Exposé introductif : Structures monastiques, Société et Eglise en Occident aux XIe-XIIe siècles - article ; n°1 ; vol.5, pg 11-23
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Exposé introductif : Structures monastiques, Société et Eglise en Occident aux XIe-XIIe siècles - article ; n°1 ; vol.5, pg 11-23

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Description

Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public - Année 1974 - Volume 5 - Numéro 1 - Pages 11-23
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1974
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Langue Français

Extrait

Monsieur Marcel Pacaut
Exposé introductif : Structures monastiques, Société et Eglise
en Occident aux XIe-XIIe siècles
In: Actes des congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public. 5e congrès,
Saint-Etienne, 1974. pp. 11-23.
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Pacaut Marcel. Exposé introductif : Structures monastiques, Société et Eglise en Occident aux XIe-XIIe siècles. In: Actes des
congrès de la Société des historiens médiévistes de l'enseignement supérieur public. 5e congrès, Saint-Etienne, 1974. pp. 11-
23.
doi : 10.3406/shmes.1974.1185
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/shmes_1261-9078_1975_act_5_1_1185RAPPORT INTRODUCTIF
Structures monastiques, société
et Eglise en Occident
aux XIe et XIIe siècles
par Marcel PACAUT
Ce rapport introductif, s'adressant à des historiens médiévistes,
risque d'être fort banal, même s'il se donne pour fin de rechercher
quelle a été l'attitude du monachisme face à l'Eglise et à la société
des xie et xne siècles et de mettre en lumière les façons dont les
structures monastiques — conception de la spiritualité, organisation
des hommes et des établissements — s'intègrent ou non dans celles
de la société et de l'Eglise. Car il est évident que mon propos, même
s'il n'est pas de retracer l'histoire du monachisme en ces siècles,
même s'il est dirigé vers un objectif apparemment d'un plus haut
niveau, devra le plus souvent se contenter de reprendre des choses
bien connues de tous. Afin de le rendre plus piquant, afin de
chatouiller les esprits et les oreilles, j'essaierai seulement de lui
donner parfois un ton plus brutal que ne le voudrait une analyse
indifférente. Je sais qu'en procédant ainsi je m'attirerai des critiques.
Mais c'est ce que je désire, puisque le but de nos colloques scienti
fiques est d'abord d'ouvrir des débats sur de grandes questions
historiques. J'ajoute que, pour faciliter et l'exposé et la discussion,
je m'en tiendrai essentiellement au monachisme clunisien et au
monachisme cistercien, en négligeant les bénédictins isolés ou grou
pés en congrégations secondaires et en m' arrêtant brièvement aux
organisations érémitiques, puisque mon ami Bernard Bligny doit
nous entretenir des Chartreux.
Les institutions monastiques se renouvelant à chaque siècle, il
est cependant nécessaire, préalablement, de porter une première
réflexion sur ce que représente la vocation monastique en général, MARCEL PACAUT 12
au plan individuel et dans le complexe sociologique, et sur ce que
comporte essentiellement, à l'époque que nous considérons, une
« réforme » monastique.
Le monachisme, de la part de ceux qui en font profession, est
d'abord une attitude spirituelle qui résulte d'une volonté délibérée
et qui s'exprime par une ascèse, c'estjà-dire par des exercices de
mortification afin de dominer totalement les sens et d'anéantir la
« sensibilité » qui conduit au désir sensuel, et par des exercices de
piété — prière, méditation, chant liturgique — afin d'approcher Dieu
et de l'aimer. C'est par cette ascèse que le moine parvient, dans la
pratique et en esprit, à renoncer totalement à ce qu'offre le monde
(la puissance et la gloire, la richesse et le luxe, la femme et le
plaisir) en imitant le Christ, afin de faire son salut et, par un
transfert des mérites lié à une certaine théologie de la grâce, pour
faciliter le salut de tous. Cette attitude se traduit par la fuite à
l'écart de la société, le retranchement dans la solitude et l'isolement
ou derrière de strictes clôtures. Matériellement et psychologiquement,
elle oblige à l'indifférence à l'égard de la société et à l'égard de
l'Eglise intégrée dans le monde par ses institutions et son histoire.
Le moine est profondément fidèle à l'Eglise, communauté des
croyants unis dans la même foi et administrée par la hiérarchie :
il n'en trouble pas l'institution dogmatique, mais il n'a aucune
raison de s'intéresser à ce qu'entreprennent et réalisent les autorités
ecclésiastiques, surtout si ces entreprises et ces réalisations sont en
relation étroite avec les activités du siècle qu'il veut fuir.
Cette démarche, on peut en inverser les phases et se demander
si le monachisme n'est pas d'abord un refus de la société telle qu'elle
est à une certaine époque et de l'Eglise visible, hiérarchisée et temp
orelle, telle qu'elle agit. S'il n'est pas d'abord, en quelque sorte,
une contestation qui conduit à désirer fuir, puis, cette rupture et
cette retraite accomplies, à élaborer une spiritualité spécifique, dont
certains arguments peuvent d'ailleurs être fournis par d'autres
formes de réflexion. Ainsi, Robert de Molesmes fuit son monastère
du Tonnerrois pour trouver autre chose ; il fuit ainsi, avec des
avatars, jusqu'à Cîteaux où Aubry, Etienne puis Bernard sauront
agencer divers éléments de la spiritualité nouvelle qui apparaît au
début du xiie siècle pour faire les Cisterciens.
Dans le domaine monastique, cependant, il est évident que \c
contestation qui aboutit à une régénération et qui consiste aussi,
au premier chef, à critiquer et rejeter le monachisme en place,
repose le plus souvent sur le désir d'un retour à la règle de saint
Benoît. Sauf quelques exceptions, dont aucune n'a grande importance MONASTIQUES AUX XIe ET XIIe S. 13 STRUCTURES
si ce n'est les Chartreux, la réforme monastique se présente comme
un retour, sans aménagement ni adaptation, à la source telle qu'elle
fut (ou telle que l'on croit qu'elle fut), et non comme la recherche
d'une autre définition. Il en est ainsi jusqu'à l'apparition des Ordres
Mendiants, plus précisément même, sans doute, jusqu'au message
de François d'Assise. Les restaurateurs monastiques tendent donc,
à chaque période, à proposer un idéal spirituel qui, lui, est condi
tionné par leur temps et que le moine cherche à atteindre dans le
cadre du monastère ou de la communauté, ces deux termes étant
susceptibles de désigner des réalités identiques ou différentes et le
second d'entre eux pouvant recouvrir les modes institutionnels les
plus variés, depuis le cénobitisme total jusqu'à rassemblement
érémitique.
Toutefois, la référence quasi permanente à la règle bénédictine
ne supprime pas les ambiguïtés qu'elle contient et dont il en est
trois qu'il faut souligner ici :
— quant à la spiritualité, l'imprécision qui concerne la pauvreté,
dont l'appréciation est, de toute façon et pour toutes les
époques, fort difficile à définir et qui peut tout au plus s'amé
nager dans un type de vie quotidienne : s'il est évident, en cflet,
que le moine doit être pauvre en esprit, tuer jusqu'au plus
profond de lui-même le vice de la propriété personnelle, quel
doit être le degré de son dénuement, quel est son genre de vie
pauvre, au sein d'une communauté qui possède et qui, fréquem
ment, est riche 1 ?
— quant à la spiritualité aussi, la valeur et le sens du travail
manuel : si, comme le dit 'la règle (ch. 48), le moine ne doit pas
refuser les gros travaux des champs quand la nécessité l'exige,
s'il ne doit pas s'en affliger, est-il astreint à les accomplir et
devient-il alors, en les accomplissant, « vraiment moine » parce
que, en vivant du travail de ses mains, en permettant au
monastère de vivre et en ne s'attristant pas de sa peine, il
renonce d'une façon remarquable à sa volonté propre, en arri
vant ainsi au meilleur degré de l'humilité, ou parce <rue, en
faisant un travail dur et pénible, il se livre à une ascèse plus
difficile et méritoire ?
1 Je profite de l'occasion qui m'est donnée ici pour rectifier une erreur d'im
pression dans l'article que j'ai donné pour les Mélanges Perroij sur « La notion de
pauvreté la règle de saint Benoît ». L'ouvrage porte à la p. 627 : &

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