Kuzmin, Nabokov, Činnov, poètes alexandrins - article ; n°3 ; vol.32, pg 369-378
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Description

Cahiers du monde russe et soviétique - Année 1991 - Volume 32 - Numéro 3 - Pages 369-378
Alexandra Pasquinelli, Kuzmin, Nabokov, Chinnov, Alexandrian poets.
The Alexandrian influence clearly appears in the works of these authors, and characterizes their forms. That influence reveals itself especially in the first period of Kuzmin's literary production.
Nabokov, through his pragmatic Hellenistic culture, finds the way to surmount the « double event » of his destiny, the Revolution and the exile.
Chinnov is connected with Kuzmin, and was properly considered - as he does about himself - as an Alexandrian: it is just in the Alexandrian field that he was able to overcome the mourning of Note parisienne and to interpret the Hellenistic theme in a personal and quite modern way.
Alexandra Pasquinelli, Kuzmin, Nabokov, Činnov, poètes alexandrins.
Dans l'œuvre de ces trois écrivains russes de notre siècle, l'influence alexandrine se manifeste avec évidence et en caractérise les formes. Cette influence se présente surtout dans la première période de l'activité littéraire de Kuzmin. Chez Nabokov, c'est le savoir pragmatique hellénistique qui lui permet de surmonter le « double événement » de sa destinée, la Révolution et l'exil.
Činnov se rattache d'un côté à Kuzmin, et pour cette raison, il a été à juste titre qualifié d'« alexandrin », qualificatif qu'il s'est donné lui-même : c'est sur le terrain alexandrin qu'il a été en mesure de surmonter la douleur de la « Note parisienne » et de réinterpréter le thème hellénistique d'une manière très personnelle et toute moderne.
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 68
Langue Français

