Colloque du 18 mai - réformes en cours dans la  juridiction administrative
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Centre de Recherches en Droit Administratif de l’Université de Paris II ------ Lundi 18 mai 2009 ------ Les réformes en cours au sein de la justice administrative ------ Intervention de Jean-Marc Sauvé Vice-président du Conseil d’Etat ------ Les réformes dans la juridiction administrative sont une constante et une nécessité. Une constante, parce que peu d’institutions se sont aussi radicalement transformées en deux siècles. Créée pour soustraire l’administration au regard du juge civil, cette juridiction était plus chargée de contribuer à la construction d’un Etat moderne, rationnel et efficace qu’à l’émergence d’un Etat légal. Tel est bien le dessein qui a présidé à la création du Conseil d’Etat et des conseils de préfecture. Cette juridiction est cependant devenue, par un véritable retournement dialectique, un des acteurs essentiels de la soumission de l’administration au droit et du respect de l’Etat de droit. Pareille transformation est d’abord l’œuvre des hommes, puis des hommes et des femmes qui l’ont menée à bien. Elle s’est manifestée avec éclat par la jurisprudence du Conseil d’Etat qui a forgé les bases du droit administratif français, droit prétorien qui a su protéger les droits et libertés des citoyens et des usagers contre l’arbitraire administratif, et assurer la conciliation de ces droits et libertés avec le respect de l’intérêt général. Mais cette transformation a aussi résulté de réformes législatives et ...

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Centre de Recherches en Droit Administratif de l’Université de Paris II   ------ Lundi 18 mai 2009   ------ Les réformes en cours au sein de la justice administrative   ------ Intervention de Jean-Marc Sauvé Vice-président du Conseil d’Etat   ------
 
    Les réformes dans la juridiction administrative sont une constante et une nécessité. Une constante, parce que peu d’institutions se sont aussi radicalement transformées en deux siècles. Créée pour soustraire l’administration au regard du juge civil, cette juridiction était plus chargée de contribuer à la construction d’un Etat moderne, rationnel et efficace qu’à l’émergence d’un Etat légal. Tel est bien le dessein qui a présidé à la création du Conseil d’Etat et des conseils de préfecture. Cette juridiction est cependant devenue, par un véritable retournement dialectique, un des acteurs essentiels de la soumission de l’administration au droit et du respect de l’Etat de droit. Pareille transformation est d’abord l’œuvre des hommes, puis des hommes et des femmes qui l’ont menée à bien. Elle s’est manifestée avec éclat par la jurisprudence du Conseil d’Etat qui a forgé les bases du droit administratif français, droit prétorien qui a su protéger les droits et libertés des citoyens et des usagers contre l’arbitraire administratif, et assurer la conciliation de ces droits et libertés avec le respect de l’intérêt général. Mais cette transformation a aussi résulté de réformes législatives et réglementaires qui ont refondé ou adapté l’organisation de cette juridiction, la procédure applicable devant elle, les pouvoirs du juge ou son statut. Pas une décennie ne s’est écoulée sans une réforme majeure sur l’un ou l’autre de ces points. L’histoire de la juridiction administrative est donc scandée par les réformes. Les trois dernières décennies sont à cet égard exemplaires avec, notamment, la loi du 16 juillet 1980 qui a donné au juge le pouvoir de prononcer des astreintes pour assurer l’exécution des décisions juridictionnelles et qui a facilité l’exécution des condamnations pécuniaires ; la loi du 6 janvier 1986 qui a créé le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et reconnu la qualité de magistrat et l’inamovibilité des membres de ces juridictions, du moins lorsqu’ils exercent des fonctions juridictionnelles ; la loi du 31 décembre 1987 qui a créé les cours administratives d’appel et confié au secrétaire général du Conseil d’Etat la gestion des juridictions administratives de première instance et d’appel ; la loi du 8 février 1995 qui a donné au juge le pouvoir de délivrer des injonctions a priori, le
cas échéant sous astreinte, et refondé la procédure d’exécution des décisions juridictionnelles ; la loi du 25 mars 1997 qui a rénové le statut des magistrats des cours administratives d’appel et des tribunaux administratifs ; l’ordonnance du 4 mai 2000 qui a adopté la partie législative du code de justice administrative, avec un décret en Conseil d’Etat du même jour et la loi du 30 juin 2000 qui a refondé les procédures d’urgence. Et je passe sous silence la multitude des décrets relatifs à l’organisation, à la procédure et au statut de la juridiction administrative et de ses membres.   Si les réformes de cette juridiction sont une constante, elles sont aussi une nécessité. Loin de n’être justifiée que par l’histoire, comme ses détracteurs le prétendent, la juridiction administrative est avant tout légitimée par le service qu’elle rend aux justiciables et, à cette fin, par ses capacités d’innovation et d’adaptation, bref par sa vitalité. Ces deux aspects sont d’ailleurs étroitement liés : parce qu’elle est critiquée et parfois même combattue, la juridiction administrative est incitée à être réactive et, pour conserver son autorité, à se remettre en cause avec constance et à progresser.   