Les Malouines, une plaie faussement cicatrisée - article ; n°1 ; vol.40, pg 194-213
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Description

Annuaire français de droit international - Année 1994 - Volume 40 - Numéro 1 - Pages 194-213
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 12
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Professeur José Manuel Pelaez
Maron
Les Malouines, une plaie faussement cicatrisée
In: Annuaire français de droit international, volume 40, 1994. pp. 194-213.
Citer ce document / Cite this document :
Pelaez Maron José Manuel. Les Malouines, une plaie faussement cicatrisée. In: Annuaire français de droit international, volume
40, 1994. pp. 194-213.
doi : 10.3406/afdi.1994.3189
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/afdi_0066-3085_1994_num_40_1_3189ANNUAIRE FRANÇAIS DE DROIT INTERNATIONAL
XL - 1994 - Editions du CNRS, Paris
LES MALOUINES :
UNE PLAIE FAUSSEMENT CICATRISÉE
José Manuel PELÂEZ MARÔN
SOMMAIRE
Introduction
a) Le profil d'un cas de paléocolonialisme.
b) La guerre qui n'aurait jamais dû avoir lieu.
I. - Une longue après-guerre kafkaïenne
a) Les tentatives de distension.
b) La forteresse des Malouines : autre chose que l'intérêt de la défense.
II. - L'exploitation des ressources
a) La zone d'administration et de protection de la pêche.
b) Autres intérêts.
III. - Intérêt stratégique et exploitation économique, un arrangement efficace
a) La souveraineté, encore sous le parapluie.
b) La transaction commerciale : boutade ou intuition phénicienne ?
(*) José Manuel Pelâez Marôn, professeur à la Faculté de droit de l'Université de Cordoue. LES MALOUINES : UNE PLAIE FAUSSEMENT CICATRISÉE 195
Introduction
Vers la fin 1994, j'ai pu lire dans la presse que le président Menem
serait prêt à «acheter» les Malouines(l); c'est-à-dire faire avec le Royaume-
Uni un marché semblable à celui qui a permis aux U.S.A. d'acquérir la
Louisiane - vendue par la France - et l'Alaska - vendu par les Russes. Il
paraît que cette offre a troublé les Kelpers (2), au point de les diviser. Selon
le journal Clarin, les résultats de l'enquête menée par l'agence britannique
Mori indiquent que 26% des habitants des îles seraient prêts à accepter le
million et demi de dollars que l'Argentine offre par personne. D'autres
observateurs croient même que ce pourcentage serait encore plus élevé. Les
Kelpers donc sont en train de réfléchir et leurs souhaits, jusque-là unanimes
se trouvent partagés depuis que Buenos Aires a fait cette avance. Wendy
Teggart, un des membres du Conseil exécutif des îles, précise : « Le gouver
nement britannique nous a garanti qu'il ne nous abandonnerait pas, mais
qui sait ce qui peut arriver dans cinq ou dix ans? Il y en a sans doute qui
préféreraient toucher cet argent tout de suite plutôt que d'attendre et de ne
rien avoir» (3). En quelque sorte, cette nouvelle - sur laquelle je reviendrai
- met à nouveau à l'ordre du jour l'ancien litige et parallèlement nous amène
à la question de savoir où nous en sommes à présent. Dernièrement, la
Grande-Bretagne et l'Argentine - cette dernière plus sincèrement selon
l'O.N.U. (4) - se sont efforcées d'amoindrir la tension entre les deux pays et
ont signé plusieurs accords concernant la prospection et l'exploitation des
ressources de cette zone - la pêche en particulier - et les communications
entre les îles et le continent. Ceci n'est pas grand-chose mais certains
optimistes y voient un symptôme d'amélioration.
On peut sans doute douter de la véracité de cette constatation mais pour
arriver à la vérité, il faut d'abord savoir quelle était la situation avant le
conflit armé de 1982, ce qu'elle était en décembre 1994 ainsi que l'état actuel
du différend en ce qui concerne le noyau dur de l'affaire, c'est-à-dire la
souveraineté.
a) Le profil d'un cas de paléocolonialisme
D'abord, il faut préciser les raisons qui ont poussé l'Argentine à la
guerre : il est bien connu que le Royaume-Uni occupa de force l'archipel en
1833 (dix ans après la proclamation de la doctrine de Monroe et sans la
moindre protestation de la part des Etats-Unis qui, d'ailleurs avaient cessé
d'être une colonie de la Grande-Bretagne depuis 50 ans à peine). Or, au
XIXe siècle, la conquête coloniale, bien que déjà en déclin et faisant l'objet
de sérieuses critiques doctrinales, était encore reconnue, tout au moins dans
le Concert Européen, comme titre suffisant donnant droit sur un territoire.
