L’histoire des Tsiganes, retour aux sources
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Le Courrier des Balkans (21 août 2016)

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Publié le 27 août 2016
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Langue Français

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L’histoire des Tsiganes, retour aux sources- Julien Radenez Le Courrier des Balkans (21 août 2016)L’idée que les Tsiganes n’ont pas laissé de traces dans l’histoire est fausse. Dès le Moyen Âge, une abondance d’archives attestent la présence d’individus ou de groupes identifiés comme Tsiganes dans la région des Balkans. En 1304,Nicola Acingano habite à Héraklion (Crète, Grèce). En 1316 et 1319, une ordonnance interdit l’entrée de la capitale crétoise à toutaçinganusouacingana. En 1323, le pèlerin Symon Semeonis observe à Héraklion «une gens en dehors de la ville suivant le rite Grec et affirmant être de la lignée de Caïn». Il ajoute que ce peuple nomadise de champ en champ et de caverne en caverne. Le vocableAtziganospilios[Ατζιγγανόσπηλιος], littéralement grotte atzigane, est appliqué à des cavernes locales. Des registres vénitiens de l’île de Crète inscriventLucas Acingano etIohannes Condoiani Acingano en 1373,Nicolaus Acingani en 1378,Stamata Açingana,Gaitani AçinganusetMavrangello Açinganoen 1379,Guillelminus Açingano1389, en Nicolaus Vassalo Açingani en 1393,Iohannes tis Parudas acinganus, Sophya Açingana etAçingana Pepani 1394. Un registre ottoman de la province de en Réthymnon (Crète) consigneMarko Açiganià Agios Konstantinos etYani Açiganià Amnatos vers 1657. En 1433, à Famagouste (Chypre),Jani Cinganusestserviteur scribe de la cour[famullus scribe curie] du roi Jean II de Lusignan. En 1464, à Chypre, le roi Jacques II de Lusignan cède au seigneurNicolo Giafunile revenu d’un impôt,le droit des Cingani[il dretto delli Cingani]. En 1444, à Nauplie (Péloponnèse, Grèce), le Conseil des Quarante décide de réintégrer Johanne Cingano de Neapoli Romanieposte de au drongaire des acingani[drungarium acinganorum], conformément aux privilèges accordés par l’ancien gouverneur Ottaviano Bono. En 1456, à Mytilène (Lesbos, Grèce), Azinganus serventis se procure une esclavine [sclavina]. En 1470, à Corfou (Grèce), le bailli confère ledit Fief des Cingani [dicto Feudo Cinganorum] au baronMichael de Ugotiset ses héritiers. Formé dans la seconde moitié du ème 14 siècle sous le règne des Angevins, le fief a appartenu aux baronsAloysius de Citro,Adam de San Ippolito,loannelus de HabitabulopuisJacobo Dondi. Les serfscingani[cinganos] du fief sont peut-être des migrants de l’Epire, appeléshomines vagenitipar Catherine de Courtenay-Valois. En 1474,Anastas CiganoetKosta Ciganosont recensés à Mantoudi (Eubée, Grèce). A Zagreb (Croatie),Nicolaus Cigan (Cygan,Chigan,Chygan), boucher [carnifex] de er profession, est cité maintes fois de 1378 à 1413. En Valachie (Roumanie), le prince Dan I attribue 40familles atsigane[ацигане челедеи] au monastère de Tismana en 1385. Celles-ci er ont été offertes par le prince Vladislav I au monastère de Vodita vers 1370. Le prince Mircea er I attribue 300familles tsyganсемейсти] au monastère de Cozia en 1388. En [цыганских er Moldavie (Roumanie), le prince Alexandre I attribue 31familles tsygan[семейство цыган] et 12 familles tatares au monastère de Bistrița en 1428.Micola voïvode des Cigani [Micola Ciganorum wayvode] est enregistré à Bistrița en 1487. ème A la fin du 13 siècle (entre 1283 et 1289) le patriarche de Constantinople Grégoire II de Chypre écrit au grand logothète de l’Empire byzantin Théodore Mouzalon au sujet de la collecte des impôts desAigyptious et Athinganous[Αίγυπτίους και Αθιγγάνους], probablement à Monemvasia (Péloponnèse). Il est possible que les Egyptiens et les Athinganes, jugés hérétiques par les Grecs orthodoxes, soient assimilés sur la base de critères religieux. En 1300,Nikolaos Aigyptios[Νικόλαος Αίγύπτιος] est parèque (serf) à Gomatou
(Chalcidique, Grèce). Il est semblable àNikolaos Ainitis, Aigyptios [Νικόλαος Αίνίτης, Αίγύπτιος]. Vers 1325, un parèqueAigyption [Αίγύπτιον] est l'époux d’une propriétaire à Ierissos (Chalcidique). En 1350, l'empereur byzantin Jean V Paléologue garantit à son oikeios (serviteur) Demetrios Kokalas la moitié d’une propriété du monastère Saint-Pantéleimon à Agios Mamas (Chalcidique), avec ses terres et ses parèquesAigyptokatzivellous[Αίγυπτοκατζιβέλλους]. En grec, Katsivelos [Κατσίβελος] est analogue à Gyftos [Γύφτος]. Vers 1350, le pèlerin Ludolf von Sudheim relate que lesMandopolinisont «Egyptiens disant être de la lignée de Pharaon» [Egyptii dicentes, se esse de genere Pharaonis] et «chrétiens avec les chrétiens, musulmans avec les musulmans» [cum Grecis Greci, cum Sarracenis Sarraceni]. En 1362, un acte mentionneVlachi et Vitani egipciorum à Dubrovnik (Croatie). En 1404, l'archevêque de Sultaniya (Iran) Johannes III s'intéresse auxCyngani ou peuple de Pharaon[Cyngani sive populus Pharaonis] dispersés dans le monde.Vers 1415, l’écrivain Mazaris constate que la langue desAigyptioi[Αιγύπτιοι] compte parmi les sept premières du Péloponnèse. En 1483, le pèlerin Bernhard von Breydenbach raconte que lessarracenosne viennent pas d’Egypte mais d’une terre nomméegippe, proche de Modon (Péloponnèse). En 1497, le pèlerin Arnold von Harff développe le même récit et conclut que la terreGyppe est lapetite Egypte [kleynem Egyppten]. Vers 1520, 22 foyers Çingenesont recensés dans la province de Modon. En 1587, Daniel Specklin associe laPetite Egypte[Klein-Egypten] à l’Epire (Grèce - Albanie). Le vocableAigyptokastro[Αιγυπτόκαστρο], littéralementchâteau égyptien, est appliqué à des vestiges situés à Mosynopolis (Thrace), Eleuthères (Attique), Pleuron (Étolie), Kalidona (Élide) et Arla (Achaïe).Aigyptokastro[Αιγυπτόκαστρο] ouGyftokastro [Γυφτόκαστρο] en grec équivaut àTchingenekale[Çingenekale] en turc. Il existe aussiAtsinganokastro[Ατσιγγανόκαστρο] à Syros (Cyclades) et Athinganochori[Αθιγγανοχώρι] à Vistonida (Thrace). En 1416,seigneur Emaus d’Egypte et ses 220 compagnons[herrn Emaus aus Aegypten und seinen 220 Genossen] seraient reçus à Brașov (Transylvanie, Roumanie). En 1476, le roi er de Hongrie Matthias I accorde le statut de sujets de la couronne auxégyptiens ou, communément appelés, cziganos[egiptiacos seu, ut vulgariter nuncupantur, cziganos] de la ville de Sibiu (Transylvanie). Successeurs des Byzantins, les Ottomans désignent les Tsiganes par les mots Kıpti / Kıbti [ﯽﻄﺒﻗ], c’est à dire Egyptien ou Copte, et Çingene / Çingane [ﻪﻧﺎﻜﻨﭼ]. Un registre de la province de Nikopol (Bulgarie) comptabilise 431 foyersKıptivers 1430 (ou 1480). Un registre de la ville d’Istanbul (Turquie) dénombre 31 foyersÇingenevers 1477. Le ème voyageur turc Evliya Çelebi note en 1668 qu'au 15 siècle le sultan Mehmed II a déplacé des çingene anatoliens [Anadolu çingeneleri] de Balat (Turquie) et deskıpti rouméliens [Rumeli kıptileri] de Komotini (Grèce) à Istanbul (quartier de Balat). Le terme générique Tsigane recouvre une multitude de dénominations dont l’étude fait apparaître deux ensembles : les (A)cingani et les (A)egyptiani. Les noms Tsigane et Egyptien, dans les variantes linguistiques médiévales, constituent un corpus sériel significatif. Vraisemblablement, le mot latin (A)cinganus et le mot grec Tsinganos [Τσιγγάνος] (Tsigane) sont issus du mot grec Athinganos [Αθίγγανος] (Athingane). Le mot latin (A)egyptianus et le mot grec Gyftos [Γύφτος] (Gitan) sont issus du mot grec Aigyptios [Αιγύπτιος] (Egyptien). (A)cingani et (A)egyptiani formeraient un seul et même groupe ethnique, aux situations sociales et économiques diverses. Tous ont un statut juridique et une fonction contractuelle, preuve d’un enracinement profond. L’analyse fine des anthroponymes, ethnonymes et toponymes permet de mieux comprendre le processus historique de permanence et de mobilité des anciennes familles tsiganes.
A lire :Contribution à l’histoire des Tsiganes en Europe- Julien Radenez Revue Hommes & Migrations (N°1314 avril-juin 2016)
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