A propos de la philosophie du langage - article ; n°21 ; vol.6, pg 3-34
33 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

A propos de la philosophie du langage - article ; n°21 ; vol.6, pg 3-34

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
33 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Langages - Année 1971 - Volume 6 - Numéro 21 - Pages 3-34
32 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1971
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Joseph Sumpf
A propos de la philosophie du langage
In: Langages, 6e année, n°21, 1971. pp. 3-34.
Citer ce document / Cite this document :
Sumpf Joseph. A propos de la philosophie du langage. In: Langages, 6e année, n°21, 1971. pp. 3-34.
doi : 10.3406/lgge.1971.2078
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1971_num_6_21_2078J. SUMPF
Paris-VIII
A PROPOS DE LA PHILOSOPHIE DU LANGAGE
1. Introduction.
En France, les philosophes ont une certaine familiarité avec la
linguistique par l'intermédiaire de F. de Saussure, de Cl. Lévi-Strauss
ou de N. Chomsky. M. Merleau-Ponty a écrit sur l'apport saussurien.
A.-J. Greimas, de son côté, a vu en Merleau-Ponty un des maillons de
cette sémiologie générale qui doit gouverner l'ensemble des sciences
humaines. Si l'on se rapproche de l'actualité, on conçoit qu'un titre
comme celui de Cartesian Linguistics (de N. Chomsky) séduise le public
français. Cette familiarité s'accompagne d'un autre sentiment qu'on
trouve tout au long de l'œuvre de Cl. Lévi-Strauss : on attend beaucoup
de la linguistique. Certes, Cl. Lévi-Strauss lui-même marque les limites
de l'apport de la linguistique. Néanmoins, il demeure frappé par la cohé
rence du modèle phonologique, par l'aisance de la pensée de R. Jakobson.
Nous voudrions montrer que (1) les notions qui semblent les mieux
assises, celles de phonème ou de morphème par exemple, sont relativement
vagues; (2) il est de fait que la linguistique est en plein bouleversement
et que les linguistes peinent beaucoup; (3) il existe une voie vers une
solution, que nous qualifierons de philosophique, ou de Philosophie du
langage. C'est sur ce dernier point que nous nous attarderons le plus, à
partir des thèses d'une partie de l'école de N. Chomsky, représentée
notamment par l'œuvre de Katz et Fodor. Par ailleurs, Zeno Vendler,
à l'intérieur de l'école de Z. Harris, peut à bien des égards être rapproché
de Katz et Fodor. Il est évident que, au-delà de l'exposé des thèses,
nous tenterons d'indiquer, après bien d'autres (U. Weinreich, Y. Bar-
Hillel, etc.), les limites, les insuffisances de la solution « philosophique »
et enfin les voies d'une réflexion qui délimitera plus soigneusement,
selon nous, la linguistique et la philosophie.
2. La notion de phonème.
Elle constitue, dès la fin du xixe siècle, la clef, ou une des clefs, de
la naissance de la linguistique scientifique. En effet, dans la tradition
dialectologique française, elle est l'élément de variation le plus fin à l'intérieur des parlers romans, ainsi que du latin au français. Le phonème
se définit donc par l'élément variable à l'intérieur d'une constante étymol
ogique. La polémique franco-allemande sur la fatalité des lois phonétiques
tient à la fois à la tradition empiriste française (qui est anti-biologiste,
mais médicale, c'est-à-dire sensible aux écarts pathologiques) et à la
tradition intellectualiste (c'est-à-dire pédagogique et positiviste) qui
veut que ce qui commande l'évolution phonétique, ce soit l'évolution
culturelle. Issue de Franz Boas, la dialectologie américaine ne sera ni
intellectualiste ni empiriste au sens français; chaque dialecte se présentant
dans une aire et une histoire spécifiques, inconscientes et nécessaires.
Cela tient à F. Boas, mais cela tient surtout au fait que les linguistes, même
lorsqu'ils étaient humanistes de formation comme E. Sapir, se trouvaient
devant des langues non familières.
Dans ce cas, on conçoit que le phonème soit apparu pour seulement
ce qu'il était déjà, c'est-à-dire l'aspect le plus élémentaire de la réalité
linguistique, mais aussi le plus descriptible et le plus aisément systéma-
tisable. Mais qu'est-ce que le phonème?
W. Freeman Twadell, dans un texte déjà ancien (1935) \ distingue
successivement :
