Énée en Crète - article ; n°14 ; vol.6, pg 7-20
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Énée en Crète - article ; n°14 ; vol.6, pg 7-20

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Description

Revue numismatique - Année 1972 - Volume 6 - Numéro 14 - Pages 7-20
M. J. Delepierre, Énée en Crète. — L'auteur propose de reconnaître sur des monnaies d'Aptéra du ive siècle Aphrodite (au droit) et Énée (au revers), en se référant à des textes pris aux hymnes homériques (Hymnes à Aphrodite) et à Г Enéide, et de là appelle l'attention sur la situation géographique de la Pergame d'Anchise et d'Énée et de façon plus générale sur la vitalité de la légende d'Énée en Crète.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1972
Nombre de lectures 90
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Marie J. Delepierre
Énée en Crète
In: Revue numismatique, 6e série - Tome 14, année 1972 pp. 7-20.
Résumé
M. J. Delepierre, Énée en Crète. — L'auteur propose de reconnaître sur des monnaies d'Aptéra du ive siècle Aphrodite (au droit)
et Énée (au revers), en se référant à des textes pris aux hymnes homériques (Hymnes à Aphrodite) et à Г Enéide, et de là
appelle l'attention sur la situation géographique de la Pergame d'Anchise et d'Énée et de façon plus générale sur la vitalité de la
légende d'Énée en Crète.
Citer ce document / Cite this document :
Delepierre Marie J. Énée en Crète. In: Revue numismatique, 6e série - Tome 14, année 1972 pp. 7-20.
doi : 10.3406/numi.1972.1016
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/numi_0484-8942_1972_num_6_14_1016Marie J. DELEPIERRE
ÉNÉE EN CRÈTE
Ce n'était pas en Troade que la légende populaire devait situer
le lieu où allait s'accomplir la prophétie que, la nuit du célèbre
hyménée, Anchise avait recueillie de la bouche d'Aphrodite,
prophétie confirmée par la prédiction de Poseidon quand le dieu
avait soustrait Énée à la lance d'Achille : ce fils de déesse régnerait
sur les Troyens, lui et après lui ses descendants jusqu'à la postérité
la plus reculée1.
Troie anéantie, les signes que lui donnèrent les dieux poussent
Énée à partir vers les lointains exils où le portent les destins.
Après la construction d'une flotte au pied des montagnes de l'Ida
phrygien, il tend les voiles qui l'emportent vers la haute mer avec
son père, ses compagnons, son fils, ses Pénates, ses Grands Dieux.
Et c'est le long périple dont le fugitif fait le récit à la reine de Car
thage.
Où fixer la Ville qui devait être la nouvelle Troie?
Un affreux prodige les écarte de Thrace et les porte à aller
interroger le Dieu en son temple de Délos ; dans l'ébranlement du
parvis et du laurier sacré la voix se fait entendre : qu'ils se dirigent
vers « la terre qui la première les a portés dès l'origine de leurs
ancêtres, elle les attend, qu'ils cherchent cette mère antique ».
Faisant appel dans sa mémoire aux traditions recueillies par lui
de la bouche des hommes d'autrefois, le vieil Anchise croit
1. Homère, Hymnes, A Aphrodite (I), 196-7 : èv Tpcoeaacv áváCei. Comme on le
voit, le poète ne dit pas expressément qu'Énée régnera à Troie («qui régnera sur
Troie », trad. J. Humbert, Belles- Lettres, p. 158), mais parmi ou sur les Troyens. Il sera
le chef des Troyens dans le pays où il les aura conduits ; ainsi l'avait compris Denys
d'Halicarnasse (Antiq. rom. XII) interprétant la prédiction de Poseidon, Tpcoeaaiv
áváCei (II. XX, 307-8), malgré l'allusion à la succession de Priam que pouvaient
laisser entendre les paroles du dieu. о M. J. DELEPIERRE
reconnaître la Crète dans cette « mère antique ». Il s'adresse aux
Troyens : dans l'île du grand Jupiter est le berceau de leur race ;
c'est de Crète qu'est parti le premier de leurs ancêtres, Teucer,
pour fonder son royaume en Troade, apportant avec lui en terre
d'Asie la déesse du Mont Cybèle, l'airain des Corybantes, le nom
de sa montagne natale, l'Ida, et les Mystères et le char de la
Souveraine traîné par un attelage de lions.
Sur le bruit qui court que le roi Idoménée est parti, que les
rivages de la Crète sont déserts et qu'ils trouveront les maisons
abandonnées, ils mettent le cap vers la terre promise, et après
trois jours de navigation, où ils côtoient Naxos, Donuse, Oléare,
Paros et les Cyclades éparses sur la mer, ils abordent aux antiques
