Madadayo de Kurosawa Akira
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Fiche produite par le Centre de Documentation du Cinéma[s] Le France.
Site : abc-lefrance.com

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Nombre de lectures 39
Langue Français

Extrait

Madadayo
F de Akira Kurosawa
FICHE FILM
Fiche technique
Japon - 1993 - 2h14
Couleur
Réalisateur :
Akira Kurosawa
Scénario :
Akira Kurosawa d’après
les œuvres de Hyakken
Uchida
Tatsuo Matsumura
Résumé Critique
Musique :
Shin’ichiro Ikebe
En 1943, après 30 ans d’enseignement de Madadayo, méditation lumineuse et sereine
l’Allemand, le professeur Uchida annonce à sur la vieillesse et les approches de la mort,
ses élèves qu’il prend sa retraite pour se est le dernier défi de Kurosawa, qui, depuis
consacrer à sa carrière d’écrivain. Il est ova- Rêves (Dreams) présenté à Cannes en
Interprètes :
tionné par les jeunes gens qui lui donnent le 1990, nous délivre son adieu poétique au
Tatsuo Matsumura titre respectueux de Sensei (Maître) et vont monde. Adieu qu’il semble s’émerveiller de
continuer à lui témoigner une attentive perpétuer avec ce dernier opus (dernier en(le professeur)
affection. Chacun de ses anniversaires est date, sinon ultime message de l’«empe-
Kyoko Kagawa fêté par ses anciens élèves lors d’amicales reur»). «Encore un dernier film», c’est ce que
réunions où on lui pose rituellement la nous suggèrent le thème et le titre de(sa femme)
question de savoir s’il est prêt à passer Madadayo (littéralement : «pas encore
Hisashi Igawa dans l’autre monde : « Pas encore ! », est sa prêt»). Telle est, en effet, la formule rituelle
George Tokoro réponse (Madadayo, titre original du film). que le délicieux vieillard qui est le protago-
Lors de sa dix-septième réunion des anciens niste du film prononce à chacun de sesMasayuki Yui
élèves, à laquelle assistent également leurs anniversaires, en réponse à la questionAkira Terao
enfants, le Maître, maintenant âgé de 77 «Maadakaï» (« Etes-vous prêt ?») posée parAei Kobayashi
ans, proclame une nouvelle fois qu’il n’est ses disciples et amis. Apprivoisement
Takeshi Kusaka
«pas encore prêt» et incite les invités à ludique à la mort, en analogie avec le jeu de
chercher en eux-mêmes, «ce qui est le plus cache-cache, où les enfants répètent indéfi-
important» et à se consacrer «de tout leur niment d’antiques formules consacrées
cœur» à sa réalisation. Mais il a un malaise («Loup, y es-tu ?» et «Pas encore prêt»).
et doit être ramené à la maison… Madadayo forme d’ailleurs avec Rêves
une sorte de diptyque puisque ces films
L E F R A N C E
1D O C U M E N T S
offrent deux points de vue complémen- témoigne d’un amour intense de l’exis- affective, une émotion unique, naissant
taires sur la vieillesse, selon un parallé- tence (Kurosawa l’angoissé semble trou- d’une notation quotidienne, de même,
lisme inversé. Alors que Rêves débutait ver la sérénité à s’identifier à cet heu- dans Madadayo, la sensibilité du per-
par des rêves d’enfance (L’Arc-en-ciel, Le reux caractère, à son équilibre enviable). sonnage central, I’écrivain Uchida,
Verger aux pêchers...) et se terminait par De fait, chaque célébration comporte un double du cinéaste, s’attache à des
l’évocation de la vieillesse à travers le aspect positif, résolument optimiste, à objets humbles et proches, comme une
dernier rêve (Le Village des moulins à l’enthousiasme communicatif. Les ban- cabane de jardinier, une mare-anneau
eau), la progression de Madadayo suit quets d’anniversaire rythment la progres- (pour permettre aux carpes de nager à
les étapes du vieillissement pour s’ache- sion du film en soulignant le passage du l’infini !), un jeune saule, un chat
ver, dans le point d’orgue final, sur un temps et la transformation du monde perdu…, à des microfictions qui fonc-
retour rêvé à l’enfance. Dans les deux extérieur. Ainsi le premier banquet, celui tionnent comme autant de moments
films, le grand âge apparaît comme le du 60ème anniversaire, évoque le ration- d’illumination l’histoire des oiseaux qui,
«temps des rêves», du retour privilégié nement du temps de guerre, avec sa libérés de leurs cages au moment de