1. le phonème comme réalité mentale ou psychologique. Le phonème
est ce qu'on répète : « Les phonèmes sont des modèles que les sujets
parlants cherchent à imiter », et cela parce qu'ils sont des éléments de
base du système, que l'on retrouve dans tout le système d'une langue,
parce qu'on peut les définir et qu'ils ont un sens. Scientifiquement parlant,
il est évidemment impossible de parler d'esprit ou de pensée; mais il
est de fait que les sons constituent, comme le dit E. Sapir, un pattern,
un modèle reproductible et reconnaissable d'une manière spécifique
dans chaque langue. Les notions praguoises de « système phonologique »
et de fonction sont évidemment proches de celles de pattern.
2. le phonème comme réalité physique. En fait on lie son et trait
distinctif. C'est le cas chez L. Bloomfield (A Set of Postulats for a Science
of Language). Différents morphèmes peuvent être semblables, ou partiell
ement semblables, quant aux traits vocaux. Ainsi /b / dans book et table, /s /
dans stay et west, etc. Définition : « le trait vocal minimal identique est
un phonème ou un son distinctif ». Le phonème est défini par deux données
de base : (a) les sons de la parole; (b) un ensemble de catégories phoné
tiques ou traits distinctif s (ouvert /fermé, par exemple). « A chaque
son de parole on fait correspondre un certain sous-ensemble de l'ensemble
des traits distinctif s. En utilisant une terminologie plus usuelle, on dira
que chaque son est constitué de n traits 2. » Quoique volontairement
non mentaliste, physicaliste, cette définition du phonème (cela n'échappe
à personne) ne va pas sans une certaine psychologie du locuteur et du
récepteur : les phonèmes sont des événements physiques, mais ils sont
aussi perçus et en tant que tels reconnus comme semblables ou différents.
S'il y a élimination du sens en tant que fonction, il n'en reste pas moins
1. Reproduit dans Martin Joos, Readings in Linguistics I, « The development
of descriptive linguistics in America (1925-1956), » The University of Chicago Press,
1957, 4e éd. 1966, 421 pages. De même, le texte de Bloomfield cité ensuite.
2. Dans I. I. Revzin, Les Modèles en linguistique, Dunod, tr. Y. Gentilhomme,
1968, 201 pages (p. 6). la dissociation complète de la substance et de la forme sont impossibles. que
Mais que faut-il entendre par forme (imaginaire, dit Twadell)? C'est ici
que commence une série de difficultés moins polémiques que celles que
nous venons d'indiquer.
(1) Distinction entre phonèmes attestés et phonèmes admissibles
dans le système. Cette distinction est essentielle à la constitution des
classes de phonèmes équivalents. Dans le cas 1, « nous disons que deux
sons de parole Sj^ et S2 sont équivalents si la substitution de S2 (ou S^
à Sj (ou S2) dans un mot phonétique au moins donne également un mot
phonétique ». Dans le cas 2, « nous disons que deux sons de parole 8г
et S2 sont fortement équivalents si la substitution de S2 (ou Sj) à Sj (ou
S^ dans un mot phonétique quelconque donne également un mot phonét
ique.
Un système phonologique se constitue généralement selon le cas 2,
c'est-à-dire selon l'équivalence forte.
(2) Les traits sont compatibles ou incompatibles entre eux, non
pertinents ou pertinents selon qu'ils demeurent liés dans un couple de
sons Sl5 S2, ou qu'ils sont libres et donc opposables, c'est-à-dire substi-
tuables et provoquant une modification par eux-mêmes. Cela suppose que
substitution (ou commutation) et identification marchent de pair. Il
faut dans pin et tin que p et t soient substituables et que in soit le
même. Mais en quoi consiste réellement l'unité ainsi définie? C'est un
« segment compris entre deux pauses », dit Revzin. Mais ce segment
dépend donc des pauses, c'est-à-dire, à certains moments, de phéno
mènes prosodiques. Ce segment dépend de la langue en question. Ce
peut être la syllabe 3. En définitive, c'est la commodité qui dictera le
choix du segment ou, plus justement, l'environnement qui décide.
Comme le dit D. Jones : « Si deux sons d'une langue peuvent se rencontrer
dans une même situation par rapport aux sons environnants, ils appar
tiennent par définition à des phonèmes différents 4, donc pertinents :
ph, p et Л ne sont pas d

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents