Le clergé vendéen face à l industrialisation (fin XIXe début XXe) - article ; n°3 ; vol.89, pg 357-368
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Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest - Année 1982 - Volume 89 - Numéro 3 - Pages 357-368
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Publié le 01 janvier 1982
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Jean-Clément Martin
Le clergé vendéen face à l'industrialisation (fin XIXe début XXe)
In: Annales de Bretagne et des pays de l'Ouest. Tome 89, numéro 3, 1982. pp. 357-368.
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Martin Jean-Clément. Le clergé vendéen face à l'industrialisation (fin XIXe début XXe). In: Annales de Bretagne et des pays de
l'Ouest. Tome 89, numéro 3, 1982. pp. 357-368.
doi : 10.3406/abpo.1982.3097
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0399-0826_1982_num_89_3_3097LE CLERGÉ VENDEEN
FACE A LTNDUSTRIALISATION
(fin XIXe - début XXe)
par Jean-Clément MARTIN
La « Vendée militaire » (1) a souvent passé pour être un bastion de
l'immobilisme, de la réaction, voire de l'archaïsme - ce que voulaient
parfois ses défenseurs autant que ses détracteurs. De cette situation, le
clergé est tenu pour un des principaux responsables, apportant une
aide essentielle au châtelain pour maintenir fermement le corps social.
C'est pourtant dans pareille région que des techniques agricoles vont
être introduites de telle sorte qu'au vingtième siècle les ruraux connaî
tront une mutation sans équivalent, qui servira parfois de modèle. Là
encore, le clergé séculier a joué un tel rôle que j'ai choisi d'éclairer les
attitudes simultanées que le clergé de la région a pu prendre au cours
du XIXe siècle finissant et dans les premières années du XXe.
Il est hors de question de dresser ici un tableau général des positions
du clergé, mais d'indiquer seulement des orientations, de signaler des
courants de force qui ont fait agir le clergé vendéen et qui ont, profon
dément et durablement, modelé l'ensemble social. L'enquête reste
pointilliste et se situe volontairement sur les marges sociales, oubliant
les grandes organisations, les notabilités, les grands débats du temps.
Elle veut seulement rappeler que les attitudes vis-à-vis des techniques
ne sont pas univoques et, qu'au-delà des apparences, l'histoire coule
dans des directions qui échappent souvent aux acteurs ; et aux obser
vateurs blasés.
Tout l'Ouest est marqué, à cette époque, par un mouvement contrad
ictoire. D'une part, les grandes villes, Rennes, Brest et surtout Nantes
associée à Saint-Nazaire s'agrandissent au rythme d'une révolution
industrielle désormais galopante. Les campagnes poussent à l'extrême
les techniques agricoles traditionnelles, tandis que la pression démogra
phique se fait de plus en plus lourde incitant les paysans à regarder de
plus en plus vers les mirages de la ville. Mais les villes et les campagnes
(1) Le terme consacré par l'usage englobe toutes les régions insurgées en 1793. 358 ANNALES DE BRETAGNE
vont vivre séparément, le monde rural restant prédominant jusqu'à la
veille de la seconde guerre mondiale.
Dans cet ensemble, la Vendée militaire s'individualise quelque peu.
Non pas que la région soit uniforme, loin de là. Le bocage couvre
d'importants espaces, certes, marquant le paysage de grandes fermes
isolées sur les plateaux, les métairies possédées par les notables, bour
geois ou nobles, tandis que les vallées regroupent les villages serrés
des journaliers et des bordiers, ces petits propriétaires exploitants. Mais
nombreux sont aussi les vignobles étendus au long de la Loire, et qui
ont donné des troupes vigoureuses aux armées catholiques et royales
en 1793 ; contrairement à certaine thèse simplifiante, le v.ignoble n'est
pas automatiquement bleu, n'est pas toujours lié à la ville. Enfin à
l'Ouest, les marais obligent à des habitudes de vie et de travail origi
nales, individualisant une population légèrement méprisée par ceux du
Bocage (les « Bocains »). Mais dans toute cette région, unie surtout
autour du souvenir de la grande guerre, les conditions de vie sont moins
pénibles qu'en Bretagne, la vie y est moins difficile, et la masse des
ruraux y est confrontée davantage aux innovations techniques.
