Hello central ? Compagnies de téléphone, abonnés et création d une culture téléphonique au Canada (1876-1920) - article ; n°55 ; vol.10, pg 25-64
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Hello central ? Compagnies de téléphone, abonnés et création d'une culture téléphonique au Canada (1876-1920) - article ; n°55 ; vol.10, pg 25-64

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Description

Réseaux - Année 1992 - Volume 10 - Numéro 55 - Pages 25-64
L'article recouvre une période qui va du lancement de la commercialisation du téléphone à l'industrialisation de sa production. Il analyse la relation entre les usagers et les compagnies d'un point de vue politico-économique, en intégrant le rôle des femmes tant au niveau de la production que de l'utilisation du nouvel outil de communication. Cette lecture prend le contre-pied de celle de la compagnie Bell pour qui le développement du téléphone au Canada aurait évolué « naturellement ».
Its viewpoint is opposed to that of the Bell Telephone Company for whom the telephone developed naturally in Canada.
40 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1992
Nombre de lectures 34
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Michèle Martin
Mc Gill - Queen's University
Press
Marie-Hélène Cartier
Hello central ? Compagnies de téléphone, abonnés et création
d'une culture téléphonique au Canada (1876-1920)
In: Réseaux, 1992, volume 10 n°55. pp. 25-64.
Résumé
L'article recouvre une période qui va du lancement de la commercialisation du téléphone à l'industrialisation de sa production. Il
analyse la relation entre les usagers et les compagnies d'un point de vue politico-économique, en intégrant le rôle des femmes
tant au niveau de la production que de l'utilisation du nouvel outil de communication. Cette lecture prend le contre-pied de celle
de la compagnie Bell pour qui le développement du téléphone au Canada aurait évolué « naturellement ».
Abstract
Its viewpoint is opposed to that of the Bell Telephone Company for whom the telephone developed "naturally" in Canada.
Citer ce document / Cite this document :
Martin Michèle, Mc Gill - Queen's University Press, Cartier Marie-Hélène. Hello central ? Compagnies de téléphone, abonnés et
création d'une culture téléphonique au Canada (1876-1920). In: Réseaux, 1992, volume 10 n°55. pp. 25-64.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751-7971_1992_num_10_55_2031CENTRAL ? ALLO,
et Compagnies création d'une de au culture Canada téléphone, téléphonique (1876-1920) abonnés
Michèle MARTIN
© Réseaux n° 55 CNET - 1992 pour la version française
© Me Gill - Queen's University Press pour la version anglaise
25 mie politique, mais également de celui de
ses processus de production et de consomm
ation. Cette analyse (1) se concentre par
ticulièrement sur la relation entre usagers
et compagnies de téléphone, utilisant une
approche politico-économique tenant
compte des « nécessités » financières et
politiques des compagnies, couplée d'une
approche d'histoire sociale et féministe
prenant en considération les « exigences »
des usagers dont une grande partie sont
des femmes. Elle documente le lecteur sur
la façon dont les forces soutenant l'expan
sion d'un nouveau moyen de communicat
ion sont influencées par les pratiques déjà
existantes dans une communauté, en même
temps qu'elles sont responsables de la
création de nouvelles activités interceptant
certains aspects de la culture populaire.
entreprise n'entre aussi inti- ucune « Des nécessiteux qui
thésaurisent » ent et personnellement dans
la vie quotidienne d'une collectivité », lit-
on au sujet de l'industrie du téléphone De nos jours, le téléphone représente un
dans le Bloor Watchman en 1929. Le tél outil « universel », banal et à la portée de
éphone « est associé à tout ce qui est sécur tous. Pourtant, comme le souligne Marvin,
ité, bonheur et progrès », y ajoute-t-on. pendant au moins un demi-siècle, le tél
Pourtant, très peu d'analyses sérieuses por éphone « n'a pas été un moyen de commun
tent sur l'expansion de ce moyen de comm ication démocratique », mais une techno
unication, et sur son impact sur la culture logie dont l'usage a été réservé à certains
populaire de l'époque. groupes privilégiés (2). Un journal québéc
Cet article traitant de technologie, capi ois qualifie la compagnie Bell comme un
talisme et culture se veut une analyse de groupe de « nécessiteux qui thésaurisent »,
l'invasion montante du téléphone dans les affirmant que ses directeurs ne cessent
activités quotidiennes des gens entre 1876, d'augmenter le prix d'usage du téléphone
année de sa commercialisation, et 1920, tout en diminuant la qualité du service. Le de l'automatisation de la production. coût excessif de l'abonnement le rend à
Il s'agit de voir comment la compagnie de peu près inaccessible à une grande partie
téléphone Bell, principale responsable de de la population, et sa technologie un peu
l'expansion du réseau téléphonique au Ca surprenante le rend difficile d'adaptation
nada central, a répondu aux attentes et aux pour une autre partie.
demandes de ses abonnés tout en gardant Les conditions économiques, politiques
et idéologiques influençant l'expansion du le contrôle sur l'accès au système et sur
ses types d'utilisation. téléphone ont orienté sa répartition sociale
et façonné certains de ses usages. En reA cet effet, l'expansion du téléphone
doit être analysée non seulement du point vanche, certaines formes d'utilisation, en
de vue de sa technologie et de son particulier celles des femmes, ont contri-
(1) Cet article a été largement inspiré des chapitres 5 et 6 de mon ouvrage « Hello Central ? » Gender, Techno
logy and Culture in the Formation of Telephone Systems (1991). D'autres aspects du développement du téléphone
au Canada ont été le sujet d'analyse dans d'autres ouvrages déjà publiés, cités in « Références » à la fin de cet ar
ticle.
(2) MARVIN, 1988, 153.
27 bué à modifier la répartition et les usages banques, pharmacies, édifices publics, hô
planifiés. L'initiation de la femme du pitaux, gares, bureaux portuaires, postes de
siècle dernier au téléphone se fait en fonc police et ainsi de suite. Tous ces établiss
tion de sa classe sociale. Sur le plan de la ements sont reliés au central téléphonique,
production, les ouvrières participent ple et la téléphoniste se charge de transmettre
inement au développement de l'entreprise les messages aux abonnés ne pouvant
comme opératrices mais n'ont pas les communiquer directement avec eux. Par
moyens financiers d'accéder au processus contre, un abonné peut rejoindre directe
de consommation, presque exclusivement ment, « sans quitter la maison », médecins,
réservé, à cause de son coût élevé, aux épiciers, bouchers, poissonniers, palefre
femmes des classes bourgeoises et niers, etc., partageant la même ligne. La
moyennes. Mis sur pied par des capitaux même année, la Dominion Telegraph Co.,
privés, le téléphone n'est pas à l'usage des devenant plus tard la compagnie de tél
ouvrières, bien que certaines pourraient en éphone Bell, annonce l'ouverture jour et
tirer profit. nuit de son bureau, permettant ainsi de re
Ainsi, en dépit de l'insistance de Bell à joindre tous ses abonnés en tout temps,
déclarer que le réseau de téléphone a évo une première à Montréal (5). Comme sa r
lué « naturellement », le système a été ivale, Bell offre à ses abonnés la possibilité
de « communiquer directement et immédconçu pour rapporter de l'argent. La répar
tition sociale de l'usage du téléphone se l iatement avec les membres éminents du
imite à des classes précises pour des rai corps juridique, médical et autres » (6)
sons économiques et politiques sans objet partageant la même ligne.
dans une évolution « naturelle ». Une ré Malgré cette publicité, les médecins et
partition naturelle prendrait son expansion les avocats sont plutôt réticents à faire af
selon un plan géographique, en desservant faire par téléphone. Les avocats craignent
les maisons des zones traversées par ses de perdre la confidentialité de leurs tra
lignes. En fait, le réseau a pris de l'expan nsactions. A Montréal, « l'Honorable
sion le long d'axes sociaux spécifiques (3). M. Abbott, qui devient plus tard Premier
ministre, ne veut pas d'un téléphone dans
Des appels d'affaires son bureau car il trouve indigne d'un avo
aux pratiques sociales cat de communiquer avec ses clients par le
biais d'un tel appareil » (7). A l'époque,
En 1878, une circulaire distribuée par la « faire confiance » au téléphone constitue
District Telegraph Co. à Montréal offre un la question d'actualité. La technologie
service de messagerie gratuit à tous les n'offre pas la garantie de « discrétion » à
abonnés désirant rejoindre des non-abon laquelle les bourgeois et petits-bourgeois
nés tels les docteurs, les vendeurs, les sont habitués.
plombiers, les charbonniers, les palefre Les raisons de la méfiance des médecins

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