Les ressources latentes de la doctrine augustinienne - article ; n°27 ; vol.32, pg 261-275
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Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1930 - Volume 32 - Numéro 27 - Pages 261-275
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Publié le 01 janvier 1930
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Langue Français

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Maurice Blondel
Les ressources latentes de la doctrine augustinienne
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 32° année, Deuxième série, N°27, 1930. pp. 261-275.
Citer ce document / Cite this document :
Blondel Maurice. Les ressources latentes de la doctrine augustinienne. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 32° année,
Deuxième série, N°27, 1930. pp. 261-275.
doi : 10.3406/phlou.1930.2582
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1930_num_32_27_2582XII
LES RESSOURCES LATENTES
DE LA
*>
DOCTRINE AUGUSTINIENNE
L'étude de saint Augustin pose des problèmes qui sont
propres à sa méthode et à sa doctrine.
C'est cette originalité d'ensemble que, pour conclure,
il importe surtout de comprendre ; et on ne la comprendra
qu'en discernant les raisons de sa fécondité permanente et
les promesses mêmes de son avenir. En dépassant les causes
durables de succès et d'influence qui lui sont communes
avec d'autres grandes doctrines du passé, nous voudrions
chercher comment cette « philosophie catholique» — pro
fondément philosophique et profondément chrétienne —
nous offre, indépendamment des vérités particulières dont
elle est grosse, autre chose qu'un système parmi tant
d'autres systèmes, une unité de pensée et de vie, un genre
neuf et supérieur de philosophie, en rapport avec les aspi
rations et les besoins de beaucoup d'esprits contemporains.
*) Avec l'autorisation des éditeurs anglais qui préparent pour le 28 août 1930
un volume destiné à glorifier saint Augustin et à commémorer le 1500e annivers
aire de sa mort, nous publions une partie de l'article que M. Maurice Blondel
a donné en conclusion de ce livre important. Nos lecteurs nous sauron? gré de
leur signaler cet ouvrage auquel ont collaboré des religieux et des laïques et qui
sera traduit en plusieurs langues. Il sera publié à Londres chez les éditeurs
Sheed et Ward. Paternoster row 31 (E. C. 4); des éditions espagnoles, italiennes,
allemandes et françaises en seront probablement données.
1 M. Blondel Ê62
Le moment est sans doute venu de prendre plus explicit
ement conscience de ce qui a pu être dès longtemps pressenti,
désiré ou pratiqué, mais de ce qui demande à être mieux
compris, plus pleinement justifié, tant pour la méthode elle-
même que pour la solution des problèmes en suspens dans
maintes consciences.
Commençons par reconnaître les raisons qu'on peut
appeler banales de l'intérêt toujours renaissant qui s'est
attaché à Fauteur des Confessions, de la Cité de Dieu, de
tant d'admirables traités, lettres ou sermons : les accents
émouvants, l'éclat des images, la caresse des formules, la
vigueur de la dialectique, la splendeur des visions spiri
tuelles forment un mélange qui, même vu du dehors, semble
déjà unique, comme la beauté d'un chef-d'œuvre de l'art.
Mais il y a plus, beaucoup plus. Si les doctrines sur
vivent, c'est par la part de vérité qu'elles portent et qui
les porte mieux encore.
Plus peut-être qu'en aucune autre doctrine, deux él
éments très distincts sont très profondément unis dans la
pensée augustinienne.D'un côté, une armature intellectuelle,
des analyses subtiles et serrées, une trame logique, un per
pétuel besoin de clarté et un effort d'ordinaire heureux vers
l'intelligibilité la plus satis faisante pour un esprit inf
iniment perspicace et aigu. D'autre part, un élan qui domine
tout le détail et semble emporter l'âme entière au delà des
régions où la dialectique, quelque vivante et rapide qu'elle
soit, ne semble plus qu'un squelette aride et inerte.
Dans la mesure donc où une doctrine reflète cette
« Beauté toujours nouvelle » que saint Augustin regrettait
d'avoir aimée si tard, le système philosophique participe à
la permanence des idées qui rayonnent en lui. Et pourtant,
c'est là, pour Augustin spécialement, une explication insuf
fisante de cette survivance qui fait de lui presque un homme
de notre temps ; sans qu'il se perde dans la foule, bientôt
anonyme, de tant d'initiateurs de la science et de semeurs
de vérité, lui, reste lui-même. La doctrine augustinienne 263
On l'a comparé à un immense courant de vie, à un fleuve
des Amazones. Mais c'est un fleuve si puissant qu'on a
beau, en chaque âge, en chaque crise de la conscience
chrétienne, dériver ses flots et les mêler avec d'autres ou
les employer à mille usages, son cours immense s'accroît
de ses affluents et recouvre les eaux dérivées de lui en les
purifiant à nouveau. Et malgré tout ce qu'il charrie, c'est
lui qui garde son nom, sa fraîcheur, son élan, ses « vertus
séminales », sa force motrice et fécondante. Et quoiqu'il
s'agisse de vérités tout impersonnelles, ce n'est plus elles
seulement qui lui confèrent leur pérennité ; il les a faites
si pleinement siennes que, pour aller à elles, c'est à lui
qu'on revient et par lui qu'on passe.
Mais ce n'est pas encore cette image qui nous donne
un fidèle sentiment de son originalité. Et nous devons venir
à des paradoxes plus étranges, celui-ci d'abord :
La plupart des théories particulières ou des vérités frag
mentaires qu'au cours des siècles des disciples plus ou moins
fidèles d'intention à Augustin lui ont empruntées ont,
comme nous le rappellerons, trahi plutôt que traduit sa
pensée véritable. Plus même qu'il n'arrive d'ordinaire, les
disciples ont desservi plutôt qu'ils n'ont interprété le maître.
Loin de l'enrichir, ils ne l'ont pas seulement appauvri, ils
l'ont parfois dénaturé. Et ce sont les adversaires qui, fin
alement, auront le plus contribué à manifester son secret et
à renouveler son influence.
Voici, en effet, un plus surprenant paradoxe :
Lorsque l'Augustinisme semblait aboutir à de périlleuses
confusions ou encourager de menaçantes tendances, des
résistances, des reprises, des redressements ont surgi. Et il
s'est trouvé que les contradicteurs ont, par leurs critiques
mêmes, procuré une plus pénétrante intelligence du véri
table Augustin. On a cru le limiter, le refouler même ; en
réalité, on a provoqué des sondages nouveaux et, par là,
on a montré que les sources augustiniennes surgissaient de
profondeurs plus grandes qu'on ne l'avait d'abord supposé. 264 M. Blondeî
La suite de notre étude fera voir, sans doute, par quelques
exemples significatifs, comment se vérifie cette loi d'inter
prétation qui n'est guère applicable qu'à cette doctrine. Et
peut-être cette originalité devra-t-elle finalement nous appar
aître comme une puissante confirmation de la vitalité
comme de la vérité d'une telle doctrine, puisqu'elle se
révèle capable d'absorber et d'assimiler ce qui semblait lui
être contraire.
Mais il y a une singularité nouvelle et dernière à mar
quer. Car, paradoxe suprême, non seulement la doctrine
d'Augustin répugne aux contrefaçons partielles et aux déri
vations qui ne sont d'ordinaire que des déviations ; non
seulement elle ramène à sa maîtrise et à son nom personnel
des initiatives qui avaient paru la contredire, même quand
elles procédaient indirectement de son salutaire ébranle
ment ; mais les oppositions immanentes qui semblent la
travailler elle-même et l'empêcher de s'achever en une
construction systématique et close, profitent finalement à
sa cohésion profonde, ravivent sa puissance interne d'unité
et permettent à cette force plastique d'assimiler plus d'élé
ments, grâce à une même idée directrice. Et c'est peut-
être par là que l'Augustinisme nous manifestera le mieux
le secret de sa jeunesse toujours féconde ; par là aussi qu'il
nous offrira le type, au moins ébauché, d'une philosophie
vraiment intégrale et portant en elle, avec la fixité d'une
orientation, la possibilité de développements et d'adapta
tions illimités.
Parler de son influence dans le passé sans dire le mes
sage qu'il nous

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