Décentralisation : quelle théorie de l État ? - article ; n°1 ; vol.24, pg 235-252
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Description

Annuaire des collectivités locales - Année 2004 - Volume 24 - Numéro 1 - Pages 235-252
18 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 29
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Gérard Marcou
XVIII. Décentralisation : quelle théorie de l'État ?
In: Annuaire des collectivités locales. Tome 24, 2004. pp. 235-252.
Citer ce document / Cite this document :
Marcou Gérard. XVIII. Décentralisation : quelle théorie de l'État ?. In: Annuaire des collectivités locales. Tome 24, 2004. pp.
235-252.
doi : 10.3406/coloc.2004.1541
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/coloc_0291-4700_2004_num_24_1_1541.«SE
XVIII. DÉCENTRALISATION : Off
QUELLE THÉORIE DE L'ÉTAT ? Jj'ê
Gérard Marcou
La décentralisation est l'une des grandes réformes annoncées par le Premier
ministre, Jean-Pierre Raffarin, dans sa déclaration de politique générale du 3 juillet
2002. La doit servir la démocratie locale et la réforme de l'État, elle
doit assurer la cohérence et la proximité, la cohérence par une nouvelle relation
État-région, la proximité par le département, la commune et l'intercommunalité. Et le
Premier ministre annonçait une révision constitutionnelle.
Le 28 février 2003, à Rouen, au terme des assises régionales des Libertés local
es, qui se sont déroulées dans toute la France d'octobre 2002 à janvier 2003, le Pre
mier ministre présentait « une politique significative et forte de décentralisation »,
mais il voulait aussi rassurer : « Ce que nous construisons, ce n'est pas le désengage
ment de l'État [. . .]. La décentralisation permettra à l'État de se concentrer sur ses res
ponsabilités propres au niveau local [...]. L'État sera plus fort sur ses missions
nationales ».
Aujourd'hui le cadre juridique de la réforme est pratiquement posé. La Const
itution a été révisée, deux des trois lois organiques ont été votées et le projet de loi
sur les responsabilités locales a déjà été adopté par le Sénat en première lecture le
17 novembre 2003. La réforme, encore inachevée, suscite déjà les critiques de ceux
qui attendaient plus1 ; elle calme sans doute les critiques de ceux qui craignaient la
mise en cause du caractère unitaire de l'État. On y trouve l'écho de l'ambition polit
ique initiale, mais elle tient compte des résistances qui se sont exprimées. Annoncée
comme une nouvelle décentralisation, la réforme en exprime en effet une vision nou-
1. Voir par exemple le numéro de décembre 2003 de Pouvoirs locaux, n° 59, qui appelle déjà à un
acte III » de la décentralisation (p. 1)...
235 Études
velle, mais le projet de loi sur les responsabilités locales s'inscrit dans une certaine
mesure dans la continuité de la réforme de 1982-1983.
Pour interpréter cette réforme, comme d'ailleurs celles qui l'ont précédée, il ne
faut pas perdre de vue que la décentralisation est d'abord un rapport entre l'État et les
collectivités territoriales. Elle est donc indissociable d'une certaine conception de
l'État, et ses caractéristiques varient en fonction de cette conception. On peut parler de
théorie dans la mesure où on peut la résumer en un certain nombre de principes politi-
ques relativement cohérents et stables. Ce qui lui donne de la force, c'est d'être le pro-
duit de l'histoire et des institutions. Le projet de décentralisation a donné lieu à
V esquisse d' une nouvelle approche de la décentralisation, et donc d' une nouvelle théo-
rie de l'État, bien qu'elle n'ait pas été réellement formulée. Il est important d'essayer
d'éclairer ce débat pour apprécier la portée de la réforme et ses possibles implications
futures. Cela permettra de caractériser les différents éléments de la réforme et d'en
interpréter certaines antinomies et ambiguïtés. Mais avant de le faire, il faut définir le
point de référence, c'est-à-dire caractériser la décentralisation en France à la veille de
la réforme, et identifier les points sur lesquels portait la contestation.
