La photographie et l archéologie : des chemins inverses - article ; n°1 ; vol.120, pg 325-344
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Description

Bulletin de correspondance hellénique - Année 1996 - Volume 120 - Numéro 1 - Pages 325-344
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Philippe Collet
La photographie et l'archéologie : des chemins inverses
In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 120, livraison 1, 1996. pp. 325-344.
Citer ce document / Cite this document :
Collet Philippe. La photographie et l'archéologie : des chemins inverses. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 120,
livraison 1, 1996. pp. 325-344.
doi : 10.3406/bch.1996.4601
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1996_num_120_1_4601325 BCH 120 (1996) /
La photographie et Γ archéologie :
des chemins inverses
parfaite escomptait. visent ces deux pour Au de domaines, XIXe la l'une pensée siècle à une antique. que se description développent les On résultats verra précise simultanément cependant, apparaissent de la réalité, au comme la terme photographie pour des l'autre différents évolutions à une et de l'archéologie, constatées compréhension ceux que dans l'on qui
La photographie, après de nombreux tâtonnements, prend son essor au milieu du
XIXe siècle. En 1 844, Talbot sort de ses ateliers The Pencil of Nature, le premier ouvrage
illustré de photographies originales. On attend tout, ou presque, de la photographie. C'en
est fini de la subjectivité du dessin et de l'approximation de la peinture : les photographies
sont le symbole de « vérité » que ce siècle épris de technique attendait.
Au même moment, l'Europe occidentale, à la recherche d'un passé glorieux, se
trouve des origines. En 1846, Louis-Philippe crée «par reconnaissance pour la Grèce
antique » l'École française d'Athènes, une institution destinée à transmettre à la lointaine
France la culture grecque et à la Grèce la culture française.
Pour assurer cette diffusion, le procédé photographique est subventionné et encour
agé par les milieux archéologiques français. En 1856, le duc de Luynes, président de la
Section française de l'Institut archéologique de Paris, offre 10 000 francs à la Société fran
çaise de Photographie, dont le président, Victor Regnault, membre de l'Institut, précise
qu'ils serviront à « hâter le moment tant désiré où les procédés de l'imprimerie ou de la
lithographie permettront de reproduire les merveilles de la photographie sans l'interven
tion de la main humaine ».
En 1851, Alfred-Nicolas Normand, architecte, part pour Pompéi, Païenne, Athènes
et Constantinople, d'où il rapporte 130 clichés. Ce chiffre paraît dérisoire aujourd'hui, mais
il faut imaginer les périls du voyage, avec un matériel impressionnant, toute la chimie dans
hg.1 des fioles, et une technique loin d'être maîtrisée. En 1849, Du Camp, qui accompagne
Flaubert en Egypte, note: «Apprendre la photographie, c'est peu de chose; mais transport
er l'outillage à dos de mulet, à dos de chameau, à dos d'homme, c'est un problème
FH3. 2 difficile ». La liste du matériel « absolument nécessaire » de Gustave Le Gray ne tient pas en
moins de trois pages, et Moulin arrive en Algérie avec 1 100 kg de bagages.
PHILIPPE COLLET — LA PHOTOGRAPHIE ET L'ARCHÉOLOGIE : DES CHEMINS INVERSES • 326 CENT CINQUANTENAIRE EFA
Illustration non autorisée à la diffusion
Flg. 1. — Laboratoire ambulant (1855). Flg. 2. — Karnak, palais. Cliché Félix Teynard, 1851.
Ce n'est donc pas le côté pratique de la photographie qui séduit les archéologues,
mais bien sa précision et sa fidélité scientifique : « Le rythme de transformation de la
société ne permet plus à l'art d'assumer correctement la fonction descriptive et narrative
qui avait été la sienne jusqu'alors. Le progrès rapide et incessant des sciences et des tech
niques appelle dorénavant un système iconographique différent capable de le soutenir»1.
Un siècle plus tard cependant, la photographie doute de sa capacité objective à reproduire
la réalité «... car si l'appareil photographique enregistre superbement, il transforme encore
mieux » (Minor White).
Au même moment, l'archéologie s'interroge sur ses méthodes ; on prend
conscience de certaines déficiences techniques observées pendant les grandes fouilles de la
fin du XIXe siècle, qui s'apparentaient davantage à une chasse au trésor qu'à une explora
tion scientifique. J. de Romilly résume d'ailleurs bien ce constat en 1992, lorsqu'elle
déclare, en introduction de son ouvrage Pourquoi la Grèce : « De même, écrire sur l'homme
ou pour les hommes ne veut pas dire grand-chose — et plus la question soulevée est large,
plus l'absence de détails, de preuves, l'absence de chair, si l'on peut dire, ne nous laisse que
des truismes, ou des affirmations à l'emporte-pièce, contestables et peu convaincantes ».
La photographie apparaît dans le BCH en 1878. Cela ne veut bien sûr pas dire
qu'aucune n'a été prise auparavant, mais les techniques d'impression ne per
mettaient pas de les diffuser. Les plus anciennes plaques que nous possédons, au gélatin
obromure d'argent, coïncident avec le début des grandes fouilles. Aucun négatif utilisant
des procédés plus anciens (collodion par exemple) n'a été conservé. 327 BCH 120 (1996)
II subsiste peu de témoignages écrits sur les débuts de la photographie à l'EFA.
G. Réveillac2 note : « Ce sont sans doute les archéologues qui sont les auteurs de la plupart
de ces clichés, car on trouve dans la manière de photographier les objets la volonté d'en
hg. 3 donner une image facilitant la description, sans ombres importantes et gênantes ». Les
seignements dans les journaux de fouilles sont très vagues : « Deux photographies ont été
prises depuis le perron de l'éphore », indique par exemple P. Perdrizet.
Les auteurs des photographies ne nous sont pas connus (on ne sait même pas si les
grandes fouilles utilisaient les services d'un photographe). En dépit de renseignements
lacunaires, il semblerait pourtant qu'H. Convert, conducteur des travaux, soit l'auteur de
bon nombre de clichés. La photographie joue ici un rôle descriptif, qui provoquera la dis
parition du dessin dans les publications de sculptures, et fera dire à E. Zola : « On ne peut
prétendre avoir vu réellement quelque chose avant de l'avoir photographié »3.
La photographie peut même remplacer l'expérience directe de la réalité : le duc de
Loubat n'est renseigné sur les fouilles qu'il finance à Délos que par les photographies des
beaux objets et. . . le nombre de mètres cubes de terre déplacée. Il ne fera jamais le voyage
jusqu'à cette île lointaine et dangereuse !
Si l'archéologie subventionne la recherche sur les procédés d'impression, c'est parce
qu'elle se considère comme porteuse d'une mission éducative et tenue de dévoiler au
monde les résultats de ses découvertes. Elle se sent également témoin d'une aventure extra
ordinaire, comme on le constate sur les photographies de la Grande Fouille de Delphes,
hg. 4 et 5 dont le tiers, estime G. Réveillac, est « à caractère ethnologique ».
D'autres motifs, moins élevés, peuvent apparaître : Schliemann utilise la photogra
phie pour tenter de vendre sa « collection privée », Th. Homolle pour réclamer à la France
des subventions.
Les clichés de l'époque soulignent en outre une autre fonction de la photographie :
immortaliser l'inventeur à côté de sa découverte. Ainsi, lors de la mise au jour des « jumeaux
d'Argos », Th. Homolle, le regard tourné vers Biton, se fait photographier en posant (les
rg. β temps de pose ne permettaient pas l'instantané), dans un évident souci de publicité. Il note
pourtant, en découvrant la statue, la « choquante maladresse » de sa facture, ou encore « la
cage thoracique, les flancs, l'abdomen et le ventre également mal venus »4 !
« Le trésor de Priam a été popularisé par la photographie souvent reproduite de
hg. 7 Sophie parée des "bijoux d'Hélène" » (P. Amandiy). Tout à l'idée d'Homère, Schliemann
se trompait d'un millénaire, car la datation, quelque peu fantaisiste, ne se référait, comme
souvent alors, qu'à des textes que l'on faisait coïncider avec les découvertes. Les bijoux,
aujourd'hui datés de 2600-2

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