Les confrères de Jean Meslier. Culture et spiritualité du clergé champenois au XVIIe siècle - article ; n°182 ; vol.69, pg 61-86
27 pages
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Les confrères de Jean Meslier. Culture et spiritualité du clergé champenois au XVIIe siècle - article ; n°182 ; vol.69, pg 61-86

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Description

Revue d'histoire de l'Église de France - Année 1983 - Volume 69 - Numéro 182 - Pages 61-86
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1983
Nombre de lectures 36
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Monsieur Dominique Julia
David McKee
Les confrères de Jean Meslier. Culture et spiritualité du clergé
champenois au XVIIe siècle
In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 69. N°182, 1983. pp. 61-86.
Citer ce document / Cite this document :
Julia Dominique, McKee David. Les confrères de Jean Meslier. Culture et spiritualité du clergé champenois au XVIIe siècle. In:
Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 69. N°182, 1983. pp. 61-86.
doi : 10.3406/rhef.1983.3297
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhef_0300-9505_1983_num_69_182_3297•
.
.
LES CONFRÈRES DE JEAN MESLIER
Culture et spiritualité du clergé champenois •
au XVIIe siècle «
Depuis fort longtemps, le cas de Jean Meslier a passionné les histo
riens des idées : ce curé du diocèse de Reims, mort en 1729 dans sa
paroisse ardennaise d'Étrépigny après un ministère de quarante années,;
ne laissait-il pas manuscrit un mémoire de ses pensées et sentiments
« pour être adressé à ses paroissiens après sa mort et pour leur servir de
témoignage de vérité à eux et à tous leurs semblables », mémoire où il pro-,
clame « la vanité et la fausseté de toutes les divinités et de toutes les reli
gions du monde » ? K
L'étude scientifique de l'œuvre a cependant été longtemps occultée*
par l'enjeu idéologique et politique qu'elle constitue. Depuis que Vol
taire a publié en 1762 un Extrait des sentiments de Jean Meslier adressés'
à ses paroissiens sur une partie des abus et des erreurs en général et en
particulier^ le curé champenois est devenu en effet le héros éponyme
du combat des Lumières contre le fanatisme religieux. Au plus fort
de la campagne déchristianisatrice, Anacharsis Gloots réclamait, à la
tribune de la Convention nationale, qu'une statue lui soit élevée dans
le temple de la Raison, comme étant « le premier ecclésiastique abju-»-
reur » (27 brumaire an II — 17 novembre 1793) a. Après la parution
à Amsterdam en 1864 de la première édition complète du Mémoire •
Jean Meslier entre dans le panthéon des précurseurs du socialisme *.
t. Nous reprenons ici les termes mêmes qui figurent au début du Mémoire. L'édi
tion de référence des œuvres complète» de Jean Meslier a été récemment publiée
par J. Deprun, R. Desne et A. Soboul, Paris, Éditions Anthropos, 1970-1972,.
3 tomes. -
- 2. Texte du discours, dans Jean Meslieb, Œuvres complètes, t. III, p. 500-504.
3. Par le libre penseur Rudolf Charles d'Ablaing van Giessenburg. Sur l'his
toire de cette édition cf. Tristan Haan, « Rudolf Charles et la diffusion de son édi
tion du Testament de Meslier, 1860-1888 », dans Le curé Meslier et la vie intellec
tuelle, religieuse et sociale (fin XVIIe-début XVIIIe siècle). Actes du Colloque Inter"
national de Reims, 17-19 octobre 1974, Bibliothèque de l'Université de Reims, 1980,
p. 539-573.
4. Cf. par exemple C. Gruenbero, « Jean Meslier, un précurseur oublié du socia
lisme contemporain », dans Revue d'économie politique, mai-juin, 1888, p. 277- -
298 ; B. Maxon, • Jean Meslier, communiste et révolutionnaire », dans La Revue
R.H.É.F., t. LXIX, 1983. . i-. - • : ■
62 > D. JULIA ET D. MC KEE
Après la révolution bolchevique de 1917 naît une « meslierologie
marxiste » 5 qui célèbre dans le curé athée le « premier annonciateur
du communisme révolutionnaire » démasquant « le caractère exploi
teur de la bourgeoisie française » 8. Dès 1925, paraît à Moscou une édi
tion abrégée en langue russe du Mémoire, suivie en 1937 d'une édi
tion complète ; en 1930, la Petite Encyclopédie soviétique range Jean .
Meslier dans la galerie des grands ancêtres du socialisme scientifique.
Ces métamorphoses successives d'un personnage dont le visage nous
restera à jamais inconnu ont en fait constitué autant d'obstacles à
une analyse en profondeur de l'œuvre. En effet, la recherche militante
d'une paternité qui fait de Jean Meslier le point-origine d'un combat w
politique contemporain conduit à une lecture anachronique de sa pensée.
Suivant la forte formule de J.-M. Goulemot, Jean Meslier
c doit être justiciable d'un discours scientifique et non d'une bouillie
humaniste et progressiste, annexion anachronique dont on peut se demander
si elle sert les fins qu'elle se pose » 7.
A la vérité, les études menées depuis une vingtaine d'années en France
ont, sur ce plan, passablement défriché le terrain : tout d'abord la monog
raphie de Maurice Dommanget 8, puis les colloques d'Aix-en-Provence
en 1964 • et de Reims en 1974 10 ; enfin, dans l'intervalle de ces deux
colloques, la parution, en 1970-1972, de la première édition véritable-*
ment scientifique des œuvres de Jean Meslier. Beaucoup reste cepen-s
dant à faire pour reconstituer la genèse du Mémoire et repérer les sources
précises où l'auteur a puisé.
Plutôt que de rechercher vainement de fort improbables relation»
entre Jean Meslier et les milieux intellectuels parisiens u, il nous est
socialiste, 1888, p. 147-154 ;' A. Lichtenberger, Le socialisme au XVIIIe siècle,
Paris, 1895, p. 74-84 ; E. Petitfils, Un socialiste-révolutionnaire du
Jean Meslier Paris, 1905.
5. Pour reprendre l'expression de G. Koutcherenko au cours de sa commun
ication « L'étude de Meslier : bilan et problèmes » au colloque de Reims en 1974
(cité à la note 3), p. 452. •
6. Les citations sont extraites d'une notice de A. Deborine en 1924 et d'une
introduction à l'édition russe du mémoire faite en 1937 par A. Gagarine. On se
reportera sur ce point à M. Skrzypek, « La fortune de Jean Meslier en Russie
et en Union Soviétique », dans Dix-huitième siècle, n° 3, 1971, p. 117-143.
7. J.-M. • Goulemot, « Meslier et son discours sur l'histoire », communication
au colloque de Reims en 1974 (cité à la note 3), p. 218.
8. M. Dommanget, Le curé Meslier, athée, communiste et révolutionnaire sous :
Louis XIV, Paris, 1965. Il s'agit de la première étude d'ensemble parue en France.
9. Centre aixois d'études et de recherches sur le xvme siècle, Etudes sur le curé -
Meslier, Actes du colloque international d'Aix-en-Provence, 21 novembre 1964, Paris,
Société des Études robespierristes, 1966.
10. La référence des Actes de ce colloque est indiquée à la note 3. Le texte pré
senté ici est une version remaniée de la dernière partie de la communication que
nous avions faite à ce colloque. Les organisateurs de celui-ci n'ayant publié dans ■
les Actes qu'un bref résumé de celle-ci destiné à la discussion orale, nous remercions -
la R.H.É.F. de l'accueillir.
11. Comme le fait par exemple l'historien soviétique G. Koutcherenko qui, .
dans sa communication au colloque de Reims, citée à la note 5, part à la décou
verte d'une correspondance entre Jean Meslier et le jésuite Burner, correspondance *
qui n'a très vraisemblablement jamais existé (p. 455-456). - CLERGÉ CHAMPENOIS AU XVIIe SIÈCLE : 63 LE
apparu utile de l'enraciner parmi ses confrères curés du diocèse de
Reims. Une pemière étude a déjà présenté les caractéristiques géogra
phiques et sociales du recrutement du clergé diocésain sous l'épisco-
pat de Charles-Maurice Le Tellier (1671-1710) ainsi que le profil de la
carrière des curés pendant la même période ia. Poursuivant l'analyse j
nous chercherons aujourd'hui à esquisser un portrait culturel du clergé
paroissial au cours des années 1670-1720 à travers trois indices : par
l'analyse du lexique employé dans les procès-verbaux des visites épis-
copales 18, nous examinerons d'abord les exigences des archevêques
à l'égard de leurs clercs — quel est leur modèle du « bon » prêtre ? — ;
nous tenterons ensuite, d'après les livres recensés par les doyens lors
de leur passage dans les presbytères de leur circonscription, et à par
tir des sujets des conférences ecclésiastiques, de cerner l'activité intel
lectuelle des confrères de Jean Meslier ; nous évoquerons enfin le jan
sénisme presbytérien dont le dioc

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