Entretien avec Michel Foucault - article ; n°1 ; vol.37, pg 8-20
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Description

Les Cahiers du GRIF - Année 1988 - Volume 37 - Numéro 1 - Pages 8-20
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

André Berten
Michel Foucault
Entretien avec Michel Foucault
In: Les Cahiers du GRIF, N. 37-38, 1988. Le genre de l'histoire. pp. 8-20.
Citer ce document / Cite this document :
Berten André, Foucault Michel. Entretien avec Michel Foucault. In: Les Cahiers du GRIF, N. 37-38, 1988. Le genre de l'histoire.
pp. 8-20.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/grif_0770-6081_1988_num_37_1_1751Entretien avec
Michel Foucault
réalisé par André Berten ,
En 1981, Michel Foucault avait été invité par la Faculté de Droit, de l'Ecole de
Criminologie de l'Université de Louvain à donner une série de cours-conférences
qu'il avait intitulés : Mal faire, dire vrai : sur la fonction de l'aveu en justice. A
cette occasion, le professeur André Berten avait réalisé, en mai, un entretien qui fut
filmé par le Centre audio-visuel de l'Université. Ce film a été repris récemment
dans le cadre de l'émission Océaniques, sur FR3. Nous publions ici le texte de
l'entretien, avec l'aimable autorisation d'André Berten, et des Facultés intéressées.
A.B. Il me semblerait intéressant que vous puissiez nous dire comment vous avez
cheminé à travers une série de problématiques, une série de questions. Pourquoi
vous vous êtes intéressé à l'histoire de la psychiatrie, à l'histoire de la médecine, à la
prison et maintenant à de la sexualité. Pourquoi, aujourd'hui, vous semblez
vous intéresser à l'histoire du droit. Quel a été au fond votre itinéraire. Qu'est-ce qui
a été le fil conducteur de votre réflexion, s'il est possible de répondre à une telle
question ?
M. F. Mais c'est une question difficile que vous me posez. D'abord parce que le fil
conducteur, on ne peut guère le dégager qu'une fois qu'on a été conduit au terme, et
puis enfin, vous savez je ne me considère absolument pas ni comme un écrivain, ni
comme un prophète. Je travaille, c'est vrai, en grande partie souvent au gré de
circonstances, de sollicitations extérieures, de conjonctures diverses. Je n'ai pas du
tout l'intention de faire la loi et il me semble que s'il y a dans ce que je fais une
certaine cohérence, elle est peut-être liée à une situation qui nous appartient à tous,
les uns et les autres, dans laquelle nous sommes tous, plus qu'à une intuition
fondamentale ou à une pensée systématique. C'est vrai peut-être depuis le jour où
?" c'est-à-dire qu'est-ce que notre Kant a posé la question "Was ist Aufklàrung
actualité, qu'est-ce qui se passe autour de nous, qu'est-ce que notre présent ; il me
semble que la philosophie a acquis là une nouvelle dimension. Plus, s'est ouverte
pour elle une certaine tâche qu'elle avait ignorée ou qui n'existait pas pour elle et qui est de dire qui nous sommes, de dire : qu'est-ce que notre présent, auparavant,
qu'est-ce que ça, aujourd'hui. C'est évidemment une question qui n'aurait pas eu de
sens pour Descartes. C'est une question qui commence à avoir du sens pour Kant
quand il se demande ce que c'est que l'Aufkiàrung ; c'est une question qui est en un
sens la question de Nietzsche. Je pense aussi que la philosophie parmi les
différentes fonctions qu'elle peut et qu'elle doit avoir, a aussi celle-là, de s'interroger
sur ce que nous sommes dans notre présent et dans notre actualité. Je dirai que c'est
autour de cela que je pose la question et dans cette mesure je suis Nietzschéen ou
Hégélien ou Kantien, de par ce côté là.
Bon, comment suis-je venu à poser ce genre-là de questions ? En deux mots,
sur l'histoire de notre vie intellectuelle aux uns et aux autres, dans l'Europe
occidentale après la guerre, on pourrait dire ceci : c'est que l'on disposait vers les
années 1950, d'abord d'une perspective d'analyse très profondément inspirée par la
phénoménologie qui était en un sens, à ce moment-là, une philosophie dominante.
Dominante, je ne mets aucune péjoration dans ce mot-là, car on ne peut pas dire
qu'il y avait dictature ou despotisme dans ce mode de pensée ; mais dans l'Europe
occidentale, particulièrement en France, la phénoménologie était un style général
d'analyse. Un style d'analyse qui revendiquait comme l'une de ses tâches
fondamentales l'analyse du concret. Il est très certain que de ce point de vue-là on
pouvait rester un petit peu insatisfait dans la mesure où le concret auquel se référait
la phénoménologie, ce concret était un petit peu académique et universitaire. Vous
aviez des objets privilégiés de la description phénoménologique, des expériences
vécues ou la perception d'un arbre à travers la fenêtre du bureau. ..
Je suis un peu sévère mais le champ d'objet que la phénoménologie parcourait
était un peu prédéterminé par une tradition philosophique et universitaire qu'il valait
peut-être la peine d'ouvrir.
Deuxièmement, une autre forme de pensée dominante, importante, c'était
évidemment le marxisme qui lui, se référait à tout un domaine d'analyse historique
sur lequel, en un sens, il faisait l'impasse. Autant la lecture des textes de Marx,
l'analyse des concepts de Marx était une tâche importante, autant les contenus du
savoir historique auxquels ces concepts devaient se rapporter, pour lesquels ils
devaient être opératoires, ces domaines historiques étaient un peu laissés pour
compte. En tout cas le marxisme, ou l'histoire marxiste, concrète, n'était pas, en
France du moins, très développée.
Puis il y avait un troisième courant qui était en France très spécialement
10 développé et qui était l'histoire des sciences, avec des gens comme Bachelard, etc... et Cavaillès. Le problème était de savoir : est-ce qu'il y a une Canguilhem,
historicité de la raison et est-ce que l'on peut faire l'histoire de la vérité.
Si vous voulez, je dirais que je me suis situé au croisement de ces différents
courants et de ces différents problèmes. Par rapport à la phénoménologie, plutôt que
de faire la description un peu intériorisée de l'expérience vécue, est-ce qu'il ne faut
pas, est-ce qu'on ne peut pas faire l'analyse d'un certain nombre d'expériences
collectives et sociales.
La conscience de celui qui est fou est importante à décrire, comme l'a montré
Binswanger. Et après tout, est-ce qu'il n'y a pas une structuration culturelle et
sociale de l'expérience de la folie ? Et cela ne doit-il pas être analysé ?
Ceci m'a amené à recouper un problème historique qui était celui de savoir : si
l'on veut décrire l'articulation sociale, collective, d'une expérience comme celle de
la folie, quel est le champ social, quel est l'ensemble des institutions et des pratiques
qu'il faut historiquement analyser et pour lequel les analyses marxistes sont un peu
comme des habits de confection mal ajustés.
Et, troisièmement, à travers l'analyse d'expériences historiques, collectives,
sociales, liées à des contextes historiques précis, comment peut-on faire l'histoire
d'un savoir, l'histoire de nos connaissances et des objets nouveaux
peuvent-ils arriver dans le domaine de la connaissance, peuvent-ils se présenter
comme objets à connaître. Alors si vous voulez, concrètement cela donne ceci : est-
ce qu'il y a ou non une expérience de la folie caractéristique d'une société ?
Comment cette expérience de la folie a-t-elle pu se constituer . Comment a-t-elle pu
émerger ? Et, à travers cette expérience de la folie, comment est-ce que la folie a pu
se constituer comme vobjet de savoir pour une médecine qui se présentait comme
médecine mentale. A travers quelle transformation historique, quelle modification
institutionnelle, s'est constituée une expérience de la folie où il y a, à la fois, le pôle
subjectif de l'expérience de la folie et ce pôle objectif de la maladie mentale.
Voilà un peu, sinon l'itinéraire, du moins le point de départ. Et, pour en
revenir à la question que vous me posiez : pourquoi avoir pris ces objets-là, je dirai
qu'il me semblait - et c'était peut-être là le quatrième courant, le quatri&#

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