/) La réforme de 1982-1983 : la mise en œuvre du principe
de libre administration des collectivités territoriales
Rappelons tout d'abord que la décentralisation n'est pas apparue en 1982,
comme des raccourcis de langage le donnent trop souvent à penser. La réforme enga
gée en 1982 ne se comprend qu'à la lumière de l'état de la décentralisation en France
à la fin des années 1970, et ce système s'est formé par strates successives que le
temps a amalgamées sur une période de près de deux siècles.
La Révolution française, tout en faisant de la nation le fondement de l'État, a
reconnu les communes et fait de la gestion des affaires locales l'expression d'une
liberté. Elle a aussi jeté les bases de l'organisation territoriale : la commune, qui réu
nit « les citoyens français considérés sous le rapport des relations locales », et chargés
d'élire ceux qui seront chargés « de gérer les affaires particulières de la commune »
(articles 8 et 9 du titre II de la Constitution de 1791) ; le département, qui n'était pas
conçu comme un cadre de décentralisation, mais comme celui de l'administration
intérieure, sous l'autorité du pouvoir exécutif2.
La seconde strate, celle du Consulat et de l'Empire, met en place une administ
ration d'État centralisée sur l'ensemble du territoire ; depuis cette époque le préfet
s'identifie au département ; par la suite aucun régime n'a remis en cause ni le dépar
tement ni le préfet. Au XIXe siècle et au XXe siècle, la multiplication des services exté-
2. Constitution du 3 septembre 1791 : titre III, chapitre IV, section II, articles 1 à 8.
236 ■■*•-;
DÉCENTRALISATION : QUELLE THÉORIE DE L'ÉTAT ? 18
rieurs des ministères a été l'une des formes du développement du pouvoir ministériel, J?U}
chaque ministère tendant à se doter ainsi de son propre appareil d'exécution. \'ifu.
La troisième est celle de la décentralisation orléaniste. Si la revendication de la X-U*
décentralisation est d'abord venue des légitimistes, c'est la monarchie de Juillet qui ::.*;?.?
en a jeté les bases en même temps que du parlementarisme. Plusieurs lois des années ':*;■'*»*■
1830 introduisent l'élection des conseils municipaux et des conseils généraux et défi- :*';*;**>
nissent leurs attributions. Le régime est censitaire et la liberté est liée à la propriété ; '!?,."*•'■
c'est ce qui conduit en 1834 à reconnaître au département la personnalité civile et la îîïu';
qualité de propriétaire3. Le Second Empire en prendra la suite avec les lois de 1866 ; /?£■■£
et 1867, répondant au « manifeste de Nancy », protestation de notables libéraux con- ;://£■;
tre le centralisme. La loi du 10 août 1871 sur les conseils généraux marquera Tabou- -■ ■■•;:-'
tissement ce mouvement en ce qui concerne le département.
La quatrième strate est celle de la IIIe République ; elle est inaugurée par la loi
municipale du 5 avril 1884, qui est toujours à l'origine des institutions locales
d'aujourd'hui. C'est celle du parlementarisme républicain et de la conquête des cam
pagnes par les républicains, mais aussi de la pénétration de la démocratie politique
dans la gestion des affaires locales. Alors que le système administratif reste fondé sur
la centralisation, la démocratie commence à changer les rapports entre les élus locaux
et l'administration ; le cumul des mandats corrige la centralisation ; les collectivités
locales deviennent progressivement un élément du régime politique. La constitution de
1946 enregistre et accentue cette transformation par ses articles 85 à 89, dans lesquels
se trouvent la première expression du principe de libre administration des collectivités
territoriales ainsi que le principe du transfert de l'exécutif départemental du préfet au
président du conseil général. Du point de vue juridique les collectivités locales sortent
alors des limites de la simple décentralisation administrative, qui n'était qu'un aména
gement de la centralisation, pour prendre place dans l'ordre constitutionnel.
On sait que ces orientations n'ont pas été suivies d&#

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