Commentaire dirigé + correction Le Dormeur du Val
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Commentaire dirigé Le dormeur du val C'est un trou de verdure où chante une rivière, 1 Accrochant follement aux herbes des haillons D'argent ; où le soleil, de la montagne fière, Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons. Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, 2 Et la nuque baignant dans le frais cresson bleu, Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue, Pâle dans son lit vert où la lumière pleut. 3 Les pieds dans les glaïeuls , il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid. Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine, Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit. Arthur Rimbaud (1870) COMPRÉHENSION 1° Relevez et analysez le champ lexical du sommeil. 2° Repérez et commentez le jeu des sensations. 3° Analysez la progression du poème. En quoi le dernier vers représente-t-il une surprise qui nous invite à une relecture ? INTERPRÉTATION 1° Quel est le rôle de la nature dans ce poème ? 2° Que dénonce ce poème ? EXPRESSION PERSONNELLE Rimbaud s'engage dans ce poème. Pensez-vous que la littérature soit une bonne tribune pour défendre ses opinions ? Développez une réflexion personnelle autour de cette question en faisant référence à d'autres œuvres littéraires que vous avez lues (300 mots).

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Publié le 23 septembre 2013
Nombre de lectures 6 490
Langue Français

Extrait

             
   
Commentaire dirigé  
C'est un trou de verdure où chante une rivière, Accrochant follement aux herbes des haillons1 D'argent ; où le soleil, de la montagne fière, Luit : c'est un petit val qui mousse de rayons.
Un soldat jeune, bouche ouverte, tête nue, Et la nuque baignant dans le frais cresson2bleu, Dort ; il est étendu dans l'herbe, sous la nue, Pâle dans son lit vert où la lumière pleut.
Les pieds dans les glaïeuls3, il dort. Souriant comme Sourirait un enfant malade, il fait un somme : Nature, berce-le chaudement : il a froid.
Les parfums ne font pas frissonner sa narine ; Il dort dans le soleil, la main sur sa poitrine, Tranquille. Il a deux trous rouges au côté droit.
Le dormeur du val                     Arthur Rimbaud (1870)  COMPRÉHENSION 1° Relevez et analysez le champ lexical du sommeil. 2° Repérez et commentez le jeu des sensations. Analysez la progression du poème. En quoi le dernier vers représente-t-il une surprise qui nous  invite à une relecture ?  INTERPRÉTATION 1° Quel est le rôle de la nature dans ce poème ? 2° Que dénonce ce poème ?  
EXPRESSION PERSONNELLE  Rimbaud s'engage dans ce poème. Pensez-vous que la littérature soit une bonne tribune pour défendre ses opinions ? Développez une réflexion personnelle autour de cette question en faisant référence à d'autresœuvreslittéraires que vous avez lues (300 mots).  
                                                 1 usés et déchirésHaillons : vêtements 2Cresson : plante potagère 3Glaïeuls : gladioli
Correction
 COMPREHENSION  Dans ce poème de Rimbaud nous pouvons observer la présence du champ lexical du sommeil. Tout d'abord dans le titre qui désigne le personnage central par le nom commun «dormeur », déterminé par l' article défini « le » insistant sur son caractère singulier et unique. Le substantif est repris sous  forme verbale « dort » à trois reprises (vers 7, 9 et 13) puis sous la forme d 'une périphrase « il fait un somme » (vers 10) qui apporte une connotation de brièveté et de légèreté. Cet effet d'insistance éveille la curiosité mais aussi l'inquiétude du lecteur. Enfin l'herbe forme « un lit », lieu sécurisant, sur lequel il est « étendu » dans une posture sereine et « berce » le dormeur comme une mère berce son enfant ajoutant un sentiment de quiétude et de paix comme le confirme l'adjectif « Tranquille » (vers 14). Ce champ lexical confère à l'ensemble du poème une horizontalité qui ramène le personnage à la terre. Mais c'est aussi une façon de tromper le lecteur, de lui suggérer une fausse piste afin de créer une émotion plus forte lors de la chute finale.  
Ce poème met en place un jeu de sensations. Rimbaud recrée un univers total par l'évocation des sens. La vue tient la place la plus importante avec les nombreuses couleurs (« bleu », « vert », « rouge ») et effets de lumière (« argent », « soleil », « luit » , « rayons », « lumière ») qui créent une atmosphère bigarrée, lumineuse et positive. L'odorat ensuite est représentée par les termes « frais » et « parfum » rappelant le vers de Baudelaire dans Correspondances «des parfums plus frais que des chairs d'enfant » mais aussi « narine », puis l'ouïe avec le terme joyeux « chante » et enfin le toucher avec le terme « main ».Cette réunion sensorielle crée une forte impression de vitalité. On remarquera également une synesthésie « mousse de rayons » qui joue sur le rapport matière/lumière.  3 °
