La survie de l’âme, de Platon à Posidonius - article ; n°2 ; vol.199, pg 169-182
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Revue de l'histoire des religions - Année 1982 - Volume 199 - Numéro 2 - Pages 169-182
Conception traditionnelle de la Grèce archaïque, l'idée de la survie a été développée par Platon à l'intérieur d'une doctrine spiritualiste. Confronté à cet héritage qu'elle récuse partiellement en accord avec ses prémisses spécifiques, l'école stoïcienne défend, à travers les écrits de ses divers membres, la thèse d'une persistance temporellement limitée de l'âme, accentuant la dissociation entre les devenirs du sage et de l'insensé.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 13
Langue Français

Extrait

Jacques Bels
La survie de l’âme, de Platon à Posidonius
In: Revue de l'histoire des religions, tome 199 n°2, 1982. pp. 169-182.
Résumé
Conception traditionnelle de la Grèce archaïque, l'idée de la survie a été développée par Platon à l'intérieur d'une doctrine
spiritualiste. Confronté à cet héritage qu'elle récuse partiellement en accord avec ses prémisses spécifiques, l'école stoïcienne
défend, à travers les écrits de ses divers membres, la thèse d'une persistance temporellement limitée de l'âme, accentuant la
dissociation entre les devenirs du sage et de l'insensé.
Citer ce document / Cite this document :
Bels Jacques. La survie de l’âme, de Platon à Posidonius. In: Revue de l'histoire des religions, tome 199 n°2, 1982. pp. 169-
182.
doi : 10.3406/rhr.1982.4714
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1982_num_199_2_4714LA SURVIE DE L'AME
DE PLATON A POSIDONIUS
Conception traditionnelle de la Grèce archaïque, l'idée de
la survie a été développée par Platon à l'intérieur d'une doctrine
spiritualisie. Confronté à cet héritage qu'elle récuse partiell
ement en accord avec ses prémisses spécifiques, l'école stoïcienne
défend, à travers les écrits de ses divers membres, la thèse d'une
persistance temporellemeni limitée de l'âme, accentuant la disso
ciation entre les devenirs du sage et de l'insensé.
Diogène Laèrce1 et Cicéron2 s'accordent à reconnaître une
même doctrine stoïcienne de l'immortalité de l'âme : périssable
comme toute chose, l'âme persiste cependant un certain
temps après la mort. Divers textes relatifs à l'ancien et au
moyen stoïcisme attestent la présence de cette doctrine chez
les principaux représentants de ce courant philosophique3.
A travers les considérations qui suivent, nous voudrions
1. Diogène Laërce, VII, 156 (= SVF, II, 774).
2. Cicéron, Tusculanes, I, 31, 77 (= SVF, II, 22) : « ... diu mansuros aiunt
animos, semper negant » et I, 32, 78 ( = ibid.) : « ... aiunt manere animos, cum
e corpore excesserint, sed non semper. »
3. Citons notamment : Epiphane, Panarion, III, 2, De Fide, 9 (= SVF,
I, 146) et saint Augustin, Contra Academicos, III, 17, 38 (= SVF, I, 146) à
propos de Zenon. A propos de Cléanthe : Diogène Laërce, VII, 157 (= SVF, I,
522). A propos de Chrysippe : Tertullien, De anima, chap. 54 (= SVF, II, 814)
et Eusèbe, Prep. evan9., XV, 20, 6 ( = SVF, II, 809).
Revue de l'Histoire des Religions, cic-2/1982 Jacques Bels 170
tenter une approche globale de la doctrine de la survie de
l'âme dans l'ancien et le moyen stoïcisme, en soulignant
l'originalité de la démarche, en marquant ses rapports avec
la spéculation antérieure et en indiquant les problèmes qui
lui sont inhérents. Or un texte de Sextus Empiricus, dans
son ouvrage Adversus mathematicos, offre un intéressant point
de départ :
§ 71 : Car il est impossible de penser que les âmes se portent
vers le bas ; en effet, subtiles et autant ignées que compos
ées d'air, elles se portent plutôt vers les régions supérieures.
§ 72 : Elles survivent par elles-mêmes et, comme le disait
Epicure, il n'est pas vrai que, séparées du corps, elles se
dispersent comme une fumée. Auparavant, le corps n'était
en effet pas leur principe de cohésion, mais elles-mêmes
l'étaient pour le corps et davantage encore pour elles.
§ 73 : (...) Elles habitent la région sublunaire où elles peuvent
subsister un plus long temps grâce à la pureté de l'air ;
elles reçoivent une nourriture dont elles ont besoin (...)
grâce aux exhalaisons de la terre. Dans ces lieux, il n'y
a rien pour les dissoudre4.
Ce témoignage suscite une première question : qui a
professé la doctrine dont Sextus Empiricus se fait ici l'écho ?
Le § 72 présente deux éléments de réponse qui, après avoir
mentionné l'opposition à la pensée épicurienne, en précise le
contenu : l'âme est principe de cohésion pour elle-même et
pour le corps. Or cette conception de l'âme et l'opposition à
l'épicurisme se retrouvent dans un texte d'Achille Tatius qui
identifie en outre les opposants :
— Les épicuriens disent que les astres ne sont pas des êtres
vivants parce qu'ils sont maintenus par des corps ; les
stoïciens affirment le contraire. Posidonius disait que les
épicuriens ignorent que ce ne sont pas les corps qui ra
ssemblent les âmes, mais les âmes qui maintiennent les
4. Sextus Empiricus, Adv. mathematicos, IX, 71-73 (= SVF, II, 812). La survie de l'âme 171
corps comme la colle maintient elle-même et les choses
extérieures5.
La convergence des deux témoignages permet d'affirmer
que Sextus Empiricus fait allusion à une doctrine stoïcienne.
Il reste qu'après avoir mentionné l'opposition générale des
stoïciens aux épicuriens, Achille Tatius cite nommément Posi-
donius. La question se pose de savoir si la doctrine rapportée
est propre à Posidonius, membre du stoïcisme moyen ou, plus
généralement, à ce courant philosophique. En fait, comme
nous allons le montrer, tous les philosophes de l'ancien et du
moyen stoïcisme ont admis le principe général d'une « immort
alité limitée » de l'âme. Leurs désaccords portent sur la
durée de cette permanence.
Avant d'évoquer ce point, il convient de souligner un
autre élément important dans le texte de Sextus Empiricus :
les régions supérieures vers lesquelles se porte l'âme sont
assimilées, au § 73, à la région sublunaire où les âmes vivent
en compagnie des astres, recevant la même nourriture qu'eux.
Le stoïcisme reprend ici une tradition perceptible dans le
pythagorisme, partiellement admise par le platonisme. En
effet, dotant l'âme du mouvement, les pythagoriciens éta
blissent des liens privilégiés entre elle et les astres : à l'image
de ceux-ci se déployant suivant un cours régulier, l'âme se
réinsère périodiquement dans le devenir et prend en charge
le corporel6. Identifiant dans le Phèdre l' automotricité à
l'essence de l'âme7, proposant une conception spiritualisée
d'une âme naturellement liée aux Idées, Platon épure pro-
5. Achille Tatius, Isagoge in Arati Phaenomena, in Commentariorum in
Aralwn reliquiae, Berlin, Ed. E. Maass, 1898, pp. 40-41. Notons au passage
que cette idée de « l'âme rassembleuse » évoque un des premiers fragments de
la philosophie grecque dans lequel Anaximène, après avoir posé l'identité de
Varchè et de la psyché, leur reconnaît à tous deux le « pouvoir de tenir ensemble »,
de « rassembler ».
6. Cf. e.a. : Eudème, Phys., 27 in D. K., I, 460, 23-25 ; Aristote, De anima,
I, 2, 405 a 29-6 1 et 404 a 17-25 ; Aetius, II, 7, 7 in D. K., I, 403, 14-16 et 19-21 ;
Iamblique, VP, 82 in D. K., I, 464, 6 ; Hippolyte, Aet. haer., VI, 2, 25 ; Plu-
tarque, Degenio Socratis, 591 c 1-2 ; Macrobe, Songe de Scipion, I, 12, 3 ;
Clément, Protr., 66 in D. K., I, 213, 24-25.
7. Platon, Phèdre, 245 c 5-10. Jacques Bels 172
gressivement les anciens mythes de la survie, conservant dans
les Lois seulement deux grands principes eschatologiques :
le décret universel de la Providence et le vouloir propre de
l'homme. A travers la métempsycose, à travers l'éternelle
alliance toujours brisée et sans cesse recommencée d'un corps
et d'une âme, celle-ci « se conquiert » progressivement et, au
terme d'une existence, occupe, au moins pour un temps, la
place qu'elle vaut auprès des âmes des astres qu'elle vaut8.
En liant survie et région sublunaire, les stoïciens pro
longent donc une conception présente dans le pythagorisme
et chez Platon. Cette vision épurée de la survie s'accompagne
d'un rejet des anciennes croyances. Ainsi, dans le De natura
deorum, Gicéron peut affirmer que plus personne ne croit aux
monstres placés autrefois dans les Enfers9.
Rapportant en la commentant la doctrine stoïcienne, Ter-
tullien dans le De anima apporte deux nouvelles précisions
et confirme les témoignages précédents : les stoïc

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