La protection juridique de la matière biologique en droit français - article ; n°2 ; vol.50, pg 491-512
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1998 - Volume 50 - Numéro 2 - Pages 491-512
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 37
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Jean-Christophe Galloux
La protection juridique de la matière biologique en droit français
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 50 N°2, Avril-juin 1998. pp. 491-512.
Citer ce document / Cite this document :
Galloux Jean-Christophe. La protection juridique de la matière biologique en droit français. In: Revue internationale de droit
comparé. Vol. 50 N°2, Avril-juin 1998. pp. 491-512.
doi : 10.3406/ridc.1998.1173
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1998_num_50_2_1173R.I.D.C. 2-1998
LA PROTECTION JURIDIQUE
DE LA MATIÈRE BIOLOGIQUE
EN DROIT FRANÇAIS
Jean-Christophe GALLOUX *
Le code génétique porte-t-il, en plus des testaments du père
et de la mère, la marque d'un voyage sans retenue à travers
chaque recoin de ce qu'on nomme l'univers ?
Yves SIMON « Le voyageur magnifique »
II n'existe pas en droit positif français de définition de la « matière
biologique » comparable à celle donnée par l'article 2 de la proposition
de directive relative à la protection juridique des inventions biotechnologi
ques : « matière contenant des informations génétiques et qui est autorepro-
ductible dans un système biologique » {. Au demeurant, cette définition
est récente. Elle ne figurait pas dans le texte de la première proposition
de directive du 21 octobre 1988 2 : elle apparaît dans celui de la seconde
proposition présentée quelques mois après le rejet de la première par le
Parlement européen 3 et a été amendée par lui .
Ceci ne signifie pas que le droit français ignore la biologie et ses
développements. Depuis les lois dites « bioéthiques » nos 653 et 654 du
29 juillet 1994, il appréhende le corps humain dans sa dimension biologi
que. Les ressources vivantes ont par ailleurs été depuis des siècles régies
* Professeur agrégé à l'Université de Versailles, directeur du Laboratoire de recherches
juridiques.
1 COM (95) 661 final, JOCE n° Ç 296/4 du 10 août 1996. Le texte de l'article 2(1) (a)
issu de 432 COM Lors la position de (95) (88) la discussion 496 661 commune final fïnal/SYN du 95/350 du 16 26 159. juill. (COD) févr. 1997, 1998 du les 13 est mots déc. rédigé : 1995. « contenant en des termes une information identiques. généti
que qui est autoproductible » ont été remplacés par les mots : « contenant des informations
génétiques et qui est autoreproductible » (Doc. 12 PE 260.947). 492 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 2-1998
par le droit privé de manière indirecte (statut des animaux, encadrement
de l'élevage, etc.).
D'une façon générale, le droit français répugne à cette double
approche que présuppose l'admission de l'expression « matière biologi
que » dans la sphère juridique : la mise sur le même plan des éléments
biologiques d'origine humaine et d'origine animale, végétale ou des
microorganismes d'une part, et d'autre part la « réduction » de l'humain
à une dimension biologique donc matérielle. La crainte d'une banalisation
de l'utilisation des matières biologiques humaines au sein d'un ensemble
de techniques a conduit de la même manière, et de façon symptomatique,
les juristes français à invoquer davantage un « droit de la bioéthique »
qu'un « droit des biotechnologies » comme si l'objet de la réglementation
était une réflexion morale et non pas un ensemble de technologies nouvell
es 5 !
En d'autres termes, le droit français se défit — voire rejette — d'une
approche globale du phénomène du vivant et considère ce qui relève de
l'humain à part de ce qui appartient aux autres règnes. Cette attitude se
fonde sur des présupposés métajuridiques sinon métaphysiques pas toujours
clairement exprimés.