Le succès de cette juridiction auprès des justiciables constitue aussi une puissante incitation à se réformer : le décuplement du contentieux administratif en 40 ans et sa croissance de 6 % par an en moyenne, voire de près de 9 % depuis le début de la décennie, la perspective de nouveaux contentieux de masse, comme celui du droit au logement ou celui du revenu de solidarité active après celui des étrangers, nous créent des devoirs particuliers : celui de maîtriser et même de raccourcir des délais de jugement qui ont longtemps été anormaux et, en tout cas, incompatibles avec le délai raisonnable mentionné à l’article 6 de la convention européenne des droits de l’homme, d’autant plus que n’existait pas alors de procédure d’urgence véritablement efficace ; celui aussi de maintenir la qualité de la justice rendue, qui est l’une des marques de fabrique de la justice administrative : l’étude attentive et méticuleuse des dossiers par les juges administratifs et, tout autant, l’unité, la cohérence et la prévisibilité de la jurisprudence constituent des atouts reconnus que nous entendons cultiver et non pas brader.   Plus largement, le juge administratif agit comme interface entre les pouvoirs publics et les citoyens. Il en résulte une responsabilité éthique et sociale forte dont ce juge est très conscient. Par suite, il est porté à considérer que la réforme, dès lors qu’elle peut améliorer la gouvernance publique, renforcer les droits des justiciables et rehausser la qualité des décisions, n’est pas une simple faculté, mais un impérieux devoir.   Ces réformes de la justice administrative qui sont ainsi constantes et nécessaires présentent une autre caractéristique : elles sont largement portées et inspirées par cette juridiction elle-même. C’est une tradition qui remonte au moins à Laferrière : celui-ci combattit avec succès des initiatives parlementaires de réforme du Conseil d’Etat tendant à créer une deuxième section du contentieux pour raccourcir (déjà !) les délais de jugement…  René Cassin fit de même pour la création des tribunaux administratifs dont il fut un ardent promoteur au milieu d’une relative apathie gouvernementale : c’est peu dire qu’il imposa quasiment cette réforme nécessaire concrétisée par le décret du 30 septembre 1953. Tout autant pourrait-on citer les efforts de ses successeurs proches ou plus lointains pour réformer la juridiction administrative. Ils ont tous été les promoteurs ou les acteurs de réformes importantes, qu’elles aient ou non abouti. Cette « posture » de la juridiction administrative et, en particulier, du Conseil d’Etat suscite régulièrement des critiques quant à une sorte de prétention à l’autogestion. Je ne partage pas ces critiques : la justice, qu’elle soit
 
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administrative ou judiciaire, n’est pas un simple service public ; c’est aussi un pouvoir public constitutionnel, dont on n’imagine tout simplement pas qu’il ne soit pas très étroitement associé aux réformes le concernant, voire à l’initiative de celles-ci. L’indépendance du juge et la séparation des pouvoirs, loin de contredire cette attitude pro-active, la supposent, la recommandent, voire l’exigent. Naturellement, la juridiction administrative ne saurait revendiquer aucun monopole dans les propositions de réforme la concernant, ni nier les responsabilités propres incombant aux autres pouvoirs publics : l’exécutif et le législatif. Car la séparation des pouvoirs forme un tout indissociable que l’on ne saurait invoquer pour protéger ses droits, pour ensuite l’ignorer quand il s’agirait des droits des autres. Il est par conséquent légitime que des réformes proposées par le Conseil d’Etat n’aient pas toujours abouti, faute d’adhésion du Gouvernement et du Parlement. Je fais référence en particulier à celle des référendaires au Conseil d’Etat en 1982 et à celle des chambres adjointes au Conseil en 1986.  J’ajoute que dans la période la plus récente, le rôle de gestionnaire de la juridiction administrative confié par la loi au secrétaire général du Conseil d’Etat et le traitement budgétaire de cette juridiction au sein d’une mission « Conseil et contrôle de l’Etat » rattachée au Premier ministre ont en quelque sorte souligné ou « surligné » le statut particulier et autonome de cette juridiction qui, moins que jamais, ne peut être assimilée à un service public classique qui relèverait banalement du pouvoir exécutif.  Ces trop longues prémisses étant rappelées, il m’est apparu, lors de ma prise de fonctions, qu’un nouveau cycle de réformes devait être engagé dans la juridiction administrative. Ces réformes sont destinées à la fois à prolonger les actions engagées depuis au moins deux décennies et à répondre à des enjeux ou des défis nouveaux.   I –  Prolonger le mouvement de rénovation engagé depuis plus de deux décennies.  La continuité des réformes opérées peut s’observer à plusieurs niveaux : celui de la méthode et celui des actions destinées à maintenir la qualité et à renforcer l’efficacité de la justice administrative.  A – Quant à la méthode, les réformes engagées sont marquées du triple souci ou sceau de la concertation, du pragmatisme et de la progressivité.  1) La démarche de réforme engagée dans la juridiction administrative repose sur la concertation, interne d’abord puis ouverte sur les partenaires et les interlocuteurs extérieurs. Cette démarche est de nature, du moins peut-on l’espérer, à favoriser la pertinence des réformes, l’unité de la juridiction, plutôt que les dissensions au sein de celle-ci, et l’intérêt, voire l’adhésion, des institutions et organisations consultées, comme les organisations représentatives de la profession d’avocat.  Depuis 1987, aucun changement majeur n’a été conduit sans de telles consultations préalables approfondies, conduisant naturellement à associer dès l’amont les pouvoirs publics aux initiatives prises. Cette éthique de la concertation qui préexistait prend une importance croissante dans la période de mutation que nous connaissons. Pour illustrer mon propos, je prendrai l’exemple des réformes que je pilote depuis 2007. Des groupes de travail composés de membres du Conseil d’Etat, de magistrats et de greffiers en chef ont été constitués au sein du Conseil d’Etat ainsi que dans les cours administratives d’appel et les tribunaux
 
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administratifs, au nombre respectivement de 9 et de 6. Ils ont travaillé sur la base de lettres de mission à la fois précises et ouvertes destinées à donner une réelle consistance à la réflexion collective, aux échanges d’expériences et aux propositions. Leurs projets de rapport ont été diffusés sur l’intranet de la juridiction et débattus collectivement avant d’être en fin de compte arrêtés par les groupes de travail. Pour les questions communes à l’ensemble de la juridiction, aucune orientation n’a été fixée sans que n’aient délibéré les groupes propres aux cours et aux tribunaux administratifs qui avaient démarré plus tardivement leurs travaux et sans qu’un débat n’ait eu lieu entre ceux-ci et ceux du Conseil d’Etat. Je ne concevais pas que ces derniers puissent en quelque sorte « préempter » les propositions, en tant qu’elles se rapportaient à des questions d’intérêt commun. Les consultations sur les décisions à prendre ont ensuite été poursuivies au sein du Conseil d’Etat, avec les chefs des juridictions administratives au cours du séminaire annuel de deux jours qui s’est tenu en avril 2008 puis à nouveau en avril 2009, avec les organisations professionnelles de magistrats à l’occasion de multiples réunions bilatérales et, enfin, au sein du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel en juin 2008 sur les orientations et en février 2009 sur les projets de texte. Les organisations professionnelles d’avocats et, notamment, l’ordre des avocats au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation ont bien entendu été consultées sur les mesures les concernant.  Cette méthode a permis d’emporter une large adhésion, certes pas unanime, aux propositions faites, en tout cas au plus grand nombre d’entre elles. Les énergies et les forces vives de la juridiction ont ainsi pu être réunies autour d’un projet commun, même si des divergences subsistent sur un petit nombre de points. Les réformes conduites en tirent une légitimité qu’elles n’auraient pu atteindre, si elles avaient été inspirées et pilotées par la seule hiérarchie du Conseil d’Etat.  2) Les réformes conduites sont aussi marquées du sceau du pragmatisme. C’est ainsi qu’elles procèdent en partie d’une réadaptation des réformes passées. La gestion par objectifs que nous souhaitons promouvoir tire par exemple les conséquences des contrats d’objectifs passés avec les cours administratives d’appel à la fin de 2002. Le développement maîtrisé de l’oralité que nous pratiquons, notamment avec les audiences d’instruction, les enquêtes à la barre ou, tout simplement, les questions posées aux parties pendant l’audience -« le dialogue interactif »- tirent de leur côté les conséquences des acquis de la réforme des référés issue de la loi du 30 juin 2000.  Le pragmatisme se manifeste d’une autre manière, par l’absence de préjugé. Les réformes ont en effet été abordées sans œillères et sous le seul angle de leur utilité ou de leur nécessité pour la juridiction ou le justiciable. Par exemple, est-il pertinent qu’en séance d’instruction au contentieux ou encore en section administrative les maîtres des requêtes et les auditeurs au Conseil d’Etat n’aient que voix consultative, sauf lorsqu’ils rapportent une affaire, requête ou demande d’avis ? L’accès au Conseil d’Etat des magistrats des cours et tribunaux est-il équitable et correspond-il aux besoins du Conseil comme aux nécessités de la promotion interne à la juridiction administrative ? Un guide de déontologie est-il nécessaire ? Si oui, avec quelle régulation et sous quel contrôle ? Doit-il être distinct entre Conseil d’Etat et juridictions du fond ou au contraire commun ?  Le pragmatisme procède aussi de la manière dont la juridiction administrative s’est toujours efforcée de s’instruire de ses échecs. Loin de l’arrogance qui lui est parfois prêtée, elle sait, je crois, tirer les conséquences des impasses dans lesquelles elle s’est engagée. L’échec des réformes que j’ai évoquées en 1982 et 1986 a ainsi conduit le Conseil d’Etat à
 
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renouveler sa réflexion, à abandonner les projets hybrides et à s’attaquer de front au problème de son encombrement : c’est ainsi qu’a vu le jour le projet du président Marceau Long de créer les cours administratives d’appel, projet plus ambitieux, plus global et, de surcroît, plus consensuel.  3) Les réformes conduites se veulent enfin progressives, ce qui conduit parfois à recourir à l’expérimentation. La progressivité est en effet une garantie de bonne application des réformes. La mise en place des cours d’appel a été à cet égard exemplaire : elles ont été dotées par étapes de compétences additionnelles en matière d’excès de pouvoir par le décret du 17 mars 1992, puis par la loi du 8 février 1995 pour les actes réglementaires et enfin par le décret du 29 juillet 2004 pour l’appel des jugements de reconduite à la frontière. C’est bien ainsi que nous ne cessons de procéder et c’est pourquoi le recours à l’expérimentation apparaît souvent pertinent. Il y est recouru en matière de téléprocédures, celles-ci s’appliquant depuis le 1 er janvier 2009 en matière fiscale dans toutes les juridictions d’Ile-de-France, après un démarrage au Conseil d’Etat en 2006 et une étape intermédiaire pour les juridictions parisiennes. Le décret du 7 janvier 2009 a quant à lui engagé une expérimentation dans le déroulement de l’audience qui s’applique dans six cours d’appel et plus de la moitié des tribunaux administratifs : dans ces juridictions, le rapporteur public présente ses conclusions aussitôt après le rapporteur, de telle sorte que les parties ne s’expriment qu’une seule fois après le rapporteur public.  Enfin, il n’est pas exclu, si le projet d’action collective en droit administratif voit le jour, qu’il ne se mette en œuvre par la voie d’expérimentations, par exemple pour certains contentieux que l’on peut qualifier de « sériels », comme celui de la fonction publique.  B –  La continuité des réformes s’observe à un autre niveau, celui des objectifs d’efficacité et de qualité de la justice administrative.  1) Dans ce domaine, beaucoup a été fait au cours des dernières décennies et des dernières années pour améliorer les résultats, grâce notamment aux moyens supplémentaires mis en œuvre, aux réformes de procédure ou au développement de l’aide à la décision… En particulier, le code de justice administrative a fait l’objet de plusieurs modifications depuis son adoption en 2000, notamment avec le décret du 24 juin 2003, pour ouvrir l’éventail des procédures mises à la disposition du juge, afin qu’il puisse proportionner ses efforts à la difficulté des dossiers.  Ces mesures ont porté leurs fruits. Depuis 2001, le nombre des jugements des tribunaux administratifs a augmenté de plus de 50 % et celui des cours d’appel, de plus de 100 %. Le délai prévisible moyen de jugement a été réduit de plus de 7 mois en première instance et de plus de 2 ans en appel : il est désormais de 1 an et 1 mois dans les deux cas, ces résultats étant imputables pour moitié aux moyens supplémentaires mis en place et pour moitié à la rationalisation des méthodes de travail et aux efforts consentis par les magistrats et les agents de greffe. Devant le Conseil d’Etat, la réduction des délais de jugement a été de près de 3 mois et le délai prévisible moyen de jugement s’établit désormais à moins de 10 mois : le stock des affaires en instance est ainsi très nettement inférieur à la capacité annuelle de jugement. Simultanément, le « stock » des affaires en instance s’est nettement réduit et sa composition s’est fortement « rajeunie » : au Conseil d’Etat, la part des affaires vieilles de plus de deux ans est ainsi passée de 15 % en 2001 à 8 % en 2008. Dans les cours administratives d’appel, elle est passée de près de 45 % en 2001 à 10 % en 2007 et 6, 3 % en
 
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2008. Dans les tribunaux administratifs, la même part est passée de 35 % en 2001 à 24 % en 2008.  Parallèlement à l’amélioration des délais de jugement qui constitue un indicateur essentiel de la qualité de la justice rendue, la solidité des décisions juridictionnelles n’a pas souffert de la très forte croissance de leur nombre. En tenant compte des taux d’appel et de pourvoi en cassation et de l’issue de ces procédures, on constate que 96 % des litiges sont réglés conformément à la solution qui leur a été donnée par les tribunaux administratifs et que 98 % des arrêts des cours ne sont pas remis en cause. La justice administrative est donc une bonne justice, dont les acteurs sont compétents et motivés. Sa jurisprudence, même si elle demeure toujours perfectible, est cohérente, lisible et respectée. Son unité est aussi favorisée par la procédure d’avis contentieux rendu à titre préjudiciel, qui a été instaurée par la loi de 1987, et par les efforts déployés pour repérer et traiter de manière rapide et efficace, aussi préventive que possible, les contentieux sériels.  