Figures narratives de la mort et l immortalité - article ; n°2 ; vol.4, pg 269-290
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Description

Mètis. Anthropologie des mondes grecs anciens - Année 1989 - Volume 4 - Numéro 2 - Pages 269-290
Figures narratives de la mort et l'immortalité. Sisyphe et autres histoires (pp. 269-290)
Partant de l'analyse de l'histoire de Sisyphe qui se joue de Thanatos, le daimon de la mort, on étudie quelques figures personnifiées du mourir, ainsi que des hypothèses de résurrection (définitive ou temporaire) et d'immortalité, élaborées par l'imaginaire des Grecs. On cherche à dégager la sémantique sous-jacente à ces récits et à ces figures, et à faire apparaître l'articulation signifiante résultant de réflexions sur la mortalité humaine, et de quelques représentations de révoltes vaines ou d'autres tentatives pour déjouer le destin mortel.
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1989
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Ezio Pellizer
Figures narratives de la mort et l'immortalité
In: Mètis. Anthropologie des mondes grecs anciens. Volume 4, n°2, 1989. pp. 269-290.
Résumé
Figures narratives de la mort et l'immortalité. Sisyphe et autres histoires (pp. 269-290)
Partant de l'analyse de l'histoire de Sisyphe qui se joue de Thanatos, le daimon de la mort, on étudie quelques figures
personnifiées du mourir, ainsi que des hypothèses de résurrection (définitive ou temporaire) et d'immortalité, élaborées par
l'imaginaire des Grecs. On cherche à dégager la sémantique sous-jacente à ces récits et à ces figures, et à faire apparaître
l'articulation signifiante résultant de réflexions sur la mortalité humaine, et de quelques représentations de révoltes vaines ou
d'autres tentatives pour déjouer le destin mortel.
Citer ce document / Cite this document :
Pellizer Ezio. Figures narratives de la mort et l'immortalité. In: Mètis. Anthropologie des mondes grecs anciens. Volume 4, n°2,
1989. pp. 269-290.
doi : 10.3406/metis.1989.939
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/metis_1105-2201_1989_num_4_2_939NARRATIVES DE LA MORT ET L'IMMORTALITÉ* FIGURES
Sisyphe et autres histoires
Sur une métope du célèbre temple d'Héra (Ire moitié du Vlème siècle
avant Jésus-Christ), à l'embouchure du Sele, est sculptée une image singu
lière et impressionnante. Une figure humaine roule un lourd rocher,
cependant que sur son épaule se pose une petite figure ailée, anthropo-
morphique, et de petites dimensions (environ deux fois plus petite que le
personnage principal)1. Aucun doute ne plane sur l'identification de
l'homme qui pousse le rocher "à la sueur de son front": c'est le fameux
Sisyphe (Σίσυφος), le fondateur d'Éphyre la future Corinthe, tel que le
décrivent quelques vers de V Odyssée (XI, 593-600) alors qu'il accomplit
son immense peine, son éternel et inutile effort. Connu de Pindare ( Olymp
iques, 13; 52, fr. 5, 1) et de l'élégie de l'époque archaïque (Théognis, 702-
712), le fondateur de Corinthe et des jeux isthmiques sera le protagoniste
de tragédies et de drames comiques des trois plus grands poètes dramatur-
* Traduction de Geneviève Henrot-Sostero.
1. Cette figure de δαίμων, diversement interprétée par les archéologues comme
Poinè, Kèr ou l'énigmatique Krataïs de la Nekyia homérique, présente des traits an
imaux, hybrides et effrayants; elle peut être rapprochée des images de démons analogues
en Orient (Pazuzu), cf. P. Zancani-Montuoro, "Sisifo nella pittura dell' Esquilino",
Rend. Pont. Accad. diArcheol., 35 (3a s.), 1962-63, pp. 67-74. Toutefois, elle est bar
bue; elle représente donc un être masculin; pour cette raison —qui s'ajoute à d'évidents
motifs de pertinence narrative— j'aurais fort envie de suivre l'avis d'Erika Simon, "Die
vier BuBer von Foce del Sele", Jahrb. Deutsch. Archàol. Inst., 82, 1967, p. 279, qui y
reconnaît une façon archaïque de représenter le démon Thanatos: "Eine volkstûmlich-
derbe Vorstellung vom Tod, wie sie uberhaupt fur den Sisyphos-Mythos vorauszusetzen
ist, hat die Gestalt des Thanatos auf der Métope geprâgt". 270 EZIO PELLIZER
ges du Vème siècle, ainsi que d'un drame satyrique singulier attribué à Cri-
tias le Tyran. De cette production pour le théâtre, il ne nous reste que de
rares fragments. L'histoire de Sisyphe est racontée sous sa forme la plus
complète en détails et en épisodes dans une scholie de Y Iliade, VI, 153, que
le scholiaste lui-même attribue explicitement à Phérécyde, un érudit et
