VENTS D EST, VENTS D OUEST
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Ami lecteur, es-tu pétophile ou pétophobe ? Peut-être pétomane ! Avec un T comme dans péTer, non avec un infâme D ! Et seras-tu offusqué(e) par mon étude savante sur les gaz à effet de serre ? Ou au contraire poufferas-tu d’un grand rire libérateur ? À tester illico avec ma page d’écriture dédiée à la romanesque Pearl Buck.

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Publié le 19 juin 2015
Nombre de lectures 19
Langue Français

Extrait



Michel Bellin






VENTS D’EST, VENTS D’OUEST









Une fantaisie écolorectale
pour temps de Crise












Il souffle où il veut, le souffle, et tu entends sa
voix.
Mais tu ne sais pas d’où il vient ni où il va ;
Ainsi de tout natif du souffle.

Parole de Jésus à Nicodème, chapitre 3, verset 8
Traduction d’André Chouraqui.




Poète, prends ton luth ; la nuit, sur la pelouse,
Balance le zéphyr dans son voile odorant…

Musset, Nuit de mai.
En hommage à la romancière Pearl Buck
dont “East Wind, West Wind” (1930)
enfiévra mon adolescence imaginative.

M.B.






Vents d’est, vents d’ouest



n ces temps de crise endémique et de déréliction citoyenne, est-il ici permis E
d'oser une fantaisie pour relâcher le stress social et détendre l'atmosphère
à défaut de l'assainir ? Ni langue de bois ni triomphants flonflons, seule l'humble
et facétieuse musiquette s'exhalant de viscères trop noués et qui rappelleront à
chacun, à chacune, quel que soit son rang, quelle que soit sa fortune, dans le
malêtre comme dans le paraître, que nous sommes des bipèdes, des mammifères, de
souffle en souffle jusqu'à l'ultime et que la honte en la matière n'est pas de
saison. En voici la démonstration : contre notre marasme national, ma fantaisie
écolorectale.
Le pet est plus tabou que le sexe. C’est dit. C’est lâché. Peut-être plus
tabou que la divinité (sauf le dieu Pan, s'entend). Tu peux t'autoproclamer
érotomane, jamais pétomane. Tu peux aspirer à devenir l'émule de Pierre Louÿs,
d'Anaïs Nin voire du Divin Marquis, pas de Joseph Pujol, star du Moulin-Rouge,
qui annonçait à la ronde avec force détonations « le seul artiste vivant du music-
3 hall qui ne paie pas de droits d'auteur ». Oui, en deux mots comme en cent, péter
est inconvenant.
Cela ne sied pas. Surtout en public, surtout lorsqu'on n'a pas de filtre. Ni à
Paris ni à Nantes ni à Marseille. Pas plus devant Beaubourg qu'au fond des
faubourgs. On nique, mais on ne pète pas. On fornique, on ne forpète pas. Et si,
foireux mélomane, tu es surpris en flagrant délit d'éloquence rectale, où que ce
soit, à table, à la gare, à la caisse de l'hyper, à l'église ou devant le ministère de
la Culture ou sur la place St Pierre, ou encore au lit - surtout au lit ! - c'est le
déshonneur, l'infamie sur ton front, plus bas la confusion. Tu es socialement
condamné et, même avec un bon avocat expert en us et coutumes, tu en prends
pour perpète.
Il existe pourtant des civilisations sophistiquées où l'on éructe pour
signifier qu'on a fort bien mangé, où l'homme épouse un autre homme pour dire
qu'il est très amoureux et, last but not least, où l'on pète avec éclat pour
proclamer qu'on est à l'aise. Je connais même des traditions familiales où le pet
fait partie du patrimoine. Comme disait mon grand-père, qui n’était pas de
Boulogne mais bien de Chamonix, à son épouse trop prude : « Pète ma bonne, ça
n’arrive qu’aux vivants ! » Mais chez nous en général, en France s’entend, on a le
pet morose et la vesse traîtresse. J'emploie sciemment le mot “ vesse ”, pour ne
pas te choquer, internaute, mon frère, ni toi non plus ma sœur. Pas question
d'enfiler des verroteries joignant à l'indigne chose des syllabes honteuses, dans
le genre louffes, vannes, pastilles et autres perlouses.
Désormais - je l'ai lu dans le Figaro Madame —, même les mal voyants et
les techniciennes de surface usent de métaphores et parlent très sérieusement
de « phénomène de résonance sphinctérienne ». En fait, j'ignore pourquoi le
Figaro Madame s'est penché sur ce dossier explosif. Les dames, c'est bien
èmeconnu, surtout celles du 16 arrondissement, n'ont pas de derrières. Des pare-
