L interdiction des images et l art du palais à Byzance et dans l Islam ancien - article ; n°4 ; vol.101, pg 393-401
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L'interdiction des images et l'art du palais à Byzance et dans l'Islam ancien - article ; n°4 ; vol.101, pg 393-401

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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 1957 - Volume 101 - Numéro 4 - Pages 393-401
9 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1957
Nombre de lectures 13
Langue Français

Extrait

Monsieur André Grabar
L'interdiction des images et l'art du palais à Byzance et dans
l'Islam ancien
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 101e année, N. 4, 1957. pp. 393-
401.
Citer ce document / Cite this document :
Grabar André. L'interdiction des images et l'art du palais à Byzance et dans l'Islam ancien. In: Comptes-rendus des séances de
l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 101e année, N. 4, 1957. pp. 393-401.
doi : 10.3406/crai.1957.10816
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_1957_num_101_4_10816DES IMAGES L'INTERDICTION
ET L'ART DU PALAIS A BYZANCE
ET DANS L'ISLAM ANCIEN
PAR
M. ANDRE GRABAR
MEMBRE DE L'ACADÉMIE
Les historiens de l'iconoclasme byzantin n'omettent jamais de
mentionner le problème d'une relation possible entre l'interdiction
des images religieuses, dans l'Empire chrétien, au premier tiers du
vme siècle, et l'hostilité à l'égard des figurations d'êtres animés,
au sein de la religion islamique, alors en pleine expansion.
Nous n'avons pas l'intention de revenir sur ce problème, pour
évaluer les chances d'une influence des édits des califes omeyyades
du début du vme siècle, sur les initiatives iconoclastes des emper
eurs, leurs contemporains. Et nous ne nous étendrons pas davan
tage sur le domaine, essentiel, des spéculations religieuses de
l'époque, dans les pays du Levant, qui pourraient expliquer la
parenté des deux mouvements d'hostilité à l'égard de l'imagerie
religieuse.
Au lieu de soulever ces questions générales, nous interrogerons
directement les monuments, et les textes relatifs à des monuments
disparus, pour juger des effets réels de l'œuvre des iconoclastes ;
et c'est en juxtaposant nos observations et les conclusions des
recherches les plus récentes sur l'art omeyyade contemporain, que
nous verrons ce qui, dans les deux expériences, parallèles à bien des
égards, a été semblable, et ce qui, au contraire, les séparait.
L'histoire de l'iconoclasme des empereurs byzantins commence
par un acte brutal de l'empereur Léon in : en 726, il ordonne la
destruction d'une image du Christ qui surmontait l'entrée de son
palais dite « Porte de Bronze ».
La destruction de cette image du Christ est le premier acte de
l'iconoclasme des empereurs qui nous soit rapporté, et il est d'autant
plus remarquable qu'il a précédé — probablement de quatre ans —
Fédit impérial relatif à l'interdiction des icônes. L'acte brutal de COMPTES RENDUS DE L* ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS - 1957 394
Léon ni a la valeur d'un symbole : dans son propre palais, l'empereur
agit conformément à ses convictions, sincères ou intéressées. Il ne
peut ignorer cependant que l'image du Christ au-dessus de la grande
porte du palais est une « profession de foi » du souverain qui l'habite,
et que la destruction de cette image est un acte public. Les événe
ments se chargent d'ailleurs de le confirmer sans tarder : la foule
s'émeut, tue le fonctionnaire que l'Empereur avait chargé de l'opé
ration, et provoque ainsi des représailles cruelles de la part de
Léon m.
Cependant, l'empereur ne se contente pas de détruire. Il remplace
l'image du Christ par une croix et lui ajoute une inscription qui est
— sinon une excuse — une explication de la destruction de l'image
et de l'installation à sa place d'une croix : « L'Empereur — dit
l'inscription — ne peut admettre une image du Christ sans voix,
sans souffle, et l'Écriture de son côté s'oppose à la figuration du
Christ par sa (seule) nature humaine ; voici pourquoi Léon et (son
fils) le « nouveau » Constantin tracent sur la porte du palais le signe
trois fois heureux de la croix, gloire des fidèles ».
