La curée
286 pages
Français

La curée

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Description

La Curée est le deuxième volume de la série Les Rougon-Macquart. Le personnage principal est Aristide Rougon, dit Saccard, qui va faire une rapide fortune en spéculant sur les futurs terrains à bâtir à l'époque des grands travaux menés à Paris par le baron Haussmann. Extrait : Aristide Rougon s'abattit sur Paris, au lendemain du 2 Décembre, avec ce flair des oiseaux de proie qui sentent de loin les champs de bataille. Il arrivait de Plassans, une sous-préfecture du Midi, où son père venait enfin de pêcher dans l'eau trouble des événements une recette particulière longtemps convoitée. Lui, jeune encore, après s'être compromis comme un sot, sans gloire ni profit, avait dû s'estimer heureux de se tirer sain et sauf de la bagarre. Il accourait, enrageant d'avoir fait fausse route, maudissant la province, parlant de Paris avec des appétits de loup, jurant « qu'il ne serait plus si bête » 

Informations

Publié par
Nombre de lectures 43
EAN13 9782824702407
Langue Français

Extrait

ÉMI LE ZOLA
LA CU RÉE
BI BEBO O KÉMI LE ZOLA
LA CU RÉE
1895
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0240-7
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.P RÉF A CE ¹
 ’    et so ciale d’une famille sous le se cond
empir e , la Curée est la note de l’ or et de la chair . L’artiste , en moi,D se r efusait à fair e de l’ ombr e sur cet é clat de la vie à outrance
qui a é clairé tout le règne d’un jour susp e ct de mauvais lieu. Un p oint de
l’Histoir e que j’ai entr eprise en serait r esté obscur .
J’ai v oulu montr er l’épuisement prématuré d’une race qui a vé cu tr op
vite et qui ab outit à l’homme-femme des so ciétés p our ries  ; la sp é culation
furieuse d’une ép o que s’incar nant dans un temp érament sans scr upule ,
enclin aux av entur es  ; le détraquement ner v eux d’une femme dont un
milieu de lux e et de honte dé cuple les app étits natifs. Et, av e c ces tr ois
monstr uosités so ciales, j’ai essayé d’é crir e une œuv r e d’art et de science
qui fût en même temps une des p ag es les plus étrang es de nos mœur s.
Si je cr ois de v oir e xpliquer la Curée , cee p eintur e v raie de la débâcle
d’une so ciété , c’ est que le côté liérair e et scientifique a p ar u en êtr e si
p eu compris dans le jour nal où j’ai tenté de donner ce r oman, qu’il m’a
1. Note de l’é dition ÉF ÉLÉ  : cee préface est dans la cinquième é dition (1876), la
dixième é dition (1877), la tr eizième é dition (1878), mais elle n’ est p as dans les é ditions
vingtcinquième mille (1883), tr ente-quatrième mille (1891) et quarante et unième mille (1895, le
te xte qui a ser vi p our cee é dition ÉF ÉLÉ).
1La curé e Chapitr e
fallu en inter r ompr e la publication et r ester au milieu de l’ e xp érience .
ÉMILE ZOLA.
Paris, 15 novembre 1871.
n
2CHAP I T RE I
  ,  l’ encombr ement des v oitur es qui r entraient p ar
le b ord du lac, la calè che dut mar cher au p as. Un moment, l’ em-A bar ras de vint tel, qu’il lui fallut même s’ar rêter .
Le soleil se couchait dans un ciel d’ o ctobr e , d’un gris clair , strié à l’horizon
de minces nuag es. Un der nier ray on, qui tombait des massifs lointains de
la cascade , enfilait la chaussé e , baignant d’une lumièr e r ousse et pâlie la
longue suite des v oitur es de v enues immobiles. Les lueur s d’ or , les é clair s
vifs que jetaient les r oues semblaient s’êtr e fix és le long des r e champis
jaune p aille de la calè che , dont les p anne aux gr os bleu r eflétaient des coins
du p ay sag e envir onnant. Et, plus haut, en plein dans la clarté r ousse qui
les é clairait p ar der rièr e , et qui faisait luir e les b outons de cuiv r e de leur s
cap otes à demi plié es, r etombant du sièg e , le co cher et le valet de pie d,
av e c leur liv ré e bleu sombr e , leur s culoes mastic et leur s gilets rayés
noir et jaune , se tenaient raides, grav es et p atients, comme des laquais de
b onne maison qu’un embar ras de v oitur es ne p ar vient p as à fâcher . Leur s
