Personnes âgées dans les régions: Entre sollitude et sollicitude
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Reportage - Personnes âgées dans les régions: Entre solitude et sollicitude Nacer Bouderbala et Mohamed Salem Tayyari, 85 ans (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI) «Si la personne est âgée, son cœur ne l’est pas», dit un proverbe chinois. Sauf qu’en Tunisie, la question des personnes âgées, durant les 23 ans du règne de Ben Ali, a toujours été un instrument de propagande aux mains du régime à l’image des restos de cœur érigés chaque Ramadan. Certes, du point de vue nutritionnel et suivi médical, le bilan reste assez honorable, mais l’Etat ne s’est jamais soucié de la dimension psychologique des personnes âgées en se penchant sur des thèmes comme «la solitude des perss âgées» ou «l’isolement social des pensionnaires des centres de protection des personnes âgées». Pis encore, par rapport au nombre très élevé de pensionnaires, ces foyers d’accueil accusent un manque effroyable en matière de personnel. On a rendu visite au centre de protection des personnes âgées de Grombalia (dans la région du Cap Bon, au nord-est de la Tunisie) pour faire le point sur le quotidien de ses résidents. Reportage. Le centre de protection des personnes âgées de Grombalia figure parmi les 12 centres, y compris le «Centre des Handicapés Mentaux de La Manouba», qui sont sous la tutelle de l’Union tunisienne de solidarité sociale (Utss).

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Publié le 13 mai 2014
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Langue Français

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Re ortae  Personnes âées dans les ré ions: Entre solitude et sollicitude
Nacer Bouderbala et Mohamed Salem Tayyari, 85 ans(Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)«Si laersonne est âée, son cœur ne l’estas», dit unroverbe chinois. Sauf qu’en Tunisie, la question des personnes âées, durant les 23 ans du rène de Ben Ali, a toujours été un instrument de propagande aux mains du régime à l’ima edes restos de cœur ériés chaque Ramadan. Certes, du point de vue nutritionnel et suivi médical, le bilan reste assez honorable, mais l’Etat ne s’est amais soucié de la dimensions cholo i uedes ersonnesâ éesen se penchant sur des thèmes comme «la solitude des personnes âgées» ou «l’isolement social des pensionnaires des centres de protection des personnes â ées».Pis encore, par rapport au nombre très élevé de pensionnaires, ces foyers d’accueil accusent un manque effroyable en matière de personnel. On a rendu visite au centre derotection desersonnes âées de Grombaliadans la région du Cap Bon, au nordest de la Tunisie) pour faire le point sur le uotidien de ses résidents. Reorta e.Le centre de protection des personnes âgées de Grombalia figure parmi les 12 centres, comprisle «Centre des Handicapés Mentaux de La Manouba», qui sont sous la tutelle de l’Union tunisienne de solidarité sociale (Utss). Ce foyer d’accueil des ersonnesâ éesne dateas d’hier comme en témoine soneune directeur, Nabil Slama :
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«Notre centre travaille sous la houlette de l’association régionale de protection des personnes âées de Nabeul. Il s’ait d’une association caritative qui aide les personnes âgées qui ont besoin de soutien moral et matériel. Elle a été fondée en 1965 sous le nom de «Dar Tkia» maisond’accueil etnous travaillons sous la tutelle de l’Union tunisienne de solidarité socialeUtss qui, ellemême, est chapeautée par le ministère des Affaires de la femme et de la famille». Un médecinermanent manue à l’aelCe centre héberge55 personnes âgées : 30 de sexe masculin et 25 de sexe féminin. «Malgré que le centre ait atteint sa capacité maximale, les demandes pour inté rernotre foer continuent d’affluer sans cesse. Nous avons actuellement 23 demandes en attente. Certes, du point de vue soins médicaux et nutritionnel, nous ne manuons de rien. Nous avons mêmeuatre voitures de service, un minibus et un autocar. Mais’avoue que notre centre manque de personnel qualifié surtout au niveau des ouvriers. Trois ouvriers ont pris leur retraite et n’ont pas été remplacés. Nous ne demandons rien, sauf qu’ils soient remplacés !»directeur du centre., souligne le
Le directeur, Nabil Slama, en compagnie des pensionnaires(Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)«ents administratifs, 1 animatrice, 1Le centre compte au ourd’hui huit a ergothérapeute, 4 infirmiers, 4 auxiliaires de vie (tous des femmes) ; 2 médecins bénévoles et aussi membres de l’association, 1 kiné qui fait des prestations de services (trois fois par semaine : mardi, jeudi et samedi), 1 chef cuisinier uitravaille de 7h00us u’à13h30 etun médecins chiatreui nous rend visite chaque lundi et mardi et seulement 4 ouvriers polyvalents». «Nous avons besoin d’un médecin permanent», ajoute Nabil.
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Dans ce centre, 60% des pensionnairessont handicapés(Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)Mais qui dit médaille dit revers de la médaille. Pour être accepté dans ce centre, le dossier du pensionnaire doit répondre à certaines conditions dont l’âge qui doit être su érieurou éal à 60 ans. Or, selon les statistiues uenous a fournies le directeur du centre, parmi les 55 pensionnairesentassés dans 13 chambres pour les hommes et 6 chambres pour les femmes (dont une à 7 lits qui accueille les cas les plus difficiles , ilen a 5 dont la situation est irréulière. «Parmi les 55 pensionnaires, 5 ont moins de 60 ans. Ces derniers ont été introduits au centre avant le 14anvier 2011. A cette éo ue,ce enrede pratique était courant sous la pression des responsables politiques de l’époque. Pour comprendre l’influence de l’ancien régime sur ces pauvres ens, quand ce réime s’est écroulé, pendant les premiers mois de la Révolution, tous les pensionnaires du centre ont eu peur de perdre l’assistance delement, on les avait endoctrinésl’Etat. Car, tout simar l’idée que Ben Ali était leur père et leur protecteur. Il a fallu qu’on les encadre psychologiquement pour les rassurer», ajoute M. Slama.
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Du côté du pavillon réservé aux femmes(Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)E alement,le centre compte dans ses rans 19 pensionnaires qui ont plus de 80 ans (15 entre 81 et 90 ans et 4 à plus de 90 ans), 23 entre 71 ans et 80 ans et 9 entre 60 et 70 ans. Mais ceui interelle beaucoul’attention, c’est le nombre élevé des personnes handicapées qui résident dans ce centre. Au total, selon les statisitiques, le foyer de Grombalia compte dans ses rangs 33 handicapés (5 mentaux, 10 ph siques,9 polhandicapés, 4 visuels et 5 sensoriels . C’estdesàdire 60% pensionnaires. Alors que ce centre ne présente pas de structures adéquates pour accueillir ce genre de personnes âgées.
A l'entrée du secteur réservé aux hommes(Cédit Photo: Abdel Aziz HALI)Pisencore,tou oursseloncesstatistiues, armiles ensionnaires,il ena36 ui présentent des maladies chroniques. C’estàdire 65,45% des pensionnaires (à peu 4
près les 2/3). Rappelons que le centre ne compte pas un médecin permanent. Et que certains cas sont traités soit à l’hôpital de Grombalia soit à l’hôpital Mohamed Taher Maâmouri de Nabeul. Néanmoins, on ne peut passer sous silence le rôle des associations caritatives de laré ionà l’imae des Lions clubui aris l’habitude de prendre en chare les personnes âées nécessitant une intervention chiruricale de la cataracte. La solitude qui tueCôté divertissements, même si le centre fait des efforts pour faire sortir les pensionnaires de leur isolement, cela reste insuffisant.
«Pour ce qui est des activités de divertissement, le centre collabore avec d’autres institutionsour oraniser des excursions. Parmi ces oranisations nous citons: la Faculté des sciences économiques et de gestion de Nabeul, l’Iteract, le Lions Club, l’Association de la dinité. D’autreart, le centre or aniseaussi des sorties en bus. Hélas, parmi les 27 pensionnaires autonomes, seule une quinzaine participe à ces sorties grâce au minibus et l’autocar que possède le centre. D’ailleurs, pendant l’été, il nous est arrivé de louer une maison au bord de la plage pour que les pensionnaires puissent aller se bainer. Et durant les fêtes reliieuses, comme le Mouled, nous oranisons en collaboration avecd’autres associations des spectacles de «soulami (chants religieux) sans parler des ateliers d’activités manuelles qui ne sont pas très suivies», renchérit le directeur du centre.
Manoubia Fallous (77 ANS), 37 ans au Centre (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)Or, il suffit d’aller à la rencontre de ces personnes âgées pour réaliser à quel point ils se sentent seuls dans cet univers. En effet, àart uelues ensionnaires ui bénéficient d’une autorisation de sortie chaque jour, les autres pensionnaires sont condamnés à rester dans le centre comme en témoigne la plus ancienne résidente du centre37 ans au compteur , Manoubia Fallous, 77 ans, oriinaire de Oued El KhatefKélibia. Elle était, dans sa chambre, assise par terre sur un tapis à côté de
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son lit. «Ça fait longtemps que j’habite dans ce centre. La vie dans ce foyer est monotone. Des hauts et des bas. Certes, ilsrennent soin de nous duoint de vue médical, il n’empêche qu’ila quelques carences. Par exemple,e suis malvoyante, et j’aime écouter la radio et surtout l’Astre de l’Orient Oum Kalthoum. Mais, hélas, certaines pensionnaires exploitent mon handicap pour me piquer le poste.De plus, j’adore le henné et surtout aller au bain maure car ’ai eurde la doucheuand il fait froid». L’exil...Dans le même pavillon, nous avons rencontré un autre cas très intriguant. Il s’agit de Zina Arbi, 63 ans, aveule, oriinaire de Tel El Ghozlane, déléation de NebeurLe Kef (Nordouest de la Tunisie).
Zina Arbi, 63 ans (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)Cettedameorphelinedupère etdelamèreaintégréen1969lecentreduKef.Mais en2002,elleaétémutéeabusivementaucentredeGrombaliatoutsim lement parce qu’elle était très critique viser du Kef.àvis des conditions de vie au fo «Je ne demande rien, seulement de me faire revenir dans ma réion. J’ai de la famille làbas et ils pourront me rendre visite. Alors qu’ici, je n’ai personne. C’est in uste ceui m’est arrivé. Lesrisonniers ont étéraciés et libérés. Quant à moi, voilà onze ans que je n’ai cessé d’écrireaux responsables pour me faire raatrier dans ma réion. Même le directeur du centre de Grombalia a écrit plusieurs lettres aux responsables. Et à chaque fois, ils nous répondent 6
comme suit : nous sommes désolés, nous n’avons pas de place vacante. Je me suis même adressée au président provisoire de la République M. Moncef Marzouki lors de sa visite au centre. Mais rien n’a été fait. Ma requête est restée lettre morte. S’il vouslaît, aidezas mourir loin de mamoi. Je ne veux ré ion», a oute Zina.
Une cohabitation à reformer (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)Danslesecteurréservéauxhommes,MohamedSalemTa ari,85ans,oriinaire deGrombalia,estunpensionnairequiestvenuaucentredesonpropregré.
«J’ai intégré le centre depuis quatre ans. C’était de mon plein gré ! Avant que je débar ueici, endant30 ans,’habitais avec la famille Ben Yedder. Sincèrement, cette famille était trèsentille avec moi, mais avec l’âe, ’ai pensé qu’il était plus judicieux que j’intègre le centre pour préserver ma dignité et pour ne pas peser lourd sur cesens qui étaient comme une deuxième famille pour moi», souligne ce pensionnaire, l’une des rares personnes qui bénéficient d’une autorisationour sortir.
«Chaque jour, je quitte le centre à 8h30 pour aller siroter un café en compagnie de quelques amis retraités ou de quelques proches. Vers 11h30,e rentre au centre pour le déjeuner. Et tout au long de l’aprèsmidi je m’assois dans le ardin en coma niede mon ami Nacer Bouderbalaour boire ensemble un verre de thé. Honnêtement,e ne m’ennuie pas dans le centre. Nous sommes bien traités et, d’ailleurs, l’association m’a permis avec une autre pensionnaire Mabrouka defaire la Omrale petit pèlerinae à la Mecque », renchérit M.S. Tayyari.
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Dans l'indifférence totale... (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)Enfin, il reste à signaler que le centre a été doté depuis 1998 d’une unité mobile qui parcourt les 16 déléations duouvernorat de Nabeul. Cette unité mobile apporte de l’aide aux personnes âgées vivant dans un cadre familial très diminué. C’est l’assistante socialeui évalue les cas à soutenir,uis elle remet aux resonsables du centre les dossiers pour intervenir. Chaque trois mois, le centre livre, dans ses deux voitures réservées à cette unité, deux types de colis: un colis alimentaire (entre 12 et 14 kde pâtes et des boîtes de tomateet un colis rempli de vêtements (manteau+pull+lingerie, soit un total de 4 à 6 pièces), sans compter les couches pour adultes 2a uetsar mois selon les besoins , les couvertures durant laériode hivernale, les produits d’hygiène (savon vert+ 1 bouteille de shampooing de 1L+1 paquet de poudre à lessive de 2 kg) et le vaccin antigrippe.
