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Revue littéraire, 1831Revue des Deux MondesT.1, 1831Revue littéraire, 1831Notre-Dame de Paris, 1482, par Victor Hugo. 2 vol. in-8), ornés de vignettes, dessinées par Tony Johannot, et gravées par Porret.Chez Gosselin, rue Saint-Germain-des-Prés, n° 9. Prix : 15 fr.(Voyez, page 185, ce que nous avons dit du nouvel ouvrage de M. Victor Hugo, qui est déjà à sa seconde édition.)Napoléon Bonaparte, drame en six actes, par Alex. Dumas,.chez Tournachon-Molin, rue du Pont-de-Lodi, n. 5.Les proportions colossales de Napoléon ne vont guère à l’étroitesse du théâtre ; on voit que le grand homme y est mal à l’aise. Ondoit dire cependant que l’auteur a tiré de son sujet tout le parti qu’il était humainement possible d’en tirer, pressé comme il l’était parles exigences de son impresario ; car il y a dans son Napoléon des scènes d’un très-bel effet, celle du Kremlin entre autres. M.Dumas est celui de nos auteurs contemporains qui nous paraît avoir la vocation dramatique la plus prononcée ; il pourra faire uneœuvre imparfaite, mais on est toujours assuré d’y trouver des scènes du plus grand pathétique, du drame en un mot ; chose fort rareaujourd’hui. En tête de Napoléon est une préface politique, dans laquelle l’auteur s’explique nettement, sans détour, quelques circonstances quiont suivi ou précédé la représentation de sa pièce. Cette préface n’a pas manqué de soulever de nombreuses inimitiés ; on a crié àla fatuité, à l’ingratitude, que sais-je ? Ce n’est rien de tout ...

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Revue littéraire, 1831
Revue des Deux MondesT.1, 1831 Revue littéraire, 1831
Notre-Dame de Paris1482, par Victor Hugo. 2 vol. in-8), ornés de vignettes, dessinées par Tony Johannot, et gravées par Porret., Chez Gosselin, rue Saint-Germain-des-Prés, n° 9. Prix : 15 fr.
(Voyez, page 185, ce que nous avons dit du nouvel ouvrage de M. Victor Hugo, qui est déjà à sa seconde édition.)
Napoléon Bonaparte, drame en six actes, par Alex. Dumas,.chez Tournachon-Molin, rue du Pont-de-Lodi, n. 5. Les proportions colossales de Napoléon ne vont guère à l’étroitesse du théâtre ; on voit que le grand homme y est mal à l’aise. On doit dire cependant que l’auteur a tiré de son sujet tout le parti qu’il était humainement possible d’en tirer, pressé comme il l’était par les exigences de sonimpresario ;car il y a dans sonNapoléon desscènes d’un très-bel effet, celle du Kremlin entre autres. M. Dumas est celui de nos auteurs contemporains qui nous paraît avoir la vocation dramatique la plus prononcée ; il pourra faire une œuvre imparfaite, mais on est toujours assuré d’y trouver des scènes du plus grand pathétique, du drame en un mot ; chose fort rare aujourd’hui. En tête deNapoléonest une préface politique, dans laquelle l’auteur s’explique nettement, sans détour, quelques circonstances qui ont suivi ou précédé la représentation de sa pièce. Cette préface n’a pas manqué de soulever de nombreuses inimitiés ; on a crié à la fatuité, à l’ingratitude, que sais-je ? Ce n’est rien de tout cela. M. Dumas a, si l’on veut, le tort d’écrire avec naïveté ce qu’il croit de conviction ; d’autres se contenteraient de le penser et ne l’écriraient pas. Pour nous, nous approuvons fort cette manière franche de procéder ; cette allure sied bien à un homme de talent et d’honneur.
Atar-Gul, par l’auteur dePlik et Plok, 1 vol. in-8°, orné vignettes dessinées par Henri Mounier, pour paraître à la fin d’avril, chez Vimont, libraire, passage Véro-Dodat. 0n dit beaucoup de bien de ces scènes maritimes, qui font suite àPlik et Plok, dont la première édition a été épuisée en si peu de temps. Nous espérons donner un fragment inédit deAtar-Guldans notre prochain numéro.
Soirées de W. Scott, à Paris; par P.-L. Jacob, bibliophile. 2e volume. Chez Eugène Renduel, rue des Grands-Augustins, n° 22. Prix : 7 fr. 5o c. Ce second volume desSoirées de W. Scott, qui s’est fait un peu attendre, n’est pas inférieur au premier, qui a eu tant de succès dans les salons. Il est précédé d’une lettre à l’auteur deWaverley, et contient 1393,le Charivari ; 1460,Guet le; 1479, la Redevance; 1501,les Écoliers; 1574,la Chasse. On voit que le bibliophile Jacob se complait dans le moyen-âge, il en reproduit parfaitement en effet la vive allure, et jusqu’à la grâce, à la force et à la naïveté de son langage. On dirait de bonnes vieilles chroniques retrouvées dans la poussière des bibliothèques. C’est là surtout-la gloire que paraît ambitionner notre pseudonyme, ainsi qu’il le dit lui-même dans la préface de sesDeux Fous. Le second volume, desSoirées de W. Scott, contient trois compositions remarquables,les Écoliers, le Guet, le Charivari. La première est une peinture fidèle des mœurs de cette turbulente université du XVe siècle qu’avait déjà assez bien esquissée l’auteur des Mauvais Garçons. La Chasse, ou la mort de Charles IX., est empreinte d’un intérêt sombre et dramatique, comme ce siècle d’ardentes passions et de haines implacables. On annonce pour paraître incessammentle Roi des Ribauds, du même auteur.
Tableau historique des Révolutions nationales de Pologne, suivant la méthode de A. Le Sage (comte de Las Cases), par A.-J. de Mancy ; in-plano, papier colombier-vélin, avec carte de Pologne, figurant les partages ; colorié, satiné. Prix : 3 francs. Au Bureau de la Revue des Deux.M’ondes.
Le comte de Las Cases, dans son célèbreAtlas de Le Sage, n’a pas traité l’histoire contemporaine de la Pologne. Depuis- les derniers évènemens surtout, cette lacune était très-remarquable. II y a soixante-sept ans que les Polonais luttent, sans se décourager, pour obtenir que l’on n’efface pas le nom de la Pologne de la carte politique d’Europe. Quelle que soit la destinée de cette nation héroïque, dit le professeur J. de Mancy, elle mérite bien qu’on lui accorde une place, au moins dans nos livres d’histoire, au premier rang parmi les plus grands peuples des temps modernes. Tous les faits importans de l’histoire polonaise, depuis le fatal avènement du roi Stanislas-Auguste Poniatowski, sont résumés dans ce tableau, où les rapprochemens piquans et instructifs se présentent en foule. Le collaborateur polonais de M. J. de Mancy, possédant des documens authentiques et puisant aux sources nationales, a été à même de rectifier d’insignes erreurs, et de rétablir un grand nombre de faits omis jusqu’à ce jour dans plusieurs ouvrages très-estimés sur l’histoire de la Pologne. Une partie entièrement neuve dans ce tableau, et qui excitera sans doute un vif intérêt, c’est l’histoire des Polonais qui sont venus volontairement mourir sous les drapeaux de France, en Europe, enAfrique et enAmérique ; l’auteur en porte le nombre àdeux cent mille! L’histoire de la révolution actuelle de Pologne a été conduite par l’auteur jusqu’au 12
mars 1831, jour de la présentation de l’adresse de la garde nationale de Varsovie à la garde nationale de Paris et de toute la France.
Carte de la Pologne, indiquant la répartition du territoire de cette ancienne monarchie entre la Russie, l’Autriche, la Prusse et la république de Cracovie, avec unTableau comparatif des divers démembremens de la Pologne, par Ch. Picquet, géographe du roi. A Paris, chez l’auteur, quai Conti n° 17.
Nous recommandons cette excellente carte de M. Picquet à tous ceux qui veulent suivre la marche des évènemens qui se passent aujourd’hui en Pologne.
Méthodes nouvelles de Dessin d’après nature et de Perspective, à l’usage des voyageurs, des personnes qui passent une partie de leur temps à la campagne, des familles qui tiennent à donner à leurs enfans une éducation soignée, et des amateurs des beaux-arts en général.
Une femme, occupant un rang distingué parmi les professeurs de Paris, madame A. Jarry de Mancy, née Adèle Le Breton, peintre, élève de son père, professeur aux Sourds-Muets, vient de terminer la publication de deux ouvrages, dont le succès ne tend à rien moins qu’à opérer dans l’étude et l’enseignement du Dessin une sorte de révolution utile aux progrès de cet art, et toute dans l’intérêt des familles.
Le Dessin d’après nature et sans maître(suivant la méthode du professeur Le Breton, consistant à faire dessiner d’après nature dès la première leçon), in-folio, texte et planches, en huit livraisons, dont les dernières viennent de paraître. Prix : 40 francs, chez l’auteur, rue du Pot-de-Fer-Saint-Sulpice, n° 20. Cet ouvrage est destiné à des commençans, depuis l’enfant de dix à douze ans jusqu’aux grandes personnes de tout âge. Vous n’avez jamais tenu un crayon : au lieu de vous donner à copier des pages d’yeux, de bouches, d’oreilles, etc., on vous mettra en suivant l’ouvrage de madame J. de Mancy, à dessiner, d’après nature, toute sorte d’objets. Vous commencerez par les plus simples, et vous serez conduit à dessiner des meubles, des intérieurs, des paysages, avant de passer au dessin de la figure et de l’académie, d’après nature ou d’après la bosse. Ce qui distingue surtout cette méthode, c’est de ne laisserdessiner d’après des dessinslorsqu’on s’est bien habitué à quedessiner d’après nature. C’est le contraire de beaucoup d’autres systèmes, qui donnent le plus ordinairement pour résultat des élèves dessinant parfaitement d’après des dessins et ne sachant comment s’y prendre pour dessiner d’après nature, en perspective, les objets les plus simples. Il est arrivé souvent que des personnes se disposant à voyager, soient venues prendre quelques leçons de M. Le Breton et de sa fille, en exprimant leurs regrets de ne les avoir pas connus plus tôt. On cite plusieurs personnes qui, même avant la mise au jour des dernières livraisons de l’ouvrage, s’étaient rendues, sans autre maître que le livre, assez fortes sur le dessin du paysage, d’après nature, pour n’avoir plus besoin que de conseils d’amateurs ou d’artistes pour se perfectionner.
La perspective simplifiée, par la même, 2 vol., texte et planches, prix : 20 francs, chez l’auteur ; à l’usage d’une tr-sgrand nombre de personnes, qui,n’ayant appris à dessiner que d’après des dessins, voudraient cependant se mettre àdessiner d’après nature, ce qui ne peut se faire qu’à l’aide dela perspective.
L’Art du Mariage, poème latin de J. Cats, grand-pensionnaire de hollande, avec le commentaire de Lidius, traduit en français, avec le texte en regard. Un volume in 12. prix : 2 fr. ; papier vélin, 5 fr. A Paris, chez Barrois l’aîné, libraire, rue des Beaux-Arts, n° 15.
Esquisses poétiques, par X. Marinier, chez Barba, au Palais-Royal.
Tel est le titre d’un petit livre qu’on vient de lancer au milieu de nos tourmentes politiques. Le temps nous paraît mal choisi pour faire de petits rêves poétiques en présence de si graves réalités ; il n’est guère donné qu’aux Châteaubriand et aux Victor Hugo de capter pour un moment l’attention publique dans de pareilles crises. Il y a cependant des vers gracieux dans lesEsquissesde M. Marmier ; mais d’avenir de poète, nous ne savons.
Mémoirs of the affairs of Greece, etc. Mémoires sur les affaires de la Grèce, contenant l’histoire des principaux évènemens politiques et militaires arrivés en 1823, et pendant les années suivantes, etc. ; par J. Millingen, chirurgien de la brigade Byron, à Missolonghi, etc. Lond. 1831. In-8°, de 338 pages, chez J. Rodwel,Bond-street.