aux «valeurs d’enfance», selon une rêve- «fondue de viande de cheval» que le pro- l’incendie dû aux bombardements «volent
rie toute bachelardienne. Les chansons fesseur fait humoristiquement passer dans le feu», (I’histoire de la perte du
ou comptines qui scandent Madadayo pour du «cerf» à ses invités ! Puis le ban- chat Nora et celle de l’adoption du chat
jouent ainsi un rôle identique à celui des quet du 61ème anniversaire devient une Kuru, etc.).…
rêves dans Rêves, prétextes à remonter véritable fête (organisée par les disciples Agnès Peck
le temps, à faire revivre, à travers une pour celui qu’ils nomment respectueuse- Positif n°388 Juin 1993
poésie nostalgique, un monde disparu, ment «Sensei», c’est-à-dire «Maître»),
celui du Japon d’autrefois, un Japon fête appelée «Maadakaï», qui ritualise le
rituel et rustique, dont la courtoisie et la fameux jeu évoqué par le titre. Enfin, le
délicatesse apparaissent comme des dernier banquet celui des soixante-dix-
valeurs désuètes dans le monde contem- sept ans, célèbre de façon chaleureuse la Comment parler d’un film tel que
porain (guère apprécié par le «Maître»). longévité de notre sage : on y voit les Madadayo le dernier Kurosawa, en face
A noter que prédomine dans Rêves un enfants et les petits enfants des collé- duquel je suis resté de marbre ? Domine
regret plus poignant, plus angoissé, tan- giens du début ; la société a évolué, le d’abord le sentiment angoissé d’être
dis que Madadayo exprime un senti- Japon est devenu plus opulent, les passé à côté d’un film tardif de grand
ment plus apaisé, plus allégé, quelque femmes assistent désormais à ce qui metteur en scène. Pourtant, Dreams et
chose comme un «regret souriant». relevait autrefois de la beuverie d’étu- surtout le magnifique Rhapsodie en
Le parcours inéluctable du vieillissement diants… août m’avaient impressionné par la
est en effet jalonné, dans Madadayo, L’évocation émue et nostalgique du capacité du cinéaste à basculer du côté
de célébrations dont la convivialité passé, des liens d’affection paisibles, qui d’un art naïf qui plonge, sans contorsions
tendre et heureuse gomme la mélancolie, est déjà par elle-même source d’enchan- ou chicanes mesquines, dans le vif des
en même temps qu’un humour omnipré- tement, trouve dans le minimalisme de questions essentielles. Bien sûr,
sent tempère le sentiment tragique de cette dernière œuvre une simplicité et Madadayo n’est pas vraiment en ruptu-
l’irrémédiable dégradation des choses. une limpidité d’expression confinant à re avec cette manière enfantine qui ne
Cette alliance d’ironie légère et de senti- une sorte de perfection poétique qui laisse subsister que le dessin des corps
mentalité, cet humanisme souriant rap- n’est pas très éloignée de la concision et des décors réduit à son expression la
pellent d’ailleurs un grand film de la elliptique du haïku, forme traditionnelle plus simple. Sauf qu’ici, il y a quelque
maturité de l’auteur et qui, déjà, traitait et intemporelle de la poésie japonaise. chose d’obscène à présenter, sans
de l’acceptation de la mort, le fameux Proches du haïku sont ainsi la référence médiation ou presque, le visage de la
Vivre (1952). On retrouve aujourd’hui le constante à la saison (cf. la série de sénilité. On dira que cette histoire d’un
même humour, en particulier dans le trai- plans faisant se succéder les impressions professeur en retraite, vénéré par ses
tement des groupes, des scènes de ban- automnales, hivernales, printanières d’un élèves et qui refuse de mourir, soutenu
quets (qui évoquent irrésistiblement les paysage), au temps qu’il fait (la pluie, le par ce cri de guerre permanent,
dîners de «ronds-de-cuir» dans Vivre). vent...), mais aussi à l’intimité du foyer, à Madadayo (ce qui signifie pas encore !),
De même, le héros de Madadayo, qui la présence des animaux domestiques, est justement le contre-poison le plus
est un personnage réel, inspiré de l’écri- qui sont ici des personnages à part entiè- efficace que Kurosawa ait pu trouver à
vain japonais Hyakken Uchida, dégage re (cf. Le Journal du chat Nora). De cette peur de vieillir. Mais une gên

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