Travaux de la Maison de l'Orient méditerranéen - Année 2003 - Volume 37 - Numéro 1 - Pages 21-33This paper presents a selective view of continuity and change in French socio-anthropological works of the last fifty years regarding Mediterranean culture and society. It distinguishes three “moments” at which local approaches to societies of the area have been gathered under a common rubric, as representing “Mediterranean” traditions or cultures. The three “moments” are the end of the colonial period (the 1950’s and 1960’s), the first half of the 1980’s, and the 1990’s. In between these “moments”, societies of the African or Asian edges have been viewed rather as “Moslem”, Arab” or “underdeveloped” societies of “the Middle East”, thus detached from those of the European northern edge, so that the area seen as “Mediterranean” is mostly reduced to islands and peninsulas. Comparison of the thematics of the three “moments” illustrates the sensibility of research to political and historical contexts, reflecting western views of a common Mediterranean substrate as well as the evolution of the local societies themselves. 13 pages Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.
Méditerranée : Ruptures et Continuités TMO 37, 2003
ÉMERGENCE ET ÉCLIPSES DANS LANTHROPOLOGIE FRANÇAISE LES TROIS MOMENTS DE LA MÉDITERRANÉE
Françoise MÉTRAL *
ABSTRACT This paper presents a selective view of continuity and change in French socio-anthropological works of the last fifty years regarding Mediterranean culture and society. It distinguishes three moments at which local approaches to societies of the area have been gathered under a common rubric, as representing Mediterranean traditions or cultures. The three moments are the end of the colonial period (the 1950s and 1960s), the first half of the 1980s, and the 1990s. In between these moments, societies of the African or Asian edges have been viewed rather as Moslem, Arab or underdeveloped societies of the Middle East, thus detached from those of the European northern edge, so that the area seen as Mediterranean is mostly reduced to islands and peninsulas. Comparison of the thematics of the three moments illustrates the sensibility of research to political and historical contexts, reflecting western views of a common Mediterranean substrate as well as the evolution of the local societies themselves.
Introduction La perception de la Méditerranée, chez les anthropologues, ne diffère pas pour lessentiel de celle des littéraires, des poètes ou des historiens : il sagit ici encore d« une unité faite de diversités ». Et cette perception varie, elle aussi, selon que laccent est mis sur lun ou lautre terme de la définition : la mer agissant tantôt comme frontière, tantôt au contraire comme lien ou pont entre des continents et des mondes « des aires culturelles » différentes. Lanthropologie de la Méditerranée a fait en France ces dernières années lobjet de vastes programmes dont les résultats sont pour lessentiel rassemblés dans une importante publication qui a paru au moment même où se tenait le présent colloque de Nicosie 1 . Je nai donc nullement lintention ou la prétention de proposer ici un bilan des ouvrages anthropologiques concernant les pays de la Méditerranée. Je men tiendrai plutôt à une vision sélective et subjective des ruptures et continuités qui surviennent dans les productions de la discipline au cours des cinquante dernières années et mettrai en relief les différents moments où la Méditerranée apparaît dans lethnologie française et lanthropologie anglo-saxonne 2 non plus seulement comme cadre (espace géographique) mais comme objet . La présente sélection est construite à partir dun regard rétrospectif sur ma bibliothèque ; celle dune ethnologue dont la formation débute en 1958 à luniversité de Montpellier où se crée alors, avec * CNRS, Maison de lOrient et de la Méditerranée, Lyon. 1 . Lensemble des communications a été réuni par Albera, Block, Bromberger 2001, dans un ouvrage de 754 pages. 2 . À qui la discipline emprunte à partir des années soixante-dix, à la suite de Lévi-Strauss, le terme danthropologie, de préférence à celui dethnologie caractérisant jusque-là la tradition universitaire française.