L’auteur de ces Mémoires se justifie du retard qu’il apporte à leur publication. Il aurait craint, dit-il, de nuire à la cause grecque en les faisant imprimer plus tôt. Toutefois, les inculpations dont il avait été l’objet à l’occasion de la mort de lord Byron lui faisaient un devoir de rendre un compte public de sa conduite, et il nous a paru complètement disculpé des reproches qui lui ont été adressés ; les détails dans lesquels M. Millingen est entré sur les évènemens politiques en Grèce, sont remplis d’intérêt. Les portraits qu’il trace des chefs avec lesquels il s’est trouvé en rapport sont en général aussi d’une extrême vérité ; mais ce qui attache particulièrement dans son livre, ce sont les particularités nouvelles qu’il nous fait connaître sur les motifs qui conduisirent lord Byron en Grèce, et sur sa conduite dans ce pays. M. Millingen dévoile ou blâme quelques-unes des faiblesses du grand poète, et en particulier sa haine injuste et invétérée contre la France.
Cet ouvrage, écrit avec bonne foi et avec une connaissance approfondie des hommes et des choses, sera lu avec plaisir par ceux qui veulent connaître la vérité sur le pays où M. Millingen a fait un long et pénible séjour
La partie botanique du voyage du capitaine Becchy, rédigée et classée par MM. Hooker et Arnott, est maintenant sous presse à Londres. Elle comprend une description des plantes recueillies par MM. Lay, Collie et autres officiers de l’expédition, pendant le voyage exécuté par le vaisseauthe Blossom, de la marine royale, dans l’Océan pacifique et au détroit de Behring. La géologie et la
zoologie ne tarderont pas non plus à paraître.
Le professeur Rosellini et autres savans toscans, qui accompagnèrent M. Champollion en Égypte en 1828 et 1829, vont publier le récit de leurs recherches et de leurs découvertes. L’ouvrage, qui se composera de deux volumes, est intitulé :Relaziono del viaggio fatto in Egitto e in Nubia, della spedizione scientifico-litterario Toscano, négli anni1828-9.
Le révérend M. Threlkeld, du lac Macquarie, dans la Nouvelle-Galles du Sud, vient de traduire l’Evangile de saint Luc dans la langue des naturels de cette partie de l’Australie.
Les missionnaires méthodistes aux îles des Amis y ont publié un petit volume, en 80 pages in-12, intitulé :Livre élémentaire de la langue de Tongatabou. Il renferme, outre une grammaire, un catéchisme, les dix Commandemens de Dieu, des prières du matin et du soir, et plusieurs hymnes.
Depuis 1820, époque de la fondation de la Société biblique de Madras, elle a publié et distribué 70,674 exemplaires de l’Ecriture sainte, traduite dans les dialectes tamil, télougou, canarese et malayalim.
Élévation, par M. Alfred de Vigny ; chez Gosselin, libraire, rue Saint-Germain-des-Prés, n° 9. Ce poème, sorte de rêve symbolique, est détaché d’un recueil inédit et incomplet encore, intitulé :Élévations. Comme il fait voir notre Paris de 1831 sous un aspect politique et philosophique, M. Alfred de Vigny a voulu lui donner sa date. En effet, le temps emporte si vite les évènemens et les impressions qu’ils font naître ! Mais il n’en est pas de même des ouvrages profondément pensés et des compositions véritablement poétiques ; chaque jour les consolide et les grandit encore. C’est le sort qui attend cette nouvelle production de l’auteur deCinq-Mars, du poète d’Eloa. Elle est à la fois de circonstance par le sujet, et de tous les temps pour le talent. La riche imagination, et toute la forte et brillante poésie de M. Alfred de Vigny, se sont jamais alliées à une pensée plus haute et plus sévère. Le poète, planant sur Paris d’une tour élevée, compare la grande ville à une roue immense qui imprime le mouvement à tout le reste. « Vois-je une roue ardente, ou bien une fournaise ?» - Oui, c’est