La question albanaise - article ; n°1 ; vol.59, pg 209-222
15 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

La question albanaise - article ; n°1 ; vol.59, pg 209-222

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
15 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Politique étrangère - Année 1994 - Volume 59 - Numéro 1 - Pages 209-222
Au sud de la péninsule balkanique, l'Albanie, seul pays européen à majorité musulmane, joue un rôle central dans un environnement hostile à dominante orthodoxe, où elle a longtemps servi d'Etat tampon entre les puissances. Ainsi, le tracé de ses frontières (traité de Londres de 1913) a résulté de considérations plus géopolitiques qu'ethniques. Les Albanais étant répartis sur cinq Etats, il paraît difficile que la volonté d'intégration du gouvernement de Ramiz Alia puisse, à elle seule, enrayer l'irrédentisme albanais. Aussi, tant que ne seront pas traitées les questions inextricables du Kosovo, de l'Epire du Nord et de ses minorités, et donc que ne se seront pas « normalisées » ses relations avec ses voisins, en particulier la Grèce et la Serbie, l'Albanie, pays le plus pauvre d'Europe, dont le taux de natalité est le plus élevé des Balkans, constituera un facteur de grande instabilité pour toute la région.
The Albanian Question, by Hans Stark
In the South of the Balkan Peninsula where it has long served as a buffer state between powers, Albania, the only European country with a Muslim majority, plays a central role in a dominantly Othodox and hostile environment. Albania's borders were drawn up (in the 1913 Treaty of London) according to geopolitical rather than ethnie criteria. With Albanians spread out over five states it seems unlikely that the simple désire of Ramiz Alia's government for integration will be sufficient to curb Albanese irredentism. Whilst the thorny question of Kosovo, Northern Epirus and minorities remain unanswered Albania's relations with its neighbours, especially Greece and Serbia, cannot be 'normalized'. In addition to being the poorest country in Europe, Albania has the highest birth rate in the Balkans and will, until these problems are solved, constitute an important factor of instability for the whole region.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1994
Nombre de lectures 18
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Hans Stark
La question albanaise
In: Politique étrangère N°1 - 1994 - 59e année pp. 209-222.
Résumé
Au sud de la péninsule balkanique, l'Albanie, seul pays européen à majorité musulmane, joue un rôle central dans un
environnement hostile à dominante orthodoxe, où elle a longtemps servi d'Etat tampon entre les puissances. Ainsi, le tracé de
ses frontières (traité de Londres de 1913) a résulté de considérations plus géopolitiques qu'ethniques. Les Albanais étant répartis
sur cinq Etats, il paraît difficile que la volonté d'intégration du gouvernement de Ramiz Alia puisse, à elle seule, enrayer
l'irrédentisme albanais. Aussi, tant que ne seront pas traitées les questions inextricables du Kosovo, de l'Epire du Nord et de ses
minorités, et donc que ne se seront pas « normalisées » ses relations avec ses voisins, en particulier la Grèce et la Serbie,
l'Albanie, pays le plus pauvre d'Europe, dont le taux de natalité est le plus élevé des Balkans, constituera un facteur de grande
instabilité pour toute la région.
Abstract
The Albanian Question, by Hans Stark
In the South of the Balkan Peninsula where it has long served as a buffer state between powers, Albania, the only European
country with a Muslim majority, plays a central role in a dominantly Othodox and hostile environment. Albania's borders were
drawn up (in the 1913 Treaty of London) according to geopolitical rather than ethnie criteria. With Albanians spread out over five
states it seems unlikely that the simple désire of Ramiz Alia's government for integration will be sufficient to curb Albanese
irredentism. Whilst the thorny question of Kosovo, Northern Epirus and minorities remain unanswered Albania's relations with its
neighbours, especially Greece and Serbia, cannot be 'normalized'. In addition to being the poorest country in Europe, Albania has
the highest birth rate in the Balkans and will, until these problems are solved, constitute an important factor of instability for the
whole region.
Citer ce document / Cite this document :
Stark Hans. La question albanaise. In: Politique étrangère N°1 - 1994 - 59e année pp. 209-222.
doi : 10.3406/polit.1994.4256
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1994_num_59_1_4256POLITIQUE ÉTRANGÈRE I 209
Hans STARK* La question albanaise
Dans tous les scénarios, plus ou moins réalistes, d'une extension
éventuelle des hostilités de la Bosnie-Herzégovine vers le sud de la
péninsule balkanique, l'Albanie joue un rôle-clef. Nation divisée (près
de la moitié des Albanais se trouvent sur le territoire de l'ex- Yougoslavie),
limitrophe de deux régions minées par des conflits ethniques du fait de la
présence d'une majorité écrasante d'Albanais (au Kosovo surtout et, à un
moindre degré, en Macédoine occidentale), confrontée à un voisinage difficile
(la Grèce), voire hostile (la Serbie) et, de l'intérieur, par une surenchère
nationaliste, l'Albanie présente de nombreuses incertitudes liées à des facteurs
d'instabilité tant internes qu'externes. Pays le plus pauvre des Balkans avec un
PIB de 600 dollars par habitant en 1990 et le taux de natalité le plus élevé
d'Europe (en moyenne six enfants par femme), l'Albanie est aussi, abstraction
faite de la Turquie, l'unique pays européen à majorité musulmane (70 %). De
plus, elle n'est entourée que d'Etats orthodoxes qui, sur le plan national,
entretiennent des rapports tendus avec « leurs » minorités musulmanes (c'est
le cas de la Grèce, de la Macédoine et de la Bulgarie), ou même conflictuels
(Serbie et Monténégro).
Mais le particularisme albanais ne s'arrête pas là. En effet, depuis sa naissance
en juillet 1913, l'Albanie — à la différence de l'ensemble de ses voisins — est
tombée à plusieurs reprises sous la tutelle d'une puissance « protectrice » :
l'Italie mussolinienne (puissance occupante entre 1939 et 1943), la Yougoslavie
titiste (dont elle a failli devenir la 7e république), l'URSS de 1948 à 1961
(c'est à cette période que l'Albanie s'est dressée en champion du stalinisme) et
la Chine de 1961 à 1978 (dont elle partage les critiques au sujet du
« révisionnisme » soviétique). Chacune de ces quatre phases de « protection »
s'est terminée par une rupture brutale et définitive suivie, en 1978, de la
« reconquête » de l'autonomie nationale qui devait mener le pays directement
à l'autarcie et au repli sur soi.
Aussi entre 1978 et 1988, l'Albanie s'est retrouvée complètement isolée, en
désaccord, tant avec ses voisins qu'avec le reste du monde, et enlisée dans le
système communiste le plus totalitaire qu'ait connu l'Europe de l'Est. Durant
cette période d'isolationnisme effréné, qui va au delà même de la mort, le
11 avril 1985, d'Enver Hoxha à la tête de l'Etat depuis 1944, l'Albanie s'est
* Chargé de recherche, à l'Ifn, sur les relations franco-allemandes et sur les questions de
l'Europe postcommuniste, Hans Stark est secrétaire général du Cerfa (Comité d'études des
relations franco-allemandes). 210 I POLITIQUE ÉTRANGÈRE
enfermée dans une espèce de logique d'assiégée, hantée par l'idée que les
« impérialistes » américains, soviétiques et chinois menaçaient sa survie état
ique [1]. Or, ce complexe d'encerclement, absurde et néfaste pour le dévelop
pement de l'Etat, n'était pas dû seulement à la nature paranoïaque du régime
albanais, mais surtout aux conditions de sa création en 1913 et, en général, à
l'attitude des voisins vis-à-vis des Albanais.
La genèse de l'irrédentisme albanais
La renaissance de l'Albanie (Rilindja), en tant qu'Etat indépendant, s'est
produite dans le cadre de la seconde guerre balkanique (juin-juillet 1913)
durant laquelle Grecs, Serbes et Monténégrins ont affronté la Bulgarie au
sujet de la répartition des dernières possessions européennes de l'Empire
ottoman (Albanie, Macédoine et Thrace). Ce dernier, vaincu lors de la
première guerre balkanique (octobre 1912-mai 1913) s'était vu obligé, à la
suite de la conférence de Londres, d'abandonner tous ses territoires des
Balkans, à l'exception de la Thrace orientale. Mais si Grecs, Serbes et
Bulgares ont tant bien que mal réussi à se partager, avec l'aval des grandes
puissances, la Macédoine et la Thrace, il n'en est pas allé de même pour
l'Albanie.
A la suite de la proclamation de l'indépendance albanaise et de la formation
d'un gouvernement provisoire à Vlorë, le 28 novembre 1912, les représentants
européens à la conférence de Londres (qui s'est tenue entre décembre 1912 et
juillet 1913) ont d'abord opté pour une autonomie albanaise sous le contrôle
de la Sublime Porte et, en même temps, pour l'octroi, à la Serbie, d'un accès
à la mer Adriatique. Cependant, ils ne sont pas pour autant parvenus à
arrêter le tracé des frontières albanaises. La défaite ottomane au printemps
1913 a rendu bientôt nécessaire une remise à plat de la question albanaise,
déjà particulièrement inextricable à l'époque, et ce, pour deux raisons. D'une
part, le Monténégro et la Serbie n'ont pas hésité à occuper toute la moitié
nord de l'Albanie, tandis qu'au sud, la Grèce s'est emparée de l'Epire jusqu'à
Gjirokastër et Vlorë. Grecs, Serbes et Monténégrins comptaient bien alors se
partager toute l'Albanie, ainsi qu'ils avaient procédé pour la Thrace et la
Macédoine. D'autre part, les puissances, siégeant à Londres depuis décembre
1912, se sont divisées sur la question albanaise. La France et la Russie, qui
soutenaient les ambitions de la Serbie et de la Grèce, considéraient la nation
albanaise comme une création artificielle, fabriquée de toutes pièces par
Vienne. L'Autriche-Hongrie, en revanche, appuyée par l'Allemagne, craignait
la formation d'une Grande Serbie et s'opposait à ce que Belgrade obtienne un
accès à la mer Adriatique. Elle s'est donc prononcée en faveur d'un Etat
tampon albanais aussi vaste que possible, une position défendue par l'Italie
qui avait, elle aussi, des ambitions hé

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents