte.
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CHAPITRE FIRST Le serveur en veste blanche déposa solennellement devant Linda une croustillante pizza à la mozzarella et lui souhaita « Bon appétit, mademoiselle » sur un ton exquis.  Linda eutà peine le temps d’entamersapizza qu’une voix masculine l’interpella: Miss Moreno ?  Elle leva les yeux. Un mec vêtu d’uncostume sombre se tenait devant elle. Pas vraiment beau gosse, mais consommable. Que puis-je pour vous ? demanda-t-elle. Brian Holden, F.B.I. !déclara l’homme entirant une chaise et en s’essayant en face d’elle.Vous pensez que je conspire contre le gouvernement ? Vous connaissez monsieur Carlos Gonzalez Mata ? Je ne vois pas du tout quiest ce monsieur…ni pourquoije devrais le connaître…─ D’après nos informations,Carlos Gonzalez Mata était votre souteneur… Linda ressentit une brusque poussée d’adrénaline: ─ Qu’est-ce que vous insinuez ? Que vous êtes une prostituée et que Carlos Gonzalez Mata était votre souteneur! asséna l’agent du FBI.Quittez cette table immédiatement ou je vous gifle devant tout le monde ! murmura Linda en laissant traîner son regard sur les clients du restaurant. ─ Vous n’oseriez pas… répondit leflic d’un air suave.─ Tiens, je vais me gêner… renvoya Linda.Je ne vous conseille pas de passer à l’acte, sinon je vous mets en état d’arrestation! grommela Holden.
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─ Okay… fit Linda en se rétractant. Qu’est-ce que vous voulez savoir sur ce vieux hareng ? Vous reconnaissez que monsieur Carlos Gonzalez Mataétait votre souteneur… Linda décida de se mettre à table. Ouais, bien sûr que je le connaissais, cet enfoiré, mais ce n’était pas mon «comme vous dites.souteneur », Simplement, je bossais dans son secteur et je lui refilais un peu de tune pour qu’il me foute la paix! Nos relations se limitaient à ça! Et rien d’autre! ─ Jusqu’au jour où vous l’avez balancé! Merde !s’écria Linda.Pourquoi vous me parlez de ça ? C’estde l’histoire ancienne !C’estcomme le trottoir, c’est terminé ! Maintenant, je travaille avec ça !  Elle exhiba son Smartphone sous les yeux du flic. Comme ça,j’ai plus d’embrouilles avec les macs…ni avec les flics ! L’agentHoldenne releva pas l’insolence du propos et préféra aller droit au but. Carlos Gonzalez Matavient tout juste d’être libéré après trois ans de détention au pénitencier d’Etat! Et alors ? fit Linda. Il veut me faire la peau ? L’agentHolden fut médusé par son aplomb. ─ Il n’en a pas exprimé publiquement l’intention…?Alors, pourquoi vous me broutez avec vos histoires Vous êtes mon ange gardien ? Monsieur Gonzalez Mataest atteint d’une maladie inconnue, déclara l’agentHolden sur un ton solennel. ─ Je m’en fous! répliqua Linda. Je n’ai jamais baisé avec lui ! Cette ordure se contentait de me taper du fric pour que je puisse travailler dans son secteur ! Vous voulez en plus que je baise avec lui ! Et entre nous, il était laid comme un pou et il bandait mou !
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─ Hum, fit l’agentHolden en se raclant la gorge. Nous recherchons toutes les personnes qui ont été en contact avec monsieur Gonzalez Mataau cours des cinq dernières années… Il est atteint d’une maladie contagieuse dont l’incubation est très longue et peut durer au moins cinq ans ! Quel enfoiré, ce mec-là ! soupira Linda. Je me disais bien qu’il avait une gueule de crevard! * * *  En prenant son service, Ramona Sanchez croisa le professeur Benson, qui sortait du vestiaire du personnel soignant du Memorial Hospital de Long Beach. Bonjour, Ramona… lança le professeur, visiblement émoustillé.On dirait que les petits matins sont difficiles…Tu veux un rapport détaillé sur ma nuit, toubib ? Est-ce que je te demande ce que tu as fait avec Mélanie ? Avec Mélanie, c’est fini… réponditBenson avec un air absent. Eh bien, bonne journée… Il tourna les yeux et s’en alla sansdemander son reste.  Ramonale regarda s’éloigner en direction de la machine à café. Elle était satisfaite de lui avoir cloué le bec. Benson faisait partie de ces patrons qui croyaient avoir un droit de cuissage sur leurs subordonnées, surtout lorsqu’elles appartenaient à des minorités ethniques comme Ramona.  Benson rêvaitde l’inscrire à son tableau de chasse de mâle dominant, mais Ramona se refusait obstinément à lui, d’autant qu’elle avait un penchant secret pour les filles… Elles’engouffra dans le vestiaire et ouvrit son casier pour se changer.  Le docteur Judith Kramer entra dans le vestiaire. Salut, beauté ! lança-t-elle en commençant à se déshabiller pour se changer.
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 Elle ôta son chemisier de soie et fit glisser son pantalon très féminin le long de ses jambes au galbe parfait. Elle s’empara du dossier médical du patientCarlos Gonzalez Mata, surnommé le « patient zéro ». Benson lui a administré du zedma Shit ! ! ça signifie que ce type souffre comme un damné !  Le docteur Kramers’immobilisa, très belle en slip et soutien-gorge, et ajouta : Cette maladie résiste à tous les antibiotiques ! Mieux, Bensonestime qu’elle commence à s’en nourrir! ─ C’est idiot, estimaRamona. Comme tout ce que peut dire cet abruti de BensonJudith s’appliqua une touche de rouge à lèvre. Elle draguait honteusement le professeur Benson, qui affectait de l’ignorer… ce qui la mettait en rage! Bon, tu viens ? dit-elle en enfilant sa blouse. Prends ton masque et tes gants, c’est l’heure de la toilette intime! On y va, confirma Ramona sans enthousiasme. Depuis qu’il avait été admis à l’hôpital, le corps de Carlos Gonzalez Matas’était couvert de pustules. Des pustules contenant une substance onctueuse et verdâtre. Mais le pire, c’était la diarrhée. Ce patient partait en diarrhée… Une diarrhée rouge, sanglante, purulente… Comme s’il se vidaitde sa substancepar le fondement… Alors, on lui avait installé une sonde dans le rectum, sondereliée à ce qu’on appelle unpistolet dans le jargon médical, pour recevoir ses selles hautement contagieuses… Carlos Gonzalez Mata sortait de prison lorsque cette maladie s’était déclarée.Par précaution, tous les détenus incarcérés dans le même bloc que lui et l’ensemble du personnel pénitentiaire avaient été mis en quarantaine.
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 Au cours de sa détention, Carlos Gonzalez Mata avait été placé en cellule individuelle pour des raisons disciplinaires, ce qui avait certainementpermis d’éviter lacontagion directe.  En arrivant au seuil de la chambre stérile où Carlos Gonzalez Mata était en quarantaine, le docteur Kramer et la jeune Ramona Sanchez trouvèrent une drôle de fille.  Une fille aux cheveux gris vêtue de noir comme une Grimaldi en grand deuil. Elle portait un corsage de guipure noire, une jupe de satin noir assez courte, des bas noirs et des escarpins noirs. Sa tenue contrastait avec la pâleur de son visage hâve aux lèvres violettes. Un visage aux traits émaciés où luisaient deux grands yeux noirs surmontés de sourcils en accent circonflexe.  Elle tenait dans ses mains un superbe bouquet de roses. Des roses rouges comme l’amour.─ Les visites sont interdites, Miss, déclara Judith Kramer. ─ Je m’appelle Linda Moreno, répondit la fille. Je voudrais offrir des fleurs à Monsieur Gonzalez Mata─ C’est bien la première fois que ce malade reçoit de la visite, observa Ramona. Vous êtes de sa famille ? ─ Disons que c’est mon parrain, fit Linda. Etrange…Le docteur Judith Kramer savait que ce patient hors du communétait un ancien taulard admis à l’hôpital quelques jours après sa libération. D’après le dossier transmis par l’administration pénitentiaire, il avait été condamné à trois ans de placard pour proxénétisme.Elle estima donc que c’était une ancienne prostituée qui lui rendait visite. Quelle délicate attention, susurra-t-elle. Mais nous ne pouvons pas vous laisser approcher de ce malade…Pourquoi ? demanda Linda. Il est en quarantaine, répondit la toubib. Ce patient est atteint d’une maladie inconnue qui résiste à tous les traitements et qui est de surcroît extrêmement contagieuse !
9
 A travers une vitre, Linda aperçut Carlos Gonzalez Mata étendu sur un lit, le corps lardé de perfusions. Elle songea que si la déchéance totale avait un visage, ce serait celui-là…─ Mais qui va lui offrirles fleurs que je lui ai apportées ? s’inquiéta Linda.─ Je vais m’en charger,déclara Ramona.  Linda posa son regard sur cette petite brune à la peau mate qui arborait sous sa blouse blanche une poitrine opulente et des fesses rebondies. Vous feriez ça, mademoiselle ? minauda-t-elle. Je vous le promets ! répondit Ramona. Vous êtes adorable, mon chou ! gloussa Linda.  Elle tendit le bouquet de roses à la jeune aide-soignante. ─ N’oubliez pas de lui direque c’est de la part de Linda…─ Linda… comment? demanda Ramona. Linda Moreno ! susurra Linda. Tenez voilà ma carte !  Elle tira de son élégant sac à main en python une carte de visite qu’elle glissa dans le bouquet de roses.─ N’hésitez pas à m’appeler!J’ai mes entrées dans les restaurants les plus chics de Los Angeles !  Sur ce, elle tourna les talons ets’éloigna en direction de la batterie d’ascenseur, laissant dans son sillage une traînée de patchouli. Les talons de ses escarpins résonnaient sur le carrelage en damier du couloir comme les sabots d’un chevalsur les pavés d’une ruelle de l’ancien temps.La cavalcade de l’Apocalypse…─ On dirait que tu as fait une touche… murmura Judith en pénétrant dans le sas qui permettait d’accéderà la chambre stérile où était confiné le « patient zéro ». Jalouse !! répliqua sèchement Ramona. Très peu pour moi, je te la laisse !D’ailleurs, je préfère les mecs ! Les plans gouines, ce n’est pas ma tasse de thé!
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CHAPITRE SECOND  Une réunion à huis-clos se tenait dans une salle réservée aux séminaires. Les murs de la salle étaient lambrissés de panneaux en acajou qui en assuraient l’insonorisation.  Dans une pénombre sépulcrale, le professeur Benson faisait face aux bureaucrates desCenters for Disease Control and Prevention,l’organisme fédéral basé à Atlanta chargé de détecter les maladies infectieuses sur le territoire des USA. ─ Nous avons vérifié…Carlos Gonzalez Matan’est jamais allé en Afrique ; il partageait sa vie entre les Etats-Unis et le Mexique. Parmi les personnes qui ont été en contact avec lui,aucune n’a séjourné suffisamment longtemps dans un pays tropical pour ycontracter une maladie endémique…Vous parlez de « pays tropical » et pas seulement africain…le docteur Gilbert. Faut-il comprendre que releva cette maladie pourrait venir d’une autre partie du monde? ─ Dans l’état actuel, nous ne savons rien de l’origine de cette maladie… réponditBenson. Rien ne prouve qu’ellesoit originaire d’Afrique.Alors, il faudrait élargir le spectre des recherches à toute la zone intertropicale ? intervint le docteur Maxwell. ─ Le problème, c’est qu’on n’a pas identifié l’hôte de cette maladie…répondit Benson.Pour l’heure, nous avons étudié sans succès plusieurs espèces de chauves-souris…Pourrait-on envisager qu’un virus d’un type nouveau soit apparu par mutation sur le territoire des Etats-Unis ? Cette hypothèse n’est pas recevable… trancha le docteur Gilbert. Ce virus présente toutes les caractéristiques d’une affection tropicale et à l’exception d’Hawaï, aucune partie du territoire national n’est situéesous les tropiques !
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