La présence de la ville est incontestablement un élément essentiel
de cette région. Nantes et Saint-Nazaire forment la plus grande métro
pole de l'Ouest, c'est là que se trouvent les plus grandes usines, les plus
diverses aussi, et les plus fortes concentrations ouvrières. Nantes domine
la vallée de la Loire et est en relations avec les villes de l'intérieur :
Montaigu, Cholet, La Roche-sur- Yon. La campagne ne peut ignorer
cette présence. Au-delà des différences de style de vie et de travail,
renaissent les clivages historiques qui s'incarnent dans une opposition
politique et religieuse de tous les instants.
En outre, de ces villes tentatrices et corruptrices partent des voies
de communications de plus en plus nombreuses qui enserrent et décou
pent progressivement la Vendée militaire, bien plus que ne le fut jamais
- que ne le sera ? - la Bretagne. Dès la fin des guerres de Vendée,
Napoléon Ier ébauche les premiers réseaux d'un quadrillage systématique
de la Vendée que Louis Philippe se hâta d'achever et de perfectionner
pour faire face aux troubles renaissants. Les routes ouvrent la région
aux quatre points cardinaux, tandis que le nord et le sud de la Bretagne
ont déjà les pires peines à communiquer. Une des conséquences, impré
vues, fut que les paysans du Choletais purent aussitôt passer commande
aux fours à chaux situés aux limites des Mauges et fertiliser leur sol.
L'accroissement des routes est poursuivi par le Second Empire, pendant
lequel les routes impériales traversant la Loire-Inférieure passent de 6
à 10 (2). Dans les années 1860-1890, les chemins de fer terminent
l'œuvre commencée. Ainsi dans le même département de Loire-Inférieur
e, la compagnie de l'Ouest et la compagnie d'Orléans mettent en place
201 km de voies ferrées nouvelles entre 1852 et 1872. Dès 1867, quatre
trains quotidiens relient Nantes à Tours. Au réseau principal se greffent
(2) M. Launay, le Diocèse de Nantes, 1850-1870, Nantes, 1980, thèse dact., p. 115. DE BRETAGNE 359 ANNALES
de nombreuses voies secondaires, desservant les petites villes de Mache-
coul, Challans, Pornic, Paimbœuf, Clisson (3). Alors autour de Nantes,
Poitiers, Niort, Fontenay-le-Comte, s'échaffaude une toile d'araignée qui
rend impossible tout isolement réel et confronte les ruraux à de nouvell
es techniques.
A dire vrai, l'ignorance n'avait jamais été complète. La Vendée
militaire a possédé deux groupes qui ont, ponctuellement, mais brilla-
ment, apporté de nouvelles techniques : les moines et les notables. Dès
le dix-huitième siècle, les moines des abbayes de Luçon avaient été des
initiateurs jalousés, voire haïs, du progrès agricole (4). Pendant le siècle
suivant, les moines de la Meilleraye, en pays nantais, sont les parangons
de l'agriculture moderne. Ils procèdent à de vastes défrichements de
landes et de bois, assèchent des marécages, et enfin utilisent du matériel
perfectionné : charrues écossaises, herses et tombereaux à bascule,
machines à vapeur et grues, la majeure partie de ce matériel venant
de Grande-Bretagne. En même temps, ils améliorent des races animales
ou en introduisent de nouvelles, et ils vulgarisent des méthodes du seul
fait de leur exemple (5).
Mais les laïcs ne sont pas toujours en reste. Le temps est à l'agro-
manie pour certains propriétaires, occupation forcée pour quelques-uns.
Dans le pays nantais, vers 1850-1860, tel propriétaire de 1000 hectares
double, en une dizaine d'années, et son capital et son revenu. Les initia
tives n'ont pas manqué plus tôt, des interventions de Cavoleau à l'intr
oduction du mérinos par le général Belliard retour d'Espagne. Mais un
exemple, nantais, symbolise ce développement : Jules Rieffel. En société
depuis 1830 avec un armateur nantais, Charles Haentjens. il crée une
ferme modèle qui devient en 1848 Ecole régionale d'agriculture (6). Son
action est aidée par de nombreuses autres initiatives, dont celles d'asso
ciations départementales et régionales, ainsi que par des journaux comme
« L'agriculture dans l'Ouest de la France ». Bien évidemment, ce progrès
ne touche pas l'ensemble de la paysannerie. La vie traditionnelle se
maintient longtemps. C'est même à la fin du XIXe siècle que les stru

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