Nous n'avons pas à entreprendre ici une analyse détaillée de cette
inscription qui a cet intérêt pour nous qu'elle exprime directement
la pensée des premiers basileis iconoclastes. Relevons-y cependant
un trait, qu'on ne trouvera plus chez les iconoclastes des générations
suivantes, et qui témoigne d'une « psychologie de l'image » assez
particulière. En effet, tandis que les iconophiles, tels Jean Damas-
cène ou Méthode ou Théodore Studite, doivent à la philosophie
classique de pouvoir imaginer sans peine ce qui nous paraît évident,
à savoir que l'image, tout en imitant l'apparence de quelqu'un, se
■distingue de celui-ci par son essence ou sa nature (bois ou toile
couverts de couleurs, d'une part ; être vivant, de l'autre) ; les ico
noclastes, à commencer par Léon ni et Constantin v, au nom des
quels a été rédigée l'inscription de la Porte de Bronze, étaient loin
de penser de même. C'est parce qu'elle était sans voix ni respiration,
que la figuration du Christ, sur la Porte de Bronze, a été condamnée
et détruite par leurs soins : car à leurs yeux, distincte de l'être vivant
qu'elle prétendait représenter, par l'absence de quelques-unes de
ses facultés essentielles — celles de parler et de respirer — cette
figuration n'était pas une image du Christ. En conformité parfaite
avec l'épigramme de Léon ni et Constantin v, le second de ces emper
eurs iconoclastes l'affirme expressis verbis dans son traité apologé
tique de l'iconoclasme : selon ce texte de Constantin, l'image n'est
vraie que si elle et celui qu'elle représente, sont consubstantiels.
L'épigramme de la Porte de Bonze le confirme : les empereurs
Léon m et Constantin v n'auraient toléré l'image du Christ que si
elle avait pu respirer et parler, c'est-à-dire si elle avait été vivante, du palais a byzance 395 l'art
et sur ce point ils n'étaient pas loin de concevoir l'image comme
on considère les effigies confectionnées par les magiciens. Or, cette
notion de l'image rejoint celle qui prédominera chez les Musulmans,
et que ceux-ci ont dû hériter de leurs devanciers dans les pays du
Levant. L'art islamique qui écarte régulièrement les images de
Dieu et — dans l'art religieux — les images de tous les êtres vivants
— ne les exclut-il pas pour la même raison ? Ne pouvant être
consubstantielle avec Dieu ni avec aucun être vivant, une image
est nulle et non avenue. Dans le cadre de l'art musulman (exception
faite du cycle princier et des illustrations de livres scientifiques), — •
l'image ne se maintient souvent qu'en vue de représentations supers
titieuses, prophylactiques et apotropaïques, précisémet parce
que dans ce domaine on admet implicitement la possibilité d'une
« consubstantialité » de la représentation et du représenté, et en
conséquence, une substitution de l'un à l'autre : les lions, les dra
gons, les chiens enchaînés des portes musulmanes, les animaux et
les monstres astrologiques, les paires d'yeux qui apparaissent sur
tant d'objets islamiques n'ont pas partagé le sort des autres images
d'êtres animés, tous exclus du répertoire des sujets possibles de
l'art, parce qu'on leur prêta implicitement la faculté de quitter
l'état d'image et d'agir comme des lions, des dragons vivants et
comme des paires d'yeux amis ou ennemis.
Rien ne le fait mieux sentir que certains passages célèbres du
Qoran lui-même, rapprochés d'un hadith célèbre, sur lesquels mon
collègue de l'École des Hautes-Études Henry Gorbin veut bien
attirer mon attention : 1er passage : Sourate m, verset 43 (Épisode
de l'Annonciation ; Jésus sera l'Envoyé de Dieu auprès des enfants
d'Israël) : « II leur dira : Voici que je viens à vous, avec un Signe
de votre Seigneur. De l'argile je formerai comme la figure d'un
oiseau, je soufflerai sur elle, et voici qu'elle deviendra un oiseau
(vivant), par la permission de Dieu... » (cf. Sourate v, verset 110) ; —
2e passage : Sourate xx, verset 96 (Épisode du veau d'or ; le Samar
itain jette dans le feu des ornements et des bijoux, et il en retire
un veau réel, poussant des mugissements) : « Et toi, ô Samaritain,
quel a été ton destin ? Il répondit : J'ai vu ce qu'ils ne voyaient
pas. J'ai pris une poignée de poussière sous les pas de l'E

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