La reconnaissance internationale, déclin ou renouveau ? - article ; n°1 ; vol.39, pg 7-40
35 pages
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1993 - Volume 39 - Numéro 1 - Pages 7-40
34 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 20
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

M. le Professeur Joe Verhoeven
La reconnaissance internationale, déclin ou renouveau ?
In: Annuaire français de droit international, volume 39, 1993. pp. 7-40.
Citer ce document / Cite this document :
Verhoeven Joe. La reconnaissance internationale, déclin ou renouveau ?. In: Annuaire français de droit international, volume
39, 1993. pp. 7-40.
doi : 10.3406/afdi.1993.3118
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1993_num_39_1_3118FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL ANNUAIRE
XXXIX - 1993 - Editions du CNRS, Paris
LA RECONNAISSANCE INTERNATIONALE :
DÉCLIN OU RENOUVEAU ?
Joe VERHOEVEN
La reconnaissance a suscité de longue date d'abondants commentaires
doctrinaux. Le fait se constate aisément. Le débat est loin pourtant de
remonter aux origines mêmes du droit des gens. Il faut attendre en effet la
fin du XIXe siècle pour que la doctrine s'interroge sérieusement sur une
«reconnaissance» dont la portée, politique ou juridique, demeure largement
imprécise. Les bouleversements suscités par l'irruption brutale du socialisme
dans un monde jusqu'alors idéologiquement homogène donneront à l'institu
tion une impulsion décisive. Ce n'est pas que la reconnaissance était aupa
ravant inconnue. Il a fallu toutefois l'avènement du régime bolchevique en
Russie et la proclamation de l'Union soviétique pour que son octroi — ou son
refus — devînt l'objet d'âpres controverses dont l'enjeu, il est vrai, n'est pas
toujours clairement apparu.
Le succès fut, à tout prendre, relativement éphémère. L'URSS, la Chine
communiste, Israël, l'annexion des Etats baltes, quelques gouvernements de
gauche ou de droite en Amérique latine, ... ont été les grands moments de
la reconnaissance. Dans un monde où la coexistence prend peu à peu le pas
sur l'affrontement, reconnaître ou ne pas reconnaître cesse progressivement
d'être un drame cornélien. Avant même que la guerre d'Algérie soit achevée,
la décolonisation — et les profondes réformes structurelles qu'elle implique —
seront réalisées sans qu'il soit réellement besoin d'une reconnaissance la
rgement devenue protocolaire. Nombreux sont par ailleurs ceux qui, après la
France du général de Gaulle, confessent publiquement qu'il n'y a plus lieu
de reconnaître les gouvernements...
L'émoi causé durant un demi-siècle par des «reconnaissances» passion
nément controversées semble ainsi apaisé. Sans doute continuent-elles de
susciter périodiquement de savantes études. Le diplomate abandonne toutef
ois à l'universitaire un outil dont il ne paraît plus, dans les années quatre-
vingt, avoir encore l'usage. L'antagonisme politique n'a certes pas disparu.
Il n'a plus guère besoin toutefois de reconnaissances contradictoires pour s'ex
primer. Dans un contexte où la concertation s'accentue, notamment aux Nat
ions Unies, les Etats s'aventurent de moins en moins dans des décisions
unilatérales dont le résultat devient singulièrement aléatoire.
On aurait pu croire que la disparition de la guerre froide confirmerait
sans ambiguïté ce dépérissement de la reconnaissance. Chacun s'étant, bon
gré mal gré, rallié à la démocratie libérale et à l'économie de marché, il
(*) Joe Verhoeven, Professeur à l'Université catholique de Louvain. LA RECONNAISSANCE INTERNATIONALE
n'est plus de credos idéologiques dont la contradiction puisse fondamentale
ment expliquer que certains appuient ce que d'autres réprouvent, au risque
de nier l'évidence. Sans doute demeure-t-il des incertitudes en tous genres.
Qui oserait encore croire pourtant qu'il convient pour les lever de (ne pas)
reconnaître, si délicate que puisse être la progression sur un terrain qui n'est
pas stabilisé ?
Les lendemains de la chute du mur de Berlin - et de la disparition de
la guerre froide qu'il symbolisait - paraissent bien confirmer le pronostic.