bien une roue ; et c’est la main de Dieu Qui tient et fait mouvoir son invisible essieu. Vers le but inconnu sans cesse elle s’avance. On la nomme PARIS, le pivot de la France. Quand la vivante Rome hésite dans ses tours, Tout hésite et s’étonne, et recule en son cours Les rayons effrayés disent au cercle : Arrête, Il le dit à son tour aux cercles dont la crète S’enchâsse dans la sienne et tourne sous sa loi. L’un le redit à l’autre ; et l’impassible roi, Paris l’axe immortel, Paris, l’axe du monde, Puise ses mouvemens dans sa vigueur profonde, Les communique à tous, les imprime à chacun, Les impose de force, et n’en reçoit aucun. Il se meut : tout s’ébranle, et tournois, et circule ; Le cœur du ressort bat, et pousse la bascule ; L’aiguille tremble et court à grands pas, le levier Monte et baisse en sa ligne, et n’ose dévier. Tous marchent leur chemin, et chacun d’eux écoute Le pas régulateur qui leur creuse la route. Il leur faut écouter et suivre ; il le faut bien ; Car, lorsqu’il arriva, dans un temps plus ancien Qu’un rouage isola son mouvement diurne, Dans le bruit du travail demeura taciturne, Et brisa, par orgueil, sa chaîne et son ressort, Comme un bras que l’on coupe, il fut frappé de mort Car Paris l’éternel de leurs efforts se joue, Et le moyen divin tournerait sans la roue ; Quand même tout voudrait revenir sur ses pas, Seul il irait, lui seul ne s’arrêterait pas, Et tu verrais la force et l’union ravie Aux rayons qui partaient de son centre de vie. Plus loin, c’est une fournaise dont la lumière Teint de rouge les bords du ciel noir et profond ;
C’est un feu sous un dôme obscur, large et sans fond. Là, dans les nuits d’hiver et d’été, quand les heures Font du bruit en sonnant sur le toit des demeures, Parce que l’homme y dort ; la veillent des esprits Grands ouvriers d’un œuvre et sans nom et sans prix La nuit leur lampe brûle, et le jour elle fume, Le jour elle a fumé, le soir elle s’allume, Et toujours et sans cesse alimente les feux De la fournaise d’or que nous voyons tous deux.
Et qui, se reflétant sur la sainte coupole, Est du globe endormi la céleste auréole. Chacun d’eux courbe un front pâle, il prie ; il écrit, Il désespère, il pleure ; il espère, il sourit ; Il arrache son sein et ses cheveux, s’enfonce Dans l’énigme sans fin dont Dieu sait la réponse, Et dont l’humanité, demandant son décret, Tous les mille ans rejette et cherche le secret. Chacun d’eux pousse un cris d’amour vers une idée. L’un soutien en pleurant la croix dépossédée, S’assied près du sépulcre, et seul, comme un banni, Il se frappe, en disant :Lamma Sabacthani; Dans son sang, dans ses pleurs, il baigne, il noie, il plonge La couronne d’épine et la lance et l’éponge, Baise le corps du Christ, le soulève, et lui dit : « Reparais, roi des Juifs, ainsi qu’il est prédit ; Viens, ressuscite encore aux yeux du seul apôtre. L’Église meurt : renais dans sa cendre et la nôtre, Règne, et sur les débris des schismes expies. Renverse tes gardiens des lueurs de tes pieds. » - Rien. – Le corps du Dieu ploie aux mains du dernier homme Prêtre pauvre et puissant pour Rome et malgré Rome. Le cadavre adoré de ses élans immortels Ne laisse plus tomber de sang pour ses autels ; Rien. – Il n’ouvrira pas son oreille endormie Aux lamentations du nouveau Jérémie, Et il laissera seul, mais d’une habile main, Retremper la tiare en l’alliage humain. - Liberté ! crie un autre, et soudain la tristesse Comme un taureau le tue aux pieds de sa déesse, Parce qu’ayant en vain quarante ans combattu, Il ne peut rien construire où tout est abattu. N’importe ! Autour de lui des travailleurs sans nombre, Aveugles inquiets, cherchent à travers l’ombre Je ne sais quel chemin qu’ils ne connaissent pas, Réglant et mesurant, sans règle et sans compas, L’un sur l’autre semant des arbres sans racines, Et mettant au hasard l’ordre dans les ruines. Et comme il est écrit que chacun porte en soi Le mal qui le tuera, regarde en bas, et vois Derrière eux s’est groupée une famille forte
Qui les ronge et du pied pile leur œuvre morte, Écrase les débris qu’a faits la Liberté, Y roulele niveau qu’on nomme Égalité, Et veut les mettre en cendre, afin que, pour sa t^te, L’homme n’ait d’autre abri que celui qu’elle apprête : Et c’est un temple. Un temple immense, universel, Où l’homme n’offrira ni l’encens, ni le sel, Ni le sang, ni le pain, ni le vin, ni l’hostie, Mais son temps et sa vie en œuvre convertie, Mais son amour de tous, son abnégation De lui, de l’héritage et de la nation ; Seul, sans père et sans fils ; soumis à la parole, L’union est son but et le travail son rôle, Et selon celui-là, qui parle après Jésus, Tous seront appelés, et tous seront élus. - Ainsi tout est osé ! Tu vois ? Pas de statue D’homme, de roi, de dieu qui ne soit abattue, Mutilée à la pierre et rayée au couteau, Démembrée à la hache et broyée au marteau ! Or oulomb toutmétal estlon édans la braise
Et jeté pour refondre dans l’ardente fournaise. Tout brûle, craque, fume et coule ; tout cela Se tord, s’unit, se fend, tombe là, sort de là ; Cela siffle et murmure ou gémit ; cela crie, Cela chante, cela sonne, se parle et prie ; Cela réduit, cela flambe et glisse dans l’air, Éclate en pluie ardente ou serpente en éclair. Œuvre, ouvriers, tout brûle ! Au feu tout se féconde ! Salamandres partout ! – Enfer ! Éden du monde ! Paris ! Principe et fin ! Paris ! ombre et flambeau ! Je ne sais si c’est mal, tout cela ; mais c’est beau ! Mais c’est grand ! mais on sent jusqu’au fond de son âme Qu’un monde tout nouveau se forge à cette flamme, Ou soleil, ou comète, on sent bien qu’il sera, Qu’il brûle ou qu’il éclaire, on sent qu’il tournera, Qu’il surgira brillant à travers la fumée, Qu’il vêtira pour tous quelque forme animée, Symbolique, imprévue et pure, on ne sait quoi Qui sera pour chacun le signe d’une foi, Couvrira, devant Dieu, la terre comme un voile, Ou de son avenir sera comme l’étoile,
Et, dans des flots d’amour et d’union, enfin Guidera la famille humaine vers sa fin ; Mais que peut-être aussi brûlant, pareil au glaive Dont le feu dessécha les pleurs dans les yeux d’Eve, Il ira labourant le globe comme un champ, Et semant la douleur du levant au couchant ; Rasant l’œuvre de l’homme et des temps, comme l’herbe Dont un vaste incendie emporte chaque gerbe, En laissant le désert qui suit son large cours, Comme un géant vainqueur, s’étendre pour toujours. Peut-être que, partout où se verra sa flamme, Dans tout corps s’éteindra le cœur, dans tout cœur l’âme, Que rois et nations, se jetant à genoux, Aux rochers ébranlés criront : « Écrasez-nous ; « Car voilà que Paris encore nous envoie « Une perdition qui brise notre voie ! »
Trois Satires politiques, précédées d’un prologue, par M Antoni Deschamps ; chez Levavasseur, au Palais-Royal, et chez Riga, rue du Faubourg-Poissonnière, n° 1. Une brochure in-8°. Prix, 2 fr.
On retrouve dans ces satires la touche ferme et nerveuse, la versification à la fois savante et naïve et ce style concis, quoique toujours poétique, dont M. Antoni Deschamps avait déjà donné un bel exemple dans sa traduction du Dante. Ces trois satires se distinguent encore par une indépendance d’opinions, une liberté de pensée et une franchise d’expression qui conviennent parfaitement à l’époque actuelle. Flatteurs de rois et de populace, fautes et ridicules du pouvoir, mœurs et physionomies de nos hommes politiques, tout y est peint et châtié avec une verve de conviction et d’indignation chaleureuse.
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