Extrait

Alexandra Pasquinelli
Kuzmin, Nabokov, Činnov, poètes alexandrins
In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 32 N°3. Juillet-Septembre 1991. pp. 369-378.
Abstract
Alexandra Pasquinelli, Kuzmin, Nabokov, Chinnov, Alexandrian poets.
The Alexandrian influence clearly appears in the works of these authors, and characterizes their forms. That influence reveals
itself especially in the first period of Kuzmin's literary production.
Nabokov, through his pragmatic Hellenistic culture, finds the way to surmount the « double event » of his destiny, the Revolution
and the exile.
Chinnov is connected with Kuzmin, and was properly considered - as he does about himself - as an "Alexandrian": it is just in the
Alexandrian field that he was able to overcome the mourning of "Note parisienne" and to interpret the Hellenistic theme in a
personal and quite modern way.
Résumé
Alexandra Pasquinelli, Kuzmin, Nabokov, Činnov, poètes alexandrins.
Dans l'œuvre de ces trois écrivains russes de notre siècle, l'influence alexandrine se manifeste avec évidence et en caractérise
les formes. Cette influence se présente surtout dans la première période de l'activité littéraire de Kuzmin. Chez Nabokov, c'est le
savoir pragmatique hellénistique qui lui permet de surmonter le « double événement » de sa destinée, la Révolution et l'exil.
Činnov se rattache d'un côté à Kuzmin, et pour cette raison, il a été à juste titre qualifié d'« alexandrin », qualificatif qu'il s'est
donné lui-même : c'est sur le terrain alexandrin qu'il a été en mesure de surmonter la douleur de la « Note parisienne » et de
réinterpréter le thème hellénistique d'une manière très personnelle et toute moderne.
Citer ce document / Cite this document :
Pasquinelli Alexandra. Kuzmin, Nabokov, Činnov, poètes alexandrins. In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 32 N°3.
Juillet-Septembre 1991. pp. 369-378.
doi : 10.3406/cmr.1991.2287
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_0008-0160_1991_num_32_3_2287ANASTASIA PASQUINELLI
KUZMIN, NABOKOV, ČINNOV, POÈTES ALEXANDRINS
D1 après Mandel' štam, la langue russe est une langue hellénistique, et c'est là la
raison pour laquelle elle « apparaît comme chair qui résonne et qui parle »' : dans
l'œuvre de trois poètes russes de notre siècle, Kuzmin (1872-1936), Nabokov
(1899-1977), Činnov (1909), l'influence de la culture alexandrine se révèle évi
dente et en caractérise les formes ; il est donc intéressant de suivre le parcours et
l'évolution de certains thèmes alexandrins présents dans la production poétique de
ces trois auteurs.
L'hellénisme du jeune Kuzmin a des racines profondes : « ô Parménide, le plus
sage parmi les sages [...]. Comment ne pas évoquer ton nom au début de mon long
récit, plein d'événements, de vie, ô sage ? » 2 Cette dédicace hiératique, cette invo
cation à la Muse philosophique est un exemple intéressant du dialogue herméneuti
que que, selon Heidegger, la pensée des époques successives instaure avec les ori
gines « pour induire à parler le silence de la pensée des origines »\ Pour Kuzmin
« alexandrin », Parménide est le maître à penser dont la parole conduit à la recher
che de la vérité dans la correspondance entre être et penser.
Il faut dire que la critique russe pré-révolutionnaire sur Kuzmin, tout en souli
gnant l'importance innovatrice de son œuvre, semblait toutefois en même temps
considérer son côté « alexandrin » évident, même affiché, plutôt comme élément
kitsch pittoresque, parfois scandaleux, que comme expression d'une recherche for
melle méthodique4. Après la révolution, tandis qu'en URSS l'image de Kuzmin
paraissait en fait critiquement désintégrée, en Occident curieusement elle était
réduite, en sens négatif, à ses dimensions « miniaturistiques » qui constituent, au
contraire, un aspect chiffré et précieux de sa poésie5.
V. Markov, dans son essai récent et essentiel sur la poésie de Kuzmin, se pen
che à plusieurs reprises sur Г «importance exceptionnelle» de l'influence alexan
drine que l'on y retrouve et explique que, justement dans la pensée de cette époque,
Kuzmin avait trouvé les thèmes qui l'auraient conduit du côté du gnosticisme (« né
à Alexandrie »), de l'occultisme, de la magie poétique orphique6.
En effet Kuzmin, au cours de la première période heureuse de son activité litt
éraire - la plus typiquement «alexandrine», qui déboucha en 1910 sur son essai
Cahiers du Monde russe et soviétique, XXXll (3), juillet-septembre 1991. pp. 369-378. 370 ANASTASIA PASQUINKLU
fameux et toujours controversé O prekrasnoj jasnosti (De la belle clarté) qui
s'identifie finalement avec Г «impeccable naïveté» de Baudelaire, où aussi la
conscience philosophique de Cocteau « trouvait son propre repos »7 - élaborait en
somme les éléments préférés de sa culture, de Parménide à Plotin jusqu'à son
Apulée « adoré ». Il parvenait ainsi à construire une méthode, ou plutôt une straté
gie complexe, composite - alexandrine à son tour - d'éléments religieux, philoso
phiques, moraux, tous rassemblés en un seul projet esthétique ; une stratégie en
mesure de faire face au temps historique de la crise (l'année 1905) et au temps
artistique de la mutation des formes dont l'année 1907 représentait le moment cru
cial8. C'est bien à ce moment-là que la conscience du déclin d'une époque se
conjugue chez Kuzmin - comme dans le « modèle » du monde alexandrin - à celle
de l'urgence d'une recherche méthodique tendant au renouvellement de l'expres
sion créatrice : rassvet et upadok - les deux termes utilisés par Markov9 pour défi
nir les aspects les plus caractéristiques de la culture alexandrine - ne sont qu'en
apparence antithétiques et pour Kuzmin ils s'identifient alternativement à ceux de
pysnosť et de smerť . La préface écrite par Kuzmin pour le premier recueil de vers
d'Anna Ahmatova, Večer (Soir)10 explique et témoigne qu'un subtil pressentiment
de mort était pour lui joint à l'impulsion d'une vitalité triomphante, car, comme
l'aurait écrit G. Ivanov, « Pered tem как zamolčať / Nado že pogovoriť ». A ce
point il est clair que pour Kuzmin il s'agissait, plutôt que de vljuhlennosť , d'att
irance envers le monde alexandrin", d'une nécessité poétique substantielle, inéluc
table. Bn réalité, le travail accompli par Kuzmin consistait - ainsi que dans la tradi
tion littéraire russe des deux siècles précédents - en la recherche et l'élaboration
d'une technique, celle du langage avant celle du style, tendant à ouvrir un espace
autonome à la poésie, l'affranchissant ainsi du territoire mythologique auquel elle
avait été assujettie (pour Kuzmin, il s'agissait surtout du mythe symboliste). La
pensée hellénistique, vis-à-vis de laquelle Kuzmin se plaçait dans un rapport dia
lectique et critique à travers sa méthode de stylisation, présentait plusieurs points
intéressant : le pastiche kouzminien - réflexion ironique sur le genre littéraire
adopté - avait été emprunté par lui justement à la littérature alexandrine (« J'ai relu
Apulée pour la centième fois »).
Le côté épicurien de Kuzmin avait déjà été correctement décelé par Brjusov12,
mais la critique s'était souvent bornée à en souligner les aspects les plus banals : se
livrer aux plaisirs sensibles, rester indifférents aux aspects tragiques de la vie13.
Kuzmin, au contraire, avait saisi l'originalité essentielle de l'œuvre ď Epicure qui,
comme il a été dit récemment, « est la critique la plus radicale que la philosophie
ancienne ait formulée à l'égard de l'univers mythique considéré comme le
domaine d'illusions ensorcelé, dont l'individu doit se détacher s'il veut avoir accès
au bonheur»14.
En ce qui concerne le stoïcisme, cet autre type de pensée hellénistique eut éga
lement une influence remarquable sur Kuzmin : en effet celle-ci ne considérait que
la logique particulière de l'événe

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