L'Allemagne se réunifie et les Etats baltes renaissent sans que l'on s'attarde
beaucoup sur leur reconnaissance. Celle-ci revient néanmoins à l'avant-plan
avec la dislocation de l'Union soviétique et elle connaîtra lors du démantè
lement de la Yougoslavie ses manifestations les plus spectaculaires. Les Etats
membres de la Communauté européenne ont mis au point pour l'occasion
une machinerie sans réel précédent dans la pratique internationale. De la
(non) reconnaissance, il est toutefois bien d'autres illustrations. Le Conseil
de sécurité a ainsi commandé, dès les premières heures de l'agression ira
kienne, de ne pas reconnaître l'annexion illégale du Koweit (1). La lente ago
nie du régime du maréchal Mobutu au Zaïre a vu les autorités rivales s'y
multiplier. «Nous ne reconnaissons personne», a précisé le président Mitte-
rand (2). Israël et l'OLP se sont reconnus à la face du monde, sous les vivats
de l'opinion (3), quelques années après la proclamation d'un Etat de Palestine
dont la reconnaissance paraît cependant avoir davantage troublé les juristes
que les politiques (4)... Les exemples pourraient être multipliés.
Il faut ainsi se rendre à l'évidence. La reconnaissance est de retour.
Convient-il de s'en réjouir ? Il est trop tôt pour en décider. Il n'est pas sans
intérêt toutefois de s'interroger sans attendre sur ce qui pourrait avoir changé.
I. - L'AUTEUR DE LA RECONNAISSANCE
Dans la pratique traditionnelle, la reconnaissance apparaît comme une
prérogative des Etats. S'il est vrai qu'elle exprime quelque fonction d'iden
tification indispensable au bon fonctionnement des rapports internationaux,
il n'y a pas lieu toutefois de la leur réserver. Tout autre sujet du droit des
gens devrait être également appelé à (ne pas) reconnaître. Théoriquement,
la conclusion est certaine. Pratiquement, elle ne se vérifie pas. Hors les Etats,
nul ne semble à l'ordinaire soucieux de reconnaissances, même parmi les
organisations internationales. Ce qui laisse croire qu'elle sert les intérêts
«subjectifs» de ceux qui contrôlent la société internationale plus qu'elle ne
remédie à de prétendues déficiences «objectives» de celle-ci...
(1) Voy. la résolution 662, § 3, du 9 août 1990 et J. Verhoeven, « États alliés ou Nations
Unies ? L'ONU face au conflit entre l'Irak et le Koweit», AFDI, 1990, 146-149.
(2) Déclaration faite en octobre 1993, à propos des gouvernements d'Etienne Thisekedi (op
position) et de Faustin Birindwa (Mobutu) (Le Monde, 20 octobre 1993).
(3) Voy. l'échange de lettres Yasser Arafat-Yitzhak Rabin, datées du 9 septembre 1993, dans
lequel « l'OLP reconnaît le droit de l'Etat d'Israël à vivre en paix et dans la sérénité » tandis que
« le gouvernement d'Israël a décidé de reconnaître l'OLP comme représentant du peuple palesti
nien » {Libération, 10 septembre 1993).
(4) Comp. à ce propos F.A. Boyle, «The Creation of the State of Palestine», IEJIL/JEDI
(1990), qui dénombre 114 reconnaissances, et J. Salmon, « La proclamation de l'Etat palestinien »,
AFDI, 1988, 37 ss ; contra, J. Crawford, « The of the State of Palestine : Too much Too
Soon », IEJIL/JEDI (1990), 307-313. LA RECONNAISSANCE INTERNATIONALE
En 1945, d'aucuns ont suggéré que l'Assemblée générale de l'ONU fasse
des recommandations sur la reconnaissance des Etats — voire des gouverne
ments — nouveaux pour éviter que ces naissances déchirent la «famille des
Nations» (5). La proposition a été fermement repoussée. La souveraineté ne
s'accomodait manifestement pas à l'époque d'une manière de décision collec
tive ou collégiale. Un demi-siècle plus tard, rien ne semble devoir infirmer
ce refus. Sans doute l'Organisation doit-elle identifier les autorités avec les
quelles il lui faut traiter pour donner effet à la Charte de San Francisco, ce
qui peut n'être pas simple. Elle n'est guère encline cependant à prêter aux
décisions qu'elle prend en ces matières d'autre vertu que d'être indispensables
à son bon fonctionnement. Seuls ses membres pèsent celles-ci en termes de
«reconnaissance». Ce n'est pas qu'ils cherchent à imputer à l'Or

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