CHAPITRE 16 VOLTAIRE ET SES COMBATS
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voltaire et ses combats CHAPITRE 16 VOLTAIRE ET SES COMBATS LE PHILOSOPHE-ROI i on appelle souvent le Grand Si cle, le si cle de Louis XIV , ele XVIII si cle est sans contredit le si cle de Voltaire.S M daille grav e par Waechter, 1772 C est son crivain le plus achev et celui qui personnifie le mieux l esprit philosophique des Lumi res. Voltaire (1694-1778) a pratiqu tous les genres : tragique, po tique, comique, mais la post rit retiendra surtout les contes philosophiques : Candide (1759) au style tincelant est peut- tre le plus grand roman en langue fran aise de tous les temps ; la correspondance : travers ses 309 Les grandes figures du monde moderne 18 000 lettres, Voltaire a correspondu avec toute l Europe ; et l histoire qu il renouvelle : L Essai sur les mˇurs (1756), Le si cle de Louis XIV (1751). Voltaire fut aussi un homme d action ; ses campagnes sont c l bres contre l injustice, l intol rance, le fanatisme et la superstition. Bref cet homme qui a combattu toute sa vie pour la libert de penser est le philosophe par excellence des Lumi res. Les ann es anglaises Fran ois-Marie Arouet est n en 1694 dans un milieu assez ais qui avait de bonnes relations. Son p re, Fran ois Arouet, est notaire royal et receveur d pices. ¸ 10 ans, il tudie chez les J suites au coll ge Louis-le-Grand, un coll ge r put pour l excellence de ses professeurs. ¸ la fin de ses tudes, il se rend Paris et fr quente les salons et la noblesse, faisant valoir son bel esprit. En 1718, il obtient son premier grand succ s avec sa trag die ˛dipe et prend le nom de Monsieur de Voltaire (anagramme de AROVET Le Ieune). Mais sa hardiesse de mˇurs et d id es n est pas sans faire scandale. Une querelle avec le chevalier de Rohan-Chabot lui rappelle qu il n est qu un roturier : son adversaire le fait b tonner et obtient son internement la Bastille. Voltaire est oblig finalement de s exiler en Angleterre. Pendant les trois ans (1726-1729) que dure cet exil, il fait la connaissance du po te et essayiste Alexander Pope (1688-1744), du romancier et pamphl taire Jonathan Swift (1667-1745) et du philosophe George Berkeley (1685-1753). Rapidement, l Angleterre devient pour lui le pays d une certaine tol rance religieuse, de la libert , de la philosophie et des sciences modernes. C est pendant ce s jour qu il est influenc par l empirisme et la philosophie politique de Locke. En 1734, il publie en Hollande les Lettres philosophiques ou Lettres anglaises, r pandues clandestinement en France avec un succ s consid rable. Il fait de l Angleterre une ˙ le de raison ¨ et en profite pour vulgariser un certain nombre d id es philosophiques tout en condamnant indirec- tement les institutions fran aises. De plus, il y compare la philosophie fran aise, incarn e par Descartes, l empirisme anglais, repr sent par Newton : Je ne crois pas qu on ose, la v rit , comparer en rien sa philosophie avec celle de Newton : la premi re est un essai, la seconde est un chef- d ˇuvre. Mais celui qui nous a mis sur la voie de la v rit vaut peut- tre celui qui a t depuis au bout de cette carri re. Descartes donna la vue 310 voltaire et ses combats aux aveugles ; ils virent les fautes de l Antiquit et les siennes. La route qu il ouvrit est, depuis lui, devenue immense (Lettre XIV , Sur Descartes et Newton, 1734). Les orageux changes Berlin L ann e suivante, les Lettres sont d nonc es et condamn es tre br l es, et Voltaire menac d arrestation. ¸ cette m me poque, il rencontre milie du Ch telet (1706-1749), la savante auteur des Institutions physiques (traduction et commentaires des Principes math matiques de philosophie naturelle de Newton), de l Examen de la Gen se, du Discours sur le bonheur ; ce qui marque le d but d une longue aventure sentimentale et intellectuelle de pr s de 10 ans. milie Le Tonnelier de Breteuil, marquise du Ch telet Au cours de ces ann es, Voltaire devient historiographe du roi Louis XV (1745) et membre de l Acad mie fran aise (1746). C est aussi cette poque que d bute sa correspondance avec Fr d ric II, devenu roi de Prusse en 1740. Leur change pistolaire (plus de 800 lettres) durera 42 ans. En 1750, Voltaire quitte Paris pour Berlin et le ch teau de Potsdam l invitation de Fr d ric II. 311 Les grandes figures du monde moderne Au d but de son s jour, c est l enchantement r ciproque. Voltaire est choy et adul . Mais de vifs m comptes surgissent, les querelles envenim es par la rivalit avec ses autres coll gues se multiplient si bien qu il finit par se rendre ind sirable ; la dispute avec Maupertuis, le pr sident de l Acad mie des sciences de Berlin, pr cipitant la disgr ce. Le ˙ patriarche ¨ Voltaire est contraint de regagner la France. Il quitte Berlin en 1753 et devra errer de 1753 1760 la recherche d un g te s r. Devant les tracasseries du Grand Conseil de Gen ve, il quitte Les D lices, une propri t pr s de Gen ve o il avait s journ quelque temps. Finalement il achetera en 1759 le ch teau de Ferney, pr s de la fronti re suisse o il vivra en ch telain clair . Un v ritable r gne intellectuel commence. Le ˙ roi Voltaire ¨ devient une figure de l gende et re oit La chambre de Voltaire Ferney La gravure de 1780 montre la galerie de portraits et le mausol e chez lui avec une hospitalit fastueuse les personnalit s les plus minentes de l Europe. Dans ce qui suit, on lira l affectueux compte-rendu, tir de ses M moires (Paris, 1804, t. II, p. 230 et ss.), de la visite que Jean-Fran ois Marmontel, l auteur succ s de B lisaire , fit Voltaire dans son ch teau des D lices , au mois de juin 1760. 