Ce poème est un sonnet traditionnel. Chaque strophe possède sa propre autonomie et constitue une étape d'un point de vue sémantique. Le poème est construit comme un tableau avec ses différents plans ou comme une scène cinématographique dans laquelle la caméra ferait un zoom avant : le premier quatrain s'ouvre sur la mise en place du cadre spatial , celui de la nature protectrice (plan d'ensemble), puis dans le second quatrain nous voyons apparaître le personnage (plan rapproché), enfin dans les tercets nous nous rapprochons du « dormeur » dont nous détaillons les « pieds » puis le visage et enfin les « deux trous » (gros plans). Alors que tout le poème contribue à nous laisser penser qu'il s'agit d'une scène paisible dans laquelle un soldat dort tranquillement, le dernier vers vient contredire tout ce qui nous était suggéré de façon brutale. Les « deux trous rouges au côté droit » du dernier vers représentant implicitement la mort s'oppose au « trou de verdure » du premier vers connotant la vie, le berceau qui reçoit le corps du soldat. L’effet provoqest d’autant plus saisissant que Rimbaud a en rejet l’adjectif placé « tranquille » (vers 14), réduisant à neuf syllabes la dernière unité grammaticale du texte. La coupe forte occasionnée par le rejet produit une rupture qui détache cette courte phrase. C’est ce qu’on appelle une chute.   
Le changement de perspective opéré par le dernier vers est si radical qu’il implique nécessairement une seconde lecture du texte. En effet, cette fin valide toutes les inquiétudes qu’avaient pu faire naître certainesexpressions et invalide l’interprétation optimiste de la scène. Ainsi nous pouvons repérer des indices et de nombreuses ambivalences jalonnant le poème : d'abord le mot « trou » est un terme plutôt trivial et sert davantage à décrire une fosse qu'un lieu enchanteur, puis la comparaison « il dort comme un enfant malade » crée une alarme, une inquiétude, en outre son arrivée est dramatisée par l'effet de contre-rejet, ensuite nous apprenons que l'enfant « a froid », information venant contredire tout le champ lexical de la lumière et de la chaleur, enfin le dernier tercet nous présente le personnage comme incapable de faire appel à son odorat « Les parfums ne font pas frissonner sa narine » (vers 12), il se tient « la main sur la poitrine » (vers 13) dans une position habituellement donnée aux cadavres.  INTERPRETATION  
La nature est omniprésente dans le poème. Elle se caractérise par une impression de vie et de bonheur qui comme nous l'avons vu, sollicite tous les sens. De plus cette nature est présentée co magnifiée d’une majuscule, personnifiée parmme douée de sentiments, au vers 11 elle est l’apostrophe, et implicitement comparée à une mère protectrice qui "berce" son enfant : Alma Mater. Trois personnifications (« chante », « follement », « fière ») décrivent la nature environnante comme une nature en fête ; la rivière notamment semble une fée dotée du pouvoir magique d’habiller d’argent les herbes  qui l’environnent : l’oxymore « haillons / d’argent», appuyé par le rejet du vers 3, semble être là pour exprimer ce pouvoir de métamorphoser la pauvreté en richesse. On pourrait interpréter le décalage constant créé par les rejets « D'argent », «Luit » comme une façon de mimer l’exubérance joyeuse des éléments naturels. On notera avec quelle insistance Rimbaud utilise la préposition « dans» chaque fois qu’il évoque la situation du soldat mort : il dort « dans le frais cresson bleu », «dans l’herbe», « dans son lit vert », « dans les glaïeuls », « dans le soleil». Il semble que le personnage s’enfonce dans de « trou son verdure », que sa mort soit une sorte de dissolution au sein de la nature.
2 °
Une autre vertu du procédé de composition choisi par Rimbaud réside dans la sobriété, la simplicité de ce réquisitoire indirect contre la guerre. Ce n’est pas ici par la polémique ou la dénonciation qu’il tente de convaincre son lecteur mais par l’évocation lyrique de ce que la guerre met en péril: le droit de vivre, le droit de jouir de ce que la nature nous offre : la chaleur du soleil, les parfums (évoqués parl’allitération en /f/ du vers 12 au moment même où le poème en évoque la privation), et tous les plaisirs des sens. Autrement dit, ces images de bonheur que le poème nous propose ne sont pas seulement des fausses pistes destinées à mettre en relief un dénouement spectaculaire, ce sont aussi des arguments contre la guerre.  
 
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