généalogiste athénien de la première moitié du Vème siècle avant Jésus-
Christ. Voyons comment se configure ce bref récit, stylistiquement plutôt
pauvre, mais qui contient pour ainsi dire tout l'essentiel. Il est entendu
que, partant de ce texte de référence, nous tiendrons compte de tout le sy
stème des variantes de l'histoire de Sisyphe que nous pourrons trouver au
fur et à mesure dans d'autres sources, et de tous les éléments dont on
pourra extraire des informations supplémentaires. Voici le récit de Phéré
cyde:
Schol. Hom. Iliade, VI, 153 (= Phéréc. Athén., FrGrHist, 3 F 119 Jacoby)
Quand Zeus transporta Égine (Αίγινα), la fille d'Asopos, de Phlionthe
(ΦλιοΟς) à Oenone (Οΐνώνη) en passant par Corinthe, c'est avec un art fall
acieux que Sisyphe dévoila le rapt à Asopos qui cherchait partout sa fille; c'est
ainsi qu'il s'attira l'immense colère de Zeus, qui lui adressa Thanatos (Θάνατ
ος, le démon de la mort). Mais Sisyphe, qui s'était aperçu à temps de
l'approche de ce dernier, le ligota de robustes liens. C'est ainsi qu'il arriva
que personne ne mourait plus parmi les hommes, jusqu'au jour où Ares (le
dieu de la guerre) libéra Thanatos de ses liens, et lui livra Sisyphe. Mais
avant de mourir, celui-ci imposa à sa femme Mérope (Μερόπη) de ne pas lui
envoyer là-bas dans l'Hadès (littéralement "dans la demeure du dieu
Hadès") les offrandes funèbres prescrites par l'usage. Après quelque temps,
puisque sa femme n'offrait pas à Sisyphe les sacrifices de rigueur, Hadès (ô
"Αιδης, le dieu des morts), informé de la chose, le renvoya sur la terre pour
qu'il pût l'en blâmer. Mais Sisyphe, une fois arrivé à Corinthe, se garda bien
de retourner en arrière jusqu'au jour où, devenu vieux, il < mourut. Pour
cette raison >, après sa mort, Hadès l'obligea à rouler le rocher, pour qu'il
ne pût s'échapper à nouveau. Cette histoire est racontée par Phérécydes.
0.1. Cette version de l'histoire de Sisyphe —que nous utiliserons comme
point de départ de notre analyse— bien que fort maigre et synthétique,
semble plutôt bien structurée, articulée comme elle est en une série corré-
lée d'actions et de conséquences, de causes et d'effets, de fautes et de puni
tions. Nous pouvons la diviser en séquences homogènes, que nous disti
nguerons de la façon suivante:
a) La dénonciation de S1: Sisyphe, c'est-à-dire le transfert d'un savoir à FIGURES NARRATIVES DE LA MORT 271
S2: Asopos, qui est en relation de cause2 avec le programme narratif (PN I)
de:
b) condamnation à mort de S1: Sisyphe, par le premier antagoniste
Ant1: Zeus ; on n'interfère pas impunément avec les affaires amoureuses
du père des dieux.
A partir d'ici, Sisyphe met en œuvre un programme de fuite devant la
condamnation (PN II), qui se développe en deux moments différents:
c) première ruse de S1 au détriment de Ant2: Thanatos. Le Prédateur
devient la proie, et s'entrouvre le piège des liens; cela cause
d) Y intervention d'un troisième antagoniste, Ares (Ant3); ce dernier
libère de ses liens l'Ant2, et ensemble ils exécutent — temporairement — le
programme de condamnation à mort (toujours le PN I) voulu par Zeus.
On a ensuite une:
e) deuxième fuite, une deuxième ruse de S1 au détriment du quatrième
antagoniste Ant4: Hadès. Sisyphe prédispose le piège avec l'aide de son
épouse, Ad1: Mérope, et revient dans le monde des vivants. A nouveau il a
évité de subir la condamnation (réprésentant ainsi la fuite, PN II) , jusqu'au
jour où
f) lui arrive tout de même la mort, mais une mort de vieillesse3; c'est
2. Il n'y a pas à s'étonner que d'autres versions déplacent sur cette faute, et non sur les
suivantes (ies tours joués au démon de la mort et au dieu Hadès), la motivation de la
seconde condamnation, la peine du rocher roulant, cf. Ch. Sourvinou-Inwood, «Crime
and Punishment: Tityos, Tantalos and Sisyphos in Odyssey 11», Bull. Inst. Class. Stud. ,
33, 1986, pp. 37-58. Un effet fort célèbre -la peine exemplaire de Sisyphe- semble donc
en mesure de générer un certain nombre de causes possibles et diverses. De notre point
de vue, il n'est guère intéressant de se demander à quelle époque les différents épisodes
du récit (comme celui d'Asopos, que je me garderai d'appeler une "variante", et encore
moins "the mytheme involving Asopos") ont trouvé leur origine, comme fait l'auteur de
Yart.cit. , p. 50, et moins encore qui peut en être l'auteur. Il me semble de toute façon
extrêmement improbable que Ph

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