L argent et l Église - article ; n°1 ; vol.28, pg 26-37
13 pages
Français

L'argent et l'Église - article ; n°1 ; vol.28, pg 26-37

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
13 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Autres Temps. Les cahiers du christianisme social - Année 1990 - Volume 28 - Numéro 1 - Pages 26-37
12 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 42
Langue Français

Extrait

Jean-Daniel Roque
L'argent et l'Église
In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°28, 1990. pp. 26-37.
Citer ce document / Cite this document :
Roque Jean-Daniel. L'argent et l'Église. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°28, 1990. pp. 26-37.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1990_num_28_1_1421L'ARGENT ET L'EGLISE
Jean-Daniel Roque
Le chrétien, l'argent et l'église : un nécessaire débat
« Comment le chrétien doit-il user de son argent ? Comment l'Église
doit-elle collecter les ressources nécessaires à son existence et à son action
et comment doit-elle en user ? » Telles étaient les questions soumises aux
synodes régionaux de l'Église Réformée de France à l'automne 1952, puis
au synode national de 19531. Depuis lors, cette question n'a plus été
posée ! Pourtant en 1969 le synode national, « reconnaissant que l'att
itude vis-à-vis de l'argent, déterminante dans la relation avec le prochain
et le Seigneur, est un des facteurs essentiels du témoignage chrétien »
avait chargé « le Conseil national d'inscrire dans les meilleurs délais à
l'ordre du jour des synodes... l'étude de l'argent et de l'offrande »2.
Douze ans plus tard, au moment d'établir la synthèse des débats des syno
des régionaux relatifs à la question « Pour qui, pour quoi travaillons-
nous », le rapporteur constatait : « En fait, les questions posées par la
rémunération du travail, le salaire, le gain ont été passées sous silence ou
ne sont apparues que voilées et secondes dans presque tous les synodes. Il
semble qu'on peut y voir un signe de notre manque de liberté chaque fois
qu'on aborde les problèmes d'argent, manque de liberté qu'on n'est tou
jours pas arrivé à exorciser »3.
Ce « manque de liberté » suffit-il pour expliquer ce silence, ces rendez-
vous manques... ou faut-il rechercher d'autres motifs ? En tout cas nul ne
pourrait aujourd'hui s'en tenir aux réflexions et débats de 1953... tant la
problématique a évolué en près de 40 ans (plus d'une génération !)
Diversification de l'approche biblique, tout d'abord
S'il était et demeure indispensable de commencer par rappeler toutes les
Jean-Daniel Roque est trésorier général de l'Église Réformée de France.
26 relatives à la richesse — les plus sévères du Nouveau Tescondamnations
tament — et le caractère premier de la dimension spirituelle du problème
de l'argent, l'on peut se demander si depuis lors la lecture du Nouveau
Testament n'a pas mis aussi l'accent sur une certaine « réhabilitation de
l'argent »4.
Ainsi, dans la parabole des talents (Matthieu 25 : 14-30), les deux pre
miers serviteurs « comprennent que ces talents, c'est une possibilité qu'ils
ont de prouver leur reconnaissance, un moyen de témoigner au maître
leur amour. C'est ainsi qu'ils reçoivent ces biens comme une responsabil
ité, certes, mais une responsabilité joyeuse merveilleuse, une
ité qui est une grâce. Et aussitôt, sans perdre un instant, ils entrent dans
cette aventure » — (« faire valoir ») — « une aventure passionnante qui
d'ailleurs, n'est pas sans risque »5. Il n'est pas contradictoire de constater
qu'alors qu'un talent représentait une valeur considérable, le maître les
louera seulement d'avoir été « fidèles en peu de chose » : le « faire-
valoir » n'est pas l'essentiel... mais il ne faut pas pour autant en sous-
estimer l'importance.
Quant à la parabole de l'économe infidèle (Luc 16,1-13), elle est deve
nue celle de l'intendant intelligent, « un homme qui sait tromper la
pseudo-puissance de l'argent pour se faire des amis »6. Non pas seule
ment parce que les études sur les coutumes palestiniennes en matière de