«Actuellement, nous comptons35 bénéficiaires à Menzel Temime et 183 âmes réparties sur tout le Cap Bon. Chaque équipe de l’unitéest composée d’un chauffeur, d’un agent représentant le centre, d’un infirmier, d’une assistante sociale et d’un médecin déêché arla direction réionale de la santé. Nous prenons aussi en chare les médicaments prescrits par le médecin. Grâce au budget alloué aux médicaments (9.500dt/an), nous n’avons jamais trouvé de difficultés pour approvisionner les personnes âées en médicaments. D’ailleurs, nous transportons toutes les personnes âgées qui sont sous notre tutelle soitceux du centre ou bien ceuxris en chare arl’unité mobileàleurs rendezvous médicaux, quelle que soit la distance à parcourir. Je le répète pour la enième fois, nous ne manquons de rien, à part le personnel qualifié et les ouvriers», conclut le directeur du centre.
Photos et Reorta 
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e: Abdel Aziz HALI
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Zied Gharbi: L’homme à tout faire
Zied Gharbi, 26 ans, ouvrier polyvalent au centre de protection des personnes âgées de GROMBALIA (Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)ÇafaitneufansqueZiedGharbi(26ans)trava illecommeouvrierdanslefoyer d’accueil des personnes âées de Grombalia. A première vue, plusieurs diront que ce jeune devrait s’estimer heureux d’avoir un job avec un salaire mensuel de 480 DT. Sauf u’ilsuffit delon erun eudans sonuotidien our se rendre comte du calvaire que peut vivre un ouvrier de ce genre, surtout quand l’établissement en question accuse un manque d’ouvriers dans ses rangs.
és par la masse de travail. Ils sont deser, les ouvriers sont submer«Au fo polyvalents: ils nettoient l’établissement, s’occupent de l’hygiène des pensionnaires douche,chan ementde couches, habillae, etc. , servent les repas et les collations, etc.», souligne Nabil Slama, le jeune directeur du centre. Et Zied n’échae ointà cette rèle.«J’ai intéré le centre comme ouvrier intérimaire en 2004. Ce n’est qu’en 2011 que j’ai pu décrocher un contrat. Au début, mon recrutement était pour occuper le poste de chauffeur, mais à cause de petites combines au niveau de la direction, j’ai fini par endosser la blouse de l’ouvrier. C’était la loi de marche ou crève!», assène Zied.
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Zied en train de raser l'un des pensionnaires du centre(Crédit Photo: Abdel Aziz HALI)En effet, à l’imae des trois autres ouvriers du centre, Zied souffre le martre avec le volume de travail qui l’attend chaque jour de 7h00 à 14h00. Il lui arrive même de rentrer chez lui à 16h00. «Je suis très épuisé. Chaque jour,j’ai à ma charge entre 9 et 13 pensionnaires. Je les aide à prendre une douche. Vous ne pouvez pas imaginer la situation quand on fait face, dès le matin, à de multiples situations complexes. Sans parler des efforts fournis pour aider ces pensionnaires à faire leurs toilettes convenablement. Et chaue mercredi,our de coné hebdomadaire du coiffeur, je suis contraint de le remplacer pour raser les barbes des pensionnaires», ajoute Zied. Et leob de Zied ne s’arrête pas là. Vu le manque de personnel, ceeune homme assure d’autres tâches, comme servir les repas, déplacer des meubles, décharger les roduitsalimentaires dans le maasin et il lui arrive même deouer le rôle de croquemort quand un pensionnaire décède. «Nous travaillons dans des conditions très difficiles. Honnêtement, sie trouve un autreob plus clément que celuin’hésiterai pas une seconde à claquerci, e la porte. Je vous assure, il n’y a que les louanges de ces pauvres pensionnaires qui nous encouraent à poursuivre le travail. Leur bonne parole nous réconforte et nous apporte l’espoir d’avoir des jours meilleurs car tout se a edans ce monde. Rien n’estratuit. Exceté larâce du bon Dieu», conclut Zied. Abdel Aziz HALI
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