É. Gentaz et P. Dessus (dir.) – Comprendre les apprentissages : sciences cognitives et éducation ; n°1 ; vol.151, pg 176-179

Jacques Crinon

Description

Revue française de pédagogie - Année 2005 - Volume 151 - Numéro 1 - Pages 176-179
4 pages

Informations

• Publié par: REVUE_FRANCAISE_DE_PEDAGOGIE
• Publié le: 01 janvier 2005
• Nombre de lectures: 23
• Langue: Français

Extrait

dans les tranches d’âge les plus jeunes elles sont plus di- plômées que les hommes. Ces spécificités respectives des actifs masculins et féminins entraîne, remarque Marie Duru-Bellat, une assez faible mixité des milieux de travail, ségrégation de fait qui est favorable au maintien d’un écart de statut et de salaire au détriment des femmes.

Un assez long chapitre de cette troisième partie fait le point des rapports, aujourd’hui, entre la vie profession- nelle et la vie familiale pour les femmes. Je ne puis, faute de place, reprendre le détail de ces analyses, mais l’au- teure rappelle combien la gestion du temps est sexuée dans nos sociétés, et quelle faible évolution on constate, malgré la quasi généralisation du travail des femmes, dans la contribution masculine aux tâches ménagères et de soin aux enfants. Quant aux femmes elles-mêmes, c’est soit en acceptant des conditions de vie « acrobatiques » (le terme revient à plusieurs reprises, et il est très juste), soit en ré- duisant leurs ambitions professionnelles et en acceptant des emplois moins exigeants, mais aussi moins intéres- sants et plus faiblement rémunérés, qu’elles réagissent, et assez rarement en se révoltant contre cette dissymétrie.

Laconclusionest dense, et ne constitue pas un simple résumé. Certaines pages de l’ouvrage avaient pu donner le sentiment (ou du moins me donner le sentiment...) que l’auteure minimisait un peu les évolutions, et les espoirs pour l’avenir qu’elles autorisent. Appartenant à une géné- ration qui a tout de même vu des transformations considé- rables de la place des femmes dans les pays développés, je suis peut-être encline à l’optimisme. Or les réflexions finales de Marie Duru-Bellat portent précisément sur ces perspectives d’avenir, de façon nuancée, interrogative, pleine d’intérêt.

Oui, les filières scolaires où l’on trouve de très nom- breuses filles sont objectivement adaptées aux emplois que leur propose le marché du travail ; oui, l’investisse- ment professionnel des femmes, qui pourrait être plus grand étant donné leur bon niveau de formation, est sou- vent contenu par une division du travail maintenue dans la vie familiale ; oui, leurs fréquentes orientations sco- laires, menant à des carrières plus modestes que celles de leurs frères, sont « raisonnables », puisqu’elles permet- tront la « conciliation des rôles » tant désirée. Mais cer- taines politiques sont de nature à modifier le contexte dans lequel elles prennent leurs décisions : équipements collectifs concernant les jeunes enfants et les travaux ménagers, action volontariste de mixité des emplois, encouragement dans le système scolaire des orientations moins traditionnellement sexuées, tout cela demande du temps, mais joue favorablement, si on le met en œuvre, sur l’évolution.

176 Revue française de pédagogie, n° 151, avril-mai-juin 2005

Obligée de constater la meilleure réussite à l’école, « la société est prise à son propre piège », écrit notre auteure. Les inégalités professionnelles et les inégalités de pou- voir entre les hommes et les femmes sont de moins en moins justifiables par des facteurs de type biologique ou psychologique. La dynamique en cours est probablement irréversible.

Ce livre est une mine de données et il fait beaucoup réfléchir. Que peut-on espérer, sinon que Marie Duru- Bellat puisse publier dans dix ans une troisième édition, après le succès de celle-ci, qui sera plus optimiste encore ?

Viviane Isambert-Jamati

GENTAZ Édouard & DESSUS Philippe (dir.).Compren- dre les apprentissages: sciences cognitives et éducation. Paris : Dunod, 2004. – 232 p.

Les recherches en sciences cognitives intéressent au premier chef les enseignants dont elles peuvent éclairer la pratique. Pourtant, quand elles ne sont pas ignorées, elles ne semblent susciter que des échos lointains et déformés. Les chercheurs devraient sans doute se soucier davantage de la diffusion des connaissances qu’ils ont produites : les faire connaître des professionnels n’est pas une condition suffisante à leur prise en compte, mais c’est une condition nécessaire. L’ambition de cet ouvrage collectif est jus- tement de mettre à la disposition des professionnels de l’enseignement des savoirs issus de la recherche (des syn- thèses et des recherches empiriques originales) et les indi- cations pour l’action qui peuvent en être tirées.

Chacun des douze chapitres constitue une illustration particulière de ce projet. Tous visent à expliciter les pro- cessus d’apprentissage ou à décrire les effets de situations d’apprentissage scolaire (l’introduction des éditeurs parle de sciences cognitives appliquées à l’éducation). Les objets, les méthodes et les références théoriques sont cependant à chaque fois différents. Trois grandes parties structurent l’ouvrage: la première est consacrée aux apprentissages fondamentaux (lire, écrire, compter), la seconde aux enseignements secondaire et universitaire, la troisième au travail de l’enseignant.

Dans le premier chapitre, Florence Bara, Édouard Gentaz et Pascale Colé proposent une revue des travaux sur les effets des entraînements destinés à développer la conscience phonémique, c’est-à-dire la capacité à mani- puler les phonèmes des mots à l’oral. Ces entraînements, pratiqués à l’école maternelle, ont des effets positifs sur les performances en lecture, amplifiés lorsqu’on y associe