droit foncier ont permis de comprendre que « l'intendant, pour assurer
son avenir et se faire des amis, accepte de renoncer à ses propres bénéfices
et à ne réclamer aux débiteurs que le montant qu'il s'est effectivement
engagé à payer à son maître ». Mais l'intendant est surtout « intelligent »
parce qu'il « a réussi à retourner une situation compromise, en inversant
radicalement l'usage de l'argent ». « Ce qu'il recherchait comme un but,
au point de détruire à cause de lui toutes relations humaines avec autrui, il
en fait un moyen de retrouver une relation avec autrui ».
N'en est-il pas de même dans le cas de la rencontre entre Jésus et
Zachée (Luc 19 : 1-10) ? « Zachée ne décide ni de renoncer à son argent ni
de répudier son métier. Il se propose de donner aux pauvres la moitié de
ses biens, et de compenser très largement les torts financiers qu'il aurait
créés... La fonction de l'argent semble bien s'être inversée... L'argent
n'est plus ce qui brise les relations, mais ce qui permet, au contraire, d'en
tisser »7.
Évolution aussi au regard des pratiques
Quel contraste entre le rapport de 1953 (témoin en cela des débats de
l'époque) affirmant gravement — après maintes citations bibliques —
« l'épargne est légitime » et reconnaissant qu'« il peut arriver... que
l'Église dispose pour un temps d'un capital plus ou moins important » et
l'analyse stimulante de 1984 : « Les chrétiens n'ont plus le droit de penser
27 d'agir comme s'ils vivaient encore dans une économie rurale et artisaet
nale. Compte tenu de la très grande complexité actuelle des relations
industrielles, bancaires, économiques et financières, ils doivent être attent
ifs aux effets bienfaisants que peut avoir leur argent suivant où sont
orientés leur épargne, leurs placements et leurs impôts, et ils doivent aussi
savoir que cet argent peut être associé à des actions superflues, inutiles ou
même nocives, dans la vie privée aussi bien que dans la gestion publique.
C'est pourquoi la responsabilité des chrétiens est grande à l'égard des
banques et des industries qui utilisent leurs économies »4 !
Enfin le synode de 1953 avait délibéremment écarté de ses travaux
« faute de temps ou parce qu'ils constituent des problèmes trop généraux
ou complexes » plusieurs questions non négligeables. Certaines d'entre
elles ont déjà trouvé une solution (par exemple « Exercice possible par les
pasteurs d'une profession rétribuée ») mais d'autres demeurent d'actual
ité :
— « Modification de la loi de 1905 sur la séparation des Églises et de
l'État »
(l'on ne sait dans quel sens le rapporteur envisageait cette modification,
mais le débat sur la loi de Séparation est redevenu d'actualité, que ce soit
à la suite de la loi du 23 juillet 1987 relative au développement du Mécénat
ou de la réflexion plus générale sur la laïcité.)
— « L'Église comme propriétaire des biens destinés au service du
culte » (cf. plus loin).
Bref, il serait temps — pour l'ERF au moins — de ne pas s'en tenir aux
questions abordées régulièrement par les rapports financiers annuels et
d'engager à nouveau une réflexion collective sur l'argent.
Église et déficit
La Séparation des Églises et de l'État entraîna la prise en charge par les
Églises de la rémunération des ministres du culte, ce qui ne se passa pas
sans de sérieuses difficultés financières et la répétition d'exercices clos en
déficit : ce dernier pouvait atteindre jusqu'à 20 % (Église Réformée,
1926) mais tournait plus souvent autour de 10 % du budget initial. Au
point que lors de la réunification, en 1938, un appel spécifique — dit
« Appel des 5 Millions » — fut lancé (et satisfait, en sus des budgets ordi
naires) afin que la nouvelle union d'Églises ne voit pas ses premiers pas
entachés d'un tel handicap. Heureusement, cette situation est révolue ou
du moins ne s'est plus présentée depuis une quinzaine d'année.
Il ressort même des études menées par les trésoriers généraux successifs
de l'ERF8 que les moyens m

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents