SPQR / Nouveaux territoires, Chap. 14-15-16 - Personnalisation : l irruption de l individu dans le territoire
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SPQR / Nouveaux territoires, Chap. 14-15-16 - Personnalisation : l'irruption de l'individu dans le territoire

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Personnalisation : l’irruption de l’individu dans le territoire L’aménagement du territoire n’est plus seulement l’a€aire des politiques, géographes et urbanistes, mais bien désormais un projet de et pour tous. Aujourd’hui, le territoire se discute et se négocie avec des individus-consommateurs-citoyens qui se l’approprient pour en devenir de véritables prescripteurs et acteurs. 76 77 Introduction 14. MON territoire Pour la première fois depuis 1945, le gouvernement ne comporte pas L’aménagement du territoire est bien désormais un pro- et décideurs traditionnels de l’espace public. En ce sens, le jet de et pour tous. Les individus le réaménagent d’abord street art des années 80 et 90 peut se lire historiquement de ministre ou de secrétaire d’Etat en charge de l’Aménagement du territoire, avec leurs pieds : les mobilités redessinent la carte et le comme l’avant-garde artistique de comportements sociaux mais un ministre de “l’égalité des territoires”. Signal faible mais porteur territoire. Ils le réaménagent ensuite avec leur tête, et leur qui se sont largement di usés depuis. Et vont de pair avec de sens, ce glissement sémantique marque de fait la fin d’une époque, volonté grandissante de se constituer en acteurs d’un déve- la tendance de plus en plus a rmée au développement du celle de l’aménagement territorial centralisé et étatique, spécificité française loppement local que l’on souhaite choisi et non plus subi, “personal branding”.

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Publié le 02 octobre 2013
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Langue Français

Extrait

Personnalisation :
l’irruption de
l’individu dans
le territoire
L’aménagement du territoire n’est plus seulement l’a?aire des politiques,
géographes et urbanistes, mais bien désormais un projet de et pour tous. Aujourd’hui,
le territoire se discute et se négocie avec des individus-consommateurs-citoyens
qui se l’approprient pour en devenir de véritables prescripteurs et acteurs.
76 77 Introduction 14. MON territoire
Pour la première fois depuis 1945, le gouvernement ne comporte pas L’aménagement du territoire est bien désormais un pro- et décideurs traditionnels de l’espace public. En ce sens, le
jet de et pour tous. Les individus le réaménagent d’abord street art des années 80 et 90 peut se lire historiquement
de ministre ou de secrétaire d’Etat en charge de l’Aménagement du territoire,
avec leurs pieds : les mobilités redessinent la carte et le comme l’avant-garde artistique de comportements sociaux
mais un ministre de “l’égalité des territoires”. Signal faible mais porteur
territoire. Ils le réaménagent ensuite avec leur tête, et leur qui se sont largement di usés depuis. Et vont de pair avec
de sens, ce glissement sémantique marque de fait la fin d’une époque,
volonté grandissante de se constituer en acteurs d’un déve- la tendance de plus en plus a rmée au développement du
celle de l’aménagement territorial centralisé et étatique, spécificité française
loppement local que l’on souhaite choisi et non plus subi, “personal branding”.
délibéré et non plus imposé. À l’heure de l’individualisme
de l’après-guerre. La perte de lustre de la DATAR, institution planificatrice
triomphant, s’approprier le territoire pour le façonner à ses Car, dans la France des nouveaux territoires, aména-
incontournable dans les années 60 et 70, reléguée aujourd’hui à un simple
souhaits, le rendre conforme à son idéal et à ses aspira- gements et équipements se font sous l’œil de citoyens
cadre d’analyse et d’évaluation, vient confirmer le basculement : la tradition
tions, émerge en tendance sociétale de plus en plus a r- de plus en plus sourcilleux et interventionnistes. Partout
jacobine de l’aménagement du territoire par le haut semble bien
mée. L’Art, le premier, a montré la voie en s’emparant en France, associations et réseaux sociaux s’emparent de
définitivement révolue. Experts, politiques, urbanistes doivent de l’espace public pour le reconfigurer selon ses propres projets et se mobilisent pour les soutenir, les contester, les
désirs, hors de toutes contingences. Pochoirs, gra tis, amender.
désormais composer avec des territoires plus autonomes sous l’e et
mosaïques, tags, a$chages, installations éphémères : le
de la décentralisation mais surtout d’individus de plus en plus acteurs
street art a fait de la rue un espace de création et une gale- L’opposition à la construction de l’aéroport de Notre-Dame-
de l’aménagement de leur propre territoire. Partout, et de plus en plus,
rie universelle. Tels les petits Space Invaders envahissant des-Landes compte évidemment parmi les plus emblématiques
les citoyens interviennent, proposent, s’opposent, animent, défendent
les murs de Los Angeles, Hong-Kong ou Paris et Grenoble, des contestations de projets d’aménagement territoriaux.
l’image et la vision qu’ils se font de leur territoire. Il est loin, bien loin, les artistes de rue ont entrepris une invasion libre, incon- Mais elle est loin d’être un cas unique. À Verdon-sur-Mer,
trôlée et anarchique de l’espace urbain pour repeindre l’association La pointe pour tous, fédérant plus de 5 000
le temps où le baron Haussmann pouvait de quelques traits de règle
“leur” territoire à leur convenance. Contreculture devenue adhérents, a fini, après quatre ans de lutte, par avoir raison du
dans son bureau du Second Empire décider, seul, de redessiner l’urbanisme
“mainstream” (au siège du Medef, Laurence Parisot a ins- projet d’installation d’un terminal méthanier dans l’estuaire
de la capitale.
tallé très en vue derrière son bureau l’œuvre d’un “street de la Gironde. À l’Ile d’Oléron, une association vient de se
artist” américain très connu), et au-delà de débats sans fin constituer pour s’opposer au projet de culture industrielle
sur sa valeur et sa postérité, le street art peut s’interpréter des huîtres en eau profonde, porté par le Comité Régional
comme un mouvement pionnier de réappropriation et de de Conchyliculture. À Lyon ou à Bordeaux, débats, polé-
personnalisation du territoire. Il a fait la preuve en e et miques et recours juridiques retardent jusqu’à présent la
que le territoire n’était plus seulement donné, subi, fixé réalisation d’un grand stade, pourtant souhaité (et voté) par
mais qu’il pouvait bien être mouvant, modifié, façonné, les décideurs locaux et les acteurs économiques.
ré-enchanté par l’intervention individuelle. Sortir l’art des
galeries et des musées pour le mettre dans la rue, c’est en
e et a cher et revendiquer la capacité de chaque anonyme
à être aménageur du territoire, à côté ou contre les experts
78 Personnalisation : l’irruption de l’individu dans le territoire
Personnalisation : l’irruption de l’individu dans le territoire 79 Proposition 1 du Conseil d’analyse stratégique de développer l’emploi et les fi lières industrielles locales et
dans sa note d’analyse de septembre 2012 d’autre part le désir d’une partie de la population de préserver
15. Le citoyen
“La participation des habitants : trois pistes leur cadre de vie.
pour rénover la politique de la ville :
Mettre en place des ‘budgets participatifs de L’appropriation individuelle du territoire génère ainsi
coproducteur
quartiers’ en plaçant les habitants en situation une pression citoyenne croissante sur les décideurs. Gérer
de codécision dans la politique de la ville”. des intérêts et des visions contradictoires du territoire,
faire face à des mobilisations de plus en plus rapides et
Partout, le développement local est rendu plus complexe e" caces grâce aux médias locaux et aux réseaux sociaux
par l’intervention croissante de collectifs de citoyens et devient alors les nouveaux défi s des porteurs de projet
par la montée des confl its d’usage au sein des territoires. d’aménagement. Et les oblige à associer à leurs décisions
Il se crée ainsi une tension grandissante entre d’une part la des habitants qui ne veulent plus que l’aménagement du
volonté d’élus de renforcer l’attractivité de leurs territoires, territoire se fasse sans eux.
L’émergence du citoyen comme acteur territorial change fabrique de co-construction du futur territorial fonctionne
la nature de la démocratie locale. L’enjeu n’est plus seu- comme une vaste plate-forme collaborative associant, aux
lement de recueillir des avis et de consulter la population, moyens de réunions, de débats, de contributions et de fo-
LES MOTS DE LA VILLE DURABLE
mais bien de lui donner les leviers et les moyens de décider, rums en ligne, citoyens et société civile à la défi nition des
(Source : Médiascopie / Bouygues Immobilier)
et donc d’agir. D’abord outils de concertation et de consul- grands axes de développement du territoire. Au sein de la
tation, les instances de démocratie locale vont nécessaire- CUB, plus de 15 000 personnes ont participé à la Fabrique,
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ment devoir se transformer de plus en plus en instances dégageant au fi nal un but (“faire de l’agglomération bor-
de co-production et de co-création. Le mouvement est delaise une véritable métropole au rayonnement européen
amorcé et sans doute conduit à prendre de l’ampleur dans en 2030”), des valeurs territoriales (“une métropole soli-
les années à venir. daire, stimulante, sobre, sensible et singulière”) et douze
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grands travaux métropolitains pour réaliser ces ambitions.
Le département des Alpes-Maritimes a organisé cette an-
n&

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