L état d urgence ou l exception à la française !
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L'état d'urgence ou l'exception à la française !

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Description

L'Etat d'urgence décrété ou l'exception à la française ! Suiteaux attentats terroristes meurtriers qui ont frappé la ville de Paris le 13 novembre dernier, un décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 a été adopté et promulgué par le Président de la République lors d'un Conseil des ministres extraordinaire. Les mesures d'urgence ont été déclarées applicables sur tout le territoire. Cette situation exceptionnelle - entrainant des restrictions en matière de protection des droits et libertés fondamentaux face à la nécessité de garantir la sécurité du territoire - trouve ses origines historiques dans les événements qui se sont produits lors de la guerre d'Algérie où les mouvements indépendantistes mais aussi anti-indépendantistes menaçaient la stabilité des institutions et l'unité du territoire. Cette loi est donc prévue pour les situations de crises où l'Etat est confronté à des troubles intérieurs ou extérieurs mettant en danger son fonctionnement démocratique. Le pouvoir souverain dispose alors dans ce cadre précis du droit de suspendre le droit pour peut-être... mieux le rétablir ou le renforcer !

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Publié le 09 juin 2016
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Langue Français

Extrait

L'Etat d'urgence décrété ou l'exception à la française !
 Suite aux attentats terroristes meurtriers qui ont frappé la ville de Paris le 13 novembre dernier, un décret n° 2015-1475 du 14 novembre 2015 portant application de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 a été adopté et promulgué par le Président de la République lors d'un Conseil des ministres extraordinaire. Les mesures d'urgence ont été déclarées applicables sur tout le territoire. Cette situation exceptionnelle - entrainant des restrictions en matière de protection des droits et libertés fondamentaux face à la nécessité de garantir la sécurité du territoire - trouve ses origines historiques dans les événements qui se sont produits lors de la guerre d'Algérie où les mouvements indépendantistes mais aussi anti-indépendantistes menaçaient la stabilité des institutions et l'unité du territoire. Cette loi est donc prévue pour les situations de crises où l'Etat est confronté à des troubles intérieurs ou extérieurs mettant en danger son fonctionnement démocratique. Le pouvoir souverain dispose alors dans ce cadre précis du droit de suspendre le droit pour peut-être... mieux le rétablir ou le renforcer ! Il n'y a qu'à voir les dernières réformes adoptées en ce sens comme la loi du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme (avec les mesures d'interdiction de sortie du territoire ou celles permettant d'y résider dans certains cas) ou la loi sur le renseignement du 24 juillet 2015 et qui remplacent les mesures d'interception de sécurité (mais qui menacent la protection de la vie privée et la sécurité des données personnelles). Le philosophe C. Schmitt disait à propos des mesures d'exception que ce qui caractérise le pouvoir souverain d'un Etat est justement de disposer de prérogatives exceptionnelles ! L'Etat d'exception est ainsi légitimé dans tout Etat démocratique afin de répondre à des situations de crises graves sans que la démocratie n'en soit menacée. Il s'agit de protéger celle-ci en faisant usages de mesures (la plupart du temps restrictives pour les libertés publiques) visant à garantir sa pérennité. Pour cela, le droit français ne dispose pas uniquement de lalloi de 1955 sur l'état d'urgence pour protéger et défendre son modèle démocratique et ses valeurs rayonnant à travers le monde depuis l'adoption de la fameuse DDHC de 1789 ! Nous trouvons aussi dans la Constitution de 1958 deux articles phares que sont l'article 16 et l'article 36. L'article 16 qui confère au Président de la République des pouvoirs exceptionnels lui octroyant le rôle provisoire d'une sorte de dictateur légitime ou d'homme providentiel comme pouvait en connaître Rome lors des périodes de crises politiques, a été utilisé par le Général de Gaulle lors du putsch des généraux à Alger (1961). Mais, cet article 16 - octroyant au pouvoir exécutif la possibilité de remplir des fonctions de législateur et de mettre en place des tribunaux d'exceptions - nepeut être utiliséque si des conditions sont rempliespréalablement : soit les institutions de la République, l’indépendance de la Nation, l’intégrité du territoire national ou l’exécution des engagements internationaux de la France sont menacées de manière grave et immédiate soitle fonctionnement régulier des pouvoirs publics s'avère interrompu. Par ailleurs, le chef de l'Etat doit avoir, en amont,consulté officiellement le Premier ministre, le président de chacune des deux assemblées et le Conseil constitutionnel. L'utilisation de cet article - de manière quelque peu abusive - a d'ailleurs conduit les gouvernements successifs de la cinquième république à en demander son abrogation. Le Conseil d'Etat avait – par exemple – dans un arrêt Rubin de Servans du 2 mars 1962 jugé qu'une décision prise par le Président de la République durant la période d'utilisation de l'article 16 et n'entrant pas dans le champ de compétence du pouvoir réglementaire, ne relevait pas de sa compétence puisque cette décision avait le caractère d'une décision de nature législative. La légitimité pour le chef de l'Etat de pouvoir empiéter sur le domaine législatif sans limitation de durée pour prendre des mesures extraordinaires avait d'ailleurs conduit le Conseil d'Etat dans une décision du 19 octobre 1962 – Canal Robin et Godot – à s'interroger sur le maintien desdites mesures. Finalement, la réforme constitutionnelle adoptée en juillet 2008 a permis d'en contrôle son utilisation dans le temps afin d'éviter quel'imperiumconféré au chef de l'Etat ne puisse le conduire à se comporter comme un véritable despote éclairé ! Ainsi, l'article modifié indique que le Parlement peut saisir le Conseil constitutionnel au bout de trente jours d'exercice et que ce dernier
peut s'autosaisir au bout de soixante jours. Si cet article a fait l'objet d'une modification dans l'esprit de limiter le recours à l'état d'exceptions et aux mesures de polices administratives, l'article 36 lui n'a pas été modifié ni même utilisé depuis qu'il est en vigueur... Alors à quoi sert-il ? Il est prévu pour répondre aux situations visant à lutter contre les insurrections armées ou tout autre péril qui menace la Nation! Il est mentionné que son application ne peut intervenir que dans le cadre d'un « état de siège ». Cet état de siège – proche de la notion d'état d'urgence donc des dispositions de la loi de 1955 – prévoit un renforcement des prérogatives du Gouvernement ce qui se traduit concrètement par des restrictions apportées aux libertés publiques comme la liberté d'expression (interdiction de certaines publications ou de la tenue de réunions et manifestations) ou la liberté d'aller et venir (perquisitions autorisées à toute heure), des transferts de compétences aux autorités militaires ainsi que des mesures d'éloignements frappant certaines personnes suspectés de troubles à l'ordre public. La prorogation de l'état de siège au-delà de douze jours ne peut se faire sans l'accord du Parlement. Nous trouvons des dispositions à peu près similaires dans la loi de 1955 sur l'état d'urgence puisque la loi de 1955 permet de suspendre certaines garanties
Pourquoi alors ne pas constitutionnaliser cette loi en élargissant son champ d'application et en modernisant certaines de ses dispositions pour les rendre compatibles avec l'évolution des nouvelles menaces qui peuvent frapper la Nation comme les attaques terroristes ou d'autres formes d'atteintes à la sécurité du territoire ? En ce sens, le Président de la République a pu annoncer - dans son discours prononcé devant le Congrès le 16 novembre dernier qu'une révision de la Constitution interviendrait pour définir constitutionnellement un statut régissant les situations de crise résultant d'attaques terroristes voire peut-être... de catastrophes écologiques. Il s'agirait alors - d'instaurer comme pour le plan Vigipirate - plusieurs niveaux de mesures exceptionnelles à mettre en place lors de situations de crises, visant à garantir un standard minimum de protection des droits et libertés au profit du citoyen tout en garantissant la sécurité du territoire et de ses occupants. Actuellement, nous le voyons, les dispositions concernant l'état d'urgence fonctionnent mieux que les dispositions de l'article 36 de la constitution qui n'ont jamais servi ou que les dispositions de l'article 16 qui elles ne sont utilisables qu'en situation de crise extrême où ne subsisterait plus de gouvernement légitime ni même d'Etat.
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