3La curé e Chapitr e I
chap e aux, or nés d’une co carde noir e , avaient une grande dignité . Seuls,
les che vaux, un sup erb e aelag e bai, soufflaient d’imp atience .
―  Tiens, dit Maxime , Laur e d’ A urigny , là-bas, dans ce coup é . . . V ois
donc, René e .
René e se soule va légèr ement, cligna les y eux, av e c cee moue e x quise
que lui faisait fair e la faiblesse de sa v ue .
― Je la cr o yais en fuite , dit-elle . . . Elle a chang é la couleur de ses
chev eux, n’ est-ce p as  ?
―  Oui, r eprit Maxime en riant, son nouv el amant déteste le r oug e .
René e , p enché e en avant, la main appuyé e sur la p ortièr e basse de
la calè che , r eg ardait, é v eillé e du rê v e triste qui, depuis une heur e , la
tenait silencieuse , allong é e au fond de la v oitur e , comme dans une chaise
longue de convalescente . Elle p ortait, sur une r ob e de soie mauv e , à
tablier et à tunique , g ar nie de lar g es v olants plissés, un p etit p aletot de drap
blanc, aux r e v er s de v elour s mauv e , qui lui donnait un grand air de
crânerie . Ses étrang es che v eux fauv e pâle , dont la couleur rapp elait celle du
b eur r e fin, étaient à p eine cachés p ar un mince chap e au or né d’une touffe
de r oses du Beng ale . Elle continuait à cligner les y eux, av e c sa mine de
g ar çon imp ertinent, son fr ont pur trav er sé d’une grande ride , sa b ouche ,
dont la lè v r e sup érieur e avançait, ainsi que celle des enfants b oudeur s.
Puis, comme elle v o yait mal, elle prit son bino cle , un bino cle d’homme , à
g ar nitur e d’é caille , et le tenant à la main, sans se le p oser sur le nez, elle
e x amina la gr osse Laur e d’ A urigny tout à son aise , d’un air p arfaitement
calme .
Les v oitur es n’avançaient toujour s p as. A u milieu des taches unies,
de teinte sombr e , que faisait la longue file des coup és, fort nombr eux au
Bois p ar cee après-midi d’automne , brillaient le coin d’une glace , le mor s
d’un che val, la p oigné e ar g enté e d’une lanter ne , les g alons d’un laquais
haut placé sur son sièg e . Çà et là , dans un landau dé couv ert, é clatait un
b out d’étoffe , un b out de toilee de femme , soie ou v elour s. Il était p eu à
p eu tombé un grand silence sur tout ce tap ag e éteint, de v enu immobile .
On entendait, du fond des v oitur es, les conv er sations des piétons. Il y
avait des é chang es de r eg ards muets, de p ortièr es à p ortièr es  ; et p er sonne
ne causait plus, dans cee aente que coup aient seuls les craquements
des har nais et le coup de sab ot imp atient d’un che val. A u loin, les v oix
4La curé e Chapitr e I
confuses du Bois se mouraient.
Malgré la saison avancé e , tout Paris était là  : la duchesse de Ster nich,
en huit-r essorts  ; madame de Lauw er ens, en victoria très cor r e ctement
aelé e  ; la bar onne de Meinhold, dans un ravissant cab bai-br un  ; la
comtesse V ansk a, av e c ses p one y s pie  ; madame D aste , et ses fameux stapp er s
noir s  ; madame de Guende et madame T essièr e , en coup é  ; la p etite Sylvia,
dans un landau gr os bleu. Et encor e don Carlos, en deuil, av e c sa liv ré e
antique et solennelle  ; Selim p acha, av e c son fez et sans son g ouv er neur  ;
la duchesse de Rozan, en coup é-ég oïste , av e c sa liv ré e p oudré e à blanc  ;
M. le comte de Chibray , en dog-cart  ; M. Simpson, en mail de la plus b elle
tenue  ; toute la colonie américaine . Enfin deux académiciens, en fiacr e .
Les pr emièr es v oitur es se dég agèr ent et, de pr o che en pr o che , toute
la file se mit bientôt à r ouler doucement. Ce fut comme un ré v eil. Mille
clartés dansantes s’allumèr ent, des é clair s rapides se cr oisèr ent dans les
r oues, des étincelles jaillir ent des har nais se coués p ar les che vaux. Il y eut
sur le sol, sur les arbr es, de lar g es r eflets de glace qui couraient. Ce p
étillement des har nais et des r oues, ce flamb oiement des p anne aux v er nis dans
lesquels brûlait la braise r oug e du soleil couchant, ces notes

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