Comment mesurer la transformation : Évaluation et amélioration de l'impact du Microcrédit Susy Cheston, Directrice exécutive, Women's Opportunity Fund Larry Reed, Directeur général, Opportunity International Network et Vanessa Harper, Lauren Hill, Nancy Horn, Suzy Salib, Margaret Walen (Cet article a été préparé pour la Réunion des Assemblées du Sommet du Microcrédit du 24 au 26 juin à Abidjan, Côte d'Ivoire. Cet article a pour objectif de contribuer aux discussions lors de la Réunion ainsi qu'au processus d'apprentissage au sein de la Campagne du Sommet du Microcrédit. Les opinions exprimées dans ces articles sont celles des auteurs.)
Comment mesurer la transformation : Évaluation et amélioration de limpact du MicrocréditSusy Cheston, Directrice exécutive, Women's Opportunity FundLarry Reed, Directeur général, Opportunity International NetworketVanessa Harper, Lauren Hill, Nancy Horn, Suzy Salib, Margaret Walen(Cet article a été préparé pour la Réunion des Assemblées du Sommet du Microcrédit du 24 au26 juin à Abidjan, Côte dIvoire. Cet article a pour objectif de contribuer aux discussions lors dela Réunion ainsi quau processus dapprentissage au sein de la Campagne du Sommet duMicrocrédit. Les opinions exprimées dans ces articles sont celles des auteurs.)
Comment mesurer la transformation : Évaluation et amélioration de limpact du MicrocréditSusy Cheston, Directrice exécutive, Women's Opportunity FundLarry Reed, Directeur général, Opportunity International NetworkteVanessa Harper, Lauren Hill, Nancy Horn, Suzy Salib, Margaret WalenSOMMAIREPrésentation générale : la question de lévaluation dimpact est lune de celles qui continuent àposer problème aux praticiens du microcrédit, dont certains estiment que les études dévaluationdimpact existantes sont sans valeur, alors que dautres insistent quelles sont absolumentnécessaires. Les auteurs voudraient voir instituer un nouveau modèle dévaluation dimpact. Ilsdécrivent brièvement les principes essentiels des audits dimpactqui comprennent la mesure dela transformation chez les clients. Ils analysent également une série doutils dévaluationdimpactdestinés aux praticiens du microcrédit et présentent rapidement les défis futursauxquels devront faire face praticiens, bailleurs de fonds et théoriciens pour accroître lutilité desefforts dévaluation dimpact.Résumé : le débat sur lévaluation dimpact conduit forcément à la question suivan t:e« Mesurer limpact, daccord, mais dans quel b u?t ». Les auteurs voudraient voir adopter desoutils dévaluation dimpact qui ne se limitent pas à incorporer les indicateurs dévaluationfinancière mais qui puissent également indiquer la transformation chez les clients et partransformation, nous parlons de modifications profondes dans la vie des personnes et de leurquartier ou région. Nous ne prétendons pas nier les problèmes attachés à lévaluation dimpact,notamment les questions de rigueur théorique, de coûts et dobligation dexpertise. Néanmoins,en dépit de ces problèmes, les auteurs dénoncent lerreur qui consiste à supposer que le marchéoffre un indicateur adéquat de données dévaluation dimpact et soutiennent que les praticiens dumicrocrédit devraient effecteur des évaluations dimpact afin de déterminer si les institutions demicrocrédit ont atteint leur objectif officiel - lallégement de la pauvreté.Cest pour cela quils demandent ladoption et la mise en oeuvre doutils dévaluation dimpactconçus pour les praticiens du microcrédit et offrant un modèle nouveau de lévaluationdimpact, un modèle qui soit basé sur le concept delaudit dimpa.c Itls relèvent lesinsuffisances des études dévaluation dimpact traditionnelles et soulignent que laudit ne doitpas être conçu comme un exercice théorique mais comme un outil de gestion interne. Lobjectifen est tout à la fois de mesurer les résultats et daméliorer les programmes analysés.À partir de lutilisation dun modèle daudit financier, nous offrons des directives générales dansle but et dans le cadre dun audit dévaluation dimpact, en privilégiant les critères que devraientutiliser les gestionnaires pour sélectionner des outils appropriés. Ces critères comprennentnotamment les analyses de tendances à long terme, les comparaisons avec les données dimpact2
antérieures, la facilité de mise en oeuvre par le personnel existant et la possibilitédincorporation au sein des systèmes dinformation de gestion déjà en place, tout cela à des coûtscomparables à ceux observés pour les audits financiers.La première étape a consisté pour les auteurs à offrir un profil de chacun des quelques- uns desoutils les plus utiles pour les praticiens du microcrédit à lheure actuell.e Nous avons inclusune description de chaque outil, des exemples de questions ou de données recueillies et unrésumé des point forts essentiels et des faiblesses de chaque outil. Lannexe contient égalementquelques présentations abrégées supplémentaires doutils dévaluation dimpact et dautresressources.En dernier lieu, les auteurs appellent les praticiens du microcrédit à redonner à lévaluationdimpact limportance due à un outil de gestion essentiel. Ils invitent également les bailleurs defonds à financer le développement doutils faciles à reproduire et à récompenser lesorganisations qui les utilisent. Ils aimeraient encourager les experts-conseil à accroître leurexpertise et leurs compétences en matière danalyse de ces outils. Enfin, ils signalent que lesclients ont besoin de comprendre que le succès des efforts dévaluation dimpact dépendabsolument de leur participation.3
Comment mesurer la transformation : évaluation et amélioration delimpact du Microcrédi1tSusy Cheston, Directrice exécutive, Women's Opportunity FundLarry Reed, Directeur général, Opportunity International NetworkteVanessa Harper, Lauren Hill, Nancy Horn, Suzy Salib, Margaret WalenIntroduction« -- Eh, monsieur, vous cherchez quoi sous ce lampadaire ?-- Mes clés.-- Vous les avez laissées tomber par ici ?-- Non, je les ai perdues de lautre côté de la rue.-- Mais alors, pourquoi vous ne les cherchez pas de lautre côté de la ru e?-- Parce quon y voit mieux ici .»Vieille plaisanterie mais qui illustre bien la situation dans laquelle se trouvent les méthodesdévaluation de limpact et du microcrédit. Lobjectif du mouvement du microcrédit estdalléger la pauvreté. En dépit de quoi, les seuls indicateurs de performance utilisés pour évaluerlefficacité des programmes de microcrédit sont conçus pour mesurer la rentabilité delinstitution de crédit et la qualité de son portefeuille. Ces indicateurs ne nous apprennent enaucune manière si nos clients sont devenus moins pauvres du fait des prestations reçues.Pourquoi se servir de ces indicateurs qui ne nous indiquent pas si nous atteignons notre objectif ?Tout simplement parce quils sont plus faciles à calculer de manière satisfaisante. Nous passonsnotre temps à étudier les zones bien éclairées alors que lobjet que nous cherchons reste danslombre.Objectif de cette présentationCette présentation cherche à éclairer la question de lévaluation dimpact sur le client dans lesecteur du microcrédit. Nous projetons détudier le manque de bons outils dévaluation dimpact,de décrire certaines des difficultés escomptées au cours de la recherche de tels outils, didentifierles éléments dune évaluation dimpact idéale et de décrire quelque-uns des outils qui devraientnous permettre dévaluer notre impact. En passant, nous essaierons également de réfuter lesarguments de ceux de nos amis qui prétendent nier limportance de lévaluation dimpact.1 Dans le cadre de ce document, du Sommet du Microcrédit de 1997 et de la campagne du Sommet longue de neuf ans,toutes les références au microcrédit font référence aux programmes de prêts destinés à encourager lemploi indépendant,ainsi quaux autres prestations financières et professionnelles à cet effet (notamment lépargne et le soutien technique)réservées aux personnes très pauvres.4
Nous sommes conscients du fait que la question de lévaluation dimpact a donné lieu à denombreux débats dexperts, tout récemment dans le cadre du projet AIMS (Assessing the Impactof Microenterprise Service - Évaluation de limpact des prestations à la microentreprise) delAgence des États-Unis pour le Développement International (USAID) et lors dune série deréunions virtuelles organisées par le Groupe consultatif d'assistance aux plus défavorisés(GCAPD) de la Banque mondiale. Nous ne pouvons que féliciter ces organismes du travailaccompli et les encourager à continuer. Dans lintervalle, les auteurs de cette présentation ontchoisi de concentrer leur attention sur ce qui fait encore défaut aux praticiens du microcrédit quenous sommes : des outils qui puissent nous aider à mieux concevoir les instruments de crédit et àmieux gérer nos institutions.Il nous faut dès le départ admettre que nous souffrons dun certain parti pris. En premier lieu, entant que praticiens du microcrédit nous avons besoin dinformations fiables pour pouvoir prendredes décisions correctes. Nous ne disposons pas de sommes de temps et dargent infinies pourvérifier que les données recueillies sont justes à 99,44 %. Nous reconnaissons la valeur desefforts fournis par les chercheurs pour développer la théorie et la pratique de lévaluationdimpact, mais pour nous, le critère essentiel reste de savoir si ces outils permettent dobtenir desdonnées qui nous aideront à prendre de meilleures décisions.En deuxième lieu, notre longue expérience de ce secteur dactivité nous conforte dans lidée quelobjectif premier de la microfinance est dalléger la pauvreté. Nous choisissons de faire cetravail parce que nous voulons aider et encourager un processus de transformation dans les vies2de nos clients et de leur lieu de vie.Nous sommes prêts à reconnaître que cela ne pourra êtreaccompli sans la mise en place préalable dinstitutions à grande échelle qui puissent opérer demanière rentable. Toutefois, notre mission primordiale est la transformation de la femme en tantquindividu, et de son quartier ou de sa région, et non pas la transformation de linstitution.Nous sommes conscients du fait quil peut être délicat de déterminer si nous avons atteint notreobjectif, dans la mesure où la pauvreté nest pas limitée au domaine économique, mais revêtaussi des aspects sociaux, spirituels et politiques. Nous avons néanmoins choisi de mesurer notreréussite en essayant de savoir si nos clients constatent une amélioration de leur vie grâce à nosprogrammes. Nous savons quil sagit dune situation complexe, mais nous préférons passernotre temps à tenter de faire la lumière sur le sujet que faire des recherches dans des zonesfaciles et bien éclairées qui ne peuvent pas réellement nous indiquer si nous avons atteint notrebu.t2 Dans le cadre de cette présentation, nous tenons à opérer une distinction entre impact et transformation. Noussommes davis que limpact représente tous les changements, positifs ou négatifs, qui résultent dune intervention.Nous définissons la transformation comme un changement très profond des croyances, des valeurs morales, desattitudes, des actions, des relations existants entre les personnes et des structures entraînant une améliorationdurable de lexistence dune personne et(ou) du quartier ou de la région dans laquelle vit cette personne.5
Le problème associé à lévaluation dimpactÀ première vue, il peut sembler évident de mesurer limpact du microcrédit. Si nous cherchons àalléger la pauvreté, et surtout si nous devons utiliser un montant limité de fonds publics pour cefaire, nous devons certainement trouver un moyen de décider si nous atteignons notre objectif.Après tout, le crédit est un outil complexe. En effet, lendettement de lemprunteur peut lui êtreaussi néfaste que bénéfique. Si nous nous efforçons daider nos clients à sortir de la pauvreté,nous voulons forcément savoir quils étaient pauvres au moment où ils ont commencé àemprunter et moins pauvres à la suite de leur emprunt. Nous ne tenons pas à les voir bloquésdans la même situation, dun cycle à lautre, ne réalisant quun faible profit. Savoir que nousavons augmenté la dette de 100 millions de personnes ne nous dit pas si nous avons accomplinotre mission, même si nous leur avons procuré ces crédits de manière efficace dun point devue comptable.Et pourtant la situation nest pas si claire et certains des experts les plus connus de lindustrie dumicrocrédit ont émis des doutes au sujet de lutilité des dépenses dévaluation dimpact.Beth Rhyne écrit par exemple : « Dans lensemble, les évaluations des programmes de créditsont encore fondées sur la logique qui procède du vieil ordre didée sur la causalité. Elles sontconçues selon la présomption dun lien causal direct entre lattribution de crédit à desemprunteurs individuels et une conséquence souhaitée particulière, par exemple une3modification du revenu de lemprunteur résultant directement de loctroi dun prêt particuli e»r.Les arguments de base à lencontre dune évaluation de limpact plus approfondie ont été lessuivants :1.La plupart des analyses dimpact ne respectent pas les critères de recherche théoriqu e:les enquêtes qui indiquent quil y a eu modification du revenu, du montant des biens ou delemploi montrent bien que quelque chose a changé dans la vie des clients mais ne prouventpas que cest le programme qui est à lorigine du changement. Si lon ne procède pas à uneévaluation similaire des changements qui ont pu se produire dans la vie de personnes nayantpas eu droit au crédit (utilisation de groupes témoins) on ne peut pas vraiment attribuerlimpact au crédit accordé. En dernier lieu, la plupart des enquêtes sont de nature ponctuelleet se fient aux souvenirs peu fiables des clients concernant leur situation avant loctroi dunêr.tp2. Les études dimpact sérieuses sont trop cotûeuses : les études dimpact rigoureuses,utilisant des groupes témoins et des bases de données de référence coûtent cher. Ellesnécessitent des experts extérieurs ou un personnel bien formé pour organiser lenquête,établir le système dextraction des informations de référence, former les enquêteurs locaux àla collecte de donnés, écrire le programme dorganisation des données et effectuer lanalysedes résultats finaux.3. Rhyne, Beth, « A New View of Finance Program Evaluation », 1992, GEMINI, Development Alternatives Inc.,Bethesda, MD, États-Unis.6
3. Il est trop coûteux deffectuer ce genre danalyse régulièreme n:tdans la plupart des cas,une institution de microcrédit qui se débat déjà pour assurer sa survie financière ne peut sepermettre de rémunérer une équipe dexperts (experts conseil extérieurs ou personnel à pleintemps) pour effectuer des études dimpact de manière régulière.4.Le marché est une indicateur suffisant de limpac t: si les clients dune organisation demicrocrédit paient la totalité du coût des prestations reçues, remboursent leurs prêts dans lesdélais impartis et reviennent régulièrement emprunter, on peut raisonnablement conclure quele programme a un effet positif (remboursement du client = perception de valeur de la partdu client = satisfaction du client = impact positif). La vérification de ces hypothèses nejustifie pas les frais importants encourus.5. Lévaluation dimpact devient alors le dernier retranchement de ceux qui refusentdaffronter la réalité du march é: les études dimpact servent souvent à justifier des fraisde développement dinstitutions qui nexhibent pas les normes de rentabilité et de qualité duportefeuille exigées par le marché. La nature floue du secteur de lévaluation permet ainsifacilement de masquer des performances financières inadéquates.Les conséquences néfastes du manque dévaluation dimpactBien que les arguments présentés au paragraphe précédent offrent une certaine cohérence, il restenéanmoins à répondre à la question de savoir si les ressources consacrées au microcréditréussissent réellement à sortir les individus de la pauvreté. Ces arguments naident pas non plus àévaluer les différentes méthodes doctroi du microcrédit. Imaginons par exemple le cas de deuxinstitutions de microcrédit, toutes deux également rentables dun point du vue comptable etpossédant le même nombre de clients. Leur impact est pourtant extrêmement différent : lunedentre elles offre un crédit rentable mais na quun impact marginal et dispersé sur ses clients.Lautre ne se contente pas doffrir des prêts mais aide ses clients à développer leurs talents deleadership et à édifier des réseaux sociaux avec pour résultat un changement positif et étendu àlintérieur des communautés où vivent ces clients. Les évaluations financières ne nous donnentaucun moyen de différencier entre ces deux institutions. Il nous faut un moyen dévaluerlimpact transformationnel pour découvrir la différence.Nous pensons que les évaluations de rentabilité et de qualité du portefeuille représententdimportants indicateurs de la santé institutionnelle dune organisation mais elles ne mesurent nila santé des clients ni leur bien-être. Citons lun des professeurs de comptabilité que nous avionsconsultés pour cette présentation : « Lutilisation des comptes de résultats pour mesurer limpactdu microcrédit est similaire à lutilisation dun compteur de vitesse pour mesurer latempérature. »Mais pourquoi essayer dutiliser un compteur de vitesse pour mesurer la températur e? Silnexiste pas de thermomètre ou si les instruments de mesure de la température sont trop gros, outrop coûteux pour permettre une utilisation régulière. Cest malheureusement la situation actuelledu secteur de lévaluation dimpact. Des outils très sophistiqués ont été mis au point pourindiquer où sest produit limpact, mais la majorité dentre nous, dans lindustrie, estiment que7
ces outils sont trop coûteux ou demandent trop de temps pour être employés dune manièrerégulière.Si nous voulons pouvoir mettre au point des outils utilisables, il est essentiel que les dirigeantsdorganisations de microcrédit jouent un rôle plus visible dans le débat portant sur limpact.Nous pensons que lheure est venue pour les praticiens du microcrédit de jouer un rôle et derendre à lévaluation dimpact son rôle essentiel doutil de gestion.Le microcrédit a besoin dun nouveau modèle dévaluation dimpactEn préparant cette présentation, nous avons étudié plus de 100 documents dévaluation dimpact,mettant en jeu 50 outils actuellement utilisés. Nous avons été très surpris du petit nombre deméthodes dont nous pouvions recommander lutilisation. Non pas que ces études dimpact aientété conçues de manière incorrecte, mais parce quelles étaient ou impossibles à reproduire outrop coûteuses. De plus, un grand nombre dentre elles présentaient les mêmes points faible s:Ellesesfientsouventuaxosvuneirsdesparticipantspourrpdoiureelsdonnéesde·référence ou de départ, au lieu de recueillir des informations au moment de lentrée duclient dans un programme.·Elles ne fournissent que des informations ponctuelles et ne peuvent indiquer si limpactprogresse ou régresse à long terme.·La période examinée est trop courte pour que les impacts aient la possibilité de semanifester.·Il nexiste pas de comparaison entre les changements observés par les clients et ceuxconstatés par les non clients.·Elles exigent un personnel spécialisé pour effecteur les recherches et interpréter lesrésultats.·Les données et les procédures sont si spécifiques à une institution quelles ne peuventêtre utilisées par dautres institutions.Si nous voulons mettre au point un instrument fiable pour évaluer limpact de manière régulière,nous devrons modifier le modèle utilisé lorsque nous réfléchissons à lévaluation dimpact. Lemodèle actuel est celui de létude dimpact théorique, commandée par le bailleur de fonds, etdont lobjectif est de démontrer si les programmes financés par le bailleur de fonds ont eu unrésultat positif quelconque. Nous possédons de ce fait un vaste assortiment denquêtes tailléessur mesure, ponctuelles et qui ne peuvent ni fournir danalyse de tendance ni permettre decomparaison avec dautres études dimpact. Autrement dit, les informations fournies serventprincipalement à justifier les dépenses déjà encourues par le bailleur de fonds ou à orienter denouvelles ressources du bailleur de fonds.Le fait que le terme « études » se trouve si souvent accolé au terme « impact », indiquelimportance acquise par le modèle théorico-académique. Il semble que nous passions beaucoupde temps à parler détudes dimpact et beaucoup moins à parler de mesures dimpact, de contrôledimpact ou danalyse dimpact.Non que nous ne tirions pas parti de ces études : nous les citons fréquemment (si tant est quelles8
nous soient favorables) lorsque nous faisons appel à de nouvelles sources de financement. Maisnous les utilisons rarement dans le cadre de la planification.Un modèle différent : laudit dimpactDavid Hulme parle dun ensemble homogène dobjectifs pour lévaluation dimpact, depuis ladémonstration dimpacts dans le cadre de lévaluation des résultats dun investissement jusquàlaméliorationdes méthodes pratiquées par une institution de microcrédit.4Les outilsdévaluation dimpact qui sattachent à lamélioration plutôt quà la démonstration peuventinclure quelques-uns des outils déjà utilisés, mais ils les utiliseront différemment. Quant auxoutils dévaluation dimpact quutilise régulièrement les dirigeants des institutions, ils serontaxés différemment.·Ils seront incorporés au sein de la collecte de données de routine duneorganisation.·Le personnel sera chargé de la collecte et de lanalyse des données.·Les données recueillies et analysées offriront la cohérence nécessaire, en termesde temps et despace, pour permettre lanalyse des tendances et les comparaisonsentre des zones géographiques différentes.·Ils offriront une comparaison avec des personnes appartenant au même groupe ou5à la même région qui nont pas eu accès au crédit.4 Hulme, David, « Impact Assessment Methodologies for Microfinance: A Review », Mai 1997 - AIMS -[Présentation préparée dans le cadre du projet AIMS pour la Réunion virtuelle du Comité de travail du GCAPDsur les Méthodologies dévaluation dimpact (Avril 17-19, 1997)]5 Remarque au sujet de lutilisation des groupes témoin s: bien que les groupes témoins représentent le moyen leplus courant de déterminer la causalité dans le domaine de lévaluation dimpact, ils provoquent également desdifficultés logistiques et éthiques pour les institutions de microcrédit. Dun point de vue logistique, il est coûteuxet fastidieux de recueillir des renseignements sur les personnes qui ne reçoivent ni crédit ni prestations financièresquelconques. Par ailleurs, il peut sembler immoral dutiliser lévaluation dimpact comme un outil de gestioncontinu : il serait injuste de refuser éternellement un crédit à des personnes qui pourraient en tirer parti,uniquement dans le but de prouver la valeur de ce crédit. Voici quelques-unes des manières dont les institutions demicrocrédit ont tenté de surmonter ces difficultés :·Utilisation de données générées par lagence centrale de statistique du pays pour développer un profit defamille type dans la région ou la catégorie considérée et déterminer les évolutions à long terme, etcomparaison avec les changements constatés chez les clients.·Collaboration avec une université dont les étudiants pourraient être chargés deffectuer un programme derecherche à long terme sur des personnes pouvant alors servir de groupe témoin.·Mise au point de comparaisons entre les nouveaux demandeurs de crédit et les clients qui ont déjà bénéficiéde plusieurs cycles de prêts, en utilisant le nouveau groupe comme un groupe de contrôle.Toute personne ayant un tant soit peu lhabitude des méthodes statistiques est à même de souligner aisément lesfaiblesses de chacune de ses méthodes. Il nen reste pas moins que, dun point de vue de gestionnaire, cesméthodes sont un gage de causalité suffisant pour offrir des informations utiles pour la prise de décision.9
eLsérsultatsesortneruvsépirodiquement(auimnimumunefoisparan),teseront·intégrés au processus de planification.·Lanalyse tentera dapporter un élément de réponse à la questio :n « Commentpouvons nous accroître limpact positif et développer la transformatio n? », plutôtquà la questio n: « Y a-t-il eu impact ? »·Des experts extérieurs à lentreprise (dans lidéal ce seront des experts locaux)seront chargés de vérifier lexactitude des données, doffrir des recommandationsvisant à améliorer le processus de collecte des informations, et daider à mettre aupoint des comparaisons avec des groupes témoins.Ce type de contrôle dimpact continu suggère un modèle différen t: un audit dimpact utilisécomme un outil interne de gestion. Son processus est très semblable à celui dun audit financier,lequel comprend toutes les étapes décrites précédemment. Les membres de léquipe recueillentles données financières selon un calendrier périodique et cohérent. Ils utilisent ces données pourgénérer une analyse de tendances et des comparaisons au niveau des centre de profits. Cesinformations sont incorporées à lintérieur du processus régulier de planification, pour aiderlorganisation à améliorer sa rentabilité. Chaque année, lorganisation fait appel à des expertsextérieurs (auditeurs) responsables de la vérification des données et de la présentation desuggestions visant à lamélioration des procédures comptables et de gestion. Lorsque les mêmesnormes dévaluation dimpact sont mises en pratique par toute une industrie, il est possible auxorganisations de comparer leurs performances avec celles dorganisations similaires.Un audit dimpact fonctionnerait de la même manière. Le personnel de linstitution recueilleraitles données de référence pour les indicateurs financiers et sociaux importants pour chaque client(dun groupe-échantillon) au cours du processus de demande de prêt. Ces données pourraientêtre mises à jour annuellement ou lors de chaque nouvelle demande de prêt. De manièrepériodique (tous les six mois ou tous les ans), lorganisation analyserait ces données pour définirles tendances observées parmi ses clients avant dapprofondir les sujets mis en lumière par cetteanalyse au moyen denquêtes menées auprès des client ou de groupes de discussion.Lorganisation pourrait ensuite recueillir toutes ces données et les inclure dans sa réflexion sur laconception et la stratégie de ses activités de prêt. La publication dun rapport annuel offrirait unedescription de limpact du programme, les niveaux de transformation souhaités et obtenus, ainsique les modifications qui seront apportées au programme à la suite de ces informations. Desexperts externes pourraient être chargés de vérifier lexactitude des informations obtenues, desuggérer des améliorations du processus de collecte des informations et daider la direction delorganisation à tirer pleinement parti des implications de lanalyse dimpact sur les activités duprogramme.01
Lutilisation du modèle de laudit financier nous permet aussi de réfléchir au montant des fraisquune institution devrait être disposée à consacrer à lévaluation de son impact. Notre règleapproximative est que linstitution devrait être disposée à dépenser la même somme pour lecontrôle et laudit de son impact que pour laudit de ses finances. Autrement dit, une institutiondevait attacher autant dimportance à la réussite de son objectif quà la réalisation dun profitsuffisant pour assurer sa survie institutionnelle. Dans le cas dun programme de microcréditpossédant un nombre maximum de 10 000 clients, le coût peut être évalué entre 10 000 et20 000 dollars US en frais de personnel, systèmes de détection et « auditeurs » externes. Noussommes davis quun investissement de ce type en contrôle dimpact ne peut que se révélerrentable financièrement à mesure que linstitution accroît son efficacité pour obtenir le typedimpact souhaité et augmente les bénéfices et avantages offerts à ses clients. (Veuillezremarquer que ce raisonnement ne concerne pas que les activités à but non lucratif ou à missionsociale. On observe un nombre toujours plus important de sociétés faisant appel à des « auditssociaux » et à des « tableaux de résultats équilibrés » pour décider si leur action a un impactpositif sur leurs employés, leurs clients et les communautés dans lesquelles elles fonctionnent.6)Lun des membres dOpportunity International Network en Inde, The Bridge Foundation (TBF)de Bangalore, a apporté la preuve de ce type daudit dimpact. À lorigine, TBF offrait des prêtsà des particuliers situés en zone urbaine. Elle a démarré ses activités en faisant appel aux égliseset aux leaders communautaires qui pouvait laider à identifier des clients honnêtes. À partir deces informations, TBF effectuait sa propre analyse pour déterminer lexpérience professionnelleet le potentiel des candidats. Durant cette phase initiale, les activités de TBF étaient axées vers lagénération demploi - la création demplois pour la catégorie de personnes ciblées, grâce à des« projets utilisateurs de main doeuvr e».Toutefois, lexpérience et des résultats dun audit dimpact ont entraîné une modification de laméthodologie. En 1991, après avoir analysé les données recueillies sur limpact de son action,TBF est arrivée à la conclusion que la génération demploi ne créait pas demplois pour legroupe cible, les très pauvres ; les employés embauchés par les clients étaient des travailleursqualifiés nappartenant pas au groupe ciblé. Cette conclusion a conduit TBF a diriger sonattention vers la génération de revenu et au relèvement du niveau du revenu familial au moyende « projets familiaux ». En outre, depuis 1991, TBF a effectué un changement majeur de sonprogramme en le transférant du secteur urbain vers le secteur rural, si bien quà lheure actuellela majorité de ses clients proviennent de villages situés à lintérieur des terres, dans quatre desétats du sud de lInde.6 Voir « The Blanced Scorecard, Measures that Drive Success », Robert S. Kaplan et David Norton, HarvardBusiness Review, janvier 1992. Voir également « Auditing the Market - a practical guide to social auditing »,Simon Zadek et Richard Evans, Traidcraft Exchange, 1993.11