Dialectes du français et français régionaux - article ; n°1 ; vol.18, pg 100-125
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Dialectes du français et français régionaux - article ; n°1 ; vol.18, pg 100-125

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Description

Langue française - Année 1973 - Volume 18 - Numéro 1 - Pages 100-125
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1973
Nombre de lectures 41
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Léon Warnant
Dialectes du français et français régionaux
In: Langue française. N°18, 1973. pp. 100-125.
Citer ce document / Cite this document :
Warnant Léon. Dialectes du français et français régionaux. In: Langue française. N°18, 1973. pp. 100-125.
doi : 10.3406/lfr.1973.5634
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lfr_0023-8368_1973_num_18_1_5634Léon Warnant, Université de Liège.
DIALECTES DU FRANÇAIS ET FRANÇAIS RÉGIONAUX
On peut se demander si les dénominations dialectes du français et
français régionaux ne sont pas simplement synonymes. De prime abord,
on serait tenté de répondre par l'affirmative; nous verrons plus loin si
c'est avec raison.
L'examen des réalités linguistiques que peuvent représenter ces
deux dénominations nous a conduit à nous reposer certaines questions
quant au français neutralisé, au corpus, au « bon usage », qu'il ne nous
a pas paru inutile d'exposer ici, ne fût-ce que pour provoquer une
plus nette redéfinition de ces réalités de la part des linguistes.
I. Dialectes du français et français neutralisé.
a) En linguistique structurale.
Depuis un certain temps, avec la linguistique structurale, est apparu,
dans la terminologie linguistique française, un sens nouveau du terme
dialecte. Comme l'idiolecte, le dialecte représente un écart par rapport
à la norme. Si celui-là est constitué par un écart découlant d'un usage
individuel, oral ou écrit, de la langue, celui-ci l'est par un écart découlant
d'un usage régional.
Ces définitions paraissent claires et satisfaisantes. Il nous semble
cependant qu'elles appellent quelques précisions.
Avant d'y arriver nous dirons toutefois notre regret que, dans un
domaine linguistique comme celui du français, où une langue officielle
s'est imposée depuis longtemps et où, par conséquent, le terme de dialecte
désigne une réalité bien définie — celle de parler (ou groupe de parlers)
ancien évincé par cette langue officielle, mais qui a possédé pendant tout
un temps et possède parfois encore aujourd'hui une certaine vitalité — ,
100 des linguistes aient cru pouvoir doter le mot d'un sens supplémentaire К
Ils ont ainsi créé une ambiguïté dont nous n'apercevons nullement
l'avantage. En Wallonie, par ex., il existe des dialectes wallons encore
vivants, que les dialectologues étudient dans des travaux nombreux,
importants et bien connus. Quand on parle du dialecte liégeois, pour
presque tout le monde, pensons-nous, il est question du patois wallon
de Liège. Allons-nous maintenant devoir nous demander s'il n'est pas
question du français parlé à Liège?
Que le terme dialect soit utilisé par des linguistes américains ne nous
paraît pas une raison suffisante pour troubler la terminologie française,
pas plus d'ailleurs que le désir de disposer, à côté d'idiolecte, d'un mot
qui s'en rapproche par le radical et s'en distingue par le préfixe pour dési
gner deux espèces d'écart par rapport à une même norme.
L'initiative nous semble condamnable. Mais nous le disons sans
doute trop tard. Il existe un Office du vocabulaire français qui aurait
bien dû donner son avis sur ce point. Ses principes pour l'admission d'un
mot ou du sens nouveau d'un mot ne peuvent autoriser l'installation de
l'ambiguïté.
Pour échapper à celle-ci, au sein de cet article, nous désignerons par
« dialecte 1 » l'ancien parler vernaculaire, d'origine romane ou non, relégué
au second plan ou effacé dans le cours du temps à la suite de l'extension
du français, et par « dialecte 2 » l'écart régional qui est envisagé par la
linguistique structurale.
La question est donc de savoir comment se définit nettement un
dialecte du français 2.
Selon J. Dubois (1965), le dialecte représente — nous l'avons déjà
dit — un écart régional par rapport à la langue, et cette langue, cette
norme — dont il importe évidemment de préciser clairement la nature
et qui est, en fait, une abstraction — se définit comme la moyenne des
emplois actuels, « une fois rejetés les écarts les plus grands » (p. 5). Nous
n'aurions là qu'une tautologie si J. Dubois n'apportait plusieurs précisions.
La langue, explique-t-il, est une norme, et la norme qu'il s'agit de retenir,
en ce qui concerne le français, est le parler des générations moyennes,
1. De plus, dialecte désignait déjà, à côté des dialectes du dialectologue, ceux du
médiéviste, c'est-à-dire des dialectes qui ont vécu avant tout d'une vie écrite et plus
ou moins artificielle. Voir à ce sujet L. Remacle (1948, p. 178-180).
2. La différence entre la langue et le dialecte a été précisée plus d'une fois d'une
manière théorique. Selon Ch.-F. Hockett (1958, p. 322), le point de départ de la dia
lectologie synchronique est l'idiolecte. Cette notion est importante, dit-il, parce que,
en dernière analyse, une langue ne peut être observable que comme une collection
d'idiolectes plus ou moins similaires. Il en va exactement de même pour un dialecte
[« dialecte 2 » de notre terminologie], à ceci près que le degré de similarité des idiolectes
dans un dialecte est présumé plus grand que celui des idiolectes dans une langue. Selon
Z. Harris (1951, p. 9), l'univers du discours de la linguistique descriptive est une
simple langue ou dialecte. Les deux termes sont donc synonymes.
Nous ne citerons ni H.-A. Gleason (1969, p. 313, 314) ni J. Lyons (1970, p. 29),
qui ne font pas une distinction claire entre ce que nous avons nommé « dialecte 1 »
et « dialecte 2 ».
101 parler des « groupes sociaux urbains, dont le volume de communicle
ations est le plus grand relativement à l'ensemble linguistique fran
çais » (p. 5). Est-ce à dire que non seulement le parler de Paris, mais aussi
ceux de Marseille, de Liège, de Bordeaux, de Bruxelles, de Genève, doivent
être pris en considération? Il nous le semblerait, les langues techniques
et les argots étant évidemment exclus.
J. Dubois poursuit : « La norme se définit par l 'intercompréhension
la plus étendue. Le français étudié est alors dit neutralisé » (p. 5). Puisqu'il
est question de Г « intercompréhension la plus étendue », ne pourrait-on
penser que la norme — le français neutralisé — est constituée par tous les
caractères communs qu'on retrouve dans le parler français de Marseille
à Liège, de Brest à Genève, de Bordeaux à Strasbourg en passant par
Paris? En effet, le langage qu'on entend à Liège, par ex., ou dans la
bouche d'un paysan de la région liégeoise qui n'emploie pas le patois est
bel et bien du français. Il est compris à Paris, à Bordeaux, à Marseille.
Il est dans sa très grande partie du français neutralisé, en dépit de quelque
trait local (un septante « soixante-dix », un avoir bon « avoir du plaisir »,
par ex.), en dépit sans doute d'une apparence acoustique particulière.
Mais l'accent qui frappe beaucoup l'auditeur étranger et qui marque tout
le parler de même que l'intonation de la phrase ne concernent que la
réalisation phonétique; ils n'appartiennent pas essentiellement à la forme
de la langue que veulent étudier les structuralistes.
Si on tient compte de ces considérations, il ne nous paraît pas heureux
de continuer à parler de « dialecte 2 », car le terme fait considérer l'idiome
ainsi désigné comme un tout spécifique employé en un certain endroit.
Or le parler utilisé tant au nord, au sud, à l'est, à l'ouest qu'au centre
du domaine gallo-roman est, pour la très grande majorité de ses traits
à valeur réellement linguistique — peut-être pour tous — , conforme à la
norme. Il ne se distingue en fait de celle-ci que par un nombre limité de
particularités. On devrait donc, plutôt que de « dialectes 2 », parler de
« traits dialectaux 2 »; septante et avoir bon seraient des « traits dialec
taux 2 » belges.
Certains niveaux du français de Paris présentent de toute évidence,
par rapport au français neutralisé ainsi défini, des traits qu'on

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