4 chocs tant qu'on veut, des airs bag, mais pas de pots d'échappement. Les
statistiques viennent d'ailleurs appuyer cette pudeur anale puisque, c'est
démontré, les femmes pètent cinq fois moins que les hommes. Moyenne
féminine : 3,28 pets par jour. Moyenne masculine : 16,63. Il reste que les mâles
sont nettement plus performants que les dames et qu'on leur doit les deux
records enregistrés : 30 pets sonores à l'heure et 96 à la journée (Livre des
Records 2008, au chapitre Cris et chuchotements).
Une étude récente permet néanmoins de nuancer mon pessimisme par
rapport à l'interdit et ses conclusions sont encourageantes : 50 % des péteurs
avouent ne se retenir dans aucune circonstance ni situation sociale. Il apparaît
que ces très cool émetteurs de vents naturels obéissent à certains indicateurs
et ont leurs préférences : avec des amis du même sexe, quand ils sont seuls,
lorsqu'ils déambulent au bord de l'océan ou juste avant de quitter une pièce
tandis que 0,5 % des péteurs sondés trouvent irrésistible de s'exprimer durant
les enterrements.
À ce sujet, la Chambre des Comptes, sous la direction du regretté Philippe
Seguin, a épinglé naguère dans son rapport annuel un certain nombre de tricheurs
abusant d'astuces illicites au regard du Droit français, et d'ailleurs dans un but
tout à fait mesquin : « éloigner les soupçons » (Rapport de la Cour des Comptes
2009, pages 2405-2410). Exemples de ces détournements : couvrir le
chuintement du pet en toussant, masquer la détonation en se raclant bruyamment
la gorge ou en simulant un éternuement ou bien, plus grave encore, accuser une
tierce personne, le chat, le chien, son percepteur voire un enfant mineur.
En fait, la Flatuologie dont je parlerai plus loin longuement est une
discipline encore récente, d'où une très lente évolution des mœurs à ce sujet.
Jusqu'au milieu des années 90, les études scientifiques piétinaient. Peu de
chercheurs motivés et surtout peu de cobayes : accepter des capteurs dans le
5 rectum ou passer à la “centrifugeuse ”pour accélérer l'émission des gaz
intestinaux paraissait une grave atteinte à la pudeur et à la dignité humaine.
Autrement traumatisant que les portiques des aéroports ! Mais la science
peutelle se permettre d'être pudibonde et d'être réduite au silence ? Aujourd'hui,
surtout grâce aux recherches américaines (menées rondo à Guantanamo), on sait
qu'un pet captif s'échappe une fois libéré à une vitesse comprise entre 0,1 et 1,1
mètre/seconde, soit 0,36 à 3,96 kilomètres/heure.
Une particularité notable : outre les quatre gaz principaux, on a pu
observer dans 30 à 35 % de la population la présence d'un 5ème gaz, le méthane,
qui avec l'hydrogène rend les détonations inflammables (blue angels), parfois
meurtrières dans les rangs de la Coalition : 12 % des Américains (et 24 % des
GI's encore présents en Irak aujourd'hui) avouent avoir cédé à l'impulsion de
mettre le feu à leurs gaz d'échappement alors que 3% confessent s'être brûlé
les fesses, tandis que seulement 7% des péteurs (civils) hexagonaux
reconnaissent s'amuser à se lâcher dans l'eau du bain et qu'un tiers de ceux-ci
ont déjà tenté de récupérer les bulles avec un verre à dents placé à l'envers
audessus de la baignoire pour les enflammer. Des études encourageantes donc.
Néanmoins, notre société reste très peu permissive, l'Église catholique encore
moins malgré la clairvoyance prophétique du pape François qui – dans le tout
premier texte de son pontificat (à paraître) – va alerter sur les errements
sphinctériens et ses graves conséquences écologiques. Il y a un indéniable
souffle dans cette Encyclique « Laudato si’ » - titre en dialecte d’Ombrie qui a
été préféré au traditionnel latin.
En ce qui me concerne, par rapport au catholicisme pétophobe, j'avoue
avoir évolué, être aujourd'hui désinhibé, soliste heureux, parfois concertiste. Je
dois en effet beaucoup à l'un de mes amants et il convient de lui rendre ici un
hommage détonant. Il s'appelait Gaspard... Il s'appelle toujours, mais nous nous
sommes perdus d'odeur. Chez lui aucun complexe, nulle p

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