Note sur la tegula  BRG 9 de La Bourgealière (Lac de Paladru - Isère). Par Jean-François DECLE et Eric VERDEL
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Note sur la tegula BRG 9 de La Bourgealière (Lac de Paladru - Isère). Par Jean-François DECLE et Eric VERDEL

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Les sites gallo-romains du lac de Paladru (Isère) . Note sur la tegula BRG 9 de la Bourgealière. Jean-François Dècle et Eric Verdel La station gallo-romaine de la Bourgealière est la seule de toute la frange littorale du lac de Paladru qui ait livré une tegula entière, bien qu’en plusieurs fragments. Elle revêt donc un intérêt incontestable pour ce qui concerne la chronologie du site et la couverture tégulaire en général . Il s'agit d'une pièce trapézoïdale (type B), légèrement dissymétrique dans sa longueur de 43,5 cm (en bord droit)/44 cm de longueur (en bord gauche), soit un format proche de 1½ pied romain (pes monetalis). La largeur supérieure est de 34 cm, soit ⅓ de moins que la longueur, pour une largeur inférieure de 31 cm avant prélèvement pour les encoches. Soit un rapport longueur/largeur de 1.29, qui lui donne une forme assez peu trapue et légèrement dissymétrique. Sa masse est de 6,5 kg (figure 1). Semblant appartenir au type F de la typo-chronologie établie par Clément, on pourrait ainsi la dater e e de la fin du II ou de la première moitié du III siècle (CLEMENT 2011, pp. 630-631) ce qui la rendrait contemporaine de la statuette de Sucellus découverte en 1942 (LAVAGNE 1993, p. 313) et de la céramique commune sombre (dite 'allobroge') récoltée au même endroit. La partie médiane inférieure montre une marque digitée qui ne semble pas résulter d'un geste accidentel.

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Publié le 11 décembre 2012
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Langue Français
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Extrait

Les sites gallo-romains du lac de Paladru (Isère) . Note sur la tegula BRG 9 de la Bourgealière.
Jean-François Dècle et Eric Verdel
La station gallo-romaine de la Bourgealière est la seule de toute la frange littorale du lac de Paladru
qui ait livré une tegula entière, bien qu’en plusieurs fragments. Elle revêt donc un intérêt
incontestable pour ce qui concerne la chronologie du site et la couverture tégulaire en général .

Il s'agit d'une pièce trapézoïdale (type B), légèrement dissymétrique dans sa longueur de 43,5 cm
(en bord droit)/44 cm de longueur (en bord gauche), soit un format proche de 1½ pied romain (pes
monetalis). La largeur supérieure est de 34 cm, soit ⅓ de moins que la longueur, pour une largeur
inférieure de 31 cm avant prélèvement pour les encoches. Soit un rapport longueur/largeur de 1.29,
qui lui donne une forme assez peu trapue et légèrement dissymétrique. Sa masse est de 6,5 kg
(figure 1).
Semblant appartenir au type F de la typo-chronologie établie par Clément, on pourrait ainsi la dater
e e de la fin du II ou de la première moitié du III siècle (CLEMENT 2011, pp. 630-631) ce qui la
rendrait contemporaine de la statuette de Sucellus découverte en 1942 (LAVAGNE 1993, p. 313) et
de la céramique commune sombre (dite 'allobroge') récoltée au même endroit.
La partie médiane inférieure montre une marque digitée qui ne semble pas résulter d'un geste
accidentel. C’est une trace imprimée par un seul doigt, d'un geste volontaire et rapide, en forme de
boucle ouverte, sans lecture ni signification connues pour Charlier (CHARLIER 2004, p. 77 et note
104 p. 77), mais qui évoque la lettre latine cursive « a » en sens rétrograde (1) et ressemble à une
signature (famille K, dans la typologie de GOULPEAU et LE NY 1989, p. 118).
Du point des techniques en général, cet exemplaire unique permet deux observations relatives à la
fabrication des tegulae et à leur utilisation fonctionnelle dans l’architecture.
L'examen des encoches hautes et basses révèle une différence de réalisation. Leurs profondeurs
présentent en effet des différences : les encoches hautes gauche et droite mesurent respectivement
(au niveau du plat de la tuile) 6 et 5 cm alors que les encoches basses (prises dans l'épaisseur du
rebord) atteignent 7 et 6 cm. Les unes et les autres ne sont pas prévues dans le moule par la pose de
cales appropriées dans les angles comme sur d'autres modèles rectangulaires plus anciens et le
rebord est réalisé d'abord sur toute la longueur de l’objet.
Leur réalisation n’implique d’ailleurs pas des gestes techniques semblables. Alors que les encoches
basses sont coupées au tranchet avant cuisson (un « tour de main » approprié entraînant de légères
différences de profondeur), les encoches hautes semblent obtenues par arrachage ou par cassure soit
avant soit après cuisson. Dans le deuxième cas, on aurait anticipé les effets de la rétractation, ce qui
aurait permis, lors de la pose sur charpente, un emboîtement effectué « à la pièce » pour un meilleur
ajustement sous les encoches basses de la tuile du rang supérieur. Une telle pratique présente un
intérêt certain dans un contexte de récupération généralisée et de réemploi sur une même toiture de
tuiles aux modules différents.
D’autre part, le bris de la tegula en quatre fragments, chacun pourvu d’une encoche, apporte
plusieurs informations sur son rôle architectural en couverture car on a, par définition, la certitude
de raisonner sur des éléments sortis du même moule. En glissant la partie basse de la tuile au-dessus
de sa partie haute, les encoches basses dans les encoches hautes comme sur une toiture (figure 2),
on observe un recouvrement en profondeur de 13 cm, soit un peu moins de 30 % de sa longueur.
Compte tenu de ce recouvrement et des interstices latéraux entre chaque tuile impliqués par sa
forme trapézoïdale (cf. infra), cela revient en pratique à poser 9 tuiles de ce gabarit au m2 (3 en sens
horizontal, pour 1,02 m, par 3 en sens vertical, en tenant compte du recouvrement de 13 cm, pour 99 cm).
Avec une masse de 6.5 kg l'unité, la charpente devait donc supporter environ 58,5 kg de tegulae au
mètre carré. En estimant à 2,7 kg le poids moyen d'un imbrex compatible avec la présente tuile
(c'est à dire de longueur identique) et à neuf le nombre d’imbrices nécessaires pour couvrir 1 m2 de
tegulae, on obtient un poids total de 82,6 kg par mètre carré.
Or, une explication parfois apportée à l'évolution morphologique des tegulae, de rectangulaires à
trapézoïdales (VIPARD p. 212), serait un gain sur la quantité de matériau utilisé et donc sur la
masse portée par la charpente à étanchéité égale puisque les bords latéraux des tuiles (rectangulaires
ou trapézoïdales) sont dans tous les cas recouverts par les imbrices.
En effet, du fait de leur forme trapézoïdale, la juxtaposition en ligne horizontale de ces tegulae sur
une toiture (cf. annexe), avant la pose des imbrices, laisse évidemment apparaître entre chaque
tegula un interstice non couvert, limité par les rebords et de forme triangulaire presque isocèle
(figure 3). Ce qui n'est pas le cas des tegulae rectangulaires qui sont placées rebord contre rebord
sur toute leur longueur. Il y a bien là effectivement un gain de matière et donc de poids supporté par
la charpente .
Toutefois, en supposant à la place des tegulae trapézoïdales des spécimens rectangulaires ayant pour
largeur la largeur haute de notre tuile (34 cm) et pour longueur sa hauteur (44 cm), avec un même
taux de recouvrement (13 cm) et pour un même nombre de tuiles au m2 (soit 9), on aboutit à une
différence de masse tégulaire de 3,8 kg/m2, pour une masse globale (tegulae et imbrices) respective
de 82,6 kg/m2 pour les trapézoïdales contre 86,4 kg/m2 pour les rectangulaires.
Cet écart relativement modeste (il ne représente guère qu’une grosse moitié de tegula au m2)
diminue encore si l'on ajoute l'utilisation de mortier de chaux jointif attesté archéologiquement, dont
la quantité est difficile à évaluer mais qui dépend de l'écart laissé entre les rebords des tuiles
adjacentes. Elle est plus importante pour des tegulae trapézoïdales, en particulier dans leur partie
inférieure (FRIZOT 1975, dessin p. 229 ; VIPARD, p. 213-214 ; COUTELAS 2003, p. 367).
Vu les poids en jeu, il semble donc bien que le choix de tuiles trapézoïdales au détriment des
rectangulaires ne soit pas déterminé par la différence des masses.
Enfin, on rappellera que sur des toitures à faible pente (moins de 20 %) la masse tégulaire
importante est une nécessité et que la réduire c'est exposer la toiture à subir les effets des vents
violents (soulèvements, déplacements, chutes). Ce qui pose une fois de plus la question du rapport
entre la morphologie tégulaire et la pente de toit.
Notes
1. Ou « α », hypothèses suggérées par B.CLEMENT.
2. Cette dissymétrie créée par les différences de longueur droite/gauche peut provenir du moule
gauchi par l'usage, du séchage inégal du à la répartition imparfaite des composants lors du mélange
de la pâte ou de la cuisson (place de la tuile dans le four). D'une manière générale, entre la tuile crue
dans son moule et la même sortant du four, la rétractation totale est estimée, sur la base
d’expériences pratiques faites par des artisans tuiliers contemporains, à 12 % , soit de 1/8e (7/8%
au séchage, 4/5% à la cuisson ; GOULPEAU 1988), sachant que pour les raisons évoquées et
combinées entre elles, chaque exemplaire peut varier différemment.Figure 1
B o r d s u p é r i e u r
E n c o c h e s h a u t e s
RR
ee
bb
G o r g e s oo
rr
dd
E n c o c h e s b a s s e s
B o r d i n f é r i e u r
Figure 2
R
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cR e c o u v r e m e n t
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u
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E n c o c h e b a s s e
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m
eE n c o c h e h a u t e
n
tFigure 3
t e g u l a t e g u l a s u p é r i e u r e
s u p é r i e u r et
t
t e g u l a t
tt e g u l a i n f é r i e u r e i n f é r i e u r ee
e
g
u
Bibliographie
CHARLIER 2004. CHARLIER F., La pratique de l'écriture dans les tuileries gallo-romaines. In: Gallia.
Tome 61, 2004. pp. 67-102.
CLEMENT 2009. CLEMENT B., Nouvelles données sur les tuiles de couverture en Gaule du Centre-Est, de
la fin de la République au IIIe siècle :

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