La jeunesse russe à l aube du XIXe siècle - article ; n°4 ; vol.8, pg 560-586
28 pages
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Description

Cahiers du monde russe et soviétique - Année 1967 - Volume 8 - Numéro 4 - Pages 560-586
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1967
Nombre de lectures 26
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Marc Raeff
La jeunesse russe à l'aube du XIXe siècle
In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 8 N°4. Octobre-Décembre 1967. pp. 560-586.
Citer ce document / Cite this document :
Raeff Marc. La jeunesse russe à l'aube du XIXe siècle. In: Cahiers du monde russe et soviétique. Vol. 8 N°4. Octobre-
Décembre 1967. pp. 560-586.
doi : 10.3406/cmr.1967.1723
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cmr_0008-0160_1967_num_8_4_1723LA JEUNESSE RUSSE
A L'AUBE DU XIXe SIÈCLE
ANDRÉ TURGENEV ET SES AMIS*
Les premières années du xixe siècle ont marqué le début d'une
ère nouvelle dans la vie publique russe — en politique, en littérature
et dans les arts, en éducation et dans les sciences, voire même dans
le champ économique et social. Contemporains et historiens l'ont
noté : il y eut une sorte d'explosion des forces vitales de la nation,
un nouveau dynamisme et un changement de direction.
Parmi les facteurs de cet élan de vie se trouve sans doute une
relève de générations parmi les classes cultivées. En effet, le début
du siècle coïncide avec l'arrivée à l'âge adulte d'une jeunesse qui rompt
nettement avec les idées et normes de ses parents. Cette rupture
donne naissance à des formes nouvelles de la vie sociale et littéraire,
qui à leur tour n'ont pas été sans influencer les conceptions et valeurs
de la nouvelle intelligentsia. Dans la présente étude nous nous efforce
rons de tracer le portrait spirituel et intellectuel de cette génération
et de découvrir les éléments qui en ont produit les traits caractéris
tiques. La vie et la destinée d'André Turgenev et de son cercle nous
serviront d'illustration exemplaire1.
* Je tiens à remercier l'American Council of Learned Societies et l'Académie
des Sciences de l'U.R.S.S., qui m'ont permis de travailler sur les archives, dans
le cadre du programme d'échanges culturels. Mes recherches ont été largement
facilitées par l'amabilité et la serviabilité du personnel de l'Institut d'Histoire
de la Littérature Russe (Puškinskij Dom) à Leningrad ; qu'il en soit sincèrement
remercié. Une bourse de l'American Philosophical Society m'a permis d'étudier
l'influence allemande sur la vie intellectuelle russe au début du xixe siècle.
I. La première étude détaillée sur le cercle a été faite par A. N. Veselovskij,
V. A. Žukovskij (Poezija čuvstva i serdečnogo voobraženija) (V. A. Žukovskij —
Poésie du sentiment et de l'imagination du caur), Saint-Pétersbourg, 1904.
Les premiers documents tirés des archives Turgenev furent utilisés par
M. Suhomlinov, « A. S. Kajsarov i ego literaturnye druz'ja » (A. S. Kajsarov et ANDRÉ TURGENEV ET SES AMIS 561
A première vue, la courte vie d'André Turgenev n'a rien de remar
quable, ce fut l'existence aisée et cultivée d'un jeune homme de bonne
famille noble de Moscou. Ce qui le distinguait parmi ses contemporains,
c'étaient un talent poétique, un goût sûr en littérature et l'intensité
de ses amitiés. L'essentiel de sa biographie tient en peu de mots1 :
né en 1781, André Turgenev était le fils d'Ivan Petro vič Turgenev,
un franc-maçon actif, ami de Novikov, V. Lopuhin et Karamzin.
Après une carrière sans éclat dans les services militaire et civil, Ivan
Turgenev se vit, en 1792, exiler dans ses terres lorsque Catherine II
ses amitiés littéraires), Otdelenie russkogo jazyka i slovesnosti Akademii Nauk,
Sborník (Département de la langue russe et de la littérature de Г Académie des
Sciences - Recueil ), 65 (5), pp. 1-33; et A. Fomin, «Andrej I. Turgenev i Andrej
Serg. Kajsarov (Novye dannye o nih, po dokumentam arhiva P. N. Turgeneva) »
(Nouvelles données sur A. I. Turgenev et A. S. Kajsarov, d'après les documents
des archives de P. N. Turgenev), Russkij bibliofil, janvier 1912, pp. 7-39 ; et,
du même auteur, « Andrej Sergeevič Kajsarov (Novye materiály dlja biografii i
dlja harakteristiki ego literaturnoj dejatel'nosti iz arhiva P. N. Turgeneva) »
(A. S. Kajsarov - Nouveaux documents pour la biographie et la définition de
son activité littéraire d'après les archives de P. N. Turgenev), ibid., avril 1912,
PP- 5-33-
Chargé de mettre en ordre des papiers de la famille Turgenev en vue de leur
publication, V. M. Istrin fit paraître plusieurs études contenant d'abondants
extraits de lettres et journaux inédits ; malheureusement aucun des documents
se rapportant directement à André Turgenev n'a été publié par lui : « Iz arhiva
brat'ev Turgenevyh : Smerť Andreja Ivanoviča Turgeneva » (Extrait des archives
des frères Turgenev : La mort d'A. I. Turgenev), Žurnál Ministerstva Narodnogo
Prosveščenija, n.s., XXVI, mars 1910, pp. 1-36 ; « Russkie studenty v Gettingene v
1802-1804 gg » (Les étudiants russes à Gôttingen en 1802-1804), ibid., XXVIII,
juillet 1910, pp. 80-145 ; K Družeskoe literaturnoe obščestvo, po materialam
arhiva biat'ev Turgenevyh » (La Société amicale de littérature, d'après les
documents des archives des frères Turgenev), ibid., XXXII, août 1911, pp. 237-
307 ; « К biografii Zukovskogo, po materialam arhiva braťev Turgenevyh »
(Contribution à la biographie de Žukovskij , d'après les documents des archives
des frères Turgenev), ibid., avril 1911, pp. 205-237 ; « Iz dokumentov arhiva
brat'ev Turgenevyh - I. Družeskoe literaturnoe obščestvo 1801 g. (Dopolnenie) »
(Extrait des documents des archives des frères Turgenev - I. La société amicale
de littérature de 1801 (Annexe)), ibid., mars 1913, pp. 1-15. Une esquisse
d'ensemble du milieu des Turgenev par V. M. Istrin, se trouve dans son intro
duction, fasc. 2, des Arhiv brat'ev Turgenevyh (Archives des frères Turgenev),
Saint-Pétersbourg, 191 1. Voir aussi le résumé (un peu plat) de V. I. Rezanov,
Iz razyskanij o sočinenijah V. A. Zukovskogo (Extraits des recherches sur les
œuvres de V. A. Žukovskij ), fasc. 2, Saint-Pétersbourg, 19 16. Un renouveau
d'intérêt pour le cercle s'est manifesté récemment dans les travaux de Ju. M. Lot-
man, « Andrej S. Kajsarov i literaturno-obščestvennaja bor'ba ego vremeni »
(A. S. Kajsarov et la lutte sociale et littéraire de son temps), UČenye zapiski
Tartusskogo gosudarstvennogo Universiteta (Tartu Riikliku Ulikooli Toimetised),
63. 1958 ; sa thèse de doctorat, Puti razvitija preddekabristskoj obščestvenno-
političeskoj mysli (Évolution de la pensée sociale et politique pré-décabriste),
Leningrad, 1961.
Bien que certains documents cités plus loin l'aient déjà été partiellement,
nous nous référons aux originaux d'archives, car pour les questions qui nous
intéressent, le découpage fait par les historiens antérieurs ne convient pas
toujours.
1. Le résumé le plus complet se trouve dans V. M. Istrin, op. cit., introduction
au fasc. 2. 562 MARC RAEFF
sévit contre Radiščev et Novikov et ferma les loges maçonniques1.
En 1796 il bénéficia — comme Radiščev et Novikov, d'ailleurs — de
la haine que portait Paul Ier à sa mère et put retourner à Moscou, où
il obtint le poste de directeur de l'Université. Durant ses années
formatrices, par conséquent, André vécut à la campagne (près de
Simbirsk), auprès de son père, qui dirigea personnellement ses premières
études. Au retour de son père à Moscou, André entra à l'Université
et, grâce aux relations de sa famille, il put faire la connaissance des
principaux écrivains de l'époque : Dmitriev, Karamzin, Izmailov,
entre autres. Après quelques années d'études (pas très systématiques
d'ailleurs), il entra au collège des Affaires étrangères. Comme tant
de futurs écrivains et publicistes, il « travailla » d'abord aux Archives
du collège à Moscou. En 1801, il fut muté à Saint-Pétersbourg comme
secrétaire-interprète. Durant l'hiver 1802-1803, il fut envoyé
courrier à Vienne, et il y demeura quelques mois attaché à l'ambassade.
De retour à Saint-Pétersbourg au printemps, il prit froid et fut emporté
en quelques jours par une fièvre ardente — il avait à peine vingt-
deux ans. Ainsi sa courte existence n'avait pu être que la promesse
d'une vie active ; pour ses amis elle prit forme de symbole : symbo

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