A ces résultats s’ajoutent les mesures destinées à garantir l’effectivité de la justice rendue. La réforme des procédures d’urgence par la loi du 30 juin 2000 a enfin permis au juge d’intervenir utilement en cas d’urgence, soit qu’il y ait un doute sérieux sur la légalité d’une décision administrative, soit qu’il y ait une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale. Le temps du juge et celui du décideur public, qu’il soit fonctionnaire ou politique, est ainsi devenu synchrone et, chaque année, près de 1 000 décisions administratives sont suspendues dans un délai de quelques jours à quelques semaines en raison d’un doute sérieux sur leur légalité. Quant à la réforme de l’exécution, elle conduit le Conseil d’Etat à prononcer annuellement moins de 150 injonctions par an, dont une cinquantaine à titre préventif, et les cours et tribunaux à traiter environ 1 700 dossiers, dont plus des trois-quarts se règlent par la voie pré-contentieuse. Dans l’ensemble de la juridiction administrative, moins de 1 % des décisions donnent lieu à des incidents d’exécution.  2) En dépit des efforts accomplis et des résultats très substantiels que je viens de rappeler, l’accent doit continuer d’être placé sur l’efficacité et la qualité de la justice administrative. En effet la situation de cette juridiction demeure fragile. La croissance de ses contentieux reste forte : en dépit d’un certain ralentissement ces deux dernières années, elle demeure positive et très supérieure à celle des contentieux civils, commerciaux et sociaux. Par ailleurs, de nouveaux contentieux de masse, je l’ai dit, se profilent à l’horizon. Les progrès spectaculaires qui ont été faits tiennent beaucoup au développement, au cours de la période de référence, de l’office du juge unique et des possibilités de rejeter les requêtes par ordonnance. La croissance du contentieux des étrangers qui se règle en quelques jours à quelques mois a aussi contribué à l’amélioration des statistiques. Par conséquent, lorsque l’on défalque de celles-ci les procédures assorties de délais contraints ainsi que les affaires réglées par ordonnance, les délais moyens constatés sont en première instance supérieurs à 2 ans -2 ans et deux mois à la fin de 2008 (contre 2 ans, 7 mois et 21 jours à la fin de 2002)- et ils s’élèvent en appel à 18 mois à la fin de 2008 (contre 3 ans et 20 jours à la fin de 2002). Si ces délais s’améliorent clairement eux aussi, ils rendent compte d’une situation moins brillante qu’en apparence et d’ailleurs très contrastée : en Ile-de-France par exemple, l’état des juridictions administratives demeure très tendu en dépit de l’implication et de l’engagement très forts des magistrats et des agents de greffe et les délais de jugement y sont sensiblement supérieurs à la moyenne nationale. Cette situation appelle par conséquent des renforcements spécifiques de moyens, sous forme de chambres ou de magistrats supplémentaires, mais aussi de création de juridictions. Ce sera le cas avec la création du tribunal administratif de Montreuil en Seine Saint-Denis à la fin de 2009. Il convient de signaler à cet égard que les moyens de la justice
 
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administrative ont augmenté de 6 % (à structure constante, c’est-à-dire sans tenir compte de la Cour nationale du droit d’asile) dans le budget de 2009 et que le budget triennal 2009-2011 devrait se traduire par une augmentation de près de 5 % des emplois qui lui sont affectés.  3) Il est donc nécessaire de consolider et d’améliorer encore l’efficacité et la qualité de la justice rendue. Cela implique un réexamen des méthodes de travail, des innovations de procédure, voire même des adaptations statutaires.  a)  La gestion par objectifs qui a été instaurée à partir de 2003 dans les cours administratives d’appel à la suite de la loi d’orientation et de programmation pour la justice du 9 septembre 2002 a permis de responsabiliser les juridictions dans la définition des objectifs et des moyens à mettre en œuvre pour les atteindre et ce dans le cadre d’une démarche contractuelle avec le Conseil d’Etat.  Cette démarche va être poursuivie avec l’élaboration de projets de juridiction triennaux dont l’objectif est de dessiner en toute transparence des perspectives à moyen terme destinées, d’une part, à programmer l’ajustement des moyens, juridiction par juridiction, de manière progressive et réaliste et, d’autre part, à donner aux juridictions la prévisibilité nécessaire pour leur permettre de projeter leur organisation et leurs méthodes de travail sur les trois années à venir. Les projets de juridiction permettent de procéder à un bilan critique de l’existant, de fixer sur cette base des objectifs précis adaptés à chaque situation particulière et de définir les moyens et méthodes à mettre en œuvre pour les atteindre. Leur cadre général a été discuté avec le secrétariat général du Conseil d’Etat lors des conférences annuelles de gestion à la fin de 2008. Les projets sont en cours d’élaboration au sein des juridictions avec la participation des magistrats et des agents de greffe.  La section du contentieux du Conseil d’Etat a également choisi de s’inscrire dans une telle démarche et elle a adopté, au terme d’un processus de conception et de préparation très intense et participatif, un projet fixant ses objectifs quantitatifs et qualitatifs pour les trois prochaines années à la fois sur les résultats qu’elle s’assigne, les méthodes qu’elle souhaite mettre en œuvre et les actions qu’elle entend développer pour apporter sa contribution aux actions d’ensemble de la juridiction administrative au service de son unité et de son rayonnement.  Tout ce processus de gestion par objectifs est mené, j’y insiste, en concertation avec les juridictions et à partir de leurs propositions. Il serait inconcevable que les objectifs soient fixés d’en haut, sans qu’un dialogue de gestion ouvert, compréhensif et constructif n’ait d’abord eu lieu avec elles et sans que chaque juridiction, sous l’autorité de son président, n’en ait préalablement débattu. La démarche des projets de juridiction offre en effet à chacun, magistrat ou agent de greffe, l’occasion de s’inscrire dans une réflexion collective approfondie dans un horizon élargi portant sur les objectifs poursuivis, sur l’organisation et les méthodes à mettre en place, sur l’ensemble des aspects de la vie de la juridiction et sur la qualité du service public rendu aux justiciables.  b)  L’amélioration des méthodes de travail repose aussi sur une refondation de la mission permanente d’inspection de la juridiction administrative.  Cette mission est appelée à être recomposée. Après que la loi aura été modifiée, elle devrait comprendre des membres de la juridiction administrative de première instance et d’appel ayant exercé les fonctions de chef de juridiction et de chef de greffe et plus seulement
 
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des membres du Conseil d’Etat. La méthologie des inspections a été revue pour que celles-ci soient à la fois plus transparentes dans leurs objectifs et leurs méthodes et plus contradictoires dans leurs résultats : les observations des présidents des juridictions sont désormais recueillies et annexées aux rapports. Le traitement des informations recueillies pendant les inspections est également en cours de clarification et d’unification. Les rapports d’inspection sont dès maintenant rendus publics dans les juridictions concernées.  Par ailleurs, la mission permanente d’inspection joue un rôle d’appui aux réformes : elle est en effet chargée de mener à bien des études préalables, des sortes d’études d’impact, sur certaines réformes envisagées : par exemple, l’introduction d’une action collective en droit administratif, mais aussi des réformes portant sur l’organisation et le fonctionnement des juridictions, comme les effectifs de référence des chambres dans les tribunaux administratifs en nombre de rapporteurs, la gestion des enquêtes publiques ou celle de l’aide juridictionnelle. La composition des groupes de travail chargés de ces études permet d’associer très largement les membres les plus qualifiés et les plus motivés de tous les niveaux de la juridiction administrative. Dès maintenant, la mission permanente d’inspection a cessé d’être exclusivement une instance de contrôle pour devenir aussi une force d’évaluation et de proposition des réformes envisagées.  c)  L’amélioration de l’efficacité de la juridiction administrative implique aussi de redéfinir une stratégie de gestion des contentieux et d’adapter nos procédures.  α ) Il est souhaitable, en premier lieu, de limiter dans la mesure du possible les flux contentieux en développant les modes alternatifs de règlement des litiges. L’extension des recours administratifs préalables obligatoires, sans pouvoir être systématique comme en Allemagne, présenterait de nombreux avantages : cette procédure bénéficie en effet aux citoyens en leur offrant un cadre simple, peu coûteux et rapide de règlement des litiges en équité et pas seulement en droit. Elle est utile à l’administration qui peut réexaminer ses décisions, corriger ses erreurs et ses malfaçons et connaître plus clairement ses dysfonctionnements et les réactions des usagers. Elle est aussi à l’avantage du juge, dont le prétoire peut être désencombré de quelques contentieux de masse. L’exemple du recours administratif préalable contre les décisions individuelles concernant la carrière des militaires et, dans une moindre mesure, les refus de visa montre la pertinence d’une telle procédure, lorsqu’elle est assortie de moyens suffisants et qu’elle est pratiquée avec un réel souci de réexamen des décisions.  Il est proposé, parmi d’autres mesures, d’étendre -tel est l’objet du rapport du groupe de travail présidé par O. Schrameck, qui a été adopté par l’assemblée générale du Conseil d’Etat en mai 2008- cette procédure à quatre domaines dans lesquels la jurisprudence est clairement établie et qui sont confrontés à un afflux ou un risque d’afflux massif de requêtes : l’invalidation des permis de conduire à la suite de la perte des points qui y sont attachés ; les litiges relatifs à la fonction publique civile ; certaines catégories de refus de titres de séjour d’étrangers et certaines décisions relatives à la situation des détenus. Les recours contentieux en ces matières, qui représentent près du tiers du contentieux en premier ressort dans les tribunaux administratifs, pourraient en effet être utilement précédés par un recours préalable obligatoire dont les modalités seraient adaptées aux particularités de chaque matière. En aucun cas, bien sûr, les personnes concernées ne seraient privées du droit d’accès au juge en cas d’échec du recours administratif.  
 
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β ) S’il nous faut, en amont du juge, prévenir les contentieux et régler autrement les litiges, il nous faut aussi en aval de cette saisine poursuivre la diversification des voies procédurales, réformer la mise en état des affaires et la clôture de l’instruction et apporter des réponses innovantes aux contentieux de masse.  - Il n’est bien sûr pas question de revenir sur la collégialité assortie des conclusions du rapporteur public qui constitue la « signature » de la juridiction administrative et, en particulier, une garantie essentielle de qualité de la justice rendue. Cette procédure doit être maintenue dans les affaires dont la complexité juridique ou des circonstances de fait le justifient, c’est-à-dire dans la majorité des affaires. Mais ne faut-il pas envisager de confier à un juge unique l’examen de requêtes relevant de facto de « séries », c’est-à-dire de requêtes répétitives et presque identiques présentant à juger des questions de droit qui ont déjà été tranchées ? La question se pose, même s’il est clair que les marges de manœuvre, s’agissant de l’extension de l’office du juge unique, sont désormais très limitées. Quelle que soit la réponse apportée à cette question, il paraît légitime de réexaminer, au vu de l’expérience acquise depuis le décret du 24 juin 2003, les matières qui relèvent aujourd’hui du juge unique et de réfléchir également au découplage éventuel entre les litiges relevant du juge unique et ceux qui ne peuvent faire l’objet d’un appel.  - De même, il semble, cette fois plus clairement, souhaitable de circonscrire l’intervention du rapporteur public et, notamment, de renoncer à ses conclusions, le cas échéant avec son accord, pour certaines catégories d’affaires ne présentant à juger que des questions de fait. Pour de telles affaires, les productions écrites des parties et le débat oral à l’audience devraient suffire à éclairer le juge. D’une manière générale, le renforcement du dialogue interactif à l’audience permettrait, en évitant la redondance fastidieuse des mémoires écrits et des observations orales, d’éclairer utilement la formation de jugement et de donner à l’audience plus d’intérêt et de visibilité. Corrélativement, il paraît légitime et même souhaitable que les rapporteurs publics puissent s’investir davantage dans l’étude des affaires complexes pour lesquelles leur valeur ajoutée est indispensable mais auxquelles ils ne peuvent en l’état consacrer un temps suffisant.  - Il apparaît également nécessaire de mettre en place une stratégie plus déterminée d’aide à la décision, afin que les magistrats puissent disposer à terme rapproché d’un assistant à temps plein par chambre, ce qui peut justifier le recrutement, à côté des actuels assistants du contentieux qui sont des fonctionnaires titulaires, d’agents contractuels à temps plein sur des contrats à durée déterminée. Dans chaque sous-section et au bureau des référés du Conseil d’Etat, une équipe d’aide à la décision apporte un concours précieux à l’examen des dossiers et à la préparation des décisions.  - Au-delà de la diversification des voies procédurales et des méthodes de travail, il faut aussi profondément repenser, en amont de l’audience, l’organisation des échanges contradictoires et mieux éclairer les parties sur les échéances d’inscription au rôle. Bref, il faut profondément rénover la mise en état des affaires afin que celle-ci soit plus transparente et visible, plus prévisible, plus efficace et, pourquoi pas, plus contradictoire. Un groupe de travail présidé par Serge Daël, président-adjoint de la section du contentieux du Conseil d’Etat et ancien président de la cour administrative d’appel de Douai, m’a remis des propositions en ce sens. Elles visent notamment à instaurer un calendrier prévisionnel d’instruction, à fixer à l’avance la clôture de l’instruction, à instaurer une procédure d’injonction sous astreinte pour obliger une partie à produire une pièce ou un élément utile à la solution du litige. Il est même proposé de permettre la suspension de l’exécution d’une
 
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décision administrative dont l’auteur se serait abstenu, sans motif légitime, de défendre dans le délai imparti.  Dès la rentrée de septembre 2009, une expérimentation sera engagée « à droit constant » dans les juridictions volontaires qui seront dotées à cet effet des outils informatiques nécessaires. D’une manière générale, les possibilités offertes par les technologies de l’information seront pleinement utilisées : c’est sur elles que l’on prend déjà ou que l’on prendra appui pour communiquer le sens des conclusions des rapporteurs publics et pour mettre en œuvre les calendriers d’instruction. Quant aux téléprocédures, elles permettent, outre leurs bénéfices en termes écologiques et de gestion d’archives, d’accélérer et de simplifier progressivement les échanges et d’en réduire le coût.  - Enfin, comme je l’ai indiqué, une réflexion a été engagée pour introduire en droit administratif une action collective afin de prévenir et traiter plus efficacement les contentieux sériels. Un rapport vient de m’être remis en ce sens par un groupe de travail que j’avais mandaté à cet effet. Sans nier la complexité du dispositif et son apparente lourdeur, il recommande la création d’une telle action qui permettrait à une association ou un syndicat de déposer une requête tendant à la reconnaissance des droits individuels d’un nombre indéterminé de personnes ayant le même intérêt ou une requête tendant à la reconnaissance de la responsabilité d’une personne publique, hors le cas de préjudice corporel. Il suggère, ainsi que je l’ai indiqué, d’expérimenter, le cas échéant, la mise en œuvre d’une première étape de cette réforme.  Cette réforme, qui soulève des problèmes nombreux et délicats mais qui peut apporter une réponse efficace à des contentieux sériels résultant du refus de l’administration de prendre en considération des jurisprudences solidement établies, devra être attentivement débattue, avant qu’il ne soit décidé de la suite à lui donner.  d) C’est peut-être sous la rubrique de l’objectif d’efficacité et de qualité de la justice rendue qu’il faut également évoquer plusieurs propositions de réforme statutaire : en particulier celles qui consistent à mettre en place une procédure spécifique de sélection et ensuite de formation des chefs de juridiction ; à limiter à sept ans la durée de leurs fonctions sur un même poste et à prévoir une assistance particulière aux chefs des cours d’appel et des tribunaux les plus importants, pour l’accomplissement des tâches de direction et de gestion qui leur incombent, par l’affectation d’un vice-président ou d’un président-adjoint expérimenté pouvant avoir vocation à présider ultérieurement une juridiction.  L’ensemble de ces mesures sont de nature à concourir à l’amélioration du fonctionnement des juridictions.  Telle est notre stratégie en la matière dans la continuité des réformes conduites depuis plus de deux décennies.  Il convient maintenant d’évoquer les enjeux et les défis nouveaux auxquels doivent répondre les réformes en cours.  
 
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II – Répondre aux enjeux et aux défis nouveaux.  Ces enjeux et ces défis sont au nombre de trois : renforcer les garanties du procès équitable, rendre plus effective l’unité de la juridiction administrative et ouvrir cette juridiction sur l’extérieur.   A – Le premier enjeu consiste à renforcer les garanties du procès équitable.  Certes, l’intégration du droit européen et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme a déjà convaincu dans le passé la juridiction administrative de la nécessité de « donner à voir » son impartialité, afin d’établir des relations plus confiantes avec les justiciables. Ainsi par un décret du 22 janvier 1992, dont les dispositions sont codifiées à l’article R 611-7 du code de justice administrative, le caractère contradictoire de la procédure a été affermi par l’obligation faite au juge administratif de communiquer aux parties les moyens d’ordre public qu’il envisage de soulever. C’est dans la même optique qu’a été approfondie la jurisprudence (1) et précisée la réglementation sur la note en délibéré, laquelle a été intégrée dans le code de justice administrative par le décret du 19 décembre 2005 codifié à l’article R 731-3 de ce code, ou encore qu’a été fixée la jurisprudence sur les conséquences d’un revirement avant l’audience de la position du commissaire du gouvernement (2) . De même, la place de ce magistrat au regard du délibéré a été définitivement arrêtée par le décret du 1 er  août 2006 après les arrêts Kress (3)  et Martinie (4)  de la Cour européenne des droits de l’homme. On pourrait encore citer la procédure mise en place lorsqu’est invoquée l’irrégularité de la consultation du Conseil d’Etat sur un projet de décret : le juge s’adresse alors au Gouvernement aux fins de faire préciser si le texte publié est conforme à l’avis du Conseil ou au projet initial.  Mais après cette période de réponse, somme toute a minima, à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme -la doctrine a d’ailleurs cru pouvoir discerner derrière telle ou telle jurisprudence ou réglementation une discrète stratégie de contournement, à moins qu’il ne s’agisse de « containment »-, la juridiction administrative fait des exigences du procès équitable une priorité. Elle y répond désormais sans restriction et sans combat d’arrière-garde.  Cette prise en compte vaut pour notre organisation, notre procédure, voire même notre statut.  1) S’agissant de l’organisation de la juridiction administrative, la prise en considération de l’équité et de l’impartialité concerne au premier chef le Conseil d’Etat. En raison de sa dualité fonctionnelle, qui est la marque de son identité avec ses fonctions consultatives et sa compétence contentieuse, il doit être particulièrement attentif à rendre l’impartialité de ses membres évidente aux yeux de tous et à la mettre au-dessus de tout soupçon.  
                                                 (1)  CE 12 juillet 2002, M.et Mme Leniau, Rec. p. 278 ; section 11 février 2005, Commune de Meudon, Rec. p. 55. (2) CE 5 mai 2006, société Mullerhof, Rec. p. 233. (3) CEDH 7 juin 2001. (4) CEDH 12 avril 2006.
 
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