Commerce des armes et politique : le cas français - article ; n°6 ; vol.41, pg 563-586
25 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Commerce des armes et politique : le cas français - article ; n°6 ; vol.41, pg 563-586

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
25 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Politique étrangère - Année 1976 - Volume 41 - Numéro 6 - Pages 563-586
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1976
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Klein
Commerce des armes et politique : le cas français
In: Politique étrangère N°6 - 1976 - 41e année pp. 563-586.
Citer ce document / Cite this document :
Klein. Commerce des armes et politique : le cas français. In: Politique étrangère N°6 - 1976 - 41e année pp. 563-586.
doi : 10.3406/polit.1976.1699
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1976_num_41_6_1699COMMERCE DES ARMES ET POLITIQUE :
LE CAS FRANÇAIS (*)
par Jean KLEIN
Chargé de recherche au C.N.R.S.
Depuis 1970, la France dispute le 3e rang à la Grande-Bretagne
au palmarès des vendeurs d'armes, et en 1975, on a estimé à
30 milliards de francs le montant des commandes non livrées.
Au cours des cinq dernières années, ce secteur d'activité a connu
une progression remarquable, puisque le montant des transactions
a été multiplié par 3 et que les exportations représentent aujour
d'hui le tiers du chiffre d'affaires des industries d'armement. Sur
les 270 000 personnes qui y sont employées, près de 75 000
travaillent pour exécuter des commandes étrangères. Enfin, il y
a lieu de souligner l'importance des ventes d'armes par ses effets
induits sur l'économie, et de noter que la conquête des marchés
extérieurs témoigne de la qualité des matériels proposés et de la
compétitivité de leurs prix. Les ventes d'armes représentent environ
3 % du commerce extérieur, mais par rapport aux exportations de
biens d'équipement, le pourcentage varie selon les années entre 13
et 25 % .
L'expansion du commerce des armes est un phénomène général
puisque de 1964 à 1974, les ventes mondiales auraient augmenté
dans la proportion de 550 % (1). Par ailleurs, les succès remportés
par la France ne doivent pas faire oublier qu'elle se place loin
derrière les Etats-Unis et l'Union Soviétique par le volume du
matériel exporté. Ainsi, dans un rapport sur les questions de défense
présenté à l'Assemblée nationale le 10 octobre 1975, M. Le Theule
estimait à 45 milliards de francs le montant global des ventes
(*) Cet article procède d'une communication présentée dans le cadre du VIII*
Congrès de Relations internationales du Québec (Québec 30-9 au 3-10-76).
(1) Time, 3 mars 1975 : « The World Arms Trade ». JEAN KLEIN 564
d'armes effectuées dans le monde en 1972. La part de la France
était de 5,2 milliards contre 21 aux Etats-Unis et 11 à l'U.R.S.S.
Les chiffres publiés en 1976 par 1' « Arms control and disarmament
Agency » font apparaître un écart encore plus grand entre les ventes
d'armes des deux superpuissances et celles des deux puissances
moyennes qui viennent en 3 e et 4e position. Selon l'Agence améri
caine, le montant total des transferts effectués entre 1965 et 1974
se serait élevé à 64.404 milliards de dollars et les parts respectives
des Etats-Unis et de l'U.R.S.S. auraient été de 49 % et de 29,17 % ;
le pourcentage des ventes d'armes françaises n'aurait été que de
4,39 pendant la même période et celle des ventes britanniques
de 3,24 (2). On a noté toutefois que si la demande de matériels
d'armements n'a cessé de croître au cours de la dernière décennie,
elle, n'est pas indéfiniment extensible et, dans certains secteurs, on
observe un phénomène de saturation qui ne manquera pas de se
répercuter sur le volume des transactions. Enfin, rappelons que la
compétition est vive entre les marchands d'armes et que la France
se heurte à la concurrence non seulement des grandes puissances
mais également de nombreux Etats petits et moyens, qui se sont
révélés des rivaux redoutables dans la prospection des marchés
du Tiers-Monde. Cette tendance ne fera que s'exacerber avec le
développement d'industries de guerre à la périphérie du monde
développé.
C'est dire qu'en vendant des armes, la France se comporte comme
la plupart des pays industrialisés prompts à répondre aux demandes
des Etats soucieux de se doter des attributs de la souveraineté
militaire. Certes, l'industrie d'armement occupe en France une
place plus importante que dans d'autres Etats de dimension
moyenne et l'Administration apporte un concours actif à la pro
motion des ventes. Toutefois, avant de porter un jugement sur
cette politique, il convient d'analyser les facteurs qui la conditionnent
et de garder présent à l'esprit le contexte international dans lequel
elle se situe. En outre, par-delà les similitudes qui l'apparentent à
celle d'autres Etats, il importe de dégager les traits spécifiques
de la politique française en la matière.
Selon la thèse officielle, les exportations de matériel de guerre
sont l'un des instruments dont dispose la France pour affirmer
(2) « World military expenditures and arms transfers. 1965-74 ». COMMERCE DES ARMES 565
son indépendance dans l'organisation de sa défense et la conduite
de sa diplomatie. L'accent est mis sur la finalité politique de l'entre
prise et les ventes d'armes apparaissent surtout comme le moyen de
garantir la base matérielle d'une défense autonome et d'étendre
l'influence de la France en Europe et dans le monde. Les détracteurs
de la politique française soutiennent au contraire qu'elle est com
mandée par des intérêts purement économiques, que loin de servir
le rayonnement de la France à l'étranger, elle en ternit l'image et
qu'en définitive, elle ressortit à un mercantilisme sans scrupules.
Il est difficile de trancher cette controverse car les facteurs écono
miques et politiques sont étroitement imbriqués et l'on se bornera
à indiquer dans quelle mesure la politique française nous paraît obéir
plutôt à des impératifs économiques et sociaux ou répondre davant
age à des préoccupations de politique générale. A cet égard, les
principes dont s'inspire la commission interministérielle pour l'étude
des exportations de matériel de guerre (C.I.E.E.M.G.) et les condit
ions d'octroi des autorisations d'exporter permettent de vérifier la
cohérence du commerce des armes avec les orientations de la
politique étrangère. En guise de conclusion, on s'interrogera sur
les chances d'une réglementation internationale du commerce des
armes, la question ayant été évoquée au cours de la campagne
présidentielle américaine, et l'on se demandera à quelles conditions
la France pourrait participer à une telle entreprise.
I. La fonction économique et sociale des ventes d'armes françaises
L'opinion qui prévaut en France parmi les opposants au commerce
des armes est qu'il s'agit d'un trafic fructueux destiné à enrichir les
fabricants du secteur privé, à alléger le fardeau de la défense nationale
et à équilibrer la balance des paiements. Ce dernier point a été
souligné par le cardinal Marty dans son homélie du 11 janvier 1976
à Notre-Dame de Paris et il a déploré notamment que « par nécess
ité économique mal comprise, la France se permette d'équilibrer
sa balance des paiements en développant le commerce des armes ».
« L'existence d'une industrie d'armement tournée vers les marchés
extérieurs » (3) avait déjà suscité dans le passé des prises de
(3) V. la prise de position de la section française du Mouvement Pax Christi
in « Journal de la Paix », avril 1970 (numéro spécial sur les ventes d'armes), et
l'article de R. Michel : « La France vend des armes », Projet, novembre 1970. JEAN KLEIN 566
position défavorables de la part des Eglises et la « note de réflexion
sur le commerce des armes » publiée conjointement par le conseil
permanent de l'épiscopat français et le conseil de la Fédération
protestante de France, le 13 avril 1973 (4), proposait de réduire
le poids des industries d'armement dans la vie économique par
des mesures de reconversion qui seraient débattues au cours de la
préparation du VIIe Plan. Ces appels se sont heurtés à une fin
de non-recevoir de la part des autorités responsables qui ont
contesté le bien-fondé de certaines analyses, invoqué la dimension
politique du problème et récusé la « compétence

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents