Herrick et le recours au minuscule  - article ; n°1 ; vol.19, pg 59-81
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XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles - Année 1984 - Volume 19 - Numéro 1 - Pages 59-81
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Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 11
Langue Français
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Extrait

Simone Dorangeon
Herrick et le recours au minuscule
In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des XVIIe et XVIIIe siècles. N°19, 1984. pp. 59-81.
Citer ce document / Cite this document :
Dorangeon Simone. Herrick et le recours au minuscule . In: XVII-XVIII. Bulletin de la société d'études anglo-américaines des
XVIIe et XVIIIe siècles. N°19, 1984. pp. 59-81.
doi : 10.3406/xvii.1984.1046
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/xvii_0291-3798_1984_num_19_1_1046- - 59
HERRICK ET LE RECOURS AU MINUSCULE
"... and I sing / The Court of Mab, and of the Fairie-King", dit
Herrick, alors qu'il énumère, dans "The Argument of his Book", les thèmes
retenus par lui au cours des années fécondes de son existence, années vouées
à l'élaboration d' "Enchantments (to) be sung, or read" . Mab, et surtout
son époux Obéron, figurent effectivement parmi les silhouettes évoquées dans
le recueil Hesperides publié en 1648, et le recours au surnaturel, mentionné
dans 1' "Argument" après le thème de la fuite du temps, et après celui des
mystères de la nature joints aux fantaisies mythologiques ("How Roses first
came red, and Lillies white", v. 10) constitue la substance de plusieurs
morceaux tels que, "The Fairies", "The Hag", "The Hagge" , "The Beggar to Mab
the Fairie Queen", "To the Genius of his house", "Charmes", "Another (charm)",
"Another (to bring in the Witch)", "Another charme for Stables", "Ceremonies
for Candlemas se Eve", "The Ceremonies for Candlemasse day", dans lesquels, mal
gré quelques allusions à Mab et à ses petites fées soucieuses de propreté
à la ferme, prédominent la frayeur inspirée par l'odieuse sorcière ou "hag",
qui hante les demeures rustiques, et la nécessité de se préserver contre
elle par des recettes puisées dans le folklore. Si l'attention est focalisée
ici sur trois poèmes seulement parmi ceux nourris de surnaturel - à savoir :
"The Fairie Temple or Obérons Chappell", "Obérons Feast" et "Obérons
Palace" -, c'est parce que le thème des fées, de leurs coutumes, de leur mo
de de relations, de leur place dans l'univers, de leur rapport à l'art et à
la nature, y est exploré de façon approfondie, avec une minutie saisissante
et un désir évident de doter les créatures lilliputiennes, nées de l'imagi
nation des hommes, d'un statut bien défini ; c'est aussi parce que les trois
morceaux, écrits en tétramètres à rimes plates, constituent un ensemble, - - 60
grâce à un système d1 échos et grâce à une continuité narrative manifeste :
ainsi le dernier vers de "The Temple" ("(he) /Goes to the Feast that's now
provided", v. 142) annonce "Obérons Feast" ; ainsi l'injonction faite à
Shapcott, à qui est dédié le "lyric", de patienter avant de découvrir le
palais ("Take first the f east . . . /We ' 11 see the Fairy-Court anon", v. 5-6),
rend inévitable la description contenue dans "Obérons Palace", qui inter
vient en troisième position, dans le respect d'un ordre chronologique dont
la validité est soulignée dès l'introduction (v. 1-2) :
After the Feast (my Shapcot) see,
The Fairie Court I give to thee.
Notons du reste que le troisième morceau - point d'aboutissement - jouit
d'un relief particulier, puisqu'il est encadré par une pièce légère, intitu
lée "To the little Spinners", qui est une apostrophe à ces mêmes diligentes
araignées auxquelles la reine Mab doit les draperies de sa couche, et par
un hommage amical "To his peculiar friend Master Thomas Shapcott, Lawyer",
dont les premiers mots sont marque de satisfaction au terme d'un projet nar
ratif réalisé :
I've paid thee, what I promis 'd. (2)
Les trois volets de cette présentation du monde des fées sont donc suscepti
bles d'être "raccordés" et même inscrits dans une même séquence temporelle
(bien qu'il y ait paradoxe, comme nous le verrons plus tard, à parler de
temporalité à propos de ce royaume qui échappe au processus hideux du vieil
lissement). En fait, l'unité structurelle est telle que D.W. Woodward a cru
possible de regrouper les trois segments et de les assimiler à un épithalame
en trois étapes : l'office religieux, le banquet, le coucher et la consomma
tion du mariage *- . Même si cette interprétation est quelque peu forcée,
car rien ne nous autorise à associer le rituel dans "The Fairie Temple" à
l'idée du mariage, il n'en est pas moins vrai que les trois poèmes gagnent
à être étudiés comme un tout organique.
En ce qui concerne les dates de composition, plusieurs indices uti
les ont été relevés par les critiques. Déjà F. Delattre, affirmant de sur
croît que "The Temple", nourri de réflexion sur des problèmes ecclésiasti
ques, ne pouvait qu'être postérieur à l'ordination de Herrick (1623) et pos
térieur aussi aux deux poèmes non religieux ("Obérons Feast" et "Obérons - - 61
avait souligné dans le premier morceau la valeur référentielle Palace") ,
des vers suivants (v. 110-2) :
They much affect the Papacie
And since the last is dead, therfs hope
Elve Boniface shall next be Pope.
Cette mort d'un pape, qui crée l'événement au pays d'Obéron, aurait signfié,
selon F. Delattre (A) J , la mort du pape Paul V, survenue en 1621, ou celle
du pape Grégoire XV, survenue en 1623 - ce qui permettrait de dater le poè
me, où il est question avant tout du penchant des elfes pour le catholicis
me. Autre piste, dont l'intérêt est rappelé par D.W. Woodward : la
Bodléienne a conservé un exemplaire d'un ouvrage publié en 1635, et intitu
lé A Description of the King and Queene of Fayries, their habit, fare, their
abode , pompe and state . Beeing very delightful to the sense, and full of
mirth ; or, cet ouvrage contient à la fois une première version de
"Obérons Feast" - trente-deux vers seulement, au lieu de cinquante -quatre
dans la version définitive, complètement réécrite - et un poème, attribué
à un certain Sir Simon Steward, dont le titre qui a la particularité de com
porter une date, est ainsi rédigé : "A Description of the King of Fayries
Clothes, brought to him on New-yeares day in the morning, 1626, by his
Queenes Chamber-Maids". Etant donné que Sir Simon Steward mourut en 1629 C7") ,
il est probable que Herrick devint son ami vers 1623 et entreprit alors de
se divertir avec lui en ciselant des poèmes sur le thème des êtres menus à
propos desquels tout peut être inventé ou rêvé. Pour conclure, et sans cher
cher à rendre compte d'investigations plus poussées, disons que les poèmes
de Herrick consacrés à Obéron appartiennent aux années 1620-1630, et cette
certitude nous permettra de rattacher les trois variations sur le motif
des fées à l'engouement pour ce type de surnaturel qui s'affirma pendant la
troisième décennie du XVIIe siècle. Citons F. Delattre :
... between 1620 and 1630... a considerable mass of fairy
poetry... under the forms of epic, lyric or descriptive verse
(was produced) by young men like Herrick or by a veteran such
as Michael Drayton. (8)
F. Delattre rappelle aussi qu'en l'espace de dix années les "good people" ou
petites fées espiègles parurent dans les poèmes composés par Herrick, dans
deux oeuvres de Drayton, dans les Britannia's Pastorals de W. Browne, dans - - 62
les contributions de Steward et autres poètes, anonymes, au petit recueil
de 1635 et dans de multiples manuscrits, très appréciés par les connais-
seurs. Inutile de refaire ici l'historique de ce genre fragile (9) . Chacun
sait que le point de départ fut la description de la reine Mab - "In shape
no bigger than an agate stone" - par Mercutio dans Romeo and Juliet,
où Shakespeare proposa à son public une image des fées - êtres menus, tou
jours impliqués dans les affaires des humains- que sanctionnaient le fol
klore et les superstitions populaires, et que Mab devint Titania dans A
Midsummer Night's Dream, où l'auteur, lié par les nécessités matérielles

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