Une telle attitude peut étonner dans un pays au laïcisme militant où
la pratique religieuse est la plus faible de toute l'Europe 6. Tout se passe
comme si le rejet de sa Tradition (essentiellement catholique) par la France
la conduisait à une attitude craintive envers les progrès des sciences
biologiques liée à la difficulté de situer l'Homme au sein de l'univers et
à abandonner une approche rationnelle de la réalité. Cette angoisse et
cette quête de sens sont sans doute à l'origine de la création des instances
bioéthiques et de leur rôle prééminent dans la régulation des biothechnolo-
gies en France depuis une dizaine d'années 7. Elle se traduit sur le plan
juridique, par une conceptualisation insuffisante, un flou des définitions
et des réglementations parfois contradictoires.
La recherche de termes équivalents à ceux de « matière biologique »
dans le droit français n'est pas cependant vaine.
Dans la mesure où la France est signataire de la Convention de Rio
sur la biodiversité, le droit positif français connaît la notion de « ressources
génétiques » mais son contenu demeure incertain : on ne sait ainsi si
elle inclut les ressources génétiques d'origine humaine. Certains auteurs
prennent l'expression « ressources génétiques » pour « l'information géné
tique elle-même » : elle devient synonyme de « séquence ADN » ou de
« gène ». « L'algue, le poisson ou le crustacé ne sont plus ici considérés
que comme un contenant, comme le support de la ressource véritable qui
est la séquence génique souhaitée, parce qu'elle est le code de tel caractère
5 Ce qui reviendrait intellectuellement à substituer au droit médical un droit sur la
déontologie médicale...
6 Cf. Claude MERMET, Francoscopie, Larousse, 1997, p. 239.
7 Sur cette question, J.-C. GALLOUX « History of Biotechnology Policy Regulation
in France » in Biotechnology and the European Public, sous la direction de J. DURANT,
Cambridge Un. Press, à paraître. GALLOUX : PROTECTION JURIDIQUE ET MATIÈRE BIOLOGIQUE 493 J.-C.
de résistance au froid, de croissance ou de goût » 8. La notion de matière
biologique est plus large : elle va au-delà du seul aspect génétique de la
biologie.
La notion de « matériel génétique » a pu être définie par la doctrine
juridique française comme « l'ensemble des caractères héréditaires d'un
organisme vivant, exprimés en termes d'information génétique, et leur
support matériel » 9. Cette définition vaut quelle que soit l'origine biologi
que du en cause. Elle restitue au matériel génétique ses deux
dimensions corporelle et incorporelle, informationnelle.
Elle peut servir de référence dans la mesure où la matière biologique
est précisément celle qui contient des informations génétiques, c'est-à-
dire, nécessairement, du matériel génétique.
Les dimensions corporelle et incorporelle du matériel génétique com
mandent deux types de protections : par le biais de la propriété corporelle
et par celui des propriétés incorporelles. C'est ce plan que nous suivrons.
On n'oubliera pas de souligner que, même si la présente étude est
d'abord une présentation de l'état du droit français contemporain aux fins
d'analyse comparée, la question des protections juridiques offertes renvoie
à celle du statut juridique de la matière biologique.
I. LA PROTECTION PAR LA PROPRIETE CORPORELLE
DE LA MATIÈRE BIOLOGIQUE
Compte tenu de ce qui a été indiqué en introduction, le droit positif
français comme la doctrine juridique dominante 10, séparent les analyses
relatives aux matériels non humains et aux matériels humains.
A. — Les matières biologiques non humaines
Les matériels biologiques d'origine non humaine se trouvent rarement
saisis en tant que tels en droit positif français. Tel est le cas par exemple
des semences de certains animaux d'élevage dans le cadre de la réglementat
ion de l'activité d'insémination. Ce sont davantage les êtres vivants eux-
mêmes qui se trouvent appréhendés. Le raisonnement se fonde donc, par
analogie, sur ces derniers. Cette analogie est pertinente dans la mesure
où les matériels biologiques ont la même nature que les êtres dont ils
sont issus ou dont ils constituent des éléments ou des produits

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