L apothicaire empoisonné, « Nouvelle comique » (XVIIe siècle) - article ; n°137 ; vol.41, pg 75-84
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L'apothicaire empoisonné, « Nouvelle comique » (XVIIe siècle) - article ; n°137 ; vol.41, pg 75-84

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Description

Revue d'histoire de la pharmacie - Année 1953 - Volume 41 - Numéro 137 - Pages 75-84
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1953
Nombre de lectures 10
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Eugène-Humbert Guitard
L'apothicaire empoisonné, « Nouvelle comique » (XVIIe siècle)
In: Revue d'histoire de la pharmacie, 41e année, N. 137, 1953. pp. 75-84.
Citer ce document / Cite this document :
Guitard Eugène-Humbert. L'apothicaire empoisonné, « Nouvelle comique » (XVIIe siècle). In: Revue d'histoire de la pharmacie,
41e année, N. 137, 1953. pp. 75-84.
doi : 10.3406/pharm.1953.11006
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/pharm_0035-2349_1953_num_41_137_11006« L'Apothicaire empoisonné »
« c/y&u&elle (XVII* siècle) c&mlque »
En taquinant les disciples de Galien, Molière n'a fait que suivre,
on le sait, la tradition des burlesques.
Le curieux récit que Von va lire appartient à cette lignée. Il s'ap
parente aux plus verveuses productions de Boccace, de Marguerite
de Navarre, de Cervantes et de Rabelais.
Car, à côté des brocarts enfantins dont Vauteur abuse pour, sans
grand dégât, empoisonner les soi-disant empoisonneurs, on appré
ciera la finesse et le mordant de certains épisodes qui nous révèlent
les murs de Vépoque et la psychologie du fanfaron, de l'étudiant,
de l'aventurière, du financier, de l'homme de loi, tous par lui ver
tement tancés. C'est peut-être la figure du personnage principal,
l'apothicaire Anselme, qui a le moins de relief. Le genre exigeait une
tête de Turc.
Nous avons eu la bonne fortune de faire cette découverte dans un
Recueil de pièces comiques, gaillardes et amoureuses, attribué à
Odin de Prefontaine et publié à Leyde en 1699.
Bien entendu, nous n'avons en rien modifié le texte. Nous avons
seulement supprimé deux ou trois passages qui constituaient des
redites (déjà, les feuilletonistes « tiraient à la ligne ») et ajouté les
titres des paragraphes.
E.-H. Guitard.
LVun apothicaire champenois.
Dans une des meilleures villes de la Province de Champagne deroeuroit un
Apothicaire assez gaillard, qui se vantoit d'être descendu de la génération de
ceux qui, aux premiers siècles, ont mis en usage l'escopette d'Hypocrate, c'est
ainsi qu'il nommoit la seringue.
Il étoit ordinairement équipé d'une faye de drap de couleur violette, d'une 76 REVUE D'HISTOIRE DE LA PHARMACIE
tocque de velours noir, et de souliers à double semelle de liège. Mesmes pour
mieux imiter la figure antique d'un Galien ou de quelqu'autre grand Autheur
de la médecine, il portoit toujours une barbe fort ample ; toutefois, comme
avec toutes ces belles apparences, il étoit plus gueux qu'un rat qui se trouve
seul dans un bâtiment neuf. N'ayant pas le moyen d'acheter de bonnes drogues
pour composer ses médicaments, il ne faisoit aucune difficulté de mêler dans
quelques Phioles, où il y avoit eu du sirop de grenouille, afin de lui en commun
iquer un peu de la couleur et de l'odorat. Ainsi composant sur le champ des
ingrédients à sa mode, à mesure qu'on lui en demandoit, il ne renvoyoit jamais
les personnes qui entroient dans sa boutique pour y acheter quelquechose, quoi
qu'ils lui puissent demander ; encores qu'il n'en eut point.
De sorte, qu'étant assez connu pour un falsificateur, il fut fort décrié par le
menu peuple, qui disoit en raillant que ses quiproquos avoient plus envoyé de
gens au cimetière qu'à la taverne, et que cet Arquebusier du ponant ne cher-
choit le fondement aux malades que pour établir celui de sa bourse. Cependant
il ne laissoit pas d'être en estime parmi quelques gens d'honneur, qui, s'arretant
seulement aux apparences, pensoient qu'il ne distribuoit que de bons remèdes,
et blamoient ce petit vulgaire d'envie et de médisance ; s'il bien qu'il ne laissa
pas de vivre malgré de tels envieux.
Ce Pharmacien avoit un fils nommé Anselme, assez spirituel, mais plus
adonné au vice qu'à la vertu, lequel tenant beaucoup de l'humeur joviale de son
père, ne s'adonnoit qu'à des choses frivoles, et n'avoit aucun penchant pour les
sciences nécessaires à son art ; si bien que ce père, qui tachoit de l'employer
quelquefois à des opérations assez communes, eut été des plus judicieux qui se
puissent trouver parmi ceux qui exercent la Pharmacie, et qu'il en eut voulu
faire un successeur digne de lui, il en auroit affreusement reçu plus de fâcherie
que de satisfaction.
Le malencontreux clystère.
Un jour Anselme étant allé porter un clistère à une Dame, comme il se met-
toit en devoir de le lui donner, elle lui commanda d'oter son chapeau ; à quoi
il ne voulut point obéir, ne pouvant se résoudre à faire tant d'honneur au der
rière de cette Dame ; et ensuite, ayant découvert le linceul de son lit, il aperçut
qu'elle s'étoit entortillé le fessier d'une serviette où il y avoit seulement un trou
pour passer le bout du canon de la seringue ; ce que voyant, lui coula tout le
long de l'épine du d'os, entre la chemise et la peau, et l'on connut qu'au lieu
d'une bonne décoction, ce n'étoit que de l'eau tiède. De quoi son père eut de
grands reproches : mais il s'en excusa, disant qu'il falloit que ce mauvais gar
çon eut répandu le Clistère en chemin, et que, n'osant en venir faire un autre
au logis, il s'étoit avisé de cette invention. Enfin, comme Anselme faisoit presque
tous ses ouvrages avec négligence ou malice, ayant une fois composé des pilules
qui pensèrent faire crever un malade, cela causa un tel vacarme que, se voyant
pressé de la populace qui le vouloit assomer, il s'enfuit, et le père, pris à partie,
allégua pour sa defence que toutes fautes étoient personnelles.
Anselme, ayant gaigné la campagne, se trouva peu après, courant comme un
basque, à plus de quatre lieues loin, la pesanteur de son argent ne l'empechoit
pas d'escarpiner à l'aise, car il n'en étoit alors non plus chargé qu'un chapeau
de plumes. Lors il rencontra un jeune homme qui l'ayant accosté lui demanda
où il alloit. * Je vais, lui répondit-il, souper avec vous si vous avez agréable
de me défrayer ; ce que le jeune homme lui ayant accordé, ils cheminèrent
quelque temps ensemble, et, la nuit qui parut les obligeant à la retraite, ils
entrèrent dans une bonne hostellerie, où ils furent bien servis, ensuite de quoi,
s'étant mis au lit, ils s'endormirent.
Sur la pointe du jour, ce jeune homme, que s'étoit le premier éveillé, tira
par le bras Anselme, et lui dit qu'ayant un grand voyage à faire, il étoit besoin
qu'il usât de diligence, si bien que tous deux se levèrent, et le jeune homme
ayant payé la dépense qui avoit été faite en ce lieu, ils partirent. * 1 L'APOTHICAIRE EMPOISONNÉ 77
Fou ou philosophe ?
En cheminant Anselme dit au jeune homme qu'il étoit fort en peine de deux
choses, l'une de savoir où il alloit, n'ayant aucun dessein formé, l'autre qu'il
n'avoit pas la guide des chemins, qui étoit de l'argent, à quoi le jeune homme
lui répondit que pour le premier il falloit jeter la plume au vent et aller au
hasard, et que pour le second, il ne tarderoit guère à lui enseigner le secret
d'avoir de belles pistoles. Lors il demeura quelque temps sans parler, ensuite
de quoi s'étant mis à regarder l'Aurore, il dit que cette agréable courière, qui
venoit annoncer le retour du Soleil, promettoit une belle journée ; qu'elle
n'étoit offusquée d'aucun nuage, et que l'Ourse Majeure... Sur quoi Anselme
l'interrompant le pria de ne point entrer dans la spéculation des causes secon
des, mais plutôt de lui enseigner le pecret qu'il lui avoit promis pour trouver
des pistoles, dont il auroit plus grand besoin que d'apprendre le mouvement
des planètes. Mais le jeune homme s'étant pris à rire lui répondit : Il n'appart
ient qu'à des gens stupides et grossières', de ne pas profiter des sciences dequoi
on leur fait part. Quant à moi, je ne puis cacher les talents que j'ai acquis, en
un mot l'on m'a dit que j'avois étudié ; par cette raison, je crois que je suis
galant homme et fort savant ; mais comment ne le serois-je pas ? continua-t-il.
Un de mes Oncles, qui savoit le mieux l'orthographe, a été trente deux ans
notaire dans un gros village.
Vous avez sans doute, lui dit Anselme, été élevé avec cet Oncle, il a eu
soin de votre éducation ?
Non, pas cela, répo

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