312 voltaire et ses combats D une plume alerte, Marmontel fait le r cit bien vivant des quelques jours pass s en la compagnie du grand homme dans son quotidien. La visite de Marmontel Voltaire aux D lices ˙ Press s de nous rendre Gen ve, nous ne nous donn mes pas m me le temps de voir Lyon, r servant pour notre retour le plaisir d admirer dans ce grand atelier du luxe les chefs-d ˇuvre de l industrie. Rien de plus singulier, de plus original que l accueil que nous fit Voltaire. Il tait dans son lit lorsque nous arriv mes. Il nous tendit les bras, il pleura de joie en m embrassant ; il embrassa de m me le fils de son ancien ami M. Gaulard. Vous me trouvez mourant, nous dit-il ; venez-vous me rendre la vie ou recevoir mes derniers soupirs ? Mon camarade fut effray de ce d but. Mais moi qui avais cent fois entendu dire Voltaire qu il se mourait, je fis signe Gaulard de se rassurer. En effet, le moment d apr s, le mourant nous faisant asseoir aupr s de son lit : Mon ami, me dit-il, que je suis aise de vous voir surtout dans le moment o je poss de un homme que vous serez ravi d entendre. C est M. de l cluse, le chirurgien-dentiste du feu roi de Pologne, aujourd hui seigneur d une terre aupr s de Montargis, et qui a bien voulu venir raccommoder les dents irraccommodables mede M Denis. C est un homme charmant. Mais ne le connaissez-vous pas ? Le seul l cluse que je connaisse est, lui dis-je, un acteur de l ancien Op ra- Comique. C est lui, mon ami, c est lui-m me. Si vous le connaissez, vous avez entendu cette chanson du R mouleur qu il joue et qu il chante si bien. Et l instant voil Voltaire imitant l cluse, et avec ses bras nus et sa voix s pulcrale, jouant le R mouleur et chantant la chanson : Je ne sais o la mettre Ma jeune fillette; Je ne sais o la mettre, Car on me la cache... Nous rions aux clats ; et lui toujours s rieusement : Je l imite mal, disait-il ; c est M. de l cluse qu il faut entendre, et sa chanson de la Fileuse ! et celle du Postillon ! et la querelle des cosseuses avec Vad ! C est la mev rit m me. Ah ! vous aurez bien du plaisir. Allez voir M Denis. Moi, tout malade que je suis, je m en vais me lever pour d ner avec vous. Nous mangerons un ombre- chevalier, et nous entendrons M. de l cluse. Le plaisir de vous voir a suspendu mes maux, et je me sens tout ranim . meM Denis nous re ut avec cette cordialit qui faisait le charme de son caract re. Elle nous pr senta M. de l cluse ; et, d ner, Voltaire l anima, par les louanges les plus flatteuses, nous donner le plaisir de l entendre. Il d ploya tous ses talents, et nous par mes charm s. Il le fallait bien ; car Voltaire ne nous aurait point pardonn de faibles applaudissements. La promenade, dans ses jardins, fut employ e parler de Paris, du Mercure, de la Bastille (dont je ne lui dis que deux mots), du th tre, de l Encyclop die , et de ce malheureux Le Franc, qu il harcelait encore ; son m decin lui ayant ordonn , disait- 313 Les grandes figures du monde moderne il, pour exercice, de courre une heure ou deux tous les matins le Pompignan. Il me chargea d assurer nos amis que tous les jours on recevrait de lui quelque nouvelle fac tie. Il fut fid le sa promesse. Au retour de la promenade, il fit quelques parties d checs avec M. Gaulard, qui, respectueusement, le laissa gagner. Ensuite, il revint lle parler du th tre et de la r volution que M Clairon y avait faite. Voltaire jouant aux checs, Jean Huber, 1775-1776 C est donc, me dit-il, quelque chose de bien prodigieux que le changement qui s est fait en elle ? C est, lui dis-je, un talent nouveau ; c est la perfection de l art, ou plut t c est la nature m me, telle que l imagination peut vous la peindre en beau. Alors exaltant ma pens e et mon expression pour lui faire entendre quel point dans les divers caract res de ses r les, elle tait avec v rit , et une v rit sublime, Camille, Roxane, Hermione, Ariane, et surtout lectre, j puisai le peu que j avais d loquence lui inspirer pour Clairon, l enthousiasme dont j tais plein moi- m me ; et je jouissais, en lui en parlant, de l motion que je lui causais, lorsque enfin prenant la parole : me Eh bien ! mon ami, me dit-il, avec transport, c est comme M Denis, elle a fait des progr s tonnants, incroyables. Je voudrais que vous lui vissiez jouer Za re, Alzire, Idam ! le talent ne va pas plus loin.
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