Puisque le droit international établit que les effets juridiques d'un fait
doivent être jugés selon les normes en vigueur au moment où ce fait s'est
accompli, il faut conclure que le Royaume-Uni était juridiquement bien
(1) L'Assemblée Générale des N.U. accorda par la R. 2065 (XX) l'utilisation de l'expression
Falklands Islands dans les textes rédigés dans une langue différente de l'espagnol. Mais si l'on
tient compte que le premier établissement colonial organisé fut français et composé, sous le
commandement de Bougainville, par des colons provenant, en grande partie, de Saint-Malo, ce
qui fut l'origine de la dénomination Malouines, et que ce texte n'est évidemment pas un texte
officiel des N.U., j'utiliserai ce nom.
(2) El Pais, Madrid 11 nov. 1994.
(3) Ibidem.
(4) Fernandez Sanchez, P.A. La crisis de las Malvinas. Tesis de licenciatura. Ed. mimeo.
Seville, 1983, p. 46. 196 LES MALOUINES : UNE PLAIE FAUSSEMENT CICATRISÉE
couvert, avant et après l'occupation. Néanmoins, le droit intertemporel mont
re clairement la légèreté de cette norme, car en 1931, à peine un siècle
après, les Etats-Unis condamnaient l'invasion japonaise de la Mandchourie,
au moyen cette fois de la doctrine de Stimson(5) aussi rigoureuse et digne
de foi que celle de Monroe, indépendamment de la politique extérieure de
leur pays d'origine.
Tout ceci montre à quel point le droit international a changé tout au
long de ce siècle, siècle qui a été témoin non seulement des deux plus grandes
guerres dévastatrices de l'histoire - la seconde avec le sinistre épilogue
atomique - mais encore des bouleversements les plus radicaux que la société,
la politique et l'économie aient connus dans un intervalle de temps si court.
En même temps, tout ceci pourrait mener à des débats et à des thèses
historiques bien différentes, mais tout en respectant les contraires, la mienne
est la suivante.
Même si la Grande-Bretagne a joui d'un titre juridique sur les îles
Malouines, le droit international de la fin du XXe siècle l'a formellement
remis en question, allant même jusqu'à le dénoncer, se basant sur des
principes aujourd'hui fermement enracinés, tels que l'accomplissement du
processus de décolonisation, le développement des droits de l'homme de la
troisième génération et les normes du ius cogens international. C'est dans
ce même sens que Gros Espiell a fait remarquer que le droit des peuples à
la libre détermination, noyau actif du processus de décolonisation, conduit
nécessairement à considérer tout colonialisme illicite et antijuridique, ainsi
qu'à déclarer périmés et sans aucune valeur les titres coloniaux (6).
Après la seconde guerre mondiale, le croissant mouvement de décoloni
sation a fourni de nouveaux arguments juridiques aux territoires non-auto
nomes en général et l'Argentine notamment y a trouvé un nouveau support
pour sa revendication territoriale. D'ailleurs, il ne faut pas oublier que
l'Argentine n'a jamais reconnu l'occupation britannique sur un territoire
qu'elle a toujours considéré comme son propre domaine, à tel point que dans
sa politique extérieure, elle a sans cesse réclamé son droit sur l'archipel. Le
Royaume-Uni ne peut donc en aucun cas arguer que l'Argentine ait accepté
tacitement la présence britannique.
Il faut alors considérer les décisions prises par les Nations Unies concer
nant les pays ayant subi un processus de décolonisation puisqu'ils se sont
constitués sur l'ensemble des principes valables pour la majorité des pays
formant la Communauté internationale, pour parler ensuite des cas résiduels
qui n'ont pas encore été résolus (7).
Lors de sa première période de séances, l'Assemblée Générale identifiait
les territoires non-autonomes avec ceux que l'article 73 de la Charte avait
définis, c'est-à-dire, les territoires qui n'étaient pas encore gouvernés par les
peuples qui les habitaient. Elle procla

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