rivages des Curetés. Et Énée poursuit son récit : « Je m'empresse
de construire les murs de la ville désirée, optatae urbis, je la nomme
Pergame, et j'exhorte mon peuple, que ce nom met en allégresse,
à chérir ses foyers et à élever pour leur protection une haute
citadelle ».
Le récit laisse voir qu'ils étaient installés, les vaisseaux mis à sec
sur le rivage, la jeunesse occupée par les mariages et les défriche
ments, Énée donnant des lois et des demeures, quand survint
l'épidémie qui allait les contraindre à abandonner le site.
Ils n'eurent pas à retourner à Délos pour savoir de quel côté
tourner leur course. Par les images sacrées de ses dieux et de ses
Pénates phrygiens s'animant dans la nuit dans une apparition
resplendissante, Énée, dans son sommeil, vit s'éclaircir l'oracle
d'Ortygie : Apollon les envoie en Hespérie, qui prit nom d'Italie,
c'est là leur vraie demeure, car c'est de là que sont sortis Dardanus
et le vénérable Jasius, première source de leur race. Anchise
reconnaît sa méprise, il convient de cette double origine, de ces
deux ancêtres. Et c'est le départ de Crète où, dit Énée, « nous
laissons quelques-uns des nôtres »2.
Du texte de Virgile on peut inférer qu'il y eut sur le site crétois
une véritable fondation de ville, des constructions, un début
d'organisation politique et qu'un contingent de Troyens demeura
et fit souche.
Devant le silence de Denys d'Halicarnasse3, qui ne fait pas
mention d'un passage d'Énée en Crète, on serait près de voir une
intention du poète latin, désireux, en faisant cas de l'origine
2. Virgile, En. III, 84-191.
3. Op. cit. XI : les Troyens seraient allés de Délos à Cythère. EN CRETE У ENEE
Cretoise de Teucer, de donner plus de lustre encore aux origines de
la nation romaine.
Pourtant, cette origine de l'ancêtre de la famille royale de Troie
est celle que retenaient certaines traditions qui faisaient de Teucer
un immigré en Troade. Fils du Scamandre de Crète il aurait passé
de l'Ida crétois en Asie et il régnait sur le pays, qui de son nom
s'appela Teucrie, lorsque Dardanus vint sur cette côte. Teucer lui
donna sa fille en mariage et lui légua ses États. A la mort de Teucer
Dardanus régna à son tour, appela le pays Dardanie et bâtit la
citadelle de Troie4.
Ainsi le vieil Anchise avait-il pu s'abuser sur le sens de l'oracle
délien et entraîner les Troyens vers la Crète pour l'édification de
la nouvelle Pergame.
Or, une Pergame (Ilspyafxov, Xtopa. Ilepyoqjúa) n'est pas restée
ignorée des auteurs et des géographes anciens. Citée par Ps. Scylax,
Pline, Plutarque, d'après les indications topographiques que donnent
les textes, elle se serait située aux environs de Cydonia ; et peut-
être, a-t-il été proposé, les ruines proches de Vrysès marqueraient-
elles son emplacement5.
Les auteurs ne la rapportent pas à la fondation d'Énée, mais
plus tard Servius, commentateur de Virgile, confirmera la fonda
tion d'une ville par les Troyens « juxta Cydoniam »6. Si son histoire
est demeurée peu connue, on aurait à son endroit une attestation
épigraphique : c'est à cette Pergame de Crète que M. Louis Robert
rapporte la mention dans une épitaphe d'Hyrtakos, qui se trouve
également dans la Crète occidentale, de l'ethnique Перуа^юс7 .
Une observation alors s'impose : partout au cours de son long
périple, Énée a laissé des traces de son passage, des jeux, des
statues, des temples... et on n'en relève pas en Crète, si ce n'est le
nom de Pergame. La brièveté de l'occupation troyenne brusque
ment interrompue peut expliquer l'absence de monuments ou
d'institutions. Mais aucun souvenir ne se serait donc attaché à ces
lieux grandis par la légende?
Or, le monnayage d'une ville voisine et même par ses possessions
limitrophe de Cydonia appelle l'attention : des statères d'Aptéra
4. Lycophron, 1303 ss. ; Strabon, XIII, 604; Servius, En. III, 108.
5. Ps. Scylax, Peripl. XLVII ; Pline, N.H. IV, 12; Plutarque, Lyc. XXXI. Cf.
J.-N. Svoronos, Numismatique de la Crète ancienne, Cydonia, p. 96 ; M. Guarducci,
Inscr. Cret. II (1939), Cydonia, p. 106.
6. En. III, 132 ss.
7. Hellenica I, 1940, XV, Pergame ďÉpire, p. 95-105.
1—1 10 M. J. DELEPIERRE
du ive s. av. J.-C.8, qui s'ornent au droit de l